
On diffingue les bâtirnens particuliers d’avec les
bâtiment publics. Les premiers fervent à la demeure
des citoyens, les féconds font ceux qui font def-
tinés aux ufages publics, tels que les églifes, les
lieux où l’on rend la juflice, les hôtels-de-ville,
les falles de fpeâacles, 6»c.
Les bâtirnens particuliers fe nomment maifons ,
quand ils font habités par de fimples citoyens;
hôtels quand ils fervent à la demeure des grands;
palais lorfqu’ils appartiennent aux évêques ou .archevêques.
On donne auffi communément le nom
dô palais au bâtiment où fe rend la jufiice.
Les bâtirnens font réputés immeubles comme les
fonds auxquels ils font attachés : ils en font regardés
comme l’acceffoire, d’où il fuit que ceux
qui bâtiffent fur un f o l , dont ils ne font point
propriétaires, ne bâtiffent point pour eux , mais
pour le propriétaire. Cependant, s’ils ont bâti de
bonne-foi, croyant que le terrein leurappartenoit,
les loix veulent qu’ils puiffent demander le paiement
du prix des matériaux & de la main-d’oeuvre.
Il fuit du même principe, que f i , après avoir
légué une terre, le teftateur y faifoit confiruire
quelques bâtirnens, ils appartiendroient au légataire
comme faifant partie du fonds, à moins que le
tefiateur n’en eût difpofé autrement.
Pareillement, h l’on confiruit des bâtirnens fur
l ’héritage de l’un des conjoints, aux dépens de la
communauté, ces bâtirnens appartiennent à celui des
conjoints qui eft propriétaire de l’héritage, fauf à
indemnifer l’autre conjoint, à proportion de ce
qu’il aura coûté à la communauté pour bâtir. Voye[
A ccession, Accessoire, Communauté.
Lorfquedes enfans recueillent, à titre de douaire,
la nioitié des héritages que la coutume leur attribue
, ils doivent prendre les bâtirnens comme ils
font, & les créanciers n’ont aucune aélion à intenter
contre eux , pour raifon des dépenfes qui
ont pu être faites depuis le mariage , pour augmenter
ces bâtirnens. Charondas &Papon rapportent un arrêt
du 7 feptembre 1601 , qui Fa ainfi jugé.
Ceux qui héritent des propres d’une fucceffion,
prennent pareillement, fans être tenus d’aucune
récompense, les bâtirnens que le défunt a conftruits
fur ces propres : fi le prix de ces bâtirnens fe trouve
encore dû, chaque héritier eft tenu d’en payer une
part, .proportionnée à celle qu’il prend dans la fucceffion.
C ’efl ce qui réfulte d’un arrêt de réglement
rendu par le parlement de Paris, le 3 août 1688.
Ce que nous venons de dire s’applique auffi à
l’aîné, qui reçoit pour préciput le bâtiment conf-
truit fur le fief. Il ne doit rien payer aux puînés
pour ce bâtiment. C ’eft l’avis de Dumoulin; &
Auzanet rapporte un arrêt du 27 mars 1626, qui
l ’a ainfi décidé.
. Lorfqu’un bâtiment eft poffédé par deux différens
propriétaires, dont l’un a le bas & l’autre le deflîis,
ils peuvent faire l’un & l’autre ce qui leur plaît,
dans la portion qu’ils poffèdent, pourvu toutefois
qu’ils ne fe caufent point de préjudice l’un à l’autre , |
tant pour la commodité, que pour la folidité; par
exemple, celui qui a la partie inférieure de la maifon
n’y pourroit pas faire une forge, parce qu’il in-
commoderoit le propriétaire de la partie fupérieure ;
le parlement l’a ainfi jugé par arrêt du 26 janvier
1672.. De même celui qui a la partie inférieure
de la maifon ne peut pas changer de place , ni
de fituation les tuyaux de fes cheminées, ni en
faire de nouveaux où il n’y en avoit point, &
ainfi des autres changemens ou nouveautés, qui
pafferoient au travers de la portion de maifon appartenante
à l’autre propriétaire.
L’article 216 de la coutume d’Auxerre, porte
que f i le bas d’une maifon appartient à un particulier
, & le haut à un autre, celui à qui appartient le
bas efi tenu de confiruire & entretenir tous les murs
de la maifon, jufquà l’étage qui appartient à l’autre
particulier, & de fournir les poutres, folives & aires
du plancher fupèrieur de la partie qui lui appartient,
& le propriétaire du haut efi tenu feulement du carreau
au-deffus du plancher & du refiant des murs
ainfi que de la couverture de la maifon , & feront tenus
pareillement chacun de la montée ou efcalier dans
les étages à eux appartenons. C’efl pourquoi, fi un
particulier n’étoit propriétaireque du rez-de-chauffée
& des caves d’une maifon, ïbne contribueroit point
à l’efcalier, il ne feroit tenu que de la defcente
des caves,.
Les coutumes de Montargis, de Nivernois, de
Bourbonnois, d’Orléans, de Berry, de Bretagne ,
&c. difent toutes la même çhofe : ainfi , par la difpo-
fition de ces coutumes, chacun des propriétaires
entretient feulement les murs des étages qui lui
appartiennent, & les propriétaires du haut ne contribuent
point à la partie inférieure des murs , quoi*
qu’elle leur ferve d’appui & de foutien, & ils ne
paient point de charges.
Suivant ces coutumes, l’égalité des charges eft
affez bien gardée entre les propriétaires; celui de
la partie inférieure de la maifon, fupporte ; à la
vérité , la charge & le fardeau de la. partie fupérieure
de cette maifon ; mais pour le dédommager le propriétaire
de la partie fupérieure efi tenu d’entretenir
feul, à fes frais, la couverture en entier , charpente
& tuile ou ardoife, ce qui efi une charge fujette
à un entretien continuel qui équivaut, en quelque
façon, à celle du propriétaire du bas de cette maifon.
L’entretien des murs des étages de la maifon , lorf-
qu’il s’agit d’y faire travailler , e f i, à la vérité, d’une
plus grande dépenfe que celui de la couverture ;
mais il n’arrive pas fi fouvent, l’entretien de la
couverture étant continuel, & le feul pour lequel
on fa fie des marchés à l’année.
Lorfqu’un bâtiment menace ruine & que le propriétaire
néglige de le faire démolir, ou du moins
étayer, il peut y être obligé par les officiers qui
exercent la police : le voifin même efi en droit
de fe pourvoir pour être autorifé à faire faire la
démolition ou les étaiemens néceffaires, aux frais
du propriétaire négligent,
Tout propriétaire efi obligé de réparer le dommage
occafionné par la chûte de fon bâtiment, fans
que pour cela il Soit néceflaire de l’avoir conftitué
en demeure, en le fommant ou en Favertiffant de
travailler à détourner le danger. Cette règle toute -
fois ne doit pas être fuivie quand la chûte du bâtiment
n’a eu lieu que par une force majeure, telle
qu’un débordement, ou un ouragan , &c.
Si le bâtiment, dont la chûte a .càufé du dommage
, appartient à plufieurs maîtres , ils ne répondront
pas folidairement de ce dommage , & chacun
d’eux n’en fera tenu qu’à proportion de la part
qu’il avoit dans le bâtiment tombé.
Les maçons & les charpentiers qui ont confiruit
un bâtiment , doivent garantir pendant dix ans la
durée de leur ouvrage : c’eft à quoi les a aftreints
parmi nous, la jurifprudence des arrêts ; c’eft pourquoi
f i , dans le cours de dix années poftérieures
à la confiruélion d’un bâtiment, on remarque-des
défauts confidérables dans la charpenterie ou la maçonnerie
, l’ouvrier, dont ils font le fait, efi tenu
de les réparer à fes frais; on l’oblige même à répondre
du dommage auquel ces défauts auront d’ailleurs
pu donner lieu. En vain, pour s’exempter de
la garantie, dont il s’agit, le maçon ou le charpentier
offriroit de juftifier que fon ouvrage efi conforme
aux plans & devis , il ne feroit point écouté :
la raifon en e fi, que tout plan & devis doit s’exécuter
félon les:règles que l’art a établies, relativement
à la folidité qu’il convient de donner à un
bâtiment quelconque.
Quant aux autres ouvriers , qui contribuent à la
conffruclion des bâtirnens, ils ne font garans de
leurs ouvrages que pendant un an, à compter du
jour que les ouvrages ont été achevés, & cette
garantie ne s’étend qu’à la façon & à la qualité des
matières employées, & non à ce qui peut s’ufer ou
le 'rompre par-violence. T el efi l’avis de Defgodets.
On a agité la queftion de favoir fi un entrepreneur
, qui, en conftrnifant un bâtiment, n’a point
obfervé les règles de Fart, & ne s’eft point conformé
aux plans & devis, peut être obligé, par
le propriétaire, à une nouvelle conftruélion nonob-
fiant la preuve que. le bâtiment efi confiruit de
manière à pouvoir durer long-temps : deux arrêts
que nous allons rapporter, d’après la collection de
jurifprudence, ont prononcé fur cette matière : l’un
a été rendu au parlement le 3 août 1746, & l’autre
au grand-eonfeil le 23 feptembre 1758; & ils
ont jugé que l’ouvrier efi tenu de réparer, à fes
frais, les mal-façons, qui peuvent l’être fans démolition
; à l’égard de celles qui font irréparables
fans démolition & reconftruékion, fi l’ouvrage peut
durer long-temps, quoique confiruit contre la teneur
des plans & devis, le propriétaire efi forcé
d’en payer le prix, non fur l’évaluation portée au
devis , mais fur l’eftimation faite par des experts.
Le coût de leur procès - verbal de vifite & rapport
, doit être fupporté par l’entrepreneur, il peut
même être condamné à des. dommages intérêts.
Les ouvriers qui ont bâti, réédifié ou réparé une
maifon , doivent être préférés, pour leurs falaires ,
à tout autre créancier, fur le prix qui provient de
la vente des bâtirnens auxquels ils ont travaillé;
mais il faut, pour cet effet, que ces ouvriers fe
foient conformés au réglement fait par le parlement
fur cette matière , par arrêt rendu , toutes les
chambres affemblées, le 18 août 1766, qui les
oblige de drefier préablement un procès-verbal de
l’état des lieux , & des réparations qui y font à faire,
& de faire recevoir enfuite leurs ouvrages par un
expert, nommé d’office par le juge, ou volontairement
par les parties.
Pour prévenir les inconvéniens du trop grand
accroiffement de Paris, il a été fait, en différens
temps, des défenfes de bâtir des maifons dans les
fauxbourgs & hors des portes de la ville. La dernière
efi une déclaration de Louis X V , du 8 juillet
1724, enregiftrée au parlement le 4 août fui-
vant, par laquelle il a de nouveau fixé l’étendue
de la ville & des fauxbourgs de Paris.
Cette loi permet aux propriétaires des maifons
8c places, fituées dans l’intérieur de la v ille , de
les bâtir de telle manière qu’ils le jugeront à propos
, en obfervant les réglemens, avec défenfes
d’ouvrir aucune rue nouvelle , fous quelque prétexte
que ce foit, à l’exception de celles qui font
défignées dans l’article 4. Il efi auffi défendu aux
propriétaires des maifons & places, fituées dans
les fauxbourgs, d’ouvrir aucune rue , & de bâtir
aucune maifon à porte cochère, autres que celles
qui exiftoient lors de la fixation de l’étendue des
mêmes fauxbourgs , fans pouvoir en augmenter les
bâtirnens, à l’exception toutefois des établis ou hangars
deftinés à l’ufage des laboureurs ou artifans ;
il efi feulement permis aux propriétaires de bâtir
de petites maifons à boutiques & petites portes ,
pourvu qu’elles ne foient élevées que d’un étage
au-defiùs du rez-de-chauffée, à peine, pour chaque
contravention , de 3000 livres d’amende contre
les propriétaires , de démolition & confifcation des
matériaux, de réunion de la place au domaine du
roi, & de 1000 livres contre les ouvriers.
Le 29 janvier 1726, le même prince a donné
une autre déclaration, en interprétation de la précédente
, par laquelle il efi défendu de faire bâtir, dans
les fauxbourgs de Paris aucun édifice , que préablement
le plan n’en ait été approuvé & ordonné par
les officiers du bureau des finances, & par le prévôt
des marchands & les échevins de la ville, avec
défenfes, en outre, de détruire les portes cochères
qui exifroient lors de l’établifiement des limites.
Une troifième déclaration du 28 feptembre
1728 a permis aux tanneurs de faire confiruire
tels bâtirnens qu’ils jugeroient à propos , pour
leur commerce, en obfervant les anciens réglemens
, & aux conditions que les bâtirnens qui
auront face fur la rivière de Bièvre, dite des Go-
belins, ne pourront être élevés que de trente pieds
depuis le rez-de-chauffée dû terrein jufqu’à l’enta