
naturellement que pour la part dont il eft débiteur.
Cette prefcription a lieu contre les mineurs, les
infenfés , les interdits, Péglife, les communautés,
les hôpitaux : mais ils ont tous leur recours
contre leurs tuteurs, curateurs ou adminiftrateurs
qui font tenus de les indemnifer,. & de leur payer
les arrérages ' qu’ils ont laiffé prefcrire.
Cette prefcription de cinq années ne s’étend pas
aux rentes viagères. Soëfve rapporte un arrêt du 5
mai 1668, par lequel la d’Albrac fut condamnée à
payer à la marquife de Kerian dix années d'arrérages
d unepenfion viagère. Et Henryspenfe avecplufieurs
autres auteurs, que l’on peut répéter trente années
de ces fortes dé arrérages.
Il eft néanmoins vrai que, par arrêt du 7 fep-
t-hibre 16 57, les arrérages d’un penfion viagère,
conftituée, au profit de la dame Diane de Coligni,
P«r fon père, lorfqu’elle fe fit religieufe, furent
réduits à dix années, quoiqu’il lui en fut dû plus
de vingt-cinq années; mais- Henry s obferve judi-
cieufement que cet arrêt ne doit pas être tiré à
confequence, parce qu’il a été rendu dans la coutume
de Bourbonnois , qui ne permet pas de répéter
plus de dix années de quelque efpece $ arrérages
que ce foit.
La prefcription dë^cinq ans n’eft pareillement pas
admife, relativement à une rente conftituée, pour,
raifon de Facquifition d’un héritage, parce que les
rentes de cette efpèce tiennent lieu d’immeubles
qui produifent des fruits : ainfi ce ne font pas tant
les arrérages d’une rente conftituée que l’on demande
, que les fruits d’un héritage. Cujas remarque
judieieufement à ce fujet, que la jouiffance d’un
immeuble acheté produit un intérêt légal, plus favorable
que l’intérêt conventionnel, attendu que
c’eft par une efpèce de compenfation que les loix
l’ont introduit.
Le roi n’ufe jamais du bénéfice de la prefcription
à l’égard des arrérages des rentes conflituéès dont
il eft débiteur.
Un oppofant à un décret doit être colloqué pour
tous les arrérages qui lui font dûs d’une rente conf-
tituée, fans qu’on pûifTe lui oppofer le . défaut de
fommation pendant cinq années, depuis fon oppo-
fition, même depuis la faifie-réelle. La raifon que
l ’on peut ' rendre de cet ufage, çft que la faifie-
réelle eft faite, non-feulement pour la confervation
des droits du faififfant, mais encore pour tous les
autres créanciers de la partie faifie, qui viendront
a former oppofition au décret. O r , tant qu’il y a
une inftance pendante au fujet des arrérages d’une
rente, cette inftance empêche le cours de la prefcription
de cinq ans, introduite par l’ordonnance de
Louis XII. Il y en a une difpofition expreffe pour le
parlement de Normandie dans le réglement de 1666;
A l’égard des arrérages de la rente confiituée,
échus avant la faifie-réelle , l’oppofant n’en peut
demander que cinq années. On a été encore plus
loin en Bourgogne ; car un oppofant ne peut être
colloqué fur les biens décrétés au préjudice des
autres créanciers oppofans,pour les deniers promis &
les legs teftamentaires, dix ans après le terme ex-
Pire pour faire le paiement de ces fommes, à moins
CU Une ^nte^Pe^afi°n judiciaire ou autre
acte fuffifant pour interrompre la prefcription. On'
ne peut pas non plus demander en Bourgogne, an
préjudice des autres créanciers oppofans, plus de
dix années d'arrérages de cens, de droits feigneuriaux
ou fonciers, de penfions de religieux & de reli-
gieufes, de douaires & du prix des fermes, à moins
quil n y ait , eu quelque a&e fuffifant pour interrompre
la prefcription. On préfume dans le refiort
de ce parlement, qu’avant les dix années-, le créancier
s eft fait payer de ce qui lui étoit dû, ou qu’il
doit être puni de fa négligence pour avoir laiffé ac*
cumuler un trop grand nombre d’années d'arrérages ,
au préjudice du capital des autres créanciers.
Le débiteur de phifieurs années d’arrérages peut
obligér le créancier à recevoir le paiement d’une
annee, quoiqu’il ne lui offre pas en même temps
le paiement des autres années, parce que tous ces.
termes d'arrérages font autant de différentes dettes :
mais le créancier n’efi pas obligé de recevoir les
dernieres années avant les précédentes.
Suivant ce principe, Dumoulin décide qu’un em-
phyteote fujet, par la claufe du bail, à perdre fon
droit, s’il laiffé accumuler trois années dû arrérages
de la redevance, peut éviter cette peine en offrant
le paiement d’une année avant l’expiration de la
troifième.
La préfomption de droit, établie dans la loi 3 ,
c. de Apoch. publ. pour les tributs , s’applique aux
arrérages des rentes, foit foncières, foit conflituéès,
aux loyers, aux fermes- & à toutes autres dettes
annuelles. Ainfi les quittances de trois années con-
fecutives etabliffent une méfomption du paiement
des arrérages des années précédentes, & , par conféquent',
une fin de non-recevoir contre la demande
de ces arrérages.
La raifon de cette préfomption efl qu’étant d’ufage
qu un créancier reçoive de fon débiteur les anciens
arrérages ayant les nouveaux, il n’efl pas probable
qu il fe foit fait payer les nouveaux pendant trois
années confecutives, fans avoir été payé des anciens.
Ainfi, pour qu’il y ait lieu à la fin de non-recevoir,
il faut que les arrérages des années précédentes
aient été dus à la perfonne même qui a
donné les quittances des trois années confécutives :
■ Pierre vendoit à Paul un héritage dont il lui
fut dû plufieurs années de fermages, & que ce même
Paul fe fût fait payer de trois années de fermage,
echues depuis fon acquifition, les trois quittances
qu il auroit données à cet égard, n’opéreroient
aucune fin de non-recevoir contre la demande que'
Pierre pourroit faire du paiement des fermages des
années précédentes.
De même il faut, pour qu’il y ait lieu à la prè-
fomption des paiemens & à la fin dé non-recevoir,
que le particulier à qui on a donné quittance de
trois années confécutives de fermages ou d'arrérages 9
foit auffi celui contre lequel on répète les arrérages
antérieurs. Ainfi le paiement de trois années de fermages
que feroit un nouveau fermier n’opéreroit
aucune fin de non-recevoir au profit du férmier précédent,
au fujet des fermages dont il pourroit être
débiteur. '
Il n’y aura pas lieu non plus à la préfomption
du paiement des arrérages antérieurs à ceux des
trois dernières années , ni par conféquent à la fin
de non-recevoir, toutes les fois que le créancier
pourra donner des raifons qui auront dû le déterminer
à recevoir les nouveaux fermages ou arrerages
avant les anciens.
Si des fabriciens, par exemple, donnaient au fermier
de la métairie d’une fabrique trois quittances
de trois années de fermages, échues pendant leur
exercice, ce fermier ne pourroit employer çes quittances
comme une fin de non-recevoir contre la demande
du paiement des fermages antérieurs, parce
que ces fabriciens avaient intérêt de faire, payer les
fermages échus durant leur geftion, plutôt que ceux
qui avoient couru du temps des fabriciens, leurs
prédécefteurs.
Un a&e de notoriété, donné par les officiers
du bailliage de Sens, le 29 août 1768, attelle que
l’ufa?e de ce fiège efl de ne point accorder aux fermiers
leur demande en paiement des arrérages, des
cens & rentes, trois ans après que le bail des mêmes
fermiers efl expiré, pourvu toutefois que les cen-
fitaires ne leur aient point donné de reconnoifiance
que ces arrérages refient dus, & qu’ils affirment qu’ils
les ont payés. .
Le parlement de Paris a jugé en conformité dans
une affaire dont voici l’efpèce, & qui fe trouve rapportée
dans la Colleéfion de jurifprudencè*
La veuve Choullier fit afiigner, en 1767, Jean
Thibaut pour le faire condamner au paiement de
neuf années d'arrérages de cens échus pendant le
bail de Choullier : les défenfes de Thibaut fe ré-
duifirent à dire : « j’ai payé, quand je ne Fau-
» rois pas fait, vous n’ètes plus en droit de me rien
v demander : fi je n’ai point de quittance, c’eft que
« les fermiers ne font pas dans l’ufage d’en donner
» pour des objets de cette modicité ; on leur fup-
» pofe de la bonne fo i, & l’on penfe qu’ils écri-
» vent avec foin fur leurs cueillerets tous les ar-
» ticles de leur recette ».
La veuve. Choullier oppofa à Thibaut la déclaration
de fes biens & de leurs charges, qu’il avoit
fournie lui-même à l’hôpital de Tonnerre, le 2.2
janvier 1738, §L dans laquelle il s’étoit fournis à
payer les arrérages des cens en queftion t mais
Thibaut lui répondit : « ce n’efi pas à votre profit
» que j’ai pafte cette reco'nnoiffance , puifque le bail
3» de votre mari étoit expiré depuis deux ans ; c’èft
v pour l’hôpital que je l’ai faite, & il n’étoit quef-
31 tioij que de payer ce qui étoit échu depuis la fin
» du bail de Choullier )).
Sur cette plaidoirie, là"cour, par arrêt du 10 janvier
1769, confirma la fentence du bailliage de
Sens, qui avoit déclaré la veuve Choullier non-
recevable dans fa demande.
Des arréragées dus par les bénéficiers. Pour (avoir fi
celui qui fuccède à un bénéfice, eft tenu d’acquitter
les arrérages dus par fon prédéceffeur, on doit examiner
fi ce font des rentes foncières ou féodales,
réelles & attachées aux biens qui ont donné lieu à
ces arrérages. ou fi ce font des penfions ou redevances
de certains bénéfices envers d’autres bénéfices
fupérieurs, ou fi ce font des penfions réfer-
vées fur le titre même du bénéfice.
A l’égard des arrérages des rentes foncières on
féodales, les auteurs font divifés : les uns, tels que
Chopin, Dupineau & Tronçon, penfent que le
fucceffeur doit être tenu de les payer : les autres
tels que Godefroi & Mornac, diftinguent le fucceffeur
aü bénéfice vacant par mort, d’avec le fuc-
ceftèur par réfignation : le premier ne doit, felont
eux, être tenu que des rentes échues depuis fa
prife de poffeftîon, parce qu’il ne tient fon bénéfice
que du collateur, & ce dernier eft préfumé avoir
conféré le bénéfice fans autres charges que celles
qu’impofe la fondation, lefquelles font d’acquitter
le fervice, & de p a y e rp o u r l’avenir feulement y
les charges auxquelles le temporel eft affujetti.
Quant à celui qui a été pourvu par réfignation;
ou par permutation, il eft, difent ces auteurs 9
tenu en quelque fdürte des faits de fon prédéceffeur t
il doit s’imputer la faute de n’avoir pas examiné ,
avant d’avoif accepté la réfignation, les charges du
temporel du bénéfice, & fi elles étoient acquittées
ou dues.
Sur cette variété d’opinions, l’auteur de la jurisprudence
canonique croit qu’il feroit raifonnable ,
à l’égard des arrérages échus du temps du prédéceffeur
, de s’en tenir à ce qui eft réglé pour les
décimes par l’édit du mois de janvier 1-599 ; fui-
vant lequel les receveurs des décimes ne peuvent
demander au nouveau fucceffeur au bénéfice:
pourvu par le décès du dernier titulaire,. plus de
deux années d'arrérages de ces décimes, & au fucceffeur
pourvu par réfignation, plus de trois années*
Cette opinion paroît d’autant mieux fondée, que:
lès décimes peuvent être confidérées comme des
charges réelles, & qu’on peut par conféquent leur
affnniler les rentes foncières & féodales. On trouve
d’ailleurs, dans Catelan , un arrêt qui. a jugé félon
ce principe.
Quant à ce qui concerne les arrérages des pendons
dont certains bénéfices font chargés envers,
des bénéfices fupérieurs, tels que des prieurés envers
des abbayes, Louet rapporte des arrêts du parlement,
qui déchargent le titulaire aâuel de ces
"arrérages : mais cette jurifprudence n’eft pas fiiivie
au grand-confeil ; on y juge au contraire que les.
abbés peuvent demander vingt-neuf années d'arrérages
de ces penfions, fauf aux titulaires aéluels leur
recours contre les héritiers de leurs, prédéceflèurs *
pour les arrérages échus de leur temps. La raifon de
cette jurifprudence eft que le revenu de ces prieurés