
tagés fur cette queftion : les Sabinîens vouloient que
la chofe nouvelle appartînt au propriétaire de la
matière, parce que difoient-ils, la forme n’étoit
qu’une firnple modification de la matière, & qu’elle
ne pouvoit fubfiller fans elle : d’où ils concluoient
que la matière étôit toujours la chofe principale ,
oc la forme un accelfoire , qui devoit fuivre le fort
du principal, & conféquemment appartenir au maître
du principal. Les Proculeiens au contraire , fou-
tenoient que c’ètoit de la forme que la chofe rece-
voit fon exiftence , & qu’elle devoit, par cette rai-
fon, appartenir à celui qui l’avoit mife en oeuvre.
Jumnien, §. 2$ , infi. de rer. div. a adopté un parti
moyen entre ces deux opinions, & a fuivi le fen-
timent des jurifconfultes appellés Ercifcundi; nous
avons adopté fes décifions, qui font effectivement
plus conformes aux loix de la juftice & de l’équité.
Il diftingue deux cas différens : ou l’elpèce peut
retourner à fon premier état, ou elle ne le peut pas.
Si l’efpèce qui a été faite peut retourner à fon premier
état, le propriétaire de la matière le devient
de l’efpèce qui a été faite, finon elle appartient à
celui qui l’a faite. Par exemple, un vafe peut être
remis en la maffe d’airain, d’argent ou d’o r , dont
il a été fait ; mais le v in , l’huile, le froment ne
peuvent retourner en raifins, en olives & en épis.
Ainfi dans la première efpèce, le propriétaire de
l ’o r , de l’argent, de l’airain, le fera du v afe , &
celui qui a tiré le v in , l’huile & le bled des raifins,
des olives ou des épis, acquiert le domaine de la
nouvelle fubftance. Juftinien ajoute que fi quelqu’un
a fait une efpèce, en partie de fa matière & partie
de la matière d’autrui, il demeure propriétaire du
total, parce qu’outre la forme, il a fourni une partie
de la matière. Pothier en adoptant les difpofi-
tions des loix romaines, laiffe néanmoins au juge la
liberté de s’en écarter, fuivant les circonftances.il
fuppofe un orfèvre qui auroit acheté de bonne foi
des lingots, qui m’auroient été volés, & qui en auroit
fabriqué de la vaiffelle d’un travail précieux, &
il veut que l’orfèvre ne foit tenu que de me payer
le prix de mes lingots : il fuppofe encore qu’un apothicaire
ait fait un onguent excellent avec desfim-
ples rares, que j’aurois apportées de pays étranger,
& il décide que le remède doit appartenir au propriétaire
des fimples, en payant par lui à l’apothicaire
le prix de fon travail. Ces diftinétions font
fondées fur la plus parfaite équité. Voye^ Spécific
a tio n .
Les mots 0?accejjion & à-accejfoire font fouvent
confondus dans le droit & par quelques auteurs.
On appelle accejfoire la chofe jointe à une autre *
& accejfion, l’aâion qui forme l’accefloire, & le titre
.qui donne droit à acquérir l’acceffoire. Ces idées fe
trouveront plus développées fous le mot A ccessoire
que nous allons traiter.
ACCESSOIRE, ( Droit civil & naturel. ) ce mot,
quoique dérivé de celui d'accejfion, renferme beaucoup
plus d’idées, & s’applique à un plus grand
nombre de ehofes. L’acceftion, comme nous l’avous
dit ci-deffus, fe dit feulement d’une chofe ajots*-
tée ou furvenue à une autre, & en ce fens le mot
accejjion eft oppofé à celui de principal. Accejfoire
fe dit généralement de tout ce qui fuit & accompagne
le principal, de ce qui s’y ajoute, s’y u n it;
& en eft ime dépendance : ainfi les fruits font un
accejfoire du fonds, les intérêts d’une rente, les dé*
pens d’un procès, les fers d’un ch ev a l, la bordure
d’un tableau, en un mot, le terme d'accejfoire s’applique
à tout ce qui peut être la fuite o u la dépendance
d’une chofe.
E11 jurifpmdence, comme en p hy fique, Vaccejfoire
n eft point au principal ce que la partie eft au tout.
L ’accejfoire eft fuppofe ajouté au principal, qui a pu
& peut encore exifter fans lui. La partie eft une
portion intégrante du tout ; ainfi la moitié de la dot
promife apres la mort, eft une partie du tout, tandis
que l’augment n’en eft que l’accejfoire. Cette diffère
nce entre la partie & Y accejfoire, qui femble ne
tenir qu’à l’exaéhtude du langage, a dans l’admi-
niftration de la juftice ,-plus d’influence qu’on ne
penfè ; il eft néceffaire de s’en former des notions
exaéles ; car c’eft d’elles que naiffent les principes
de la législation, & la véritable manière de les appliquer
aux efpèces qui fe préfentent dans les tribunaux.
Il n’y a prefque aucune des affaires qui fe traitent
entre les hommes, dans lefquelles il ne fe tr< >uve
une chofe principale & des accejfoires ; cependant la
détermination précife des accejfoires, en fait de p ro- ’
priété, de leg s , de v en te , eft un des objets des
plus difficiles de notre jurifprudence, u n .d e ceux
qui reviennent le plus fou v en t, & fur lequel nous
n’avons aucune efpèce de loix : nous fommesdonc
forcés de récourir aux loix romaines, & de faire
dans notre jurifprudence l’application des principes
généraux qu’elles nous ont laiffés fur'la nature &
les effets de Y accejfoire & du principal.
O n peut les réduire à trois i° . Y accejfoire ne
peut être plus fort que le principal ; 20. Y accejfoire
fuit le principal ; 3 °. Y accejfoire périt avec le principal.
Nous allons appliquer ces principes, & les con-
féquences qui en réfultent aux différentes ehofes :
qui font -fufceptibles d’accejfoires.
Des accejfoires des fonds. Nous avons déjà dit au
mot accejjion que les fruits naturels d’un fonds ap-
partenoient au propriétaire, parce qu’ils en font une
fuite & une dépendance, & qu’ils en font partie ;
& en fuivant ce même principe, nous avons ajouté
que tout ce qui naît des animaux qui nous appartiennent
, eft encore à nous, comme accejfoire de
notre propriété : c’eft encore par la même raifon que
tout ce qui a été planté, femé ou édifié dans un
fonds, appartient au propriétaire de ce fonds ; nous
avons donné , fur ces différens objets, les principes
des loix romaines, & la manière dont ils avoient
été adoptés dans nos moeurs, ainfi que les exceptions
& limitations qu’on y doit obferver._ Voyez
A ccession.
Des accejfoires d'une vente. Dans le contrat de
venté I
Vente, tout ce qui fait partie de la chofe vendue , ou
çe qui en eft un accejfoire, eft cenfé vendu conjointement
avec le principal, s’il n’eft expreffément réfer-
vé. Ainfi celui qui vend un héritage, vend en même
temps les arbres, les fruits pendans par les racines, les
échalas qui font dans les vignes, les clefs de la mai-
fbn, les tuyaux qui y conduifent une fontaine, les
fervitudes, & généralement tout ce qui en dépend,
& qui y eft deftiné pour l’ufage ordinaire , &pour
perpétuelle demeure. Il faut néanmoins obferver,
que, dans la vente d’un héritage affermé à prix d’argent,
l’acquéreur de ce même héritage ne peut demander
les loyers ou fermages, que du jour de fon
' contrat d’acquifition, le furplus appartient au vendeur
, s’il n’y a convention contraire ; parce que
ces arrérages font dus à raifon de la jouiffance, &
échoient de jour à jour , de la même manière que
, la jouiffance qui fe renouvelle & fe perpétue tous
les jours.
Les ehofes détachées d’un bâtiment, mais dont
l’ufage y eft accejfoire, comme la corde & les
féaux d’un puits, les robinets d’une fontaine, fon
baffin & autres femblables, celles aufli. qui n’en
ont été détachées que pour y être remifes, en font
des accejfoires, & entrent dans la vente; mais celles
qui, y étant deftinées, n’y ont pas encore, été
mifes, n’y doiveht pas être comprifes. Au refte,
pour juger fainement de tous les cas particuliers où
toutes ces ehofes font des accejfoires de la vente du
fonds, ou n’en font pas partie, il faut confidérer
les circonftances , leur deftination ordinaire , le lieu
où elles fe trouvent lors de la vente, l’état des
lieux vendus, & fur-tout l’intention des contra&ans,
pour reconnoître ce qu’ils ont entendu y comprendre.
On peut dire en général que dans la vente d’une
maifon ou autre héritage, tout ce qui y a été
mis pour perpétuelle demeuré, ce qui y eft attaché
à fer, à plomb, ce qui y eft fcellé en
chaux, & en plâtre, ce qu’on réputé faire partie
de l ’immeuble, & ce qui eft ordinairement eftimé
comme tel, eft un accejfoire du fonds vendu, &
appartient aü nouvel acquéreur.
Dans la vente des ehofes mobiliaires, les accef-
foires qui peuvent en être féparés, fans leur nuire,
entrent dans la vente ou n’y entrent pas, félon les
circonftances. Ainfi le cheval que je mets en vente
fens harnois, n’eft pas cenfé vendu avec le har-
nois ; mais s’il eft préfenté en vente avec le harnois
, le harnois appartiendra à l’acheteur , à moins
qu’il n’y ait convention contraire.
Dans la vente d’un château, l’artillerie qui s’y
trouve en eft regardée comme Y accejfoire, & en
cette qualité elle paffe à l’acquéreur du fonds. C ’eft
le droit commun, fondé fur la difpofition de plu-
fieurs coutumes du royaume.
Le droit de fervitude comprend les accejfoires,
fens lefquels on ne peurroït en ufer. Par cette raifon
le droit de puifer de l’eau dans un puits ou une
fontaine, emporte la fervitude du pàffage, & celle
Jurifprudence* Tome I.
de faire faire les réparations néceflaircs, pour s’en
fervir ; fi le travail ne peut fe faire dans l’endroit
où eft fixée la fervitude, on pourra travailler dans-
les environs, félon que la néceflité y oblige. Il
faut obferver cependant que les accejfoires en matière
de fervitude, doivent toujours être réglés de
la manière la moins incommode à celui qui la doit.
Des accejfoires en matière d'hypothèque. En matière
d’hypothèque, lorfqu’un fonds eft hypothéqué ,
tout ce qui lui devient accejfoire, foit par l’art, foit
par la nature, eft fujet à la même hypothèque. Ainfi
les arbres plantés fur mon héritage , & les fruits
qui y croiffent, font fujets à l’hypothèque, comme
ma terre : l’accroiflement qui peut y furvenir par
alluvion y eft également amijettie ; mais fi ces par- •
ties accejfoires en font féparées, on ne les confidère
plus comme accejfoires ; le créancier hypothécaire-
n’y a plus aucun droit, dès qu’il a fouffert que les:
fruits foient cueillis ; il en eft de même d’une forêt
hypothéquée , dès que les arbres ont été coupés
& tranfportés ; & des matériaux d’une maifon ,,
que le créancier auroit laiffé démolir & tranfporter
ailleurs.
Il en eft de même lorfqu’on a fait ajouter de
nouveaux bâtimens à une maifon déjà hypothéquée.
Ces nouveaux bâtimens deviennent un accef-
. foire de la maifon, & comme en étant une fuite & une
dépendance, ils font obligés à l’hypothèque qui y
étoit affife antérieurement : cependant les ouvriers
qui ont fait cette conftruâion, ou ceux qui ont,
prêté des deniers pour les payer, acquièrent un
privilège fur le créancier hypothécaire du fonds,
parce que fans eux cet accejfoire n’exifteroit pas.'
Voye^ Batiment, Hypothèque.
Les arrérages d'une rente en font l'accejfoire. Les arrérages
d’une rente conftituée n’étant qu’un accef
foire du principal, fui vent pour l’hypothèque la date
de ce même principal, parce que la chofe engagée
& hypothéquée pour le principal, l’a été en même
temps pour les intérêts de ce principal. C ’eft pourquoi
nous accordons dans notre jurifprudence, au
créancier antérieur par fon titre, le droit d’être payé
fur la vente des biens de fon débiteur, avant les
créanciers poftérieurs, quand bien même ceux-ci
auroient obtenu avant lu i, une fentence de condamnation
: il doit être payé non-feulement de fon
principal, mais encore de fes arrérages & de fes
frais ; parce que ces deux objets font un accejfoire
du principal, & qu’ils en fui vent la.nature, & on t
les mêmes, effets.
La caution efi accejfoire de l'obligation principale.
En général,l’obligation d’une caution ne doit être
regardée que comme l’accejfoire de l’obligation principale
, & femble être foumife au même fort ; cependant,
les loix & la jurifprudence ont admis une
diftin&ion néceffaire, qui réfujte de la nature du
contrat- de cautionnement. Lorfque l’obligation principale
eft nulle en elle-même, foit à caufe du dol
du créancier, foit parce quelle a été contractée par
un fils de famille, l ’obligation acceffoire de la eau-
N