
& de donner copie des reconnoiflànces fournies par
les cenfitaires, ou du moins, de dater ces recon-
noiffances, de défigner le notaire qui les a reçues,
& d’en offrir communication.
En un mot, il y a lieu de blâmer un dénombrement
lorfqu’il manque par le défaut de quelqu’une
des formalités que nous avons indiquées pour qu’il
foit jufte & régulier.
Si le vaffal ne veut point le réformer de bon gré,
le feigneur n’a que la voie de l’aâion pour l’y
contraindre, fans pouvoir ufer de la faifie féodale ,
fi ce n’e ft, comme nous l’avons dit , lorfque le
vaffal a refufé de fatisfaire au jugement qui le condamne
à cette réformation dans le délai prefcrit ;
temps après lequel le feigneur peut faire faifir avec
perte de fruits pour le vaffal.
Lorfque le vaffal prétend au contraire que le feigneur
n’a aucun moyen valable pour refufer le
dénombrement , il faut de même qu’il prenne la
Voie de l’aâion pour contraindre le feigneur à le
recevoir, ou pour voir dire qu’il fera cenfé reçu ;
mais en attendant la fentence, le vaffal doit avoir,
par provifion, main-levée de tous les objets dénombrés
, car ceux qui ne le feroient pas demeureroient
toujours valablement faifis.
Il ne faut pas croire que parce qu’un dénombrement
eft conforme à ceux qui l’ont précédé , il foit
pour cela à l’abri de tout reproche. Le feigneur a
pu être indulgent dans une occafion, fans que cela
tire à conféquence pour l’avenir. De forte que s’il
fe trouvoit des omimons ou des irrégularités dans
un aveu antérieur, ces défauts ne ferviroient nullement
à juftifier les fautes que Ton auroit commifes
dans celui que Fon fourniroit alors.
Mais rien de plus facile ', avec un peu de bonne
fo i, entre le feigneur & le vaffal, que d’être d’accord
fur un dénombrement.
La coutume de Paris veut qu’après Y aveu donné,
le feigneur & le vaffal fe communiquent ce qu’elle
appelle les titres de tenure du fief, & quils fe purgent
par ferment s’ils en font, requis. Il vaudroit bien
mieux qu’ils fufîent obligés à cette communication
avant aucun aveu, parce qu’alors ce feroit le vrai
moyen, pour le vaffal, de le donner exaéi, & pour
le feigneur, de connoître s’il eft jufte & régulier.
Quoi qu’il en foit, comme cet aveu n’eft point
pour contracter une nouvelle obligation, mais Amplement
pour être au fait de celles qui exiftent déjà
entre le feigneur & le vaffal, il s’enfuit que fi ce
dernier avoit donné aux droits de fon feigneur plus
d’extenfion qu’ils n’en dévoientavoir, il feroit recevable
, pendant trente ans, à les faire reftreindre,
fans même qu’il fut obligé de prendre des lettres
de refeifion ; tout comme le feigneur, pendant le
même intervalle, feroit fondé à réclamer les droits
qui fe trouveroierit omis à fon préjudice, parce
•qu’enfin un aveu donné & reçu n’eft jamais regardé
comme un nouveau contrat. C ’eft ce qui réfulte
d’un arrêt du parlement de Rouen, du 28 février
16 82 , rapporté par Bafti^ge,
II a pourtant été jugé, dans la coutume de Paris
, par arrêt du 12 décembre 1622, rendu contre
les chartreux, que lorfqu’un feigneur a procédé ,
par voie de faifie féodale , contre le nouvel acquéreur
d un fief, cet acquéreur étoit obligé d’avouer
ou de défavouer le feigneur faififlànt, fans pouvoir
demander aucune communication de titres , quand
meme, par le contrat d’acquifition, le fief feroit
dit mouvant d’un autre feigneur, & que l’acquéreur
eut donné à celui-ci fon aveu & dénombrement.
Cet arrêt peutparoître fingulier, mais on croit qu’il
eft dans la décence que le vaffal s’explique lui-
même : autrement, fi le feigneur étoit obligé de
commencer par montrer fes titres , il n’en eft aucun
de qui on ne les exigeât, & envers lequel on ne
cherchât à éluder Y aveu > à la faveur de mille chicanes
contre ces mêmes titrés.
A l’égard des fiefs qui relèvent immédiatement
du roi, il y a des règles particulières qu’il eft bon
d’expliquer ici. Lorfque le vaffal a été reçu à faire-
la foi & hommage entre les mains de M. le chancelier
, ou à la chambre des comptes, il doit avoir
trois copies de fon aveu & dénombrement , l’une
pour la chambre des comptes , l’autre pour la
chambre du domaine, & la troifième pour lui.
Lorfque la chambre des comptes a reçu la copie
qui lui étoit deftinée , elle rend arrêt par lequel
elle renvoie le dénombrement fur les lieux pour en
faire faire la vérification. Lorfque le fief eft fitué
dans la généralité de Paris, elle renvoie devant les
baillis & fénéchaux pour cette vérification ; mais
fi c’eft dans une autre généralité que fe trouve la.
fituation du fief, c’eft au bureau des finances, dépendant
de cette généralité -, que le renvoi eft ordonné.
Pour que les officiers commis s’acquittent de
leurs fondions avec connoiffance de caufe, il eft
dit, par deux arrêts de la chambre des comptes,
rendus en forme de réglement , l’un du 15 fep-
tembre 1744, & l’autre du 12 août 174 6 ,que les,
fentences de vérification des aveux & dénombrement
préfentés au roi, feront expédiées en parchemin ,
& que la publication de ces dénombremens dans
les bailliages, fénéchauffées & bureau des finances »
ne fe fera qu’après qu’ils auront été préalablement
’ envoyés, par les officiers de ces lièges, aux pa-
roiffes dépendantes du chef-lieu du fief où font
fitués les objets dénombrés, pour y être lus & publiés
par trois dimanefies confécutifs, à l’iffue de
la méfié de paroiffe.
Le dernier de ces réglemens porte que les publications
faites par les curés feuls, feront fuffifantes
avec leur fimple certificat, & que le miniftère des
huiftiers ne fera néceffaire que lorfque le curé aura
des empêchemens de faire ces publications, lef-
quelles, en ce cas, feront faites à l’ifîùe de la méfié
paroifiiale, par un huiffier qui fera mention dans
fon certificat de l’empêchement furvenu.
Cette vérification fur les lieux eft d’un ufage fort
ancien. L’époque en remonte à un arrêt de la chambre
des comptes du 4 février 1511.
Les oppofitions qui peuvent furvenlr fe difeutent
Sl fe jugent au bureau du domaine ; & s’il y a appel
des fentences rendues fur ces oppofitions , l’appel
fe porte en la grand’chambre du parlement; le
tout enfuite eft renvoyé à la chambre des comptes,
en conformité d’un réglement du confeil, du 19
janvier 1668.
Les eccléfiaftiques qui ne poffèdent des fiefs qu’à
caufe de leur bénéfice , ne doivent qu’une fimple
déclaration de leur temporel, laquelle fe renvoie
devant les baillis & fénéchaux des lieux où font
fitués les bénéfices, ainfi qu’il eft réglé par une
déclaration du 29 décembre 1673 9 une fécondé
du 18 juillet 1702, & un arrêt du confeil du 24
juillet 1735.
Pour ce qui eft des terres titrées, telles que Ie5
duchés , comtés , marquifats , baronnies, &c. qui
relèvent du ro i, les aveux & dénombremens doivent
s’en donner aux chambres des comptes, à l ’ejclu-
fion des bureaux des finances.
Quant aux autres fiefs, ceux qui en font pof-
feffeurs peuvent à leur choix fournir leurs aveux ,
ou aux bureaux des finances, ou à la chambre des
comptes. Mais les bureaux des finances font toujours
obligés d’envoyer aux chambres des comptes
les aveux quils ont reçus, pour y demeurer en
dépôt.
C’eft au procureur du roi du tribunal où les
aveux font renvoyés, à examiner s’ils font exafts
ou réguliers. La chambre du tréfor juge enfuite les
conteftations qui peuvent naître à ce fu jet ; & s’il
y a appel, c’eft à la grande chambre du parlement
que cet appel doit être porté, parce qu’il ne feroit
pas naturel que la chambre dés comptes, qui doit
recevoir Y aveu, fut, en quelque façon , juge & partie.
Si le vaffal a quelques droits d’ufage dans les
forêts du roi, ou de pêche dans les rivières navigables
, ou même fi quelques-uns des héritages du
dénombrement defquels il s’agit, ne font éloignés
que de cent perches des bois de fa m a je f té , 1W « b
doit être communiqué au procureur du roi de la
maîtrife où le fief eft fitué : c’eft ce qui réfulte de
l’article 8 du titre 27 de l’ordonnance des eaux
& forêts.
Le procureur du roi en la maîtrife, fait ou fait
faire telle vérification que bon lui femble, après
quoi il donne fon certificat au bas de chacune des
trois copies du dénombrement. •
Lorfqu’il s’agit d’une grande feigneurie, le vaffal
eft encore obligé de communiquer fes trois copies
au fermier ou receveur du domaine du diftriâ de
la fituation du fief, & d’y faire mettre fon certificat
, portant déclaration qu’il n’a aucun moyen
pour empêcher la réception du dénombrement.
Quand tous ces préliminaires ont été obfervés ,
& que Y aveu fe trouve enfin exaâ & régulier ,
il eft reçu par la chambre des comptes.
Voilà en général ce qui concerne Y aveu & dé-
nombrement, de la part du vaffal envers le feigneur
féodal, qu’on appelle feigneur dominant ; mais comme
le vaffal eft feigneur lui-même, à l’égard des
particuliers poffeffeurs des héritages qui compofent
fon fief, ceux-ci lui doivent à leur tour une efpèce
dû aveu & dénombrement qu’on appelle reconnoiffance.
Ces particuliers font appellés tantôt emphytéotes ,
à caufe dû bail qu’ils ont à perpétuité ou à longues
années, ou Amplement à v ie , des fonds qu’ils pof-
fèdent : tantôt tenanciers à caufe de ce même fonds ,
dont ils font détenteurs : tantôt, & même le
plus fouvent, cenfitaires, à caufe des cens,rentes,
droits ■ & devoirs feigneuriaux, qu’ils font annuellement
obligés d’acquitter; tantôt enfin on les appelle
arrière-vajfciux, parce qu’ils dépendent du vaffal du
feigneur dominant.
- Il eft fans difficulté que tout cenfi taire eft obligé
d’avouer à fon feigneur immédiat qu’on appelle
plus communément feigneur direft, tout ce qu’il tient
& poffède dans fa direâe ou dans fa juftice, foit
en bâtimens ? terres ou autres héritages, & de déclarer
les cens, rentes, droits & devoirs auxquels
il eft affujetti, à raifort de cette détention. C ’eft la
colle&ion de toutes ces déclarations ou reconnoif-
farices , qui compofent le volume qu’on appelle
papier terrier, ou Amplement terrier dune terre ou
feigneurie.
Le feigneur eft en droit de faire renouveller fon
terrier tous les vingt ans, pour prévenir Ja pref-
criptiôn de fes droits , & chaque cenfitaire eft obligé
de payer les frais de fa- reconnoiffance.
Lorfqu’il y a changement de cenfitaire, autrement
que par fucceffion en ligne direéle., le feigneur
peut exiger du nouveau tenancier une nouvelle
reconnoiffance, aux frais de celui-ci.
Quand la mutation arrive de la part du feigneur ,
le cenfitaire n’eft obligé à une nouvelle reconnoiffance
, qu’autant- que ce feigneur veut en faire
les frais.
Cette reconnoiffance doit être détaillée & cir--
conftanciée de la même manière que nous l’avons
dit de Y aveu & dénombrement: elle doit être elle-
même un dénombrement exa& de tout ce que le
cenfitaire peut pofféder & devoir.
Comme un aâe pareil eft en même temps une'
efpèce d’hommage que le cenfitaire fait à fon feigneur,
il eft obligé de l’aller faire au château du:
feigneur, ou de le faire faire par un fondé de procuration
: quelques feudiftes ont prétendu que cet
endroit n’étant pas un lieu de liberté, le cenfitaire
n’étoit point obligé de s’y rendre, & que c’étois
même un motif pour réclamer contre la reconnoiffance;
mais c’eft une erreur; i°. parce qu’on
ne doit pas préfumer que le feigneur ufe de contrainte
ni de violence, ni que le notaire, qui eft
un officier garant de la foi publique , prête fon mis
è r e à l’iniquité; 20. parce qu’une reconnoiffance
n eft pas une nouvelle obligation , mais Amplement
Y aveu d’une ancienne obligation: à quoi on peut
ajouter qu on a trente ans pour faire réformer cette
reconnoiffance, fi elle eft exagérée, fans qu’onfoi£
même obligé, comme nous l’avons dit, de pren.