
fréteur, il doit jouir de la totalité du navire, à
l’exclufion de tous autres pendant la durée du
voyag e, de manière q u e , fl fes marchandifes ne
remplirent pas toute la charge du navire, le maître
ne peut louer à d’autres perfonnes lès places qui
lui refirent, fans le confentement de l’affréteur ; il
lui fuffit d’en avoir allez pour répondre de la valeur
du. fret.
Cette obligation eft fi étroite , qu’il ne peut même
charger des marchandifespou*- fon propre compte ;
& * s’il le fait du confentement de l’affréteur, il doit
lui tenir compte du fret de ces marchandifes, à moins
.qu’il n’y ait une convention contraire.
Il en eft de même des marchandifes étrangères
que le maître prendrait du confentement de l’affréteur
, ainfi que celui qui efl dû pour le tranfport
des malles des étrangers. Mais, à l’égard de leurs
perfonnes, il n’a pas befoin du confentement de l’affréteur,
parce qu’il efl fuffifamment préfumé par
l’intérêt même de l’affréteur, à qui iHmporte d’avoir
fur le navire qu’il a loué, des paffagers qui peuvent
, en cas d’accident, contribuer à fa défenfe.
: Lorfque le navire a été lotie au quintal ou au
tonneau, le maître efl tenu feulement d’y recevoir
la quantité de marchandifes pour lefquelles il s’efl
obligé, ou de donner à l'affréteur la place fuffifante
pour y placer la quantité de tonneaux dont ils font
convenus : il peut difpofer du furplus comme bon
lui femble.
Il efl du devoir du maître d’un bâtiment affrété
non-feulement de n’apporter aucun obflacle au chargement
des marchandifes de l’affréteur, mais même
de le défendre contre ceux qui pourroient s’oppofer
foit au chargement, foit au tranfport de fes marchandifes.
Il efl tenu pareillement de fe charger des marchandifes
de l’affréteur, & de les prendre en fa garde,
de.manière qu’il ne leur arrive par fa faute aucune
avarie. Il doit auflî les conduire au lieu de leur def-
jtination, dans le temps fixé par la charte-partie, ou
parl’ufage du commerce, & mettre à la voilé, foit
au jour convenu, foit dans le moment favorable.
Le juge peut néanmoins, en cas de conteflation,
accorder au maître du navire une modique prorogation
des délais.
Lorfque le navire n’a pas été vifité par les maîtres
charpentiers & calfàts avant fon départ, le maître
efl garant des vices de fon vaiffeau, qui exifloient
avant qu’il mît à la voile, & qui l’ont rendu incapable
de fe rendre au lieu de fa deftination ,ou même
qui ont retardé notablement fa courte. H efl en
conféquence, refponfable des dommages & intérêts
de l’affréteur, & il ne peut alléguer qu’il ignoroit
les vices de fon bâtiment; car fa profeffion l’oblige
de s y connoître & de s’en- informer.
Ceci cependant ne doit s’entendre que des vices
extérieurs ; car, fi le vice étoit intérieur & caché,
& s’il n’avoit pu même être connu par la vifite ordinaire
, le maître du navire n’en feroit refponfablé
_que dans le cas où il icroit prouvé qu’il étoit connu
du maître avant fon départ , & qu’il y a eu doî &
mauvaife foi de fa part*
Le maître d’un navire affrété efl obligé, avant
le départ & pendant le voyage, d’apporter tous les
foins convenables pour la confervation des mâr-:
chandifesqui lui ont été confiées : il eft même refi-
ponfable des fautes légères. Par cette raifon, il doit
avoir fur fon bord la charte-partie & les autres pièces
juflificatives de fon chargement; & , fi, en temps
de guerre, faute de pouvoir les représenter| fon
navire étoit déclaré de bonne prife, il feroit tenu
des dommages & intérêts des affréteurs.
l a confervation dès marchandifes reçoit une première
exception .dans les cas de néceflité, tels
qu’une tempête ou l’attaque faite par un corfaire
ou un pirate. Si on efl obligé de jetter à la mer.
une partie des marchandifes pour alléger le vaiffeau
& faciliter fa fuite, le maître n’eft tenu à aucuns
dommages & intérêts envers les propriétaires des
marchandifes.
Mais, avant d’en venir à cette reffource, il doit
prendre lavis des intéreffés, s’ils font préfens, &
des gens de l’équipage.
Le propriétaire des marchandifes jettées à la mer
a une aéfion d’indemnité contre tous les intéreffés
a la confervation du vaiffeau, ainfi que nous lé
dirons au mot A varie.
Le maître du navire efl encore autorifé à vendre
des marchandifes des affréteurs pour acheter des vi*
vres pendant le cours du voyage, & pour faire
radouber fon vaiffeau, & généralement pour toute
autre néceffité auffi preffante. Mais, dans ces cas ,
il efl tenu de prendre l’avis des gens de l’équipage j
& de conflater par , leur témoignage la nécefnte de
l’emprunt, & ion emploi. Il doit auffi préférer
d’emprunter de l’argent, s'il le peut commodément,
ou vendre par préférence fes propres marchandifes ,
ou celles du propriétaire du bâtiment.
Lorfque les marchandifes ont été jettées à la mer,'
leur propriétaire n’a le droit d’exiger une indemnité
de tous les intéreffés à la confervation du navire
, que lorfqu’il efl arrivé à bon port; mais, s’il
périt dans le voyage avec toute fa cargaifon, ou
s’il efl pris par l’ennemi, il n’y a plus lieu à la
contribution pour les marchandises jêttées à la mer.
Il n’en n’eft pas de même de celles qui ont été
vendues pour fùbvenir aux néceffités preflantcs du
vaiffeau. Si, après cette vente, il vient à périr ou
à être pris, le maître eft tenu de payer les marchai*-
difes à l’affréteur à qui elles appartenoïent. Lâ raifon
de cette différence eft fondée fur ce que , par la vente
des marchandifes, le maître dit navire en a reçu le
prix comme une efpèce de prêt forcé que le propriétaire
des marchandifes vendues lui a fait; qu’il
naît de ce prêt une obligation perfonnelle du maître
qui l’oblige à rendre à l’affréteur la fomme provenue,
dir prix de fes marchandifes, quoique, par
événement , il n’en ait pas profité; que la perte de
fon bâtiment ne le libère pas delà néceflité de rendre
à l’affréteur une fomme qui . lui appartenoit, Cetté
déciflon eft fondée fur l’article 68 des ordonnances
de Wisboury : c’eft le fentiment de M. Valut fur
l’article 14 du titre du fret, & de M. Pothier dans
fon Traité de la charte-partie.
Le maître du navire eft néceffairement tenu de
remettre aux corfefpondans des affréteurs les marchandifes
dont il s’eft chargé, à moins qu il ne juf-
tifie qu’elles ont été perdues ou enlevées par une
force majeure. Lorfqu’il ne les reprefente pas, il
eft refponfable envers .l’affréteur non-feulement du
prix des marchandifes, mais encore du bénéfice que
le marchand aurait pu faire, conformément à leur
qualité & à leur valeur dans le lieu de leur deftination,
à la déduCtion néanmoins du fret & des
droits & menus frais auxquels elles auroient été
fujettes. , , 1
Il eft également obligé de les remettre aans le
même état où il les a reçues, à moins qu’elles n’aient
été endommagées par une force majeure dont iln eft
pas refponfable. Toutes'les fois qu’elles 1 ont été par
fon fait & fa négligence, ou par celle de fes gens,
il eft obligé d’indemnifer l’affréteur de ce qu’elles
valent de moins. Dans le cas meme ou 1 avarie feroit
confidérable, le çorrefpondant peut refùfer de
les recevoir & les laifler au maître pour fon compte ;
& alors il doit à l’affréteur les mêmes dommages,
que s’il ne repréfentôit aucune partie des marchandifes,
Lorfqu’un navire' eft loué en entier par un feul
"affréteur, il arrive fouvent qu’on déflgne dans la
.charte - partie la quantité de tonneaux qui forment
le port du bâtiment. Cette claufè peut donner lieu
à deux queftions; la première de lavoir a quoi eft
tenu le maître, lorfque le port a été déclaré plus
confidérable qu’il n’eft effectivement; la fécondé,
lorfqu’il a été déclaré moindre.
, . Dans le premier cas , fi la contenance du bâtiment,
déclarée dans la charte-partie, fe trouve plus
confidérable que fa contenance réelle , que la différence
foit un peu confidérable, & qu’elle excède
la quarantième partie, le maître du navire eft tenu
envers l’affréteur, non-feulement de la diminution
du fret ,.au prorata de ce qui manque de tonneaux,
mais encore de fes dommages & intérêts , eu égard à
ce qu’il fouffre de n’avoir pu tranfporter autant de
•.marchandifes qu’il fe leraropofoit.
Si, au contraire, le maître a déclaré fon vaiffeau
d’un moindre port que celui dont il eft effectivement,
il ne peut demander une augmentation de fret, pour
raifon d’une plus grande contenance, parce qu’il a
loué fon vaiffeau en entier , fans s’eq rien rêferver.
On doit fentir que ces queftions ne peuvent avoir
lieu,, lorfque le. fret a été ftipulé, même pour le
vaiffeau entier, à raifon du tonneau.
Des allions qui naiffent de l’affrètement contre le
maître du vaiffeau, & fes .commettans. Les affréteurs
ont contre le maître du navire faCtion ex condufla,
par laquelle ils peuvent le faire condamner perfon-
nellement à remplir fes obligations, & , faute par
- lui de les remplir, aux dommages & intérêts, réfultans
de l’inexécution des obligations qu’il a contrariées.
Ils ont pareillement contre les propriétaires du
navire, qui ont prépofé le maître à fa conduite-,
l’aCtion exercitoire, aux mêmes fins que celle ex
conduêlo, qu’ils peuvent exercer contre le maître :
cette aCtion s’étend à tous ceux qui ont droit de
percevoir les revenus du bâtiment, foit en qualité
de propriétaires, foit en qualité de premiers & principaux
locataires.
L’aCtion exercitoire eft fondée fur le principe général
, par lequel tout commettant eft cenfé avoir
confenti d’avance aux contrats que fon commis ou
prépofé peut faire pour l’utilité de la choie qui lui
eft confiée. Ainfi, dans i’affrètement, les propriétaires
d’un navire doivent .'être tenus envers les affréteurs
des obligations contractées avec çux par le maître
qu’ils ont prépofé, parce qu’ils ont confenti d’avance
à tous tes contrats qu’il feroit pour l’avantage du
navire dont il a la conduite.
Lorfque les propriétaires d’un navire demeurent
dans le lieu où eft le vaiffeau, le maître peut-il les
engager fans leur confentement ? quelques-uns penchent
pour l’affirmative; mais nous croyons devoir
embraner le fentiment contraire, comme plus conforme
à l’ordonnance de la marine , qui porte , titre
des chartes-parties, article 2 , que le maître fera tenu
de fuivr.e l’avis des propriétaires du vaiffeau, quand
il l’affrétera dans le lieu de leur demeure. En effet,
les propriétaires d’un bâtiment font bien cenfés donner
pouvoir au maître qu’ils établiflent, de louer le
vaiffeau en leur abfence, & . de faire tout ce qu’ils
feraient eux-mêmes, s’ils étoient préfens ; mais on
ne peut préfumer cette volonté de leur part, lorfque
l’affrètement fe paffe dans le lieu de leur demeure.
Il fera donc vrai de dire que, dans cette efpèce,
la location , faite par le maître fans le confentement
des propriétaires, ne les oblige pas v is -à -v is des
affréteurs ; néanmoins, le contrat eft valable entre
ces derniers & le maître, parce que, dans cette
circonftance, il a pu louer une chofe qui ne lui
appartenoit pas. Mais s’il ne peut remplir fon obligation
, & que les propriétaires ne veulent pas
conféntir à Y affrètement qu’il a contracté, il fera tenu
des dommages & intérêts envers les affréteurs.
Lorfque la propriété du vaiffeau appartient à plu-
fieurs perfonnes, chacune d’elles eft tenue folidai-
rèment de l’aCtion exercitoire, ainfi qu’il eft décidé
par les loix 1 §, ult. Si 2 ,ff. de exerc. ail. & par
Y Ordonnance du commerce de 1673, qui déclare les
aflociés de commerce folidairement obligés à toutes
les dettes de leur fociété.
Il eft néceffaire de remarquer .que les propricataires
d’un vaiffeau ne font pas, ainfi que tous les
autres commettans, tenus indéfiniment de toutes les
obligations que leur prépofé a contractées, mais feulement
jufqu’à la concurrence de l’intérêt qu’ils ont
dans le navire ; enforte qu’ils peuvent fe décharger
des obligations que le maître a contractées pour eux,
en abandonnant leur bâtiment & le fret. Sous le