
parla voie de l’appel comme d'abus, Sc on trouve
plufieurs arrêts qui ont déclaré abufives les entreprifes
des juges laïques contre la jurifdiélion ecclé-
fiaftique : f il’ufage n’en eft pas fréquent, c’eft que
l’appel fimple produit le même effet, puifqu’il défère
également au parlement la connoiffance des griefs
dont le juge eccléfiaflique a droit de fe plaindre.
L e clergé d’ailleurs, lorfque le juge laïque entreprend
fur fa jurifdiélion, préfère fouvent le recours
dire# au fouverain, qui arrête les entreprifes des
tribunaux féculiers par des évocations, ou y pourvoit
par des arrêts du confeil, dont les parlemens
fe plaignent quelquefois comme d’une chofe contraire
au bon ordre & aux loix du royaume.
De la maniéré dont on fupplée à l'appel comme
d'abus dans quelques provinces du royaume. Les appels
comme d'abus ne font point connus en Lorraine
& en Rouffillon, c’eft-à-dire, que l’on ne s’y fert
pas de cette voie pour réprimer les attentats du
clergé; mais on y remédie en Rouffillon par la voie
de recours , & en Lorraine, par opposition à fins de ^
nullité. Ces deux formes de procéder ne diffèrent
de l’appel comme d'abus que par l’expreffion, car
quant au fond, elles produifent le même effet.
Tous les états catholiques fe font également oCr
cupès du foin de trouver des moyens capables de
prévenir les inconvéniens des entreprifes de la cour
de Rome fur la jurifdiélion temporelle; & les Ef-
pagnols , qui parlent encore de l’infaillibilité^ du I
pape, pour conferver au royaume fes privilèges
ê i fes droits, appellent du pape au futur concile,&
ne biffent mettre à exécution aucunes bulles, ref-
crits ou provifions apoftoliques, fans placet & lettres
d’attache du fouverain ou de fes officiers, en bonne
& due forme.
Quelles circonfiances donnent lieu à l'appel comme
d'abus ? Il nous feroit impoffible d’examiner & de
difcuter toutes les circônftances dans lefquelles il
peut y avoir lieu à l’appel comme d'abus. Il ne fe
préfente aucune affaire à un tribunal eccléfiaflique, !
dont on ne puiffe appeller comme d'abus, lorfque
le juge d’églife a excédé les bornes de fonpouvoir,
ou s’efl écarté, foit en la forme, foit au fond, des
règles prefcrites par les canons & les ordonnances :
nous obferverons feulement qu’il faut s’en tenir
exactement à ce que nous avons indiqué au commencement
de cet article, fur les quatre principales
fources de Y abus, & fur la manière dont les
prélats peuvent le commettre. Au refie, nous aurons
foin de marquer les cas ou Y abus peut fe rencontrer
, à mefure que notre travail nous fournira
l ’occafion de traiter une matière dépendante de la
jurifdiélion eccléfiaflique. Il nous renie actuellement
à faire connoître la forme des appels comme tYabus.
Oit fe relève l'appel comme d'abus. L’appel comme
d'abus j foit que Y abus foit commis par le juge eccléfiaflique
, ou par le juge laïque, fe relève devant
les tribunaux féculiers , & à caufe de l’importance
de la matière, ce font les cours fouveraines qui en
connoiffent, à l’exclufion des juges inférieurs.
Les appellations comme d'abus fur les affaires
civiles font toujours portées à la grand’chambre,
& fur les affaires criminelles à la tournelle criminelle.
Ces appels fe mettent au rôle des plaidoieries ;
mais quand ils ne viennent point à leur tour, ils
ne font point appointés de droit comme les affaires
ordinaires ; on les met à un autre rôle : cependant
ils peuvent être appointés, du confentement des parties
& des gens du roi, ou quand la cour, après
avoir entendu la plaidoierie, ne trouve pas l’affaire
difpofée à être jugée à l’audience. Te l eft l’ufage
obfervé au parlement de Paris.
Il arrive auffi quelquefois que, quand la cour eft
chargée d’appellations comme d'abus , le roi donne
une déclaration pour les appointer. La dernière dé-,
claration de cette efpèce eft du 12 mai 1776.
L’appel comme d'abus peut être relevé par arrêt
ou par lettres obtenues en chancellerie.
Dans le premier cas, il faut pour obtenir l’arrêt
qui reçoit l’appel, & permet d’intimer, préfenter
une requête oc y joindre, la fentence contre laquelle
on veut fe pourvoir, & que le tout foit communiqué
au procureur-général.
Dans le fécond cas, il faut une confultation de
deux avocats qui trouvent l’appellant bien fondé.
Cette confultation doit être attachée aux lettres de
relief d’appel comme d'abus, qu’on peut prendre en
petite chancellerie, fuivant l’arrêt d’enregiflrement
de l’édit de 1610. Mais pour prendre» des lettres
d’anticipation fur un appel comme d'abus, il n’eft
; point néceffaire de les libeller ni d’avoir une confultation
d’avocats.
Au parlement de Touloufe , on accorde des reliefs
d’appel comme diabus fans confultation d’avocats
, quoiqu’elle foit requife par l’édit de 1606.
Des appels comme d'abus incidens. Tout ce que
nous venons de dire ne concerne que les appels
comme (Yabus principaux ; mais il eft neceflàire d ob-
ferver qu’on peut interjetter des appels comme d'abus
incidemment, lorfque, dans le cours d’une procedure
, on objeéle un aéle abufif.
Ces efpèces d’appels s’interjettent ordinairement
fur le barreau, & ils ne font pas fujets aux formalites
de la confultation & du fceau. Toutes les cours fouveraines
peuvent connoître des appellations comme
dé abus, incidentes à une affaire principale, pendante
en leur tribunal, parce qu’elles fuivent naturellement
les inftances principales, & doivent être jur
gées en même temps. On trouve dans la bibliothèque
canonique, au mot Monitiori, un arrêt de la^ cour
des aides , du 18 décembre 1573 , qui juge l’appel
comme d'abus d’une monition oétroyée par 1 official
de Reims. .
Si l’on interjette incidemment appel comme d abus
dans une inftance appointée , il doit etre joint à
Pinftance par un réglement arrêté avec les gens du
ro i, ou qui fe reçoit fur leur avis à l’audience de
la grand’chambre , quand même l’inftance principale
feroit conclue aux enquêtes : mais après la jonction
ordonnée, cet appel incident eft jugé aux enquêtes
avec l’inftance principale. On doit cependant
en excepter les appels, qui, quoique incidens, doivent
être regardés comme principaux , torique îe
jugement du procès dépend de l’événement de 1 appel
comme S abus. Par exemple, C , dans le cas
d’un procès conclu aux enquêtes, fur une fuccef-
fion, dans laquelle les enfans ferment parues on
inter étroit incidemment appel comme M
célébration du mariage de leur pure , il faudroitfur-
feoir au jugement du procès pendant aux enquêtes,
& faire juger à la grand’chambre 1 appel comme
d 'abus, qui, quoique incidemment interjette , eft regardé
comme un appel principal , dont la decifion
réelera néceffairement le fort de 1 inftance pendante
aux enquêtes. C ’eft la doarine contenue dans une
lettre de M. le chancelier de Pontchartrain, écrite
le i l juillet 1701 , au premier préfident du parlement
de Touloufe, & enregiftréedans les regiftres
de cette cour.
Effets de l'appel comme d'abus. Les appellations
comme d'.abus font non-feulement dévolutives, mais
encore fufpenfives, fuivant la règle generale, que
l’appel empêche l’effet de la chofe, jugee : cette rai-
fon eft encore plus forte dans les, appels comme
d'abus, parce que Y abus intéreffant l’ordre public,
il feroit fouverainement injufte de lui accorder la
provifion. . M r
Suivant l’article 36 de l’édit du mois d avril 1695*»
les appellations comme dé abus inter jettées des ordonnances
& réglemens faits par les archevêques
& évêques dans le cours de leurs vifites, ou des
jugemens que ces prélats &> autres juges d’églife
peuvent rendre pour la célébration du fervice divin,
réparation des églifes , achat d ornemens , fubfif-
tance des curés, & autres eccléfiaftiques qui def-
fervent les cures , rétabliffement & confervation
de la clôture des religieufes, correction des moeurs
des eçcléfiaftiques, & toutes autres chofes concernant
la difeipline, ne doivent avoir qu’un effet dévolutif
& non fufpenfif ; c’eft-à-dire , que ces
ordonnances ou jugemens doivent etre executes
nonobflant l’appel, & fans y préjudicier.
Mais fi, fous prétexte de vifite, de cotreélion de
moeurs, ou de maintenir la difeipline eccléfiaflique,
les ordonnances & jugemens rendus par les ordinaires
ou les juges d’églife renfermoient évidemment
des contraventions à la police & aux loix
de l’état, alors le parlement, fur les conclufions
du procureur-général, feroit défenfes d’exécuter ces
jugemens, & l’appel feroit fufpenfif comme dévolutif;
fans cela ce feroit accorder la provifion au
trouble ? tandis qu’elle n’eft due qu’a l’ordre & a la
règle. J
Il faut auffi remarquer que quand 1 appel comme
d'abus eft interjetté par le procureur-général, il eft
toujours fufpenfif, même en matière de correélion,
de difeipline eccléfiaflique, vifite épifcopale, &c.
c’eft une maxime confiante fondée fur ces deux
confidérafions ; i° . que l’article 5 de l’ordonnance
de x 5 3 9 , en difant que les appellations comme d'abus
interjettées par les eccléfiaftiques en matière de correction
& de difeipline, n’auront aucun effet fufpenfif
, ne peut concerner les appels^ interjettes par
le miniftère public : 20. que le roi n’accorde jamais
la provifion contre lui-même, comme le fit voir
folidement M. Joli de Fleuri, avocat-général, à l’oc-
cafion d’un arrêt du 4 juin 1704, rapporte au journal
des audiences. L ’article 10 du meme edit de 16.95
accorde encore l’exécution provifoireaux jugemens
des évêques, relatifs à l’approbation & million des
prédicateurs; & l’article 11 ,à ceux qui concernent
les permiffions de confeffer. L’article 18 déclaré fim-
.plement dévolutifs les appels des jugemens des évêques
pour la confervation de la difeipline & du bon
ordre, dans les monaftères non exempts , & même
dans ceux, qui font exempts, lorfque les fuperieurs
ont négligé d’y pourvoir.
Dans le cas d’appel comme d'abus de la procedure
criminelle commencée contre un clerc, le parlement
ne peut accorder de défenfes d’executer les
décrets, même d’ajournement perfonnel, ni ordonner
que le prifonnier fera élargi, que fur le vir
des charges & informations : & quand il y a un decret
de prife-de-corps, les eccléfiaftiques accufés ne
peuvent faire aucune fonélion de leurs bénéfices &.
de leur ordre , même après avoir obtenu des arrêts
de défenfe, que l’appel n’ait été jugé définitivement ,-
ou que le juge d’églife ne leur ait permis de faire
ces fondions. C ’eft ce qui réfulte de l’article 40 de
l’édit du mois d’avril 1695.
De l'intimation & prife à partie des évêques^ ou de
leurs officiaux. Par l’édit d’oélobre 162.5 9 & ^article
43 de celui de 1695 , les archevêques, évêques ,
ou leurs grands-vicaires ne peuvent être pris à partie
pour les ordonnances qu’ils ont rendues dans les
matières qui dépendent de la jurifdiélion volontaire;
on peut feulement les intimer. Mais ils peuvent être
pris à partie pour les jugemens qu’eux ou leurs officiaux
ont rendus, & que les promoteurs ont requis
dans les affaires qui regardent la jurifdiélion con-
tentieufe. Dans l’un & l’autre cas la prife à partie
ou l’intimation ne peut avoir lieu, fi ce n’eft lorf-
qu’il y a calomnie évidente, & lorfqu’il n’y a aucune
partie capable de répondre des dommages &
intérêts, qui ait rçquis ou qui foutienne leurs ordonnances
ou jugemens. Ils ne font tenus de défendre
à l’intimation, qu’après que les cours l’ont
ainfi ordonné en connoiflance de caufe. On peut
également prendre à partie 1 official & le promo-,
teur, lorfqu’ils ont agi d’eux-mêmes, fans être requis
, & qu’ils ont malverfé & calomnié ; alors on
les intime feuls en leur propre & privé nom. Lorf-
qu’on interjette appel comme dabus d’une fentence
de l’official , rendue à la requête feule du promoteur
, on peut intimer l’évêque, en fon propre &
privé nom, fans le prendre à partie, parce qu’on
ne regarde pas les promoteurs comme capables, en
cette qualité, de comparoître au parlement, &
qu’airifi que les procureurs fifeaux , ils n’ont aucune
tondion devant les juges fupérieurs: par cette raifon,