
payer à leurs feigneurs eu certaines circonftances particulières*
Il paroît que les feigneurs ont- introduit ces aides
à l’exemple des patrons de l’ancienne Rome, qui
recevoient des préfens de leurs cliens & de leurs
affranchis en certains cas , comme pour doter leurs
filles, ou en certains jours folemnels, comme celui
de leur naiflànce. .
Uaide diffère de la taxe,. en ce que la taxe s’ioi-
pofe dans quelque befoin extraordinaire 8c preffant,
au lieu que l'aide n’eft exigible qu’autant qu’elle eft
établie, & dans les cas marqués par la coutume.
Origine des aides , 6» des cas oit elles font dues.
Dans l’origine , les aides étoient libres 8c volontaires
, elles ne dépendoient que de l’honnêteté & de
la courtoifie des vaflàux. C etoient des préfens que
nos rois recevoient dans des circonffances extraordinaires
, 8c qu’à leur imitation les feigneurs reçurent
dansjes mêmes circonffances. Auffi ces aides étoient
appellées libres & gracieufes , loyaux-aides , coutumes
volontaires, droits de comp'laifance , elles font même
ainfi qualifiés dans un arrêt du io juillet 1624. Mais
ces aides ont été enfuite réglées par des conventions
paffées entre les feigneurs 8c leurs vaffaux, ou
par les coutumes lors de leur réformation.
aide étoit principalement due dans quatre cas,
lorfque le feigneur étoit fait prifonnier , lorfque lui
ou fon fils étoit reçu chevalier, lorfqu’il marioit fa
fille aînée, lorfqu’il partoit pour le voya'ge d’outre-
mër. C ’eft par rapport à ces quatre motifs pour lef-
quels les feigneurs exigoient une aide de leurs vafi j
faux, que l’on trouve fréquemment dans les auteurs
le droit à'aide fous la dénomination de la taille aux
quatre cas.
Mais outre ces aides que le feigneur avoit le droit
d’exiger, on connoiffoit encore des aides ràifonna-
bles y que les vaffaux étoient obligés de fournir aux
feigneurs dans de certaines néceflités imprévues, 8c
pour raifon defquelles on les taxoit au prorata de
leurs facultés.Telles étoient par exemple, celles que
l’on nommoit, aides de l’ojl & de chevauchée , qui
étoient des fubfides dus au feigneur, pour-l’aider à
fubvenir aux frais d’une guerre, elles étoient payées
par tous ceux qui nepouvoientle fervir en perfonne.
U aide efb-elle due dans toutes les provinces du royaume
? Dans les pays de droit écrit on ne paie le droit
dû aide, que lorfqu il eft fondé en titre.
Quelques auteurs ont prétendu que lorfque le
titre donne au feigneur le droit de taille en général,
ou à volonté ,’à merci ou à miféricorde , ou le droit
de taille haut 8c bas, ils font en droit de lever la
taille aux quatre cas. Mais nous ne penfons pas que
cette opinion foit bien fondée, Il faut s’en tenir
ffridement aux difpofitions contenues dans le titre ,
8c les vaffaux & cenfitaires ne peuvent être contraints
à payer d’autres redevances, que celles auxr
quelles ils ont été affujetfis.
Les termes même de taille à volonté, & aux cas
accoutumés , ne peuvent .s’étendre à la taille aux
quatre cas : le fens naturel de ces mots eft d’exprimer
qüe la taille eft duefuivant l’ufage ordinaire,
& impofable à la volonté du feigneur , parce qu’au*
trefois le feigneur faifoit annuellement le rôle de
la taille qui lui étoit due 8c en fixoit la quotité fuivant
les facultés des contribuâtes. Depuis , l’ufage s’eft:
introduit de déterminer cette quotité fur l’eftimation
d’experts.
En fécond lieu , les termes aux cas accoutumés
pourroient s’entendre non des quatre cas, mais de
ceux pour lefquels- il eft d’ufage dans le pays d’im-
pofer le taillable. Cela eft conforme à la jurifpfu-
dence du parlement de Paris ; mais celui de Bor-
deaux admet que le mot de toutes les tailles, comprend
la taille annuelle, celle à volonté , & celles
aux cas extraordinaires.
Dans lçs pays coutumiers les aides ne fe-paient
que lorfqu’elles font établies par la coutume, & de la
manière dont elle les a prefcrites. Celles qui contiennent
ces droits, font Bourgogne , Franche-Comté,
Amiens , Boulenois, Artois , Anjou, le Maine ,
Bretagne, Loudunois , la Salle-de4’Ifle, Ponthieu,
Beauquefne, Dourlens, Normandie, T ours, Poitou,
Bapaume , Auvergne, Bourbonnois, & la Marche,.
Précis des difpofitions de chaque coutume. Dans les
coutumes de Bourgogne 8c de Franche-Comté , le
droit Y aides eft dû au feigneur dans les quatre cas M
le premier pour payer fa rançon , lorfqu’u a été fait
prifonnier ; le fécond lorfqu’il eft fait chevalier ; le
troifième lorfqu’il marie fa fille aînée, & le quatrième
lorfqu’il fait le voyage d’outre-mer. Il fe fixe dans
tous ces cas, à la fomme que produifent toutes
les redevances, feigneuriales d’une année /enforte
que fi elles montent à une fomme de cent livres ,
le droit d'aide fera également de cent livres. Mais f>
les redevances feigneuriales fe paient en nature, on
eftimera la valeur des fruits, fuivant le prix courant
de 1 année, parce que Y aide doit toujours être payée
en argent.
Dans la coutume du Boulenois, le droit d’aide eft
égal à la fomme due pour le relief de fief ; mais il
n eft exigible qu’une feule fois dans la vie du feigneur ,
foït pour le mariage de fa fille aînée, foit lorfque
fon fils eft fait chevalier ; il eft à fon choix de
l’exiger dans l’un ou l’autre cas.
Les coutumes d’Amiens & de Dourlens ne l’accordent
auffi qu’une fçulç fois pendant la vie du feigneur
& à fon choix , pour les deux cas exprimés dans
celle du Boulenois ; elles en fixent la quotité à une
fomme de dix livres , pour les fiefs tenus en pairie,
8càfoixante fols pour les fiefs tenus en plein hommage
& non pairie,
La coutume de Normandie accorde au feigneur
le doit d'aide lorfqu’il fait fon fils chevalier, qu’il
marie fa fille aînée, & qu’il eft fait prifonnier. Elle
appelle .ces droits d}aide aides-chevets, parce qu’ils
ne font dus qu’au chef-feigneur, c’eft-à-dire, à celui
qui poffède par foi 8c hommage, & qui, à caufe
•de fon fief, tombe en garde-. *
La coutume, ne s’explique pas fur la fomme à
laquelle Yaide doit monter ; mais Bafnage, 8t les
antres commentateurs eftiment qu’elle ne peut pas
être plus forte que Y aide de relief que cette coutume
donne encore aux héritiers d’un feigneur, pour leur
fournir la fomme dont ils ont befoin pour payer
eux-mêmes le relief du fief qui leur eft échu par
la mort de leur parent. Or- ce droit d'aide-relief eft.
de la moitié du relief qui feroit dû pour le fief
fervant. ~
En Bretagne, le vaffal doit à fon feigneur le droit;
dtaide, lorfqu’il marie l’une de fes filles, que lui
ou fon fils aîné eft fait chevalier , lorfqu’il a été
fait prifonnier, & lorfqu’il achète ou qu’il retire les
héritages mouvans de fon fief ou de fa cenfive. Dans
les trois premiers cas , Y aide eft du prix de la rente
fegineuriale * pour la rançon , Y aide n’eft due qu’a-
près que les meubles du feigneur ont été épuifés .
pour la payer, & le furplus de la rançon s’impofe
fur chaque vaffal, en proportion du bien qu’il pof-
iede. Au cinquième cas, Y aide n’eft pas un don , mais
une fimple avance, faite par lé vaffal, de la rente
qu’il doit au feigneur , 8c dont celufici doit lui donner
quittance.
, Les coutumes d’Anjou & du Maine n’acsordent
aux feigneurs les droits d'aide qu’en trois cas : lors
du mariage de fa fille , lorfqu’il eft fait chevalier,
ou qu’il eft prifonnier. Il ne peut les lever qu’une
feule fois en fa v ie , & ils confident dans le doublement
des devoirs de fes hommes, lorfqù’ils n’excède
pas la fomme .de vingt-cinq fols, autrement ils
ne furpaffent jamais cette fomme, à quelque quantité
qu’ils montent.
La coutume de Tours accorde lesdroits S aides
dans les mêmes cas que celles d’Anjou 8c du Maine
; mais elle ajoute que fi deux ou trois cas arrivent
dans la même année*, le feigneur ne doit pas
les exiger dans la même année, mais feulement un
droit chaque année: elle défend à tout non-noble
de les demander, & indiftinélement à tous de les
céder, tranfporter ou donner à ferme , parce que
ce droit n’eft accordé qu’à la perfonne du feigneur,
uniquement pour fes befoins particuliers & extraordinaires.
Le droit Y aide eft fixé, pour les fiefs fujets
aù fervice , à la tierce-partie du fervice, 8c au quinzième
du revenu que le , vaffal retire de fon fief5
8c à l’égard des fiefs non fujets à fervices, ainfi qu’à
l ’égard des cens & rentes inféodées, au cinquième
du revenu de l’année, .
La coutume de Loudunois contient les mêmes
difpofitions que celle de Tours, 8c elle fixe le
droit , lorfqu’il n’eft pas abonné, à la trbifiëme
partie du fervice outre le fervice, 8c s’il i^’y a pas
de fervice, à la feptième partie du revenu du fief
pour l’année ; elle le détermine pour le cens &
rentes inféodées, à leur doublement, s’ils nepaf-
fent pas vingt fols , & à cette même fomme lorf-
qu’ils font plus confidérables.
La coutume de Poitou donne au feigneur le droit
de lever Y aide dans les quatre cas, 8c chacun eft
fixé à la quatrième partie du revenu du fief, de ce
que le vaffal leveroit en fa main* déduit le droit
du laboureur. Les quatre cas arrivant la même année
, le feigneur n’en doit lever qu’un par chaque
année. Cette coutume accorde au feigneur, homme
d’églife , un droit d'aide lorfqu’il entre pour la première
fois dans fon bénéfice.
Dans la counime de la Marche, la taille eft due
aux quatre cas, non au feigneur haut-jufticier , fujet
de la comté de la Marche, à caufe de la juftice
qu’il .poffède en Marche , mais au feigneur direét 8t
foncier.
Ce droit YYaide eft fixé pour ceux qui tiennent
en franchife , & à devoir d’argent, à la même fomme
que celle déterminée pour le devoir; mais quant
aux héritages tenus fervement, Y aide felève à la volonté
du feigneur, fuivant les facultés des tenanciers
, & dans le cas de plainte de leur part, elle
eft impofée à dire d’experts. Ceux qui ne doivent
pas d’argent, ne doivent pas auffi Y aide aux quatre cas.
Lorfque le feigneur lève le droit (Yaide, il ne
peut lever dans la même année la quête courante,
mais il perçoit quatre fois Y aide , fi les quatre cas
fe rencontrent dans la même année.
La coutume d’Auvergne eft . celle qui a le plus
étendu le droit à'aide. Elle l’accorde dans les quatre
cas, & en outre elle veut que Y aide fe réitère autant
de fois que le feigneur eft fait prifonnier, 6c
au mariage de chacune de fes filles,. pourvu qu’elles
foient mariées hors de fa maifon 8c dotées. La
veuve même du feigneur peut l’exiger dans ce dernier
cas.
| Les quatre cas arrivant dans la même année, les
quatre droits ne doivent être perçus qu’en quatre
ans.^Chacun de fes droits eft fixé à une fomme de
trente fols par feux , qui doivent être égalés & répartis
fur les fujets : mais les veuves, les mineurs
8c autres perfonnes miférables, en font exempts.
Dans la partie de l’Auvergne, qui eft fituée entre
les rivières de Cher 8c de Sioule,la taille aux
quatre cas eft due au feigneur direét, 6c non au
feigneur haut-jufticier :ce droit eft fixé par la coutume
locale, au doublement du cens.
La coutume -de Bourbonnois rte diffère guère
de celles d’Auvergne 6c de la Marche, elle donne
le droit d'aide dans les quatre cas, le déclare réité-
rable pour la rançon, le fait confifter dans le doublement
de la taille réelle 8c perfonnelle, 6c lorf*
qu’il fe rencontre plufieurs cas dans la même année,
elle ordonne qu’ils feront partagés en différentes
an n é e sd e manière qu’il n’en foit payé qu’un par
chaque année.
En Artois, il eft dû au feigneur haut-jufticier 8c
vkomtier , lorfqu’il marie fa fille aînée, ou que fon
fils aîné eft reçu chevalier. Ce droit eft le même
que celui de relief fans chambellage.
Saint-Omer 6c Bauquefne ont adopté les mêmes
difpofitions.
Bapaume n’en diffère qu’en ce qu’elle n’accorde
ce droit qu’au, feigneur haut-jufticier, 6c non au
feigneur vicomtier.
Dans le Ponthieu, le droit d'aide eft dû dans trois