
eft précife. La jurifprudence, depuis la guerre de
1755 , a admis une interprétation favorable à cette
difpofition en faveur des affureurs, en obligeant les
aflùrés d’augmenter leur prime dé affurance, fuivant
le taux ordinaire de la place en temps de guerre.
Nous en parlerons plus au long en traitant de la
prime déaffurance , ci-deffous, cinquième objet qui constitue
Veffence de V affurance.
Durée des rifques. La durée des rifques eft ordinairement
fixée par la police déaffurance : & , dans
ce cas, il faut fuivre ce qui y eft réglé. Quelquefois
elle eft faite pour le voyage feulement, quelquefois
aufli pour le voyage & le retour. Dans ce
dernier cas, les affureurs font tenus des rifques
jufqu’au retour du vaifleau. Mais fi les parties ne
fe font pas expliquées fur ce dernier objet, Y affurance
n’eft cenfée faite que pour l’aller, & non pour
le retour.
lé affurance fe fait aufii" pour un temps limité
fans défignation de voyage ; par exemple , pour
fix mois, à dater du jour que le vaifleau mettra à
la voile. Dans cette efpèce, les aftureurs font déchargés
de tous les rifques après l’expiration du
terme fixé ,'fauf à indemnifer, de leur part, les affinés
, pour les pertes Sc avaries arrivées auparavant.
Lorfque Y affurance eft faite pour un voyage dé-
figné, quoique le temps en ait été réglé par la police
, les affureurs ne font néanmoins déchargés des
rifques qu’à la fin du voyage; mais ils font autorifés
à demander une augmentation de prime, en proportion
du temps que le voyagea excédé le terme
porté par la police.
Lorfque les parties ne fe font pas expliquées fur
le temps où les rifques commencent à courir pour
le compte des aftureurs, l’ordonnance décide que
ce temps commence, à l’égard du vaifleau, de fes
agrèts, apparaux & viéhiaHies, au moment où il
met à la voile, & qu’il dure jufgu’à ce qu’il foit
ancré au port de fa deftination, &. amarré au quai.
A l’égard des marchandifes, les rifques regardent
les aftureurs, dès qu’elles font chargées fur le vaif-
feau ou dans les gabarres pour les y porter, & il
dure jufqu’à ce qu’elles foient mifes à terre fur le
quai du lieu de leur deftination. Ce qui a lieu non-
feulement pour les marchandifes, chargées au port
du départ du vaifleau, mais encore pour celles qui
fout chargées dans tous les endroits ’où il fait,
échelles, & où il doit relâcher fuivant la police dé affurance.
Nous avons dit que les affureurs, pour l’aller & le
retour, étoient tenus des rifques jufqu’à l’inftant du retour
des marèhandifes. Mais néanmoins lorfque le
temps du retour n’eft pas fixé par la police déaffurancei
les aftureurs ne font pas tenus indéfiniment4des rifques
de ce retour. La jurifprudence de l’amirauté
de Paris, confirmée par deux fentences rendues en
mai & en feptembre 1765, eft de limiter à l’arbitrage
du juge le temps que doivent durer les rifques
du retour. Cette jurifprudence eft: conforme
à l’équité. Les aftureurs. feroient expofés à être
trompés. Un négociant de maùvàife fo i, après avoir
reçu en entier les retours qu’il a fait* aflùrer, &
dont l’aflùreur ne feroit pas inftruit, pourroit longtemps
après faire valoir cette affurance fur des
marchandifes qu’il àuroit perdues, en difant contre
la vérité, qu’elles font partie de fes retours.
Des pertes 6» dommages jdont les affureurs ne font
pas tenus. i°. Les affureurs ne font pas refponfables
des pertes & dommages arrivés par la fart te des
maîtres & des mariniers ; ils ne font tenus que des
cas fortuits, des accidens de mer qui arrivent par
une force majeure à laquelle on ne peut réfifîer.
Ceft la difpofition de Y article 28 de lé ordonnance.
Cependant ils en peuvent être tenus par une claufe
particulière qui les charge de la baraterie du pafröii jS*
& , dans ce cas, ils font fubrogés de plein droit aux "
aérions des aflùrés contre le maître du navire, &
contre l ’armateur.
2.0. L’article 29 de la même ordonnance décharge
les aftureurs des' diminutions & pertes qui arrivent
par le vice propre de [la chofe ; en conféquence,
ils ne font pas tenus du coulage des marchandifes
qui y fontlu jettes, à moins qu’il n’ait été occafionné
par une tempête. Alors on doit arbitrer ce que le
coulage ordinaire laifle à la charge de l’aflùré, 8c
ce que l’accident de mer doit faire fupporter aux
affureurs.
Par les mêmes principes, les affureurs, pour
1 aller & le retour d’un vaifleau, ne font point tenus
de fa perte, lorfqu’il fe trouve hors d’état de revenir,
par vétufté & pourriture ; il en eft de même
des cables & des voiles ufés de vétufté, des nègres
ou des animaux morts naturellement, même des
nègres qui fe tuent par défefpoir, parce que ces
pertes arrivent par la nature & le vice de la chofe.
Mais il en feroit autrement, fi ces objets viennent à
périr dans une tempête ou dans un combat.
Ÿ ’ Les affureurs ne font pas tenus des frais de
pilotage, louage, lamanage , des droits de congé, de
vifite, de rapports, d’ancrage, ni de tous autres
droits^ dus fur les navires & marchandifes, foit à
l’entrée, foit à la fortie des ports, parce que ce font
des frais ordinäres de voyage , qui font à la charge
du bâtiment & des marchandifes. Mais fi quelque
accident extraordinaire avoit donné lieu à ces frais,,
les affureurs feroient tenus d’en indemnifer les ajf-
flirés. ’
4°. Les affureurs font entièrement déchargés des
rifques, lorfqn’on s’eft écarté de ce qui eft porté
par la policé, fi ce n’eft: de leur confentement ou
en cas de néceflité. C ’eft fur ce motif Se. fur cette
décifion de l’ordonnance, que rfous avofis dit plus
haut que les affureurs n’étoient plus1 refponfables
des dommages arrivés dans le changement de route,
de voyage ou de vaifleau. •
En conféquence de cette difpofition de fordon-
nance,- lorfque Y affurance d’une certaine quantité de
marchandifes a . été faite divifément' fur plufièurs.
vaifieaux défijjnés, & que la charge entière a été
mife fur un (eul des bâtimens, l’aflùreur ne court
l e
le rifque que de la fortune particulière qu’il a affu-
ree fur ce bâtiment, quand bien même tous les autres
viendroient à périr : & il n’eft tenu dans ce
cas qu’à rendre* aux aflùrés la prime dé affurance qu’il
a reçue, pour lès parties de marchandifes qui dévoient
être chargées fur les autres bâtimens, à la
déduélion néanmoins du demi pour cent qu’ils lui
doivent par forme de dommages & intérêts de.
l’inexécution du contrat.
Effence du contrat dé affurance. Quatrième objet. Obligation
des affureurs de pay er la valeur des effets péris.
Il eft de l’effence du contrat <Yaffurance que les affu-
renrs s’obligent de payer une fomme à l’aflùré en
cas de perte des chofes affinées.
Ordinairement cette fomme eft fixée par la police
; mais cela n’eft pas abfolument néceffaire : &
les affureurs n’en font pas moins tenus.de payer le
prix de ' la chofe affurée , fuivant l’eftimation qui
en fera faite.
L'ordonnance défend de faire aflùrer ou réaflù-
rer les effets au-delà de leur valeur par une ou par
plufièurs polices, à peine de nullité du contrat &
de la confifcation des marchandifes. Mais il faut-
diftinguer fi l’affuré l’a fait fans fraude, parce qu’il
ignoroit la véritable valeur des marchandifes, ou
s’il l’a fait feiemment.
Lorfque Y affurance a été portée feiemment par
l ’aflùré au-delà, de la valeur de la chofe, il encourt
le s peines portées par l’ordonnance; mais s’il l’a
fait fans -fraude & de bonne fo i, la police n’eft
pas nulle, elle eft feulement rédu&ible à la fomme
de la véritable valeur de la chofe affurée.
Lorfque la valeur des marchandifes a été portée
par plufièurs polices différentes, au-delà de leur
jufte eftimation : s’il s’agit, par exemple, d’une
fomme au total de quarante-cinq mille livres, pour
laquelle l’aflùré a pris trois affureurs différens : un
premier pour quinze mille livres ; un fécond oour
vingt mille livrés; un troifième pour vingt-cinq
mille livres. Dans le cas de la perte totale des
chofes affurées, le premier affureur fera tenu de
payer les quinze mille livres contenues dans fon
affurance ; le fécond, vingt mille livres; Y affurance
du troifième fera réduite à dix mille livres, qui
forment le reftant de la valeur des chofes affurées ,
puifque les deux premières affurances montoient à
celle de trente-cinq mille livres. Mais fi la perte
n’eft pas totale, elle fera fuppoftée au marc la livre
par les trois affureurs, c’eft-à-dire, que chacun d’eux
paiera la moitié ou le tiers de fon 1affurance, fi la
perte monte à la moitié ou au tiers des chofes affurées.
Celui qui a fait aflùrer fes effets pour une fomme
au-delà de leur valeur, eft toujours cenféTavoir
fait de bonne foi & par ignorance, parce que la
fraude ne fe préfume jamais. C’eft donc aux aflù-
reurs à la prouver, lorfqu’iis Faïlèguént, & demandent
en conféquence la nullité de Y affurance.
Il arrive affez fréquemment qu’on fait aflùrer un
chargement d’une manière indéterminée pour une
Jurifprudence. Tome I.
fomme moindre que fa valeur. Dans le cas de la
perte d’une partie de ce chargement, les rifques fe
partagent entre l’aflùreur, au prorata de la lomme
qu’il a affurée, & l’affuré pour le furplus. Ainfi,
en fuppofant.le chargement de vingt mille livres,
& Y affurance de quinze mille livres, l’aflùreur fup-
portera les trois quarts de la perte, & l’aflùré, l’autre
quart ; la raifon eft qu’il n’eft pas jufte d’attribuer
la perte de la partie des effets péris à l’aflùreur
plutôt qu’à l’aflùré, & qu’on ne peut pas dire qu’elle
eft une portion des effets aflùrés, ou de ceux qui
ne le font pas.
Mais qu’arriveroit-t-il fi i’affuré retiroit du bâtiment
une partie de fes marchandifes, & n’en eût laiffé
que poür la fomme de quinze mille livres ? Dans
le cas de la perte entière du refiant, l’aflùreur eft
tenu de payer les quinze mille livres portées par la
police, puifqu’il eft obligé de payer cette même
fomme , quand bien même l’aflùré n’auroit tiré aucune
partie de fes effets. Mais, dans le cas d’une
perte particulière ou d’avaries, l’aflùreur eft-il bien
fondé à foutenir qu’il ne doit contribuer que pour
les trois quarts? Valin penche pour la négative,
parce que, dit-il, ce n’eft que par accident que l’aflù-
reur eut partagé les pertes & avaries avec l’aflùré,
s’il n’eût rien retiré du navire, & que d’ailleurs
l’aflùré ne s’eft pas interdit la faculté de débiter
partie de fes marchandifes pendant le cours du
voyage. D ’autres jurifconfultes penfent au contraire
que l’affureur a intérêt à ce que toutes les marchandifes
reftent dans le bâtiment, afin que les pertes
& avaries fe partagent, foit avec l’affuré, foit arec
un fécond affureur que l’aflùré auroit pu prendre*
Pothier, dans fon Traité des Affurances, propofe à
cet égard une diftinétion. très-plaufible. Si l’afiùré,
d it- il, retire une partie de fes marchandifes pour
les débiter dans les ports où le navire relâche, l’af-
fureur ne peut s’en plaindre, & c’eft le cas d’appliquer
la décifion de Valin; mais fi l’affuré, lorfque
le navire eft prêt d’arriver au port, fait déchar-'
ger une partie de fes marchandifes pour les fouftraire
au danger des avaries qu’il y a lieu de craindre,
la perte arrivée fur les marchandifes reliées à bord
du navire, fera fupportée au marc la livre par l’af- '
fureur & l’aflùré.
Cinquième objet de Veffence du ‘contrat déaffurance s
la prime. De même qu’il eft de l’effence du contrat
dé affurance, que l’aflùreur s’oblige de payer la valeur
des chofes affurées, il eft également de fon
effence que l’aflùré donne ou s’oblige de donner
à l’afîùreur une fomme pour le prix des rifques
dont il fe charge.
On lui a donné le nom de prime, parce qu’elle
fe payoitprimo & avant tout, même avant que le
départ du vaifleau eût fait commencer les rifques,
C ’eft même une difpofition de l’ordonnance, tit. 6„
Mais l’ufage a prévalu de ne la plus payer comptant
: l’affuré donne à l’affureur un billet payable à
une certaine échéance que l’on appelle billet de
1 1 « y w