
fur le tillac : le maître du navire eft feul refpon-
iable vis-à-vis leurs propriétaires, lorfqu’ils ont été
jettés , parce qu’on prèfume qu’il y a de fa faute
de les avoir reçus , & de ne les avoir pas placés
d’une manière convenable. En effet, s’ils font ref-
tês fur le tillac à défaut d’autre place , le maître a
furchargé fon bâtiment , & cette furcharge a pu
être la caufe du jet ; s’il y avoit facilité de les arranger
ailleurs, le maître efl encore en faute de les
avoir abandonnés fur le tillac , & on préfume alors
qu’ils n’ont été jettés , que parce qu’ils embarraf-
ioient la manoeuvre.
Dans le cas du je t , la contribution a lieu, i °. de
la part des propriétaires du navire, pour la moitié
. de la valeur du vaiffeau, & pour la moitié du fret
qui leur efl dû pour le voyage ; 2°. par les propriétaires
des marchandises confervées , au prorata
de ce qu’ils en ont » & eu égard à leur valeur au
temps de la contribution , déduélion faite du fret
■ qui efl dû par rapport à elles ; 30. par les propriétaires
des marchandifes jettées, qui font confufion
fur la fomme qui leur eft rembourfée, de ce qu’ils
doivent contribuer eux-mêmes fur la perte totale ,
en proportion de la valeur de leurs marchandifes ;
4°* par les paflagers , pour leurs hardes & leurs
■ bijoux ; car quoique ces chofes ne chargent pas le
vaiffeau , elles font également confervées par le jet.
? Les matelots font difpenfés de cette contribution,
pour leurs loyers & pour leurs hardes ; &
cette prérogative leur efl bien due, parce qu’on doit
attribuer la confervarion du vaiffeau aux fervices
extraordinaires qu’ils ont rendus dans l’accident qui
a donné lieu au jet.
Les munitions de guerre ou de bouche ne font
pas également fujettes à la contribution, ainfi que
les perfonnes des paffagers.
Pour établir la contribution, on compofe deux
maffes : l’une de la perte des marchandifes, & l’autre
de la valeur du bâtiment & de fa cargaifon.
Si l’on fuppofe le bâtiment, le fret & les marchandifes
de la valeur de 200000 liv ., & les .
marchandifes jettées de celle de 20000 l i v . , la
perte fupportée par chacun de peux qui doivent ,
contribuer , fera du dixième de la valeur des effets
qui lui appartiennent, & les propriétaires des marchandifes
jettées feront confufion fur eux-mêmes
du dixième de la valeur de leur perte ; ainfi , ils
ne recevront que 18000 liv.
Il faut toujours fe reffouvenir que l’eflimation
des marchandifes jettées , ainfi que de celles qui
ont été conferVées , doit fe faire, eu égard à leur
valeur , dans le lieu & dans le temps du. débarquement
& de la décharge du navire, & fi aucun
des contribuables refufe de payer la part qu’il doit
fupporter, le maître peut , pour fureté de la contribution
, retenir & .même taire vendre , par autorité
de juflice , des marchandifes , jufqu’à concur-,
rence.de leur contribution.
Le propriétaire des marchandifes jettées à la
mer , n’eft pas cenfé en avoir abdiqué le domaine; ,
c efl pourquoi s’ils font par la fuite retirés , fort
par des plongeurs , foit par des pêcheurs , il a toujours
le droit de les réclamer. S’il en recouvre la
pofTefïion, avant que la contribution ait eu lieu pour
raifon de leur jet , elle eft alors réductible à la
fomme dont on eftimera qu’elles ont été dépréciées „
& aux frais qui ont été néceffaires pour leurs recouvrement
; fi au contraire la contribution a déjà
eu lieu , il eft tenu de reftituer aux intérefles ce
qu’il a reçu d’eux, déduélion faite pareillement du
dommage qui lui a été caufé per le jet, & des
frais de recouvrement.
Des chofes données par compofition aux pirates.
Une des avaries communes qui arrive le plus ordinairement
, réfulte des chofes données par çom-
pofition aux pirates ou aux corfaires, pouf le rachat
du navire & des marchandifes. Comme cette
perte n’eft foufferte que pour empêcher le navire
de tomber entre les mains de l’ennemi , elle devient
une avarie commune à tous ceux qui ont
intérêt à la confervarion du vaiffeau & de fa cargaison
, & ils font tenus de contribuer à indemnr-
fer.celui fur lequel la perte efl effectivement tombée
, de la même manière que dans le cas de \avarie
ôccafionnée par le jet d’une partie des marchandifes;
Mais il faut bien remarquer que l’ordonnance
ne donne la qualité d’avarie commune , qu’aux chofes
données par compofition pour le. radii.-: du navire.
Il en feroit autrement, fi le corfaire ou pirate
, après s’ètre emparé du bâtiment , s’étoit fait
donner les effets les plus précieux fans aucune compofition
, & l’eût enfuite relâché avec le refte de
fa cargaifon : le pillage feroit alors regardé comme
une avarie fimple, qui doit être fupportée en entier
par les propriétaires de ces effets.
Dans cette efpèce, comme dans celle du jet des
marchandifes , la contribution n’a lieu que dans le
cas où la compofition a effectivement procuré la
confervarion du navire; mais fi le corfaire, «contre
la foi donnée, s’emparoit du vaiffeau ou le pil-
loit en entier , ceux qui auroient pu fauver quelques
effets du pillage , ne font tenus en aucune
manière d’indemnifer les propriétaires des chofes
données par compofition..
Dans le cas du rachat du navire , la contribution
fe fait de la même manière que dans le cas
du jet ; avec cette différence néanmoins, que le propriétaire
du navire contribue pour la totalité de la
valeur du navire & du fret , fous la déduélion
des viéluailles confommées & des avances. faites
aux matelots, & c’eft avec raifon, puifque le fret
n’efl un profit pour les propriétaires du. navire ,
que fous cette déduélion.
Une fécondé différence , entre cette contribution
& celle qui a lieu pour le jet , confifle en
ce que les matelots font tenus de contribuer à
proportion de ce qui leur refte dû de leurs loyers.
La raifon qui les y fait affujettir, vient de* ce que
le rachat du navire leur conferve -la liberté, qu’ij*
Sturoient perdue, fi le vaiffeau n’eût pas été racheté.
Cette contribution des matelots ne profite pas
aux propriétaires de la cargaifon , mais feulement
au maître du navire ; ils lont affez avantagés de
ce que ce dernier contribue au rachat, pour le total
& du navire & du fret. C ’eft pourquoi la maffe
de la contribution fe partage d’abord entre le maître
& les marchands, au prorata de la valeur ref-
peélive du vaiffeau, du fret & des marchandifes :
après cette opération, le maître fait fupporter à chaque
matelot une partie de fa contribution particulière
, en proportion de ce qui lui efl dû pour
fes loyers.
De la perte des cables , ancres * mats , &c. Nous
avons d it, au commencement de cet article, que
la perte des cables , des ancres , des voiles , des
mâts & des cordages étoit une avarie particulière ,
qui ne tomboit que fur le maître ou le propriétaire
du navire. Cependant toutes les fois que cette
perte a été occafionnée pour le falut commun ,
elle devient une avarie commune à laquelle tous
les intérefles à la confervarion du bâtiment doivent
contribuer ; mais alors le maître doit faire confta-
ter , par l’avis des principaux de l’équipage , la
néceflité de jetter ces objets à la mer , & obier-
ver toutes les formalités que nous avons détaillées
en parlant du jet des marchandifes.
Des panfemens & nourritures des matelots blejfés.
Nous ayons déjà dit que les panfemens & nourritures
d’un matelot bleffé dans un combat foute-
nu pour la défenfe du navire , étoient une avarie
commune à tous les intérefles : il importe peu que
le matelot ait été bleffé , foit en combattant, foit
en manoeuvrant pendant le combat.
L’ordonnance ne parle que des matelots ; mais
il eft jufte d’en étendre les difpofitions à tous les
gens de l’équipage, même au maître , & aux paffagers
qui ont pris les armes à fa requifition.
La contribution, pour cette efpèce d'avarie , doit
avoir lieu pour ce qu’il en aura coûté au maître,
s’il a été obligé de prendre de nouveaux matelots
pour remplacer ceux qu’il a perdus dans le combat
, parce que ce font des frais nèceflâires pour
la confervarion du navire & des marchandifes ,
qu’il n’eft pas jufte de faire fupporter au maître
feu l, qui efl tenu de payer aux héritiers du matelot
, mort en combattant, les loyers qui lui font dus.
■ Autres efpèces d’avaries. Lorfqu’un maître de navire
le fait échouer fur une cote , pour éviter là
pourfuite d’un pirate ou d’un corfaire , le dommage
caufé par l’échouement, foit au navire , foit aux
marchandifes, eft une avarie commune , puifqu’rl
a été fait pour le falut commun.
Il en eft de même des frais faits pendant le fé-
jour d’un navire dans un port , ou fous une citadelle
, en fuyant des vaiffeaux ennemis , ils font
cenfés avaries communes, parce que c’eft pour le
falut commun que le maître s’y eft réfugié, & y
xefte pendant le temps du danger.
De l’abordage. Le dommage caufé à un navire,
par l’abordage & le heurt d’un autre , eft une ava-
fie dont le maître paroîtroit ne devoir pas être
tenu envers les marchands , lorfqu’il n’y a point
eu de fa faute , & qui devroit être mis au rang de»
cas fortuits, dont perfonne n’eft refponfable.
Cependant l’ordonnance de la marine oblige les
maîtres des deux vaiffeaux , de fupporter egalement
le dommage arrivé par l’abordage, lorfqu’oa
ne peut juftifier par la faute de qui il a été occa-
fionné. Voye^ A b o r d a g e .
AUBAIN , f. m. A u b ain e , f. f. ( Droit civil. \
AuBAINETÉ & AUBANITÉ , f. f. ( termes de Coutume. J
On appelle aubain , dans notre jurifprudence ,
tout étranger , non naturalifé , qui habite dans le
royaume , foit qu’il y ait fixé fon domicile , foit
qu’il n’y faffe que paffer en voyageant ou autrement
: on donne auffi le même nom à celui qui
eft forti du royaume , & qui a renoncé à fa patrie
, en s’établiffant en pays étranger. Aubains , dit
Loifel, font étrangers qui font venus s’habituer dans
ce royaume , ou citoyens qui , en étant natifs , s’en
font volontairement étrangés.
On appelle aubaine, aubaineté ou aubanité, le droit
en vertu duquel le Souverain recueille la fuccef-
fion d’un étranger qui n’eft point naturalifé, ou qui,
étant naturalifé, ne laifle aucun parent régnicole,
lorfque cet étranger n’a pas difpofé de fes biens,
foit par- donation entre - v ifs , foit par teftament.
Ancienneté au droit d’aubaine. M. le Bret fait remonter
l’origine du droit $ aubaine au temps où les
hommes commencèrent à former des fociétés, & il
prétend que la crainte qu’ils eurent de leurs voi-
fins, les fit renoncer à toute communication & à
toute habitude avec eux. On ne peut nier que les
monumens des plus anciennes républiques prouvent
l’exiftence delà haine ou de la crainte qu’on avoit
des étrangers.
. Les Athéniens n’avoient'aucun égard pour eux;
ils condamnèrent Trafibule à une amende de dix
talens pour avoir donné le droit de bourgeoifie â
Lifiàs, Syracüfain, qu’ils chaflerent de leur ville.
Ils n’admettoient'dans-leur pays que ceux qui avoient
été. bannis à perpétuité de leur patrie, ou ceux qui
venoient s ÿ établir avec toute leur famille pour y
exercer quelque métier : & même, dans ces deux
cas, l’étranger étoit privé de plusieurs privilèges
dont jouiffoit le citoyen, & une partie de leur fuc-
ceflion appartenoit au fife.
Plutarque, dans là vie d’Agis, dit que ceux de
Sparte, & la plupart dès peuples de la Grèce ea
ufoient avec beaucoup dé rigueur envers les étrangers,
dans la crainte qu’ils ne cherchaflent à découvrir
les fecrets de l’état, ou qu’ils ne corrompiffent
les moeurs de leurs citoyens.
Dans les premiers temps de la république romaine,
il étoit défendu à tous étrangers, même à
leurs plus proches voifins, de s’établir dans la ville
de Rome, fous peine de la vie. On les toléra dans
la fuite : mais ils ne participèrent jamais aux privilèges
des citoyens,