
L'appel en tant que de befoin eft un appel indéterminé
qu’on interjette pour obvier aux avantages que
la partie adverfe voudrait tirer d’une fentence : on
V ajoute ces mots, en tant que de befoin, pour que
l’appeliant ne foit pas condamné aux dépens qu’il
eft obligé de fupporter dans un appel déterminé,
lorfqu’il n’obtient pas gain de caufe fur fon appel.
Des jugement dont on peut interjetter appel, & des
perfonnes qui peuvent appelles. C ’eft une règle générale
en France, qu’on peut interjeta appel de toute
efpèce de jugement d’un juge inférieur, lorfqu’il
na pas .le pouvoir de juger en dernier reffort : il
importe peu que le jugement foit interlocutoire,
c eflva-d-re-, d infiruff ion, ou qu’il foit définitif : en
ce point, notre jurifprudence diffère de la jurifpru-
■ dçncje romaine,qui n’admettou l’ap^r/d’un jugement
interlocutoireque quand le grief étoit .irréparable
en 'définitif.
Les Romains feconnoiffoient auffi des nullités de
droit, enforte qu’une fentence qui en étoit infeflée,
ne pouvoir palier en force de chofe jugée,, & n’avoit
pas befoin d’être réformée par Vappel. Nous ne con-
noilfons pas ces fortes de nullités de droit. Une fem-
rence -vifîblement nulle & iajufte doit être, attaquée
par la voie de l'appel.: le juge fupérieur peut feul
en connoître , .& la déclarer nulle.
On ne peut plus appeller d’une fentence qui a
palfé en force de chofe jugée, fuivant cet axiome
de drott : res judicata pro veritate habetur, la chofe
jugée eft une vérité. Un jugement acquiert cette autorité,
lorfqu’on.a laiffé écouler le temps fixé par
les ordonnances pour en interjetter appel, airm qup
nous le dirons dans le paragraphe fuivant, ou lorf-
qu’on a acquiefcé au jugement .d’une manière, foit
tacite, foit expreffe.
, fignification feule d’une fentence fans réferves
ni proteftations fuffit pour empêcher la partie qui l’a
iàit fignifier, d’en interjetter appel par la fuite. Ainfx
toute perfonne qui fe propofe .d’appeller d’un ju- ■
gement à l ’égard de quelque chef qui lui fait préjudice
j ne feroit plus recevable dans fon appel, fi ,
dans la fignification, il ne fait une réferve expreffe de
fe pourvoir contre les difpofitions qui lui font griefs.
On trouve dans la collection de juri (prudence un
arrêt du 13 août 1765, qui appuie cette décifion.
Toutes perfonnes intéreffées à une fentence peuvent
en interjetter appel, quand bien même elles
n’auroient pas été parties dans le jugement , & n’y
auroient pas. aflîfté. Mais tous ceux à qui le jugement
ne porte aucun préjudice d ire â, ne font pas
recevables à en appeller. Cependant lorfque, dans le
cours d’une infiance, on oppofe une fentence rendue
entre d’autres particuliers, & qu’on prétend en tirer
avantage, celui contre qui on foppofe, peut s’en
fendre appellant incidemment & en tant que de
befoin. |
- Les tuteurs, curateurs & autres adminiftrateurs
des biens d autrui peuvent interjetter appel des ju-
gemehs rendus contre- les pupilles, les mineurs &
autres perfonnes dont ils gèrent les biens : ils ne font
[ Pas refponfables de l’événement de Yappel,
lorfqu’ils ont eu la précaution de fe faire autorife*
par une affemblée. de parens , voifins ou amis.
Les maires & échevins, les fabriciens d’une pa-
roifle peuvent également interjetter appel d’un ju-
gement qui porte préjudice à la ville où à la pa-
roifle , après s’y être fait légalement autorifer. Autrement
ils s’expofent à être condamnés aux dépens-
en leur nom, fans pouvoir les répéter contre ceux
dont ils adminiftrenr les biens.
Du temps accordé pour former l’appel. Les loix
romaines avoient fixé des délais pour appeller.
Ils n’étoient d’abord que de deux jours dans fa
propre cai.fe, & de trois pour appeller au nom
dun autre. Juftinien les prolongea jufqu’à dix
jours, après lefquels la fentence pàffoit en force
de chofe jugée.
Parmi nous, avant l’ordonnance de 1667, la la*
cul té d’appeller d’une fentence duroit trente ans,
parce que f-aCtion qui .dérive de la fentence pour
l’exécuter, ne fe preferivant que par trente ans,
il paroifloit raifonnable de ne pas donner de limites
plus étroites à l’a&ion que l’on a pour l’attaquer
par la voie de Yappel.
La longueur de cette aCtion mettoit dans une
incertitude perpétuelle le fort & les biens des fa-
I milles : perfonne ne pouvoit être fur de ce qu’il
poflèdoit, puifqu’il pouvoit être attaqué de nouveau
au bout de trente ans, & voir renverfer fa fortune
& fon établiffement par l’événement d’un procès
qu’il eroyoit éteint par le laps de temps.
Aujourd’hui l’on n’admet la faculté d’appeller d’une
fentence au bout de trente ans, que lorfque cette
fentence n’a été fignifiée ni à perlonne ni à domicile
: mais une fimple fignification à perfonne ou
à domicile reftraint le délai d’appeller au terme de
dix ans, foit entre abfens, foit entre préfens non
privilégiés : & cet éfpace de temps fe compte du
jour de l’exploit de fignification. —
Le délai eft de vingt .ans pour les hôpitaux, les
églifes yles maladreries , les collèges, les univerfirési
Il ne court contre les mineurs, que du jour de
leur majorité, & contrôles abfens pour le fervice
du ro i, qu’après le temps de leur fervice.
L’ordonnance de 1667 a même fourni à ceux qui
ont lieu de craindre un appel, les moyens de forcer
leurs adverfaires de s’expliquer pendant un certain
temps, après lequel la faculté d’interjetter appel eft
éteinte, lorfqu’on a rempli les formalités néceflaires
pour les avenir &*les conftituer en retard.
Ces formalités font d’abord de faire fignifier la
fentence à celui qui a été condamné, avec les forma«
lités des ajournemens à perfonne ou domicile ; en-
fuite , lorfque trois années fe font écoulées depuis
cette fignification, il faut le fommer par exploit
fignifié avec les mêmes formalités, d’en interjetter
appel. S i, après avoir été ainfi doublement averti,
il n’interjette point fon appel dans fix mois de la
fommation à lui faite, il eft par la fuite non-recevable
à le faire*
à p P
Comme tes hôpitaux, églifes, collèges, uiiîver-'
fîtes & autres communautés privilégiées ont toujours
été fous la 'protection des loix d’une manière
particulière, le délai qui doit être entre l'a lignification
de la fentence & la fommation d’en interjetter
appel, eft doublé à leur' égard, c’eft-a-dire ,
qu’il eft de fix ans au lieu de trois. Ces délais, dans
l’un & dans l’autre cas * ne courent pas moins contre
les abfens que contre les préfens ; & il n y a d affranchis
de cette fin de non-recevoir, que les mineurs
, tant que dure leur minorité, & les abfens
hors du royaume» pouf le fervice du roi, ou en
conféquence de fes ordres.
Si celui qui a été condamné, vient à décéder
pendant le cours du délai de trois années, fes re-
préfentans, foit à titre univerfel, foit à titre parti- ;
culier, n’étant point préfumés avoir connoinance |
des procédures faites contre lui, doivent être per- ;!
fonnellement-avertis par une procédure fpéciale, &
on leur accorde un accroiffement de délai pour les
mettre à portée de s’inftruire dès affaires du défunt.
C ’eft pourquoi, outre ce qui refte à expirer du délai
ordinaire, ils ont une année entière, après laquelle
il faut leur faire fignifier la fentence avec fommation
d’en interjetter appel; & la fentence-ne peut
paffer en force de chofe jugée contre eux,, qu’après
les fix mois, à compter de cette nouvelle fommation.
La même chofe a lieu en faveur du fuccef- ■
feur d’un bénéficier qui auroit été condamné, &
qui' feroit mort dans l’intervalle de fix années ; ce
fucceffeùr auroit une année & ce qui refteroit à
expirer des fix années, pour interjetter appel, &
il n’y feroit non -recevable que fix mois après la fommation perfonnelle qui lui en- auroit été faite ;
cette fécondé fommation doit avoir lieu, tant à
l’égard des héritiers & repréfentans d’un défunt,
que du fuccéffeur d’un bénéficier décéd équand
bien même on en auroit déjà fait une première,
foit au défunt, foit au bénéficier mort avant leur
décès , d’autant, que cette première fommation peut
être ‘ parfaitement inconnue à leurs, fucceffeurs ou
repréfentans.
Du temps enh l’appel doit être relevé , & de la défertion
& péremption d’appel. Chez les Romains Fap-
pellant étoit obligé de prendre des lettres démif-
ioires ou libelles d’appellation qu’ils nommoierit
apôtres, dans les trente jours de Y appel ; finon il
étoit cenfé défert, & Ton pouvoit mettre la fentence
à exécution , fi les parties n’avoient pas
tranfigé;
Dans notre jurifprudènce les appellations des
juftices- inférieures doivent être relevées dans les
vingt-quatre jours; il en eft de même de Yappel du
juge-auditeur du châtelet de Paris, dont les appels
fe portent au préfidial. Les appels des bailliages,
portés aux préffdiaux, fe relèvent dans- les quarante
jours, & les appels portés au parlement ont
un délai de trois mois.
Les appellations des fentences rendues dans les
grueries royales doivent être portées aux maîtrifes,
A P P 379
J & pourfuivîes dans la quinzaine, finon les fentences
s’exécutent par provifion ; l’ordonnance de 1669
veut qu’après le mois écoulé fans appel ou fans
pourfuite fur Yappel, les fentences foient exécutées
en dernier reffort, comme ayant paffé en force de
chofe jugée.
Les appellations des maîtrifes portées direâement
aux fièges des tables de marbre, doivent être relevées
dans le mois de la prononciation ou fignification
des fentences, & être mifes en état d’être
jugées dans les trois mois fuivans. Les officiers
chargés de ces appellations font à cet effet tenus
d’en faire leur rapport dans un mois pour tout délai,
après qu’elles leur ont été diftribuées , à- peine d’en
répondre en leur propre & privé nom. Cependant
les jugemens rendus- après l’expiration des délais
fixés par l’ordonnance ne font pas regardés comme
nuis, lorfque les procureurs du roi dans les maî-
trifes. ont occafionné le retard en négligeant d’en-«
voyer aux procureurs, généraux les pièces & mémoires
inftruétifs.
Ce que nous difons des délais fixés pour relever
les appels des maîtrifes des eaux & forêts, reçoit
deux exceptions» La première eft fondée fur l’article
53 de l’édit du mois de mai 17 16 , qui accorde
quatre mois pour faire juger les appellations des
maîtrifes fituées aii-delà de la-Loire.,, qui reffortif-
fent à Paris.
La fécondé eft en faveur dés fentences des maîtrifes,
portant condamnation à peine afflictive ou
infamante : la faculté d’en appeller ne fe preferit,
quant à la peine, que par Yefpace de vingt ans-;
mais elles -s’exécutent après les trois ou quatre mois
pour les amendes pécuniaires &.les condamnations
civiles.-
L’appel des fentences portant condamnation, fort
de paiement des droits des fermes, foit de confiscation
8c. amende pour fait purement c iv il, doit
être relevé par les appellans dans les trois mois ,
à compter du jour de la fignification de la fentence
à perfonne ou à domicile, & ils font tenus de le
mettre en état d’être jugé dans lés neuf mois fuivans.
Dans l’un & l’autre cas, après le délai expiré,
la fentence dont eft appel, demeure confirmée
de plein droit, & paffe pour jugée en dernier
reffort ; l’amendé même de fol appel & les dépens
font dus , dans le fécond c asp ar l’appellant, faute
d’avoir mis fon appel en état d’être jugé..
Quoiqu’il foit vrai que Yappel eft cenfé défert,
lorfque l’appellant néglige de le relever dans les délais
.preferirs par la lo i, la défertion n’a pas lieu
dans les appels comme d’abus & dans les ‘appels
en matière criminelle, parce que ces fortes à!appels
intéreffent le public, & que la négligence d’un particulier
ne peut lui nuire.
La défertion d'appel ne s’acquiert pas de plèin
droit : elle doit être prononcée par le juge. La ju—
rifprudence n’eft pas certaine par rapport à la com«
pétence du juge qui doit prononcer fur la défertion*.
Anciennement le juge dont étoit appel? connoiffoit
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