
que provîfiomiellement ; mais cette préemption
çft-elle bien conforme aux lobe de la nature ? M.
Bernoulli, dans fon traité de ufu artis eonjeüandi in
jure , d eft-à-dire, de l*application du calcul des probabilités
aux matières de jurifprudence , prétend qu’un
abfent doit être réputé mort , lorfqu’il y a deux
fois plus à parier qu’il eft mort, que vivant ; o r ,
fi on applique ce raifonnement aux tables de M.
de Parcieux, Vabfent pourroit être réputé mort à '
quatre-vingt-treize ans, & même à foixante-quinze,
fi l’on s’en rapporte à MM. de Buffon & d’Alem-
bert ; cette préemption nous paroîtroit plus jufte,
& devroit peut-être être admile j par la raifon que
l’époque de-foixante-quinze ans eft à-peu-près le
terme ordinaire & le plus commun de la vie des
hommes, & que, fuivant les loix, les préfomptions
doivent être fondées fur quelques vraifemblances ,
&ffur ce qui arrive le plus communément; mais
puifque nous n’avons pas de loi précife fur cet
objet, il n’y a pas d’inconvêniens , en attendant
qu’il plaife au roi de fixer la jurifprudence, de s’en
tenir à la fuppofition établie par les loix romaines,
& de fuppofer vivant un abfent jufqu’à ce qu’il
ait atteint fa centième année, toutes les fois qu’il
s’agira de fon intérêt, parce que la législation doit
fuivre ici , 8c dans toutes autres conjon&ures
pareilles, la difpofition la plus favorable à l’hu-
manité.
S e c t i o n I I I .
De Vabfent en matière civile.
Sous ce point de vue ,. nous examinerons
trois queftions principales ; de quelle manière
doit-on diriger les actions qu’on a à exercer contre
un abfent ? Ün abfent peut-il partager les fucceflions
qui lui adviennent, 8c dans quel tems fes héritiers
doivent-ils être admis au partage de la fienné ?
Comment la prdeription s’opère-t-elle contre un
ttbfent ?
A bsent , affiliation. L’ordonnance de 1667 veut
que les abfens foient afiignés à leur dernier domicile
connu , pour répondre fur les demandés formées
contre eux : 8c s’ils n’ont ou n’ont eu aucun domicile
connu, qu’ils foient afiignés par un. feul cri
public , au principal marché du lieu de l’établiffe-
ment du fiège où la conteftation doit être portée,
& fans aucune perquifuion de leurs perfonnes.
Avant cette ordonnancé, l’ufoge étoit de créer
un curateur aux abfens, pour répondre aux demandes
formées contre eux ; mais cette formalité a été
abrogée par l’article 8 de l’ordonnance que l’on
vient de citer, & cela avec raifon ; car cette procédure
augmentoit la dépenfe, 8c ne produifoit aucun
avantage à Vabfent , le curateur peu intéreffé à le
défendre, n’en prenoit pas le foin.
On alfigne encore aujourd’hui en Lorraine les
abfens au domicile du curateur en titre, fuivant
l’ordonnance du duc Léopold, de 1707, quis’ob-
ferye toujours ; elle enjoint au curateur de foire
fon poflîble , pour infiruire Vabfent de ce qui fe
paffe.
A l’égard des étrangers, on les envoyoit autrefois
afligner fiir la frontière à fon de trompe : mais
la meme ordonnance de 1667 a abrogé cet ufage ,
& fiatué que les étrangers feroient afiignés aux
hôtels des procureurs-généraux du parlement où
refîortùTent les appellations des juges pardevant
lefquels ils font ajournés.
Par un réglement provifoire du confeil, du 2<j
août 1692 , ceux qui habitent lés colonies françoifes
doivent être ^ également afiignés au domicile dès
procureurs-généraux des cours où reflbrtiront les
appellations des juges devant lefquels l’aflignation
& l’aâion font portées ; il y a cependant une très-
grande différence entre un François qui quitte l’Europe
pour tranfporter fon domicile dans une colonie
françoife, 8c un étranger ; le François ne quitte
pas la domination du ro i, il ufe feulement du droit
acquis atout citoyen, de quitter une province pour
aller habiter dans une autre: or., dans ce cas, le
particulier qui fortiroit du reffort du parlement de
Paris, 8c qui établirait fon domicile en Bretagne,
ne ferait pas alfigne au domicile du procureur-
général du parlement de Paris , après le tems que
les loix exigent pour affurer le nouveau domicile
élu par un citoyen, il ne pourroit être légitimement
afiigné que pardevant le juge de fon nouveau
domicile, fuivant la règle générale, qu’en matière
perfonnelle ou mixte, le demandeur eft obligé de
fuivre le domicile du défendeur. Ne devroit-orr
pas procéder de même à l’égard de celui qui va
s’établir dans les colonies françoifes ? après un ail
de réfidence, il y a acquis un véritable domicile ,
& il devroit y être aifigné en toutes demandes
perfonnelles ou mixtes, 8c cela avec d’autant
plus de raifon, que Taflignation qui lui eft donnée
à l’hôtel du procureur-général eft illufoirè , &
qu’il n’en a jamais connoiffance ; d’où il arrive
qu’un François établi en Amérique - eft prefque
toujours condamné par défaut en France. Nous
favons que cet inconvénient a été remarqué par le
confeil du r o i , 8c nous fommes inftruits qu’on
travaille aéluellement à un nouveau code de loix
pour les colonies françoifes , dans lequel on marquera
d’une manière précife, les cas où les habitans
des colonies devront être afiignés en France ; ceux
dans lefquels ils feront ajournés devant les juges
de leurs domiciles, ainfique la forme & les délais
de ces aflignatîohs.
A bsent ,fucceJfon. Nous avons obfèrvé, au commencement
de cet article , qu’un abfent étoit capable
de fuccéder, 8c que fdriq l’il s’agiffoit de fon intérêt
, il étoit prêfumé vivre jufqu’à cent ans ;
fuivant cette préfomption, Y abfent eft-il faifi de
toutes les fuccefiions qui peuvent lui êcheoir jufqu’à
ce qu’il ait atteint fa centième année, 8c lès
tranfmet-il à fes héritiers ? Gn doit tenir pour certain
que dans les coutumes qui fixent un tems pour là
préfomption de la mort, 8c dans les efpèces-où
les «confiances donnent un fait déterminant fur
le décès de 1'abfent, il tranfmet à fes héritiers les
fuccefiions- qui lui font -dévolues par la loi , )ul-
orfau jour- qu'il eft réputé mort , fon par les coutumes,
foit par la jurifprudence, foit par les cir-
confiances. , c
En fécond lieu, dans les coutumes qui ne fixent
pas la préfomption de la' mort de \ abfent les
fuccefiions qui lui adviennent julqua ce quil ait
atteint l’âge de cent ans , font cenfeeslm appartenir
en vertu de la préfomption qui le fuppole vivre
jufqu’à cet âge, & fe s créanciers peuvent fe venger ■
fur elles de ce qui leur eft du par 1 abfent ; mais
s’il ne reparoît pas, il n’eft pas cenfé en avoir été
faifi, il ne les tranfmet pas à fes héritierspréfomp-
tifs / elles appartiennent à ceux qui, au ^ tems de
leur ouverture, auroient du les recueillir a fon defaut,
parce que toutes les fois qu un abfent^ ne
reparoît pas , il eft réputé mort du jour qu’il a
difparu , ou du jour de la dernière nouvelle qu’on
en a reçue. - .
La raifon de la différence que la jurifprudence
a établie entre les créanciers 8c les héritiers de
Y abfent, fe tire de ce que la préfomption qui prolonge
la vie d’un homme jufqu’à cent ans, n’a été
introduite que pour fon avantage, & pour ne le •
pas priver des biens qui pouvoient lui écheoir, &
cette faveur a été aufli accordée à fes créanciers ,
.parce qu’ils font autorifes a exciper de tous les
droits de leur débiteur, qu’ils le repréfentent en
quelque manière , qu’ils font peut-être plus favorables
, puifqu’ils. cherchent feulement à fe fouf-
traire à: des pertes ; mais il n’en eft pas de même
de fes héritiers, la jurifprudence qui les admet au
partage de fa fucceflion , les y appelle du jour
de fon abfence ou de fes dernières nouvelles' :
elle le préfume donc mort dès cet inftant, & par
cette raifon elle fuppofe qu’il n’a pu recueillir les
fuccefiions qui lui feroient échues depuis ce.mor
ment, elles ne .fe trouvent pas dans les biens ,8c
par confisquent ils n’y ont aucun droit. Il faut
cependant obferver que, dans l’incertitude,de la
vie ou de la mort de Y abfent., fes créanciers: qui
auroient obtenu l’envoi en poffefiion d’une fucceflion
qui lui eft advenue , font obligés de .donner
caution de reftîtuer ce qu’ils auroient reçu , dans
le cas où ceux qui auroient , à fon défaut , recueilli
fa fucceflion , juftifieroiént'idu prédécès, de
X-ahfmU’ tw'b-'fô'.q NÉ •- ou i: ? - , -. u.r- oh
Quel doit être , le tems auquel on doit fixer
l ’ouverture de là fucceflion d’un abfent ?.y
Les héritiers préfomptifs d’un homme, abfent,
obtiennent, après um^çertain tems,la permiflionde
prendre - poffefiion de fes biens 8c de les .partager.
•Ce: partage n’éft que. provifionnel ; 8c, fi Yab-
\fent lé repréfente, fes biens doivent lui être rendus:
:car ce partage n’a été-introduit que pour l’intérêt
public, afin que lés biens des abfens ne foient pas
abandonnés pendant un trop long tems ; on peut
même ajouter que c’efl; l’intérêt même de Y abfent,
parce qu’on préfume que fes biens feront confervés
avec plus de foin par ceux qui efpèrent les recueillir,
que par des étrangers.
Le tems fixé pour être mis en poffefiion dés
biens d’un abfent dont on eft héritier préfomptif,
varie fuivant le.s jurifdidions. A Paris, cette pof-
feflion ne s’obtient qu’après trois ans d’abfence
prouvée par a&e de notoriété ou autre pièce équivalente
jointe à la requête préfentée au lieutenant-
civil pour cet effet. La coutume de Hainaut fixe
un pareil délai.
• Les coutumes d’Anjou & du Maine autorifent
l’héritier à fe mettre en poffefiion des biens de
Y abfent après fept ans fans nouvelles. Il en eft dé
même en Bretagne, où l’on juge que Y abfent eft
cenfé vivant les fept premières années ; après lequel
tems il eft réputé mort.
Au parlement de T©uloufe, le partage provifionnel
des biens de Y abfent a lieu après neuf ans, félon
les arrêts de Maynard.
A Bordeaux, le partage provifionnel des biens
de Y abfent ne peut être demandé qu’après dix ans ,
& ce n’eft qu’aux héritiers qui font alors les plus
proches, que ce droit appartient. Cela a été ainfi
décidé par deux arrêts; des ; 21 janvier 1700 6c 2
juillet 171.5-.
Quand il n’y a point de loi qui détermine le
tems pèndant lequel lés- héritiers doivent attendre,
c’eft l’ufage du lieu qu’il faut fuivre. Mais on peut
dire en général qu’après dix ans d’abfence ou de
la dernière nouvelle , les héritiers peuvent demander
le partagé provifionnel des biens de Y abfent,
en donnant bonne 6c fuflifante caution. Ils font
difperifés de cette caution après .trente années
d’abfence. M :
Lorfqu’avant le tems déterminé pour demander
le. partage provifionnel,. les héritiers craignent que
les intérêts de Y abfent ne périclitent', ils peuvent
faire établir un curateur pour y veiller, • à la charge
de rendre compte:,' foit à ,l'abfent en cas de retour ,
foit à eux lorfqu’iisî jouiront de fes. droits. -
Comme : la? pséffefiion ne donne aux héritiers
préfomptifsaucune propriété , mais' une fimplè
adminiftràtioti dont ils font comptables envers-
Xabfent en cas de retour, ils ne peuvent vendre y
aliéner, ni hypothéquer les biens de Y abfent 2. fon
-préjudice, avant qu’il ait atteint les cent ans pendant
lefquels la loi .le foit préfumer vivant.
Lorfqne Y abfent ne revient point, il eft réputé
mort du jour de fon départ ou dè la dernière
nouvelle,qu’on en a eue, enforteque fafucceftion
;eft réputée ouverte dès ce • tems-là : les héritier^
qu’il avoit alors font préfumés l’avoir recueillie
,dès ce moment, & .quoiqu’ils décèdent dans les
dix ans de l’abfence,, ils ne laiffent pas de transférer
i leurs droits à leurs héritiers. C ’eft ce qu’ont jugé.
I les, arrêts du parlement de Paris du 23 mars 1688 v
; 6c du parlement de Totiloufe, des 5 avril 1677
6c: 23 mars 1679.
. Le tuteur d’un mineur abfent eft obligé derendre