
femme indigente, lors même qu’elle ne lui a apporté
aucune dot . & quelle en eft féparée par
autorité de juftice [ il en feroit autrement, fi la réparation
n’ayoit aucun motif fuffifant , & qu’elle
.fût l’effet du caprice ou de la légèreté.
Le parlement de Bretagne a jugé , en 1666 ,
qu’un mari devoit nourrir & prendre foin de fa
femme devenu^ folle, & a débouté ce mari de la
demande par lui formée contre les parens de fa
femme , tendante à ce qu’ils fufiént obligés de contribuer
aux dépenfes que cette fituation occafionnoit.
Une femme , féparée de biens, doit des alimens
à fon mari indigent, quand elle eft en état de lui
en fournir : c’eft ce qu’a jugé le parlement de Dijon
le 25 janvier. 1719 , en condamnant la dame de
Salvert à payer 200 liv. de penfion au fieur de
Salvert fon mari , chevalier de ,l’ordre royal &
militaire de S. Louis.
Mais s’il y avoit entre les conjoints féparation
de corps & de biens, & que la féparation fut fondée
fur les torts du mari, il n’obtiendroit pas facilement
une penfion alimentaire contre fa femme :
cette quefiion fe préfenfa au châtelet en 175,9 dans
i’efpècè fui vante , rapportée par l’auteur de la collection
de jurifprudence. Le vicomte de l’Hôpital
y avoit demandé des alimens à fa femme féparée
d’avec lui , en vertu d’un arrêt du 12 décembre.
1755 , qui déclarait suffi révoqués les dons &
avantages à lui faits par le contrat de mariage ; il
difoit que la femme riche eft obligée par les loix
divines & humaines de nourrir fon mari pauvre,
& il lui demandoit une penfion viagère.
La vicomteffe de l’Hôpital répondoit que fon
mari ne pouvoir pas employer en fa faveur, une
qualité & des droits qu’il avoit abdiqués par les
excès, & dont il avoit été jugé indigne ; par fen-
tence, rendue le 3 juillet 17 59 , le vicomte de
l’Hôpital fut déclaré non-recevable.
Il y eut appel de cette fentenee ; mais l’affaire
changea de face , parce que , depuis la fentenee,
le vicomte de l’Hôpital apprit que , par teftament,
la mère de fa femme lui avoit fait un legs en ces
termes :
« Quels que foient les torts de M. de l’Hôpital
» envers ma fille ', par efprit de religion , je lui
v donne & lègue , à prendre limitativement fur
v la part de ma fille , 3000 liv. de penfion via-
7> gère , exemptes de toutes impofitions , &c. »
Le vicomte de l’Hôpital demanda la délivrance
de ce legs : fa femme le foutmt nul, 1 °. parce que
fa mère n’avoit pas pu , félon elle , faire un legs
à prendre limitativement fur la portion de l’un de—
fes héritiers.
20. Parce que le legs paroifibit fait-en hâme de
la féparation.
30. Parce qu’elle ne pouvoit pas être contrainte
de donner des alimens à un mari qui avoit violé
fes droits , &c.
Mais tous ces moyens furent rejettes ; Ôc , par
arrêt du 28 août 1760, la cour ordonna la délivrance
du legs en faveur du vicomte de l’Hôpital.
Le mari , pendant le procès, ou de diflolution
de mariage ou d’adultère , doit fournir des alimens
à fa femme ; & c’eft toujours au juge laïque qu’elfe
doit s’adreffer pour les obtenir.
Des alimens dus à. d’autres perfonnes. La Roche-
flavin rapporte un arrêt qui a condamné le nommé
Garebal, riche marchand de Rouergue , à donner
des alimens à fon frère indigent.
Le donataire univerfel doit des alimens au donateur
indigent ; s’il les lui refufoit , ce feroit une
ingratitude qui pourrait faire révoquer la donation ,
au moins ce refus donneroit-il aétion au donateur
pour les demander.
Le créancier ,qui contraint fon débiteur par corps
& par emprifonnement de fa perfonne, doit con-
figner les alimens fuïvant la taxe ; & s’il y a plusieurs
créanciers , ils peuvent être contraints foli-
dairement pour cet effet, fauf leur recours entre eux.
La taxe des alimens fe fait de temps en temps ,
par le juge qui a la police des priforïs , eu égara
à la cherté des vivres, & elle varie félon les temps.
L’article 29 de l’arrêt de réglement du premier
feptembre 1717 , concernant les prifons dureffort
du parlement de Paris , porte que les lieutenans-
généraux, ou autres premiers officiers des juftices
royales ou fubaltemes, feront tenus de régler tous
les ans le dernier jour de décembre, fur les con-
clufions des procureurs du roi ou fifeaux , la fom-
me pour laquelle il fera fourni, par mois, des ali-
mens aux prifonniers détenus pour caufes civiles *
& que les ordonnances , rendues à cet égard, feront
publiées le 2 de janvier de chaque année à
l’audience de chaque fiège , & affichées dans les
prifons, pour être exécutées durant l’efpace d’une
année, fauf à être pourvu extraordinairement aux
cas qui pourraient mériter quelque changement relativement
au prix des vivres.
Un arrêt du parlement de -Rouen , donné en
forme de réglement le 4 avril 1731 , fur le requi-
fitoire du procureur général, ordonne qu’à; l’avenir
la provifion alimentaire des prifonniers, détenus à
la requête des parties civiles , fera de trois fous
quatre deniers par jour, fi mieux n’aime le prifons
nier prendre en échange deux livres de pain , que
le geôlier fera tenu de lui délivrer fur fa fimple
demande.
Un autre arrêt du parlement de Paris a porté „
à caufe de la cherté du pain , à fept fous par jour
la taxe des alimens des prifonniers détenus , pour
dettes civiles, dans les prifons de Paris.
L’article premier de la déclaration du 10 janvier
1680 , fait défenfes à tout huiffier & officier de
juftice d’emprifonner aucun particulier pour dettes ,
fans configner entre les mains du greffier de la
prifon ou du geôlier, la fomme néceffaire pour la
nourriture du prifonnier pendant un mois.
Il eft pareillement défendu aux huiffiers de recommander
aucun prifonnier fans configner pareille
fomme , à moins qu’elle n’ait déjà été. confignée '
par quelqu’un de ceux qui ont fait arrêter ou recommander
le prifonnier.
Les créanciers ou les parties civiles qui ont ainfi
fourni la nourriture à un débiteur , en doivent être
rembourfés, par préférence à tout autre créancier ,
fur les biens de ce débiteur , 8c il doit leur être
délivré exécutoire pour cet effet. Cette difpofition
de l’ordonnance eft fondée fur ce que le public
étant intéreffé à la vie du débiteur , il eft jufte que
ce qui eft fourni pour la" conferver , foit préféré
à toute autre dette particulière de quelque nature
qu’elle puiffe être.
Quant aux prifonniers détenus pour crimes, on
ne fauroit contraindre les parties civiles à leur fournir
des alimens ; ils ne font nourris que de pain &
d’eau , & couchés fur de la paille que leur fournit
le geôlier : le pain eft payé par le roi ou par
les feigneurs.
L ’article 10'de la déclaration du 10 janvier 1680 ,
porte que ceux qui auront été condamnés , en matière
criminelle, à des amendes envers les feigneurs
haut-jufticiers, & à des dommages & intérêts envers
les parties civiles, feront mis hors de prifon ,
fi les receveurs des amendes , les feigneurs haut-
jufticiers & les parties civiles négligent de fournir
des alimens dans la huitaine , après la fommation
qui leur en aura été faite à domicile ; c’eft pourquoi
, dans le cas d’appel des procès criminels ,
les receveurs des amendes , les feigneurs haut-jufticiers
& les parties civiles font tenus d’élire domicile
dans la maifon d’un procureur de la jurifdic-f
tion où l’appel reffortit j-& faute par eux de fatis-
faire à cette obligation „.il doit être pourvu à l’élàr-
giffement des accufés, par les juges des lieux où
ils font détenus.
Autrefois jiorfqu’après deux fommations , faites
à différens jours , les créanciers étoient en. retard
de fournir des alimens au prifonnier, le juge ppu-
Voit, trois jours après la dernière fommation , ordonner
l’élargiffement du prifonnier , partie préfente
ou duemènt appellée ; mais cette difpofition de l’ordonnance
dé 1.670, a été" changée par la déclaration
de 1680 j fur le fondement que les prifonniers
•ne tiraient pas de l’ordonnance, l’avantage que le
légiflateur avoit voulu leur procurer, parce qu’ils
étoient, pour la plupart, dans l’impuiffance de fournir
les deniers néceffaires pour faire les fommations,
J8c obtenir leur élargiffement en connoiffance de
caufe : c’çft pourquoi l’article 5 de la déclaration
citée , veut qu’après l’expiration des premiers quinze
jours du mois, pour lequel la fomme néceffaire aux
alimens d’un prifonnier n’aura point été payée , les
confeillers des cours, commis pour la vifite des prifonniers,
ou les juges des lieux, ordonnent l’élargiffp*
ment du prifonnier fur fa fimple requifition, fans autre
procédure, en rapportant le certificat du greffier ou
geôlier, que la fomme pour la continuation des
alimens n’a point été payée, & qu’il ne lui refte
aucun fonds à cet égard entre les maius.
Il faut néanmoins remarquer que fi les caufes
de l’emprifonnement &. des recommandations, excèdent
2000 livres, le prifonnier doit demander
fon élargiffement par une requête fignifiée au créancier,
au domicile par lui élu dans l’aéte d’écrou
ou de recommandation, & fur cette requête, le
juge prononce l’élargiffement, s’il y a lieu de le
faire.
L’article 6 de la même déclaration de 1680,
porte que le prifonnier qui aura une fois été élargi,
parce que les alimens néceffaires ne lui auront pas
été fournis par les créanciers, ne pourra être une
fécondé fois emprifonné ni recommandé à la requête
des mêmes créanciers \ qu’en payant par
avance de leur part, des alimens pour fix mois-, à
moins qu’il n’en foit autrement ordonné par jugement
contradiéfoire.
L’article 25 de l’arrêt de réglement du premier
feptembre 1 7 1 7 , porte que quand un prifonnier
fera obligé de faire des fignificàtions, ou d’obtenir
des jugemens contre fes créanciers, pour être payé
de fes alimens, les geôliers ou greffiers des geôles
ne recevront les créanciers à configner les alimens
pour l’avenir, qu’en confignant en 1 même temps
ceux-qui n’auront pas été payés, & en rembour-
fant le prifonnier des frais qu’il .aura faits à ce
fujet, lefquels doivent être liquidés fans autre procédure
, par le lieutenant général ou autre premier
officier du fiège où la prifon eft fituée.
Un arrêt de la cour des aides, du 20 décembre
1707, a fait défenfes aux greffiers, concierges &
geôliers des prifons du reffort de cette cour, de
retenir aucune chofe fur les fommes confignée*
entre leurs mains pour les alimens des prifonniers 5
fous prétexte de gîte & geolage, ou autre quel
qu’il loit, à peine de 300 livres d’amende & d’être
procédé contre- eux extraordinairement fuivant la
rigueur de l’ordonnance.
Lorfqu’unê femme, pendant fi>n mariage, a commis
quelque délit, & que le plaignant la fait em- '
prifonner pour la réparation civile à laquelle elle
a été condamnée envers lui, eft-il fondé à répéter
au mari les deniers avancés pour les alimens de la
femme , tandis qu’il la retient en prifon ? Les moyens
du créancier font que là communauté doit des alimens
à la femmea & qu’en les lui fourniffant, il a
acquitté une-dette de la communauté qui, par con-.
féquent r doit lui être rembourfée par le mari , en
fa qualité de chef de la même communauté..
Le mari peut repouffer la demande, en ’difant
que la communauté n’a pas profité des alimens que
le créancier a fournis à la femme qu’il retient pri-
fonnière* que ces alimens ne font dus que dans la
maifon même du mari , où ils n’auraient rien coûte
à la communauté , parce qu’elle auroit été .dédommagée
par les feryiees que la femme auroit rendus
à la maifon.
• Je crois que les moyens du mari doivent préva-*
loir , fi ce n’eft dans quelques coutumes fingulières.