
dépôt ou en nantiffement chez lé preneur, pourvu
toutefois que ces meubles ne foient pas en évidence,
.& qu’on les tienne enfermés ; U eft alors clair que
le preneur n’a pas l’ufage de çes meubles, 8c qu’il
■ n’en a que la garde, jufqu’à ce que le propriétaire
-ait jugé, à propos de les retirer.
Mais fi les effets confiés au preneur étoient-de
mature à pouvoir garnir une maifon, comme eft ,
par exemple, une tapifferie, ,8c qu’ils fuffent en évi-
.tlence, ils rèpondrôient du loyer envers le bailleur ;
la raifon en eft que celui qui des a confiés au pre*
neur, paroît alors avoir confenti quils-.garniffent la
maifon, & que par conféquent ils foient affujettis
au privilège du bailleur. D ’ailleurs, celui-ci ne fo-
.chant pas a quel titre le preneur les tient, doit fup-
pofer qu’il en a la propriété.
La même règle n auroit pas lieu dans le cas d’un
dépôt néceffaire., tel que celui qui ferôit oecafionné
par un incendie ou par le.débordement de la rivière,
des meubles qu’en pareille- circonftance ontranfpor-
.teroit dans une maifon, ne répondr oient aucunement
des loyers ; la raifon en eft que le propriétaire
ne les ayant fait tranfporter que pour lesfouf-
traire à l’aôion du feu ou de l’eau, on ne pourvoit
pas préfumer qu’il eût confenti qu’ils garniffent
la maifon., ni.qu’ils fuffent obligés au loyer.
Quant aux meubles-qui.appartiennent aux fous-
locataires, ils ne font-communément affujettis qu’à
répondre du loyer de l’appartement occupé par
chaque fous-locataire., c’eft ce que porte l’article 162.
de la coutume de Paris., qui eft ainfi conçu :
« S’il-y a desfous-locataires, peuvent être pris
->» leurs biens pour ledit loyer 8c charges du bail,
» 8c néanmoins leur feront rendus en payant les
j j loyers pour leur, occupation ».
Cette difpofition doit être ïuivie dans les cou-
-tumes qui ne contiennent rien de contraire.
De ce que le fous-locataire n’engage fes>meubles
-îque jufqu’à là concurrence de-fondoÿer , Bafnage ,
en fon traité des hypothèques, en conclut, après
.Barthole, que les meubles dé celui à qui le loca-
.taire .a-donné l’habitation gratuite d’une partie de
.la maifon, ne font point obligés envers ’le bailleur,
fi ce n’eft pour les menues réparations de fon appartement
, defquelles il eft tenu comme un fous-locataire
: cette décifion eft critiquée avec raifon par
M. Pothier. En effet, un propriétaire qui compte
spour rja fureté de fes loyers fur les meubles dont
.il voit fa maifon garnie, feroit trompé fila maifon
ou prefque toute la maifon fe trouvoit occupée par
différens particuliers., auxquels il fiuffiroit de dire
-jque le principal locataire-leur a accordé une habitation
gratuite ; il paroît équitable que leurs meubles
-foient obligés .au loyer à proportion de la partie
,qu'ils occupent.
La coutume d’Orléans s’eft écartée de la difpo-
jfition du droit commun ; elle affujettit les meubles
du fous-locataire de partie de la maifon au.paiement
de tous les loyers , 8c non pas feulement à proportion
de ce . quoi occupe ; d’où qu’elle y
affujettit auffi ceux de celui‘qui auroit une habitation
gratuite. Voici les termes dans lefquels eft-rédigé
l’article 408. « Le feignsur d’hôtel peut faire
» exécution fur tous les meubles qu’il trouve en
» fon hôtel, pour le paiement des loyers qui lui font
» dus, encore que celui fur lequel l’exécution fera
faite, ne tînt que partie de la maifon ».
Cette coutume, par cet article, donne au propriétaire.,
pour fes loyers, un droit indéfini furies
meubles du fous-locataire qui 11’occupe que partie
de la maifon, & ne le limite point à ce •qui eft dû
pour la portion qu’il occupe : ce droit eft exorbitant
8c particulier à la coutume d’Orléans.
Quoique nous ayons dit que le privilège du bailleur
ne pouvôit s’exercer que fur les meubles qui
paroiffoient avoir été . mis dans la maifon pour la
-garnir ou pour y être confommés-, il ne faut pas
prendre cette décifion à la lettre ; car.quoique des
marchandifesne puiffent pas être regardées comme
ayant été mifes dans la maifon-pour la garnir ou-pour
y être confommées, puifqu’au contraire elles font
deftinées à être vendues , elles font néanmoins affu-
jetties au privilège du bailleur ; la raifon en eft que
celui-ci peutexercèr fon droit fur tout ce qui garnit
..chaque partie -de fa maifon , fuivant l’üfage auquel
on emploie cette partie : ainfi le preneur ayant fait
une boutique dans Une partie de la maifon, il finit
en conclure que les effets qui fe trouvent dans
cette boutique, doivent répondre du-loyer.
-Il faut remarquer que l’obligation de garnir de
meubles en fuffilance, ne s’applique qu’aux maifons
des villes,-8c- non aux métairies. Ici la récolte répond
du paiement des fermages. On peut néanmoins exiger
du preneur qu’il entretienne dans la métairie
les beftiaux, & les inftrumens d’agriculture qui font
néceffaires pour la mettre en valeur ; fans quoi le
bailleur pourroit faire réfoudre la convention. Les
■ coutumes de Paris, Verinandois,Châlons-& Rennes.,
affujettiffent au privilège du bailleur les meubles
du fermier : d’où l’on peut conclure que dans
ces coutumes le fermier eft tenu de meubler 'la maifon
fùivant fon état.
Le droit de préférence fur les meubles qui garniffent
un appartement, 8c fur les frnits recueillis
fur les terres d’une métairie, a lieu dans la coutume
de Paris, & autres femblables, même fans convention.
De plus il s’exerce, félon le témoignage de
Bafnage, dans les provinces même où les meubles
font fiifceptibles d’hypothèque ; enforte que le bailleur
doit être payé fur le prix des meubles ou fruits
dont il s’agit, avant les autres créanciers du preneur
, quoiqu’ils aient une hypothèque antérieure au
bail. La ration en eft -que dans les provinces où
les meubles peuvent être hypothéqués, ils lie le
font néanmoins qu’autant que le débiteur en con-
ferve la poffeffion, puifqu’il eft de principe que les
meubles ri ont point de fuite par hypothèque. Ainfi celui
-qui les tient en nantiffement, doit avoir la préférence
fur tout autre créancier ; parce que, félon
l’obfervation de M.Pothier, le nantiffement en a,
en
en quelque manière, dépoffédé le débiteur : or les
meubles qui font dans la maifon louée, font une
efpèce de nantiffement pour le bailleur , & en conséquence
, le prix doit lui en être délivré par préférence
à tout autre créancier, même antérieur.
I l fout cependant foire attention que le privilège
du bailleur pour les loyers, n’eft pas le premier dans
l’ordre de ceux/auxquels les meubles qui font dans
la maifon louée, peuvent être fournis. Les frais néceffaires
pour la vente des meubles, & les frais funéraires
doivent être acquittés avant les loyers. Et
Suivant une déclaration du 2,2. août 1665 , & un édit
du mois d’août r66p, le loyer de la maifon ne doit
être payé par préférence à la taille que pour frx
mois, & le fermage d’une métairie que pour un an.
On préfère auffi au bailleur le falaire dû aux moif-
fonneurs pour les grains coupés à la dernière récolte.
Il en eft de même des'gages des. valets pour les
Services qu’ils ont rendus relativement à la culture
& à la récolte. Dans quelques provinces’ ils font
préférés pour une année de gages, 6c dans d’autres
pour une demi-année.
Au furplus , lorfqu’il eft queftion de décider juf-
qu’où doit s’étendre la préférence due au bailleur
relativement aux autres créanciers du preneur, on
diftingué, à Paris, comme le prouvent différens aéfes
de notoriété du châtelet, fi le bail eft paffé parde-
vant notaires, ou s’il n’eft que fous feing-privé.
Dans le premier cas , on préfère le bailleur aux
autres créanciers du preneur, non-feulement pour
tous les termes échus, mais encore pour tous ceux
qui font à échoir , 6c en général pour toutes les
obligations qui réfidtent du bail. Mais fi le bail n’eft
que Verbal ou fous feing-privé, le bailleur n’eft .préféré
que pour trois termes échus & pour le courant,
à moins qu’il n’ait été reconnu en juftice,
avant qu’aucun créancier eût fait faifir les biens du
preneur.
En Lorraine, il règne fur cette matière un ufoge
qui mérite une obfervation particulière.
Suivant l’article 17 du titre 12, delà coutume générale
de Lorraine , les meubles qui font dans une "
maifon font exprejfément ajjeciés au bailleur pour les
loyers: & fui vaut l’article 18, le propriétaire d’une
métairie doit être préféré aux autres créanciers du
preneur fur les fruits de. cette métairie, pour les
fermages de l’année courante , 8c d’une année d’arrérages.
Ces difpofitions de la coutume font confirmées
par l’article 5 dû titre 17 de l’ordonnance
civile du duc Léopold de Lorraine, du mois de novembre
1707, dont voici les termes :
Pourra aujji être demandé au juge permijfion défaire
faifir & arrêter la chofe dérobée, ou celle que le demandeur
prétend lui appartenir, comme aujjî les fruits
provenons de métairie, pour canon de, la ferme , à la.
requête du propriétaire , qui fera préféré pour Vannée
courante y & une d'arrérages ; & les meubles étant en
la maifon louée pour les loyers, encore qu il n'y auroit
Jurifprudence. Tome I.
auciin bail par écrit ; comme aujji,faire faifir es mains
d'un tiers.
Il femble, d’après ces lo ix , que l’intention du
légillateur a été d’accorder aux propriétaires des
maifons une préférence pour la totalité des loyers
fur les meubles des maifons louées : cependant plu-
fieurs magiftrats éclairés nous ont affuré que différens
bailliages de Lorraine reftreignoient à cet égard
les droits des propriétaires des maifons, 8c affimi-
loient ces propriétaires à ceux des métairies, en ne
leur accordant de préférence que pour l’année courante,
8c une année d’arrérages. On ne nous à
donné aucune raifon fatisfoifonte pour appuyer cette '
jurifprudence, qui nous paroît égalementoppofée à
la loi 8c aux principes établis fur la matière dont
il s’agit.
Mais de ce que le bailleur doit être préféré .pour
les loyers ou fermages, 8c pour toutes les obligations
qui réfultent du bail, peut-on tirer la con-
féquence que cette préférence doit s’étendre aux
avances qu’il a faites au preneur pour foire valoir
la métairie ? M. Pothier, qui propofe cette queftion,
dit qu’il fout diftinguer. Si ces avances ont été faites
par le bail même, l’obligation de les rendre faifant
partie des obligations du bail, il n’eft pas douteux
que le propriétaire ne doive être préféré, fuivant
le principe qui lui accorde la préférence pour toutes
les obligations du bail- Il y a plus de difficulté fi
les avances n’ont été faites que depuis le bail; car
la créance de ces avances dérive d’un contrat de
prêt féparé 8c diftingué du bail, 8c qui n’en fait
point partie. Cependant il paroît que l’ufage a étendu
à cette forte de créance les. droits des bailleurs, fur-
tout lorfque ces avances ont été faites- en grains
ou autres efpèces, & qu’on ne peut douter qu’elles
n’aient été faites pour faire valoir la métairie.
Droit de fuite fur les meubles. Quoique ce foit une
règle parmi nous, comme on l’a vu , que les meubles
riaient pas de fuite par hypothèque, cependant la plupart
des coutumes ont attribué au bailleur de maifon
ou de métairie, le droit de fuivre les effets
obligés au loyer ou fermage. Voici comme s’ex-.
pliqué à cet égard la coutume de Paris :
« Meubles n’ont point de fuite"par hypothèque,
» quand ils font hors de la poffeffion du débiteur :
» toutefois les propriétaires des maifons fifes ès villes
» & fouxbourgs 8c fermes des champs, peuvent
» fuivre les biens de leurs locatifs ou fermiers exé-
» cutés, encore qu’ils foient tranfportés, pour être
» premiers payés de leurs loyers ou moifons, iceux
» arrêter, julqu’à ce qu’ils foient vendus 8c déli-
» vrés par autorité de juftice ».
Au refte, il fout que le bailleur exerce le droit
de fuite dans un court délai ; fans quoi ce droit,
8c celui de préférence fur les meubles tranfportés
s’évanouiroient. Ce délai varie fuivant les coutumes.
Il fout fuivre à cet égard l’ufage de chaque endroit.
On peut exercer le droit de luite par la voie de
faille ou par la voie d’a&ion, même contre une
perfonne qui auroit acheté de bonne foi les effets
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