
aucune part, peut s’obliger & faire de fon chef
tout ce qui dépend de ce négoce. Ce n’eft pas que
le mari perde de les droits en cette occafion, &
qu’il ne puifle bien empêcher fa femme de faire,
aucun commerce ; mais c’eft qu’en lui permettant
de commercer , il eft préfumé l’autorifer à cet
effet: & en pareil cas, une autorifation tacite fuf-
fit, parce qu’on fait que le commerce ne fauroit
s'accorder avec toutes les formalités qu’on exige
pour les autres affaires de la fociété. Ainfî une
femme qui devient marchande publique, peut acheter
, vendre, emprunter, & faire elle feule tout ce
que font d’autres marchands. Mais cette liberté de la
femme fe borne effentielleinent aux affaires de fon
négoce ; tout ce qui y eft étranger demande une au-
torifation particulière. Elle ne pourroit même pas,
fans l’expreffe participation de fon mari, fe rendre
caution pour un marchand avec lequel elle ne
feroit point affociée d’intérêt.
Nous obferverons, au fujet du commerce de la
femme mariée, que, quoique le mari n’y prenne
aucune part, il ne laiffe pas de devenir garant des
dettes que fa femme peut contra&er en pareil cas,
Iorfqivil y a communauté entre eux, Si l’ufage
eft de foire déclarer exécutoires contre lui les obligations
de fa femme, parce que comme il eft
toujours maître de la communauté, & qu’il eft
cenfé avoir profité des emprunts nie fa femme, il
paroît naturel qu’il foit tenu de payer pour elle. Il
-en feroit autrement, s’il n’y avoit point dè communauté
, ou qu’elle fut diffoute par une réparation.
Comme le mari ne gagneroit rien alors au
négoce de fa femme, il ne feroit point garant des
obligations qu’elle auroit pu contrafter."
Une exception encore concernant Y autorifation
maritale, eft au fujet de l’adminiftration domefti-
que, On fait que ce font les femmes qui pour
l’ordinaire fe chargent du détail du ménage. Ainfî,
que les fournitures d’une maifon aient été faites
au mari ou à la femme, la chofe eft égale. La
femme eft cenfée avoir commiflion du mari pour
çes fortes de chofes, & celui-ci eft obligé de payer;
mais par une jurifprudence particulière au châtelet
de Paris, laquelle ne fauroit foire loi ailleurs, le
mari eft déchargé de ce paiement, lorfqu’il eft en
état d’affirmer qu’il a fourni à fa femme une fomme
ftjffiTante pour la dépenfe du ménage.
Il n’en feroit pas de même des ameublemeps
particuliers qu’il auroit plu à une femme de procurer
à fon mari; il ne feroit tenu de les payer
qu’autaçt qu’il voudroit les garder, il auroit toujours
la faculfé de les faire reprendre. A l’égard de ces
dépenfes de luxe pour parures ou habillemens,
que cqntrafferoit une femme à l’infu de fon mari ;
comme il eft d’ufage que les maris, fur-tout à
Paris, s’abonnent avec leurs femmes à une certaine
femme par an, pour ces fortes d’objets, il leur fuffit
ii’affirmer qu’ils ont payé l’abonnement convenu,
pour qu’ils foient déchargés-; autrement les fontaiftes
ffmçies. rirfroiçnt à çonféquençe pour eux.
La chofe n’eft pas tout-à-foit de mèmè dans les
petites villes, & à l’égard des perfonnes qui ne
tiennent point un certain rang. Lorfque les emplettes
qu’une femme foit pour elle ou pour fes
enfons, n’excêdent’ point les bornes de fon état,'
& que ce font de ces emplettes prefque indifpen-
fables , le mari ne fauroit s’exempter de les payer.
Il ne fout pas non plus à'autorifation à la femme
pour les cas fuivans.
i °. Pour fe racheter de prifon : le mari doit être
le premier à lui tendre une main fecourable, & il
feroit contre le fentiment naturel de foire dépendre
de celui-ci la faculté de la laiffer dans une efpèce
d’efclavage ou de l’en retirer.
Elle peut aufti, fans être autorifée , s’obliger
pour tirer fon mari de prifon , ou pour le racheter
de captivité. Un arrêt du 2.7 âotft 1594 l’a jugé
pour la première efpèce, & l’ordonnance de la
marine l’a décidé pour la fécondé.
2,0. La femme n’a pas befoin non plus $ autorifation
pour tefter. Comme un afte de dernière volonté
n’a d’exiftence, à proprement parler, qu’après
la mort de celui qui en eft l’auteur, & que la femme
à fon décès ne fe trouve plus fous la puiffance
de fon mari, on n’exige point en pareil cas d’au-
tonfation. Il fout pourtant excepter de cette règle
générale quelques coutumes particulières, comme
celles de Douai, du Bourbonnois, du,Nivernois,
de la Bourgogne & de la Normandie, où cette au-
torifation eft néceffaire.
3 La femme peut aufti fe paffer à'autorifation ,
pour difpofer de fes biens paraphernaux, c’eft-à-
dire de ceux qu’elle n’a point voulu mettre au rang
- de fes biens dotaux par fon contrat de mariage :
cependant, dans quelques coutumes,'comme celle
de la Marche, l’effet de cette réferve n’eft que de
lui en donner la libre adminiftration, & le con-,
fentement du mari eft requis quand elle veut en
difpofer à titre gratuit.
4°. Lorfque le mari eft abfent, la femme a de
plein droit tout pouvoir pour une légère adminiftration,
comme pour foire agir les ferviteurs, les
domeftiques, pour recevoir les cens & redevances,
foire faire les réparations urgentes, prendre foin
dq l’éducation des enfons, &c. Mais ce pouvoir
rç s’étend point à un renouvellement des baux,
à une vente qui tendroit à dégarnir un appartement
de fon mobilier,un domaine de fes beftiaux,
de fes fourrages, &c. Si l’abfence duroit trop longtemps
, & que les affaires exigeaient des aéies d’une;
adminiftration plus effentielle, la femme feroit dès-
lors obligée de s’y faire autorifer par juftice, en
jijftifiant de l’abfence par un aâe de notoriété. Le
juge, en pareil cas, fur l’expofé de la requête &
fur le vu de l’affce , donne fon autorifation ; mais
il convient que le tout demeure dépofé au greffe
pour la fureté des contractons. La femme doit fim-
plement s’en faire délivrer expédition pour foire
connoître fon pouvoir en cas de befoin.
50. La femme eft affranchie dfi la néceifité de
Y autorifation, lorfque fon mari eft tombé dans un
état de mort civile, par une condamnation aux galères
perpétiielles ou à un banniffement à perpétuité
hors du royaume. Mais cet aftranchiffemenf
n’a lieu qu’autant que la condamnation eft par jugement
en dernier reffort & qu’elle a été exécutée
ou en réalité ou par effigie.
Lorfque le mari eft Amplement condamné aux
galères ou au banniffement à temps, la femme
n’èft-elle pas du moins affranchie de fon autorité
pendant qu’il fubit la peine ? Les auteurs ne fé
font point expliqués fur cette queftion ; mais il eft
tout naturel de penfer qu’elle peut agir de fon chef
pour les a&es de fimple adminiftration. A l’égard
de ceux qui peuvent tendre à une aliénation, comme
le mari peut y avoir- un intérêt plus fenfible , il
paroît jufte de lui conferver toute fon autorité. Sur
quoi il fout remarquer qu’il ne la perd d’aucune
foçon, lorfque la condamnation fe borne à une infamie
fans peine affiiûive, comme au blâme, à
l’amende, &c.
Si le mari étoit relevé de la mort civile par lettres
du prince, la femme retomberoît-elle fous fon autorité
? La chofe ne fouffriroit aucune difficulté,
parce que cette efpèce de mort ne diffout pas le
mariage ; elle empêche feulement l’exercice des
effets' civils.
Lorfque le mari ne peut autorifer fa femme,
parce qu’il feroit en démence, lorfqu’il ne le veut
pas, comme dans le cas où fa femme voudroitfor-
mer contre lui une demande en réparation de biens ,
elle ne peut agir fans au préalable s’y être fait autorifer
par le juge* Dans les autres aftes extrajudiciaires
où l'autorifation du mari eft' néceffaire, &
qu’il refufe de; la donner, le juge ne peut autorifer
la femme qu’après quelle a demandé Yautorifation
de fon mari, & l’ufage eft qu’on expofe à celui-ci
les motifs fur lefquels on la réclame, & qu’on lui
faffe faire fommation de l’accorder. Alors ou il
s’explique ou il ne dit rien.: s’il s’explique, le juge
peut apprécier fes raifons, & dès-lors accorder ou
refufer Y autorifation. S’il ne dit rien, il n’eft pas
néceffaire de lui foire donner d’affignation ; l’ufage
eft de prendre fon filence pour une approbation
de tout ce qui fera ordonné par le juge.
Si dans cet intervalle il y avoit du péril en la
demeure, les auteurs conviennent que la femme
pourroit , fans autorifation, faire des aétes confer-
vatoires, tels, qu’une faifie , une oppofttion, &c.
parce qu’en pareil cas ce qui eft l’effet de la né-
ceffité ne fauroit être une infraftion de la loi.
Lorfqu’il eft queftion d’a&es qui n’ont trait qu’à la
procédure:, & qü’on nomme afles judiciaires, quoique
la femme ne puifle pas plus les exercer , fans
la participation de. fon mari, que ceux qu’on appelle
extrajudiciaires:, cependant fur le refus allégué
de celui-ci , &. fans qu’il foit .néceffaire de lui faire
d’interpellation , le juge peut autorifer la femme
fans, autre précaution particulière , parce qu’il eft
de préfomption reçue que tout ce qui fe paffe fous
les yeux du juge eft à l’abri de la fraudé & de
l’in juftice-.
Par une fuite de cette préfomption, lorfque le
mari autorife fa femme pour ejler en jugement, il
n’eft pas néceffaire que cette autorifation foit marquée
d’une manière aufti ex-preffe que pour des a&es
extrajudiciaires ; il fuffit que le mari & la femme
procèdent conjointement pour que Y autorifation foit
préfumée telle qu’elle doit être. Aufti la coutume
de Paris , article 224, fe borne-t-elle ,< en pareil cas ■,
au fimple confentement du mari, au- lieu que par
l’article précédent, pour les aéles qui peuvent tendre
à une aliénation hors de la préfénee du juge,
elle exige une autorifation fpéciale.
En matière criminelle, la femme ne peut former
aucune accufation, fans y être autorifée par
fon mari ou par le juge. C’eft ce qui eft bien établi
par le Brun , en fon Traité de la communauté, par
Dupleflis, fur la coutume de Paris, & par Pallu,
fur celle de Tours. C ’eft suffi le fentiment de Pa-
pon. La chofe a même été ainfî jugée par deux
arrêts du parlement de Paris., l’un du 7 août 1748,
& l’autre du 2.3 avril 1749. Il eft vrai' que quelques
coutumes, comme celles de Berry, de Bour-
bonnoh & de la Marche , difpenfênt la femme de
1 autorifation; mais la' difpofition particulière' de ces
coutumes ne peut être regardée que comme une e*-
ception au droit commun. Si le mari refufe d’auto-
rifer fa femme pour la pourfuite d’une plainte, elle
peut fe foire autorifer par juftice; de forte qu’on
peut dire qu’il fout toujours une autorifation, ou du
mari ou du juge, ou de la coutume.
Lorfque la femme eft accufée & décrétée , comme
il fout néceffairemeut qu’elle paroiffe devant le juge
& qu'elle réponde feule en perfonne, On ceffé
d’exiger une autorifation, qui , ne pouvant rien changer
à l’ordre des chofes, feroit fort inutile.
Lorfque le mari a autorifé fa femme à procéder ,
il eft refponfable des fuites de la condamnation
intervenue contre elle. Il faut qu’il prenne , fur lut
ou fur la communauté , le paiement des objets de
cette condamnation, parce qu’au moyen de fon
autorifation, il eft cenfé avoir approuvé fa femme
dans le foit qui a donné lieu à to condamnation^
Cependant , dans les pays où il n’ÿ a point de
communauté, la partie qui a obtenu la condamnation
ne peut l’exercer , contre le mari , que pour
les dépens , fauf, après le mariage, à l’exercer poilr
le refte fur les biens dotaux. Cette partie peut
néanmoins faire faifir la nue-propriété -en confer-
vant l’ufufÈuit du mari ; & fi les caüfes; de la condamnation
étoient antérieures au mariage, le mari
pourroit être dépouillé de cet ufufrüit, même de
fon vivant.
Mais lorfque le mari n’a-point autorifé fa femme,
Y autorifation qu’elle a pu obtenir de. la juftice
ne fauroit , lui nuire. On prétend cependant qu’en
foit d’injures , l’ufage eft , au châtelet de Paris ,
d’exécuter la condamnation, contre la femme, fur
la communauté, que le mari l’ait autorifée ou non-;