
„N o u s penfbns d’abord avec M. de la Croix, que
I mfmi&ion & la difcuflion publique deviennent inutiles
après l’aveu formel d’un accufé. Sa confeffion,
îoutenue des preuves judiciaires, permet de s’abf-
temr d’une plus longue procédure. Le juge n’a plus
."Oi" nouvelles lumières ni de plus grands éclair-
ciflemens pour déterminer fon fuffrage. C’eft le-cas
<1 appliquer cet adage trivial, habemus reum confiten-
tem. Voyez Aveu (matière criminelle fi
La queftion ne peut donc plus avoir lieu que pour
les accufés qui perfiftent dans le défaveu des crimes
qu’on leur impute, & qui peuvent oppofer quelque
défenfe plaufible.
On peut dire, en faveur de Pinftruâion publique,
que fila loi civile & naturelle, l’honneur & la religion
impofent a tous les juges l’obligation d’écouter
avec patience ce que les parties ou leurs défenfeurs
jugent à propos d’alléguer pour établir leurs prétentions
dans les affaires les plus légères : on doit
employer les mêmes précautions , lorfqu’il s’agit
d’un intérêt plus important, de l’honneur^ ou de la
vie d’un citoyen : que cette inftruéfion publique peut
procurer à un accufé les moyens de faire triompher
ion innocence, épargner quelquefois ces erreurs involontaires
dans lelquelles les magiftrats fe font
trouvés entraînés, & tarir la fource des regrets im-
puiffans que leur caufent ces mêmes erreurs : que
cette forme de procéder annonce de la nobleffe,
de la franchife oc. de la grandeur, & que, par cela
même, elle eft digne de la douceur & de la généralité
qui cara&érifent finguliérement la nation
françoife. On peut même l’appuyer de l’exemple
des Romains dont nous avons emprunté la majeure
partie de nos loix, & des Anglois, nos voifins &
nos rivaux dans la carrière de la gloire & des fciences.
Mais n’en réfulteroit - il pas une foule d’incon-
véniens ? Le premier qui fe préfente, eft le temps
ïmmenfe qu’exigeroit le cours de cette procédure.
Peut-être ne feroit-il pas dans le cas d’arrêter le
légiflateur, par rapport aux tribunaux dont le reffort
eft peu" étendu, & dans lefquels on juge à peine
chaque année quelques procès criminels.
Mais, dans les parlemens, dans les tribunaux fur-
tout de la capitale , où ces affaires font très-multipliées
, comment trouver le temps néceffaire pour
difeuter à Y audience chaque procès? Une audience ne fuffira pas pour le plus léger ; il en faudra une
très - longue pour l’audition des témoins, une fécondé
lors du récolement, une troifième dans le
temps de la confrontation.
Ce n’eft pas tout : cette inftruéfion publique don"
sera lieu à une multitude d’incidens qui furcharge"
ront & arrêteront le cours de la procédure. L’ac”
eufé, peut-être même fon défbnfeur, chercheront
a égarer l’accufateur, les témoins & le juge dans un
labyrinthe de mauvaifes chicanes. Elle deviendra
peut-être l’école où les fcélérats viendront apprendre
de la juftice même les moyens de la braver & de
fè fouftraire à la peine due à leurs forfaits, Nous
nofoiis ajouter qu’elle peut expofer les magnftra'fcf
f c\CS ^cen.es défagréables : il n’eft aucun de nos
leéteurs qui ne nous prévienne à cet égard.
3°. Des /épurations de corps entre mari & femme.
En général^ toutes les affaires fufceptibîes de plaidoirie,
doivent être difeutées publiquement, on
en excepte néanmoins dans l’ufage quelques-unes ,
telles que celles où il s’agit d’une demande en fé-
paration de corps entre mari & femme.
Lorfqne ces affaires intéreflent des perfonnes de
confidération , lorfqu’ell'es préfentent des détails
dont le récit peut bleffer les moeurs & l’honnêteté
publique, le magiftrat qui a la police de Y audience^
eft le maître de ne laiffer plaider ces affaires qu’à
huis-clos. On peut en agir de même dans toutes
les caufes qui offrent des conteftations fcandaleufes*
comme fèroient celles d’entre un père & fes en-
fans. Au refte, ces égards dépendent de la confidération
que méritent les parties, & de la délicat
teffe du juge qui préfide.
Dans les demandes en féparation de corps entre-
mari & femme, on m’a affuré qu’il étoit d’ufage
au châtelet de Paris, que fur la plainte portée au
lieutenant-civil, des févices & mauvais traitemens
ce magiftrat, en permettant d’affigner la partie done
on fe plaint, pour en venir à Yaudience dans les
délais ordinaires, ordonne qu’au préalable le mari
& la femme comparoîtront en fon hôtel, pour être
ouïs en préfence l’un de l’autre. S’il parvient à rétablir
entre eux la paix & l’union qui doivent y régner >
il a rempli d’une manière plus noble les fondions
de fon miniftère : s’il ne peut obtenir leur réconciliation
, il les renvoie à Yaudience. Cet ufage eft
extrêmement fage, & il feroit à fouhaiter qu’on
l’introduisît dans les autres jurifdiéfions. Les loix en
effet devroient plus s’occuper des moyens d’empêcher
les conteftations que de les juger, & de prévenir
les crimes (que de les punir.
4°. Autres affaires qui ne fe portent pas à l'audience ',
^ACft Perm^s aux juges de s’occuper, dans leurs
hôtels, des affaires fur lefquelles il n’y a point de
litige formé, de celles qui requièrent une grande
célérité , de celles qu’il n’eft pas poflible d’expédier
à Y audience,
1. Le juge peut rendre chez lui toutes les ordonnances
fur requête, foit au civ il, foit au criminel,
lorfqu’elles ne tendent qu’à l’inftru&ion de
l ’affaire que l’on pourfuit. II peut permettre d’affigner,
de faifir, taxer des falaires , des dépens ,
liquider des dommages-intérêts, recevoir des cautions
, accorder des dêfenfes contre l’exécution pro-
vifoire des fentences des juges de fon reffort, donner
des parearis, &c.
2. Il peut recevoir chez lui des parens convoqués,
à l’effet de donner leur avis pour la nomination
d’un tuteur ou d’un curateur à des mineurs „
à des prodigues, à des infenfés, & y homologuer
l’avis de ces parens, foit pour la tutèle, l’émancipation
, la curatelle ou l’interdi&ion, en obfcrvant
toutefois qu’à l’égard d’une interdi&ion, il eft obligé
de renvoyer l’homologation à Y audience, .parce que
la perfonne à interdire peut y propofer des moyens
pour empêcher fon interdiction.
3. Il peut permettre d’informer, de fe fairevi-
fiter, faire l’information; mais il ne peut interroger
les accufés ni les décréter, excepté dans ces
momens, où les accufés ayant été pris en flagrant
délit, font conduits chez lui pour recevoir fes ordres.
Il peut alors leur faire lubir le premier interrogatoire
, & les décréter provifoirement ; mais les
autres interrogatoires & les nouveaux décrets, ainfi
que les fentences de provifion alimentaire, de récolement
& de confrontation, ne doivent fe rédiger
que dans la chambre deftinée à cet effet.
4. Les fentences d’élargiffemens provifoires doivent
être pareillement rendues à la chambre. Cependant
, il eft porté par l’article 6 d’un édit de
janvier 1685 , concernant le châtelet de Paris , que
quand il s’agira de4 la liberté des perfonnes qualifiées
ou conftituées en charge, de celles des marchands
& négocians emprilonnés à la veille de
olufieurs fêtes confécutives, ou de jours auxquels
on n’entre point au châtelet, le juge pourra l’ordonner
en fon hôtel.
, 5. Il eft dit, par ce même réglement, que lorf-
qu’on demandera la main-levée de marchandifes prêtes
à être envoyées, & dont' les voituriers feront
chargés ou qui pourroient dépérir ; que lorfqu’il fera
queftion du paiement que des hôteliers ou des ouvriers
demandent à des étrangers pour des nourritures
, fournitures d’habits, ou autres chofes nécef-
faires ; que lorsqu’on réclamera des dépôts, des
gages, des papiers ou autres effets divertis, le lieutenant
civil , s’il le juge ainfi à propos pour le bien
de la juftice, pourra ordonner que les parties comparoîtront
le jour même en fon hôtel, pour y être
entendues, & être par lui ordonné pjr provifion ,
ce qu’il efiimera de plus jufte ; mais il ne peut fe
taxer ni frais ni vacations à cet égard.
Quoique ce réglement ne femble fait que pour
le châtelet, il peut néanmoins s’appliquer à toutes
les jurifdiétions où il fe préfente des cas pareils.
Autrement, comment feroit-il poflible, dans des oc-
cafions urgentes, de tenir des audiences en règle,
& d’y faire trouver les autres jugés qui auraient
droit d’y affifter? Il a paru raifonnable de laiffer
toutes ces décifions provifoires au premier juge en
fon hôtel : le bien de la juftice & l’intérêt public
l’exigent ainfi, fauf en cas de plus grande con-
teftation, à renvoyer les parties à Y audience , pour
les entendre contradictoirement, & décider définitivement
leur différend au principal.
6. Le juge peut encore faire en fon hôtel des
partages ordonnés par juftice, des enquêtes, des
interrogatoires fur faits & articles, recevoir des redditions
de compte, nommer des experts, recevoir
leur ferment & leur procès-verbal de vifite oud’ap-
preciation , accorder des compulfoires, dreffer des
procès-verbaux d’extraits & de collations de pièces,
d’ouverture de teftamens olographes \ de comparai
fon & de vérification d’écritures & de fignatures,
légalifer des actes & en attefter l’authenticité.
7. Pour voir plus particuliérement ce qui peut
être fait à Y audience ou à l’hôtel, on peut confulter
le réglement du 18 juillet 1684, fait pour le bailliage
du palais à Paris ; celui du 17 féptembre 1660,
pour le fiège de Dreux; un autre du 21 avril 1679, '
pour le bailliage de Richelieu ; un quatrième du 15
-mai 1714 , pour la juftice de Pontchartrain. On peut
confulter auffi l’article 2 de l’arrêt des grands jours
de Lyon , du 29 novembre 1596, rapporté par
Chenu.
8. Le magiftrat qui a l’adminiftration de la police
, peut faire en fon hôtel tout ce qui peut tendre
‘ à la fûreté publique, lorfque les faits ne préfentent
rien de contentieux. Il à droit d’y rendre des
ordonnances , & d’y faire des réglemens provifoires
: mais fi quelqu’un eft cité à fon tribunal
pour répondre aux plaintes du procureur du ro i,
ou des parties , il eft obligé d’en renvoyer la con-,
noiflance à Y audience publique.
5 °. Des réceptions d'officiers. A l’égard des réceptions'
d’officiers, le juge peut faire chez lui l’information
de vie & de moeurs ; mais le refte dépend
de l’ufage introduit dans chaque fiège.
Le lieutenant-civil, au châtelet de Paris, reçoit.
les juges des juftices feigneuriales, les meffagers
de l’univerfité, les huiffiers, &c. il n’en eft pas de
même dans tous les fièges de province.
Un réglement fait pour l’adminiftration de la
juftice dans la fénéchauffée de Poitiers , le premier
juillet 1688, homologué par arrêt du confeil du
2 août fuivant, porte que le lieutenant-général pourra
vaquer dans fa maifon aux informations de vie &
moeurs de tous ceux qui fe préfenteront pour être
reçus officiers , tant du fiège préfidial que des fièges
qui y reffortiffent, mais qu’il ne pourra recevoir
que le ferment des notaires, greffier, procureurs,
huiffiers, fergens, & autres miniftres fubalternes.
Et à l’égard des confeillers du fiège préfidial,
des baillis, fénéchauxs, leurs lieutenans, affeffeurs-
& autres qui font des fondions de juges dans les
jurifdiâions royales, des greffiers, procureurs ,
huiffiers & concierges des prifons du fiège de Poitiers,
il eft dit qu’ils feront examinés, qu’ils prêteront
le ferment, & qu’ils feront reçus en préfence
de tous les officiers du fiège. Ce réglement paraît
fort fage, & mérite de recevoir une extenfion à
tous les' autres fièges, où il s’éleveroit des contef-
tations qui ne pourroient point fe décider par un.
ufage certain & bien établi.
6°. Des officiaux. On prétend que les officiaux
ne peuvent faire aucun aéte de leur jurifdiétion,
ailleurs que dans leur auditoire ou prétoire, fous prétexte
qu’ils n’ont aucun territoire; mais ce prétexte
eft une idée qui tient plus à la fubtilité du raifon-
nement qu’à la réalité du fait. Il eft vrai qu’ils ne
connciffent point des caufes réelles entre eccîéfiaf-
tiques, quoique cependant ils puiffent connoître,
f