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Paris, & cPun arrêt du 2,8 juin 1597, rapporté fur
cet article par Brodeau. Ainfi, quoiqu’un feigneur
ait titre pour un moulin banal, il ne peut, fans un
titre précis, attacher à un moulin à vent la banalité
qui étoit attachée à un moulin à eau. On a remarqué
qu’un moulin à eau étoit beaucoup plus
propre à faire de belle farine qu’un moulin à vent.
D ’ailleurs , il faut qu’un moulin pour être banal
puiffe être d’un fervice habituel, & ce fervice habituel
ne peut pas fe trouver avec le vent, qui ne
règne pas toujours.
Ainfi, dans les coutumes où la banalité eft attachée
de plein droit & fans titre à la direéfe , fi tous
les moulins banaux de l’endroit font à eau, le fei-1
gneur ne peut point rendre banal un moulin à vent
qu’il lui a plu de contraire. Il y a cependant des
provinces où la coutume admet des moulins à vent
à caufe dé la rareté des eaux : dans ces provinces
la banalité peut fubfifter avec ces moulins à vent,
ainfi que dans celles où l’ufage les a généralement
introduits fans que la coutume fe foit expliquée à
cet égard.
Nous obferverons encore que dans les coutumes
où la banalité eft attachée de plein droit à la
feigneurie , le moulin doit être placé de façon que
l ’eau puiffe le faire mouvoir habituellement , parce
qu’il eft de l’intérêt des habitans qu’on veut aflù-
jettir à la banalité, de n’y pas porter vainement
leurs grains & de n’ètre pas obligés de recourir
trop fouvent à un nouveau meûnier, fans quoi ils
feroient expofés à mille inconvéniens fous prétexte
de contravention.
Par une fuite du droit de banalité, les meuniers
étrangers ne peuvent pas venir dans les marchés
charger des grains qu’ils difent avoir été achetés
par des gens qui ne font point de la banalité de
l ’endroit, parce que fous ce prétexte il n’y a point
de fraude qu’ils ne pourraient commettre : c’eft ce
qui a été jugé au parlement de Paris le 5 août 17 6 1 ,
contre des meûniers qui venoient charger au marché
d’Aumale des grains qu’ils difoient être pour
des étrangers. Ces meûniers peuvent même être
valablement faifis lorfqu’ils ne font que paffer fur
le territoire de la banalité avec des chevaux ou des
voitures chargées de grains , à moins qu’ils ne foient
en étaf de prouver que ces grains appartiennent à
des particuliers domiciliés hors de la banalité. C ’eft
ce qu’a décidé le même parlement le premier août
1 7 6 1 , fuivant que le rapporte Déni fart.
S’il eft défendu aux meûniers étrangers de venir
charger dans des marchés hors de leur banalité,
il leur eft encore plus particuliérement défendu de
Venir, comme on dit, quêter dans d’autres banalités
que celle où ils ont leur moulin : les meûniers
de Carillon & de Villers-le-vert s’avifoient d’aller
quêter dans la banlieue de Ribemont où il y a des
moulins banaux. L’abbaye de S. Nicolas, d’où ces
moulins dépendoient, fe pourvut contre ces meûniers,
& les fit condamner au parlement de Paris
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par un arrêt du 17 juillet 1753 , l i t par l’auteur
de la collection de jurifprudence.
Moulins à draps , à huile, à écorce, à chanvre '
&c. Ces fortes de moulins peuvent être banaux ou
par un titre particulier, ou par lés difpofitions de
la coutume. L’article 8 de celle de Châteauneuf
porte que les gens de condition fervile feront
tenus d’aller moudre leurs grains , fouler leurs
draps & battre leurs écorces aux moulins banaux
du feigneur , à peine de foixante fous d’amende
& de confifcation de chevaux & de voitures.
La coutume d’Anjou autôrife le feigneur bas-
jufticier d’avoir moulin à draps & de contraindre
fes fujets, demeurans dans les trois lieues du moulin,
d’y aller fouler , à peine d’une amende de
douze deniers tournois par aune de drap, outre le
droit de foulage. Celle du Maine qui renferme
la même difpofition , ajoute la confifcation du drap,
fauf à le racheter pendant quinzaine.
La coutume de Bretagne admet pareillement la
banalité du moulin à draps pour ceux qui font dans
les cinq lieues de diftance du moulin. Mais, comme
nous l’avons dit, la banalité du moulin à grains
n’emporte pas celle de tous ces autres moulins
particuliers, il faut qu’ils foient banaux ou par des
titres ou par la coutume*
Banalité de four. Ce- que nous avons établi ait
fujet de la banalité d’un moulin , s’applique, à bien
des égards, à ee qui concerne le four. Le feigneur
qui a droit d’avoir un four banal, doit l’établir dans
le milieu du bourg de la feigneurie, afin qu’il foit-
également à portée de tout le monde : c’eft ce
qu’exige l’article 2,9 de la coutume d’Angoumois,
qui eft en cela conforme à l’ufage reçu.
Le feigneur doit tenir fon four en bon état,
fournir le bois néceffaire , avoir des prépôfés pour
le fervice du four, afin que les habitans ri’aient
d’autre peine que de porter leur pâte & de retirer
leur pain. Mais la banalité de ce four peut-elle
s’étendre auffi loin que celle du moulin ,( c’eft-à-
dire , tous ceux qui font dans la banlieue font-ils
obligés d’aller au four comme au moulin ? Taifand,
fur la coutume du duché de Bourgogne , dit que
les fujets du feigneur de Sainte-Colombe, éloignés
d’une lieue du rour banal, étoient en poffeffion
depuis 40 ans d’avoir chez eux des fours particuliers
, que néanmoins par arrêt du parlement de
Dijon, du 5 mars 1580, ils furent condamnés à
les démolir, fi mieux ils n’aimoient demander per-
miffion au feignent de les conferver & d’en ufer
comme par le paffé moyennant une redevance modérée.
Ce préjugé ne femble pas devoir faire une
loi générale dans les provinces où rien n’eft décidé
à çetégard par la coutume ou par les titres. Il n’eft
pas auffi facile d’aller à une lieue de diftance porter
de la pâte à un four que des grains à un moulin
: d’ailleurs la pâte peut fournir confidérable-
ment dans le tranfport, ou par le trop grand froid
ou par le trop grand chaud ; ainfi , il nous paroîtroit
fuffifant de donner au four banal un quart de lieue
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cfarrondiffement , fi mieux n’aimoit le feigneur
faire conftruire plufieurs fours dans l’étendue de fa
feigneurie pour ufer plus amplement de fon droit.
Au furplus, l’ufage introduit peut être à cet égard
d’une grande confédération, fur-tout s’il n’entraîne
point d’inconvéniens.
Ceux qui font fujets au four banal ne peuvent
point avoir de fours particuliers, ceci eft généralement
reçu. Ceux même qui font fur les limites
dans la banalité, ne peuvent point en avoir à
leur portée hors de cette banalité, de crainte qu’ils
ne s’en fervent au préjudice du four banal, & le
feigneur de fa propre autorité peut faire abattre ces
fours. C ’eft ce qui réfulte des difpofitions de la
coutume de Nivernois, qui feule paraît avoir prévu
cet inconvénient.
A l’égard de ces petits fours que les bourgeois
font conftruire chez eux pour la pâtifferie, il eft
fans difficulté qu’on les tolère aujourd’hui, pourvu
qu’on ne puiffe pas en abufer & qu’ils ne foient
pas affez grands pour qu’on puiffe y faire cuire à
la fois plus d’un boiffeau de farine. La raifon de
cette tolérance vient de ce qu’ils font deftinés à des
ufages pour lefquels on ne peut recourir à un four
banal.
Quand le four eft banal, perfonne n’en eft
exempt. Il n’y a d’exception que pour les maifons
religieufes, les collèges & les hôpitaux, parce qu’il
leur feroit trop incommode d’aller habituellement à
un four public. Cependant le feigneur n’en eft pas
moins en droit d’exiger une certaine indemnité pour
lui tenir lieu de fon droit de banalité.
A l’égard des boulangers publics, on trouve une
ordonnance de Philippe-le-Bel , de 1303 , par
laquelle il eft permis aux talemeliers, ç’eft-à-dire,
aux boulangers de Paris, où il y avoit des fours
banaux comme ailleurs, de cuire librement chez
eux le pain deftiné à être vendu. Cette ordonnance
a introduit l’exception pour tous les autres boulangers
du royaume : ils font difpenfés aujourd’hui
d’aller cuire au four banal le pain qu’ils deftinent
pour le public, fans qu’ils foient tenus pour cela
d’aucune indemnité envers le feigneur. Cependant
fi ce feigneur avoit un titre particulier nommément
contre eux, ils feroient obligés d’aller à fon
four. La chofe a été ainfi jugée au parlement de
Paris , par un arrêt dit 2.2 juillet 1760, en faveur
du fieur Bon , propriétaire du four banal deT o rcy ,
contre les boulangers de l’endroit, au fujet du pain
deftiné pour la provifion de Sedan : cet arrêt eft
rapporté dans la colleétion de jurifprudence.
La coutume de Poitou & celle de Touraine s’expliquent
fur l’exception introduite en faveur des
boulangers, mais en général cette exception n’eft
reçue que pour les pains blancs qu’ils débitent d’un
poids déterminé. A l’égard des gros pains qu’ils
vendent dans leur boutique , ils font fujets au four
banal, fuivant un arrêt du parlement de Paris, du
$>Amai 162,9, rendu contre les boulangers de Vendôme,
& cité par Leprêtre.
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Il en eft de même du pain qui concerne leur
ménage ; ils font obligés de recourir au four banal ,
fi mieux ils n’aiment payer une indemnité au feigneur
; fur quoi nous croyons que le feigneur
ne peut pas fe refufer à accepter cette indemnité
lorfqu’il y a lieu de la lui offrir, quand ce ne
feroit que pour obvier aux conteftations qui pourraient
s’élever tous les jours à ce fujet.
Le feigneur doit-il avoir fon four habituellement
prêt à cuire la pâte qu’on y porte ? On ne peut
guère donner de règles certaines à cet égard ; ceci
dépend du nombre des habitans fujets à la banalité.
Il y a des villes & des gros bourgs où l’on cuit
tous les jours & même deux fois par jour. Dans
quelques endroits, c’eft trois fois par femaine; dans
d’autres deux fois feulement, à certains jours déterminés.
Le feigneur ne doit pas être obligé de faire
chauffer fon four exprès pour le plaifîr & la commodité
d’un fimple particulier. En cas de contefta-
tion à ce fujet, c’eft au juge à faire un réglement
de police.
Mais il faut obferver qu’il eft d’ufage par-tout
que le fujet prévienne le fournier, dès la veille,
de la quantité de pâte qu’il doit faire cuire le lendemain
, afin que ce fournier fâche à quoi s’en
tenir pour chauffer un four plus grand ou plus
petit.
Le fournier de fon côté, lorfque fon four eft
au degré de chaleur convenable, eft obligé de le
faire (avoir à cri public, afin que chaque particulier
apporte fa pâte à temps. On doit fur cela fe
conformer à l’ufage reçu.
Les fourniers doivent s’abftenir de rien exiger
au-delà du droit établi, & de marquer des préférences
pour les uns au préjudice des autres. Le
feigneur eft refponfable de leurs délits ou de leurs
fautes; s’il étoit même certain qu’il les approuvât,
il y en aurait affez pour lui faire perdre la banalité.
Lorfque le pain n’eft pas bien cuit, ou qu’il l’eft
exceffivement au point d’être brûlé, le fujet peut
l’abandonner & le faire payer. Il en eft cru fur
les plaintes que peuvent lui occafionner l’humeur
& la tracàfferie des fourniers, parce que, comme
le remarque fort bien d’Argentré fur la coutume de
Bretagne, au fujet des meûniers, la préfomption
n’eft jamais pour ces gens-là, & le juge de police ,
fur une fimple citation, peut terminer tous ces
petits différends.
Lorfque le fujet contrevient à la banalité du
four, il encourt la confifcation, d’après la difpofition
de la plupart des coutumes, fuivant que nous
l’avons remarqué à l’égard de la banalité du moulin.
Banalité de preffoïr. C ’eft un droit qu’a le feigneur
d’obliger de venir preffurer à fon preffoir
toute la vendange qui fe fait dans la banlieue de
fon territoire. Ce droit n’eft pas fi général que
celui qui concerne les fours & les moulins; le
feigneur n’en peut faire ufage qu’autant qu’il lui eft
accordé par des titres valables.
L’établiffement des preffoirs banaux eft ancien:
A À a a.a %