
bailliage, d’une fénéchauffée, de connoître de certaines
caufes en première inftance, & privative-
ment à tous autres juges particuliers ou fubalternes.
Cette compétence a lieu en matière civile, criminelle
, eccléfiaflique , domaniale, municipale &
de police publique.
Compétence en matière civile. Suivant l’édit de Cre-
mieu, & autres réglemens poftérieurs, les baillis
ou les officiers des bailliages connoiffent, privati-
■ vement à tous autres juges, des matières féodales
, foit qu’il s’agiffe de droits honorifiques ou de
droits utiles , entre les feigneurs & leurs vaffaux,
ou entre deux feigneurs, toit que l’aâion foit per-
fonnelle, réelle ou mixte , pourvu cependant qu’il
foit queftion de l’exiftence, de la nature ou de l’étendue
des droits feigneuriaux; car, Vil ne s’agiffoit
que du paiement de droits utiles, non conteftés, la
connoiffance de cette forte d’affaires appartient aux
juges desjlieux.
Ils connoiffent, en fécond lieu, de toutes les affaires
perfonnelles entre nobles, & même lorfqu’une
des deux parties jouit de la nobleffe ; à l’exception
néanmoins de celles dans lefquelles il s’agit de fcellé,
tutèle, curatelle, partage de fuccefîion, même de
biens nobles, dont ils ne connoiffent que concurremment
& par prévention avec les juges des lieux.
Mais les caufes réelles dans lefquelles les nobles
font intêreffés, foit en demandant, feiren défendant
, doivent être portées devant le juge du lieu,
quand bien même ce feroit un juge feigneurial. A
l’égard des faifies-réelles des biens nobles, ils n’en
ont la connoiffance que lorfqu’elle a été faite en
vertu de leur fentence ; finon elle appartient au pre-*
mier juge dont on s’eft rendu appellant.
Ils connoiffent, en troifième lieu, par prévention
& en première inftance, des reconnoiffances
d’écriture privée , de la rébellion aux mandemens
& à l’exécution des ordonnances & jugemens émanés
des juges royaux : & concurremment avec les
autres juges royaux , de l’exécution des ordonnances
des officiaux, & de celles des’évêques, rendues dans
le cours de leurs vifites.
Suivant M. l’avocat général Talon, l’exécution
des commiffions données par le parlement appartient
aux baillis , à moins qu’il ne foit queftion d’une
eommifiion donnée en vertu d’un arrêt qui infirme
une fentence du bailliage : dans ce cas, l’exécution
èn eft renvoyée au plus prochain juge royal, quand
bien même il releveroit par appel du bailliage dont
la fentence a été réformée.
Les baillis ont la réception de tous les officiers
royaux de leur reffort, tels que les notaires & les
huiffiers. Ils reçoivent le ferment, & font l’information
de vie & moeurs des juges, lieutenans &
procureurs du roi des prévôtés royales, des baillis
& autres juges feigneuriaux. Ils peuvent même admettre
au ferment d’avocat les licenciés en droit,
après que leurs lettres de licence ont été vifées par
le premier avocat général du parlement dont ils
relèvent.
Ils ont l’infpeélion fur tous les juges de leur reffort,
foit pour les obliger à rendre affidument la
juftice , foit pour réformer les abus que ces officiers
peuvent commettre dans leurs fondions. C ’eft le
but des affifes que les baillis ou fénéchaux ont coutume
de tenir une ou plufieurs fois l’année, & auxquelles
font appellés les officiers des juftices de leur
reffort. Voye^ Assises.
11$ connoiffent, privativement à tous autres juges
, de l’exécution des lettres de grâce, des privilèges
émanés du ro i, des droits d’aubaine & de
bâtardife, de la légitimation des bâtards , de la na-
turalifation des étrangers, de l’établiffement des foires
& marchés , de la publication & enregiftrement
des ordonnances, édits & déclarations du ro i, de
la publication & enregiftrement des fubftitutions, &
des conteftations qui peuvent naître à caufe d’elles.
Ils connoiffent enfin privativement de toutes les
caufes où le procureur du roi du bailliage eft partie ,
& de celles des juftices inférieures de leur reffort,
à défaut d’officiers ou d’auditoire, parce qu’alors la
jurifdiélion leur eft dévolue de plein droit.
A l’égard des autres affaires qui font de la compétence
des' juges royaux, inférieurs aux bailliages ,
les baillis peuvent en connoître concurremment avec
eux, lorfqu’elles font portées en première inftance
à leur tribunal. Mais fi la caufe eft revendiquée par
le procureur du roi du fiège inférieur, ils font tenus
de lui en renvoyer la connoiffance ; il en eft de même-
par rapport aux juftices feigneuriales dont ils ne peuvent
retenir les caufes après la revendication du procureur
fifcal.
Les officiers des bailliages ne peuvent, feus aucun
prétexte, connoître des caufes qui.dépendent d’un
tribunal différent du leur ; telles font les caufes fôu-
mifes à la jurifdiélion des eaux & forêts, des élections,
des bureaux des finances, &e. Quoique portées
devant eux en première inftance ^ils font tenus
d’en faire le renvoi aux juges qui en doivent çon-
noître, fans attendre la revendication.
Ils ne peuvent aufli évoquer le fonds des affaires
pendantes devant les juges inférieursà l’occafion
des premiers jugemens qui leur font déférés par l’appel
, à moins que ce ne foit pour ftatuer fur le tout
définitivement par un feul & même jugement rendu
à l’audience.
Compétence en matière criminelle. Les baillis & les
fénéchaux font compétens pour connoître de toutes
fortes de crimes & de délits commis dans l’étendue
de leur jurifdiélion. Ils connoiffent même de ceux qui
peuvent être commis dans les forêts & fur les eaux,
pourvu que ces délits n’aient aucun trait à ce qui concerne
la chaffe ou la pêche, tels que ceux où il s’agit
de meurtres ou de brigandages. Ils ont la prévention
fur tous les juges de leur dépendance, même
pour les crimes dont ceux-ci peuvent connoître,
afin que les délits ne demeurent point impunis, par
la négligence des juges, dans la jurifdiélion defquels
ils ont été commis. Mais cette prévention n’a lieu
que vingt-quatre heures après que le délit a été comïms
dans les juftices des feigneurs, & trois jours
après qu’il l’a été dans les prévôtés ou châtellenies
royales. L’ordonnance de 1670 le règle ainfi.
Ils connoiffent exclufivèment à tous autres juges :
i°< Des cas qu’on appelle cas royaux, & dont on
trouvera l’énumération à l’article C as.
I a0. Des cas privilégiés concernant les eccléfiaf-
tiques.
30. De ceux où un eccléfiaflique ou un gentilhomme
peuvent être impliqués, en obfervant que,
fi l’eccléfiaftique ou le gentilhomme n’étoient qu’ac-
cufateurs, les autres juges pourroient connoître du
délit, fi ce délit ne formoit point un cas royal.
4°. Des crimes commis par des officiers de ju-
dicature dans leurs fonctions ou autrement.
50. Des délits commis dans l’enceinte du palais
de là jurifdiélion, quoique d’autres juges y exercent
des fondions particulières, ainfi que de ceux qui
font commis dans les prifons royales.
6°. De l’entérinement des lettres de grâce, de ré-
miffion, de pardon, d’abolition, de rappel de ban
& de galères, &c. Cependant , fi ces lettres étoient
obtenues par des gentilshommes, elles feroient dans
le cas d’être.entérinées dans les cours de parlement :
mais , pour des eccléfiaftiques, l’entérinement pour-
roit fe faire dans les bailliages & les fénéchauffées.
Quoique les cas prévôtaux appartiennent aux prévôts
des maréchaux de France, les baillis & les
fénéchaux ne laiffent pas d’avoir fur eux la prévention
, s’ils ont informé & décrété les premiers ou
le même jour : l’article 9 de la déclaration du 5 février
1731 ne laiffe à ce fujet aucune difficulté. Mais
il y a cette différence que, fi les,prévôts des maréchaux
ont prévenu , & que le délit foit de leur
compétence, l’accufé eft jugé prévôtalement & en
dernier reffort, au lieu qu’il ne l’eft qu’à la charge de
l’appel, fi l’inftruélion de fon procès fe fait wibailliage.
Compétence en matière eccléfiaflique & bénéficiai.
L’exécution de tout ce qui concerne la religion, le
maintien & la régularité dans la difcipline de l’églife,
eft de la compétence des baillis & des fénéchaux,
privativement aux autres juges royaux. L’arti,cle 50
de l’édit du mois d’avril 1^9 5 ; &. l ’article 2 de la
déclàration du 14 mai 1724, affurent pofitivement
cette compétence ; ils connoiffent, par la même
raifon , de tout ce qui regarde l’exécution des édits
& des déclarations donnés, au fujet de la religion
prétendue réformée ; ils ont droit d’empêcher qu’on
ne profeffe publiquement, dans le royaume, d’autre
culte que celui de l’églife catholique romaine ; de
réprimer les troubles, les fcandales & les abus .commis
par les eccléfiaftiques dans leurs fonctions., ,de
veiller fur - tout à la confervation des libertés de
l’eglife gallicane ; d’empêcher que les juges d’églife
n’entreprennent fur la jurifdiélion féculière, & même
d’évoquer, fans en demander aucun renvoi, les
caufes -qui ne font point de la compétence des officiaux,
en fe renfermant toutefois dans les bornes
de leur propre jurifdiélion, fans dépouiller les of-
ficialités des, affaires qui leur appartiennent naturellement;
car ils abuferoient de leur autorité, f i , par
exemple, en matière, de facrement, ils voulôient
fe rendre juges de la validité d’un mariage célébré
en face d’églife : un arrêt du 3 août 1700, rapporté
par Néron , a jugé cet article de la compétence des
' officiaux.
L’article, 23 de l’édit du mois d’avril 1695 > enjoint
pareillement aux baillis & aux fénéchaux de
• veiller à ce que les eccléfiaftiques qui poffèdent des
bénéfices à charge d’ames, réfident fur les lieux de
leurs bénéfices, qu’ils acquittent le fervice & les
aumônes dont ils font chargés, qu’ils fàffent faire
les réparations qui les concernent. Les juges doivent
les avertir de leurs devoirs, & en donner avis
aux fupérieurs de ces bénéficiers ; f i , trois mois
après cet avertiffement, les bénéficiers ne remplit
lent pî^s leurs obligations, le procureur du roi du
bailliage peut faire faifir jufqu’à concurrence du tiers
du revenu de ces eccléfiaftiques, pour être employé
aux oeuvres pies que leurs fupérieurs jugeront à
propos de déterminer.
Mais, pour ce qui eft des archevêques & des
évêques, les bailliages ni les fénéchauffées n’ont
aucune autorité fur eux : ces prélats ne font fournis
à d’autre jurifdiélion qu’à celle des parlemens.
Les baillis & les' fénéchaux ont aufli, à l’exclu-
, fion des autres juges royaux, la connoiffance de
toutes les conteftations qui peuvent avoir rapport
aux matières bénéficiâtes/notamment pour les complaintes
fur le poffeffoire ; car l’articlè 4 du titre 1 ^
de l’ordonnance de 1667 veut qu’elles forent pour-
fuivies pardevant les juges royaux auxquels là con-
noijfiance en appartient, & cette connoiffance eft attribuée
par l’article 13 de l’édit de Cremieu, aux
baillis & aux fénéchaux / à l’exclufion des autres
juges royaux.
La connoiffance du droit de patronage qui a rapport
aux bénéfices, appartient, par la même raifon ,
aux baillis & aux fénéchaux.
Mais pour ce qui eft des dixmes , 1a compétence des
baillis & des fénéchaux n’eft pas tôut-à-fait fi ab-
, folue à cet égard : il faut diftinguer /entre les dixmes
inféodées Si tes’dixmes eccléfiaftiques; les dixmes
inféodées qui font tenues en fief d’iïnè terre
de feigneur laïque, font de la compétence & des
baillis Sa des autres juges , même des feigneurs dont
elles relèvent, & cela par concurrence entre eux,
foit pour le pofféffoïrç, foit pour le pétitoire.
Si au contraire il s’agiffoit de dixmes eccléfiaftiques
entre eccléfiaftiques où religieux, l’official
pourroït en connoître, mais fimplement pour le
pétitoire ; cependant, fi un feigneur laïque étoit in-
téreffé dans la conteftation, ou qu’il fût queftion
de favoir fi la dixme pour laquelle on contefté, eft
inféodée ou eccléfiaflique, le juge, d’églife ne feroit
plus compétent pour en connoître; cette conteftation
appâ’rtieridroïf àu juge laïque : on voit, dans
les lnflitutions au droit français, par Coquille, que
la jphpfe a; été ainfi jugée par un arrêt du 18 jan-
[ vier 15 51.