
à fept jours pour aller d’Agde à Touloufe avec un feul
cheval, ou une dixaine d’hommes qui tirent la barque
à lacordelle; ils font fix lieues par jour, de 3 100
toifes chacune, & ne vont point la nuit.
La defcription que je viens de donner de cet ouvrage
furprenant eft bien éloignée de s’accorder
avec le tableau qu’en faifoit, il y a quatre ans ,
un écrivain célébré qui le comparant avec le grand
canal de la Chine, qu’on prétend avoir 200 lieues
de longueur, appelle le notre un miférable petit canal
déjà dégradé & prcfque hors (Pujâge..........aujourd'hui
tout enfablé, une efpece d'égout déparé par les refies
même defon ancienne magnificence. Ceux qui en avoient
fait cette peinture à M. Linguet, l’avoient - ils bien
examiné ? M. Belidor, l’écrivain le plus connu dans
ce genre, & qui étoit lui-même un ingénieur habile,
parle du canal comme étant devenu P admiration du
monde entier; il a dit ailleurs que toutes les nations le
regardent comme au-deffus de ce qu’a jamais pré-
fenté l’Archite&ure hydraulique. Archit. hydr. T.
IV. p. S 7 .& 3 S S .
Pour moi je me fuis affuré que ce canal n’eft en
aucune façon enfablé ni dégradé, qu’il eft plus utile,
plus floriffant & mieux affuré qu’il ne le fut jamais :
il eft aulîi grand que peut l’exiger le commerce intérieur
du royaume. On fonde chaque année tout le
long du canal; & par-tout oii il n’y a pas fix pieds
d’eau, on nettoie & l’on enleve les fables, on y fait
fans ceffe de nouvelles conftru&ions, de nouveaux
ouvrages pour le maintenir & en affurer la durée.
L ’ingénieur du roi en Languedoc , le directeur des
ouvrages de la province , y font chaque année leur
vifite , & je les ai vu applaudir, de concert, à la '
bonté & la perfection des travaux, à la vigilance &
à l’exaCtitude des infpe&eurs.
Le P. Duhalde convient que le canal royal de la
Chine eft dans un terrein uni, qu’il n’a que cinq à fix
pieds d’eau, & quelquefois trois pieds feulement,
qu’on a profité des rivières même , & qu’on fait encore
une journée par terre pour aller d’une riviere à
l’autre ; qu’il eft fujet à des dégradations & à des réparations
continuelles; enfin, qu’il n’a de mérite quë
fa longueuh Yoye^ le P. Duhalde, T. I. p. 3 3 . T. II.
p. i56'. mais on a beaucoup exagéré le mérite des
Chinois. Au refte, un femblablecanaloii il n’y a point
d’éclufes, n’étoit pas fi difficile à faire que la grande
muraille, il ne falloit que creufer, & les bras ne
manquoient pas dans un pays auffi fécond que la
Chine , & on ne les épargnoit pas fous des princes
tels que les fucceffeurs de Gengiskan ; mais on ne voit
point dans le canal de la Chine l’intelligence qui régné
dans toutes les parties du canal de Languedoc ; la
difficulté qu’il y avoit à raffembler dans les montagnes
des eaux difperfées fur une longueur de 15
lieues, à trouver le point de partage fix cent pieds au-
deffus des deux mers pour diftribuer des eaux qui
avoient eu de tout tems un cours fi différent ; tout
cela joint à l’immenfité des travaux qu’ont exigé toutes
les parties du canal de Languedoc, me-fait regarder
cet ouvrage comme une des merveilles du
monde.
Quand on a vu ce grand ouvrage avec foin, on ne
peut s’empêcher de rendre juftice à la vigilance de
MM. de Caraman & de Bonrepos, pour l’entretien
& l’amélioration de ce canal; trois à quatre mille
ouvriers font employés , dans les mois d’août & de
feptembre, entre la foire de Beaucaire & celle de
Bordeaux , à nettoyer & réparer toutes les parties
qui en ont befoin ; & s’il arrive quelque défaftre par
les pluies & les débordemens, on n’épargne rien pour
y apporter le remede le plus prompt & le plus fo-
lide, qui fou vent eft le plus dilpendieux ; le débordement
de 1766 à 1 76 7 , occafionna une feule réparation
de 200 mille livres du côté de Beziers, où
le canal qui eft à mi-côte, avoit été emporté par les
eaux, & caufa en tout cinq cens mille livres de réparations.
Celui de 1772 a caufé auffi une dépenfe
confidérable.
Il y a pour cette régie fept directeurs, deux inf-
pe&eurs, treize contrôleurs généraux & particuliers
, fept receveurs généraux & particuliers ,
dix-huit gardes à bandoulière, & une centaine d’é-
clufiers ou autres ouvriers qui font employés habituellement
au canal. Les fept directions font établies
à Touloufe, Caftelnaudari, Trebes , le Somail,
Beziers , à Agde, & dans lamontagne. La juftice eft
compofée d’un juge châtelain affimilé aux fénéchaux,
de fix lieutenans de juge, de fix procureurs jurifdic-
tionnels & fix greffiers : l’appel de cette jurifdiCtion
va directement à la grand’chambre.
Le défintéreffement & l’aCtivité de M. le comte de
Caraman, arriere-petit-fils de M. Riquet, lui ont tellement
concilié l’affeCtion de ceux qui concourent
à cette régie, que le zele de la chofe s’accroît
par l’attachement à la perfonne ; M. le marquis de
Caraman &M . de Bonrepos , propriétaires du canal
pour un tiers, entrent dans toutes fes vues & fécondent
toutes fes intentions ; je crois que fi 1e.canal
paffoit en d’autres mains, il feroit difficile qu’il ne
perdît quelque chofe du côté de la bonne adminiftra-
tion.
M. Andréoffi de Luc , qui avoit été employé à ce
grand ouvrage, dès le commencement, en fit graver
les plans dans le dernier fiecle, & les dédia à Louis
.X IV .
. On grava en 1697 , une carte du canal en trois
feuilles, chez Nolin, géographe ordinaire du roi ;
l’on voit tout-autour les élévations & les plans des
aqueducs, des éclufes du réfervoir de Saint-Ferriol,
du port de Cette, & une petite carte de ia province.
Mais en 1 7 7 1 , 1a province en a fait faire unecarte
beaucoup plus étendue & beaucoup plus belle, qui
a plus de fix pieds de long ; dont l’échelle eft d’une
ligne pour cent toifes, comme dans la carte de France ;
mais elle n’eft point en vente ; c’eft la province
qui s’en réferve les cuivres & qui en diftribue les
exemplaires; elle a fait auffi graver une grande carte
des rigoles & dé toutes les ëaux de la montagne noire,
qui foiirniffent au canal, fur une échelle cinq fois
plus grande , ou de cinq lignes pour cent toifes. Les
états de Languedoc font travailler à une carte de tout
le canal, fur cette même échelle de cinq lignes pour
cent.toifes,qùi doit paroître cette année (-i-774) ; elle
eft extraite d’un plan général que M. Garipuy a fait
lever avec foin pour régler les limites des héritages
voifins.
M. de Froideur publia dans le dernier fiecle une
petite defcription du canal,qn un volume in-12; mais
ce livre eft extrêmement ra re, & il s’en faut bien
qu’il contienne les détails qui viennent de faire l’objet
de cet article. M. Gunffy, juge-mage de Caftelnau-
da ry, qui travaille à l’hiftoire de Lauragais , .nous
fait efpérer des détails fur l’hiftoire du canal. M. Garipuy
feroit fur-tout en état de nous en donner une
defcription complette : elle devroit avoir l’étendue
d’un volume in-folio, avec beaucoup de figures, pour
contenir tout ce qu’il offre d’intéreffant : j’ai été fur-
pris de ne pas voir cet ouvrage en Languedoc, du
moinsmanuferit, non plus que la ftatue de M. Riquet,
auteur de cette prodigieufe entreprife ; c’eft ce que
dit M. le maréchal dé Vauban, lorfqu’iléu t vifitéle
canal pour la première fois.
Maisle fils de M. Garipuy eft occupé à extraire du
plan de M. fon pere celui de tous les ouvrages de
maçonnerie qui compofent le canal, avec un profil
de toute fa longueur; & quant à m oi, j’çfpere publier
une defcription plus détaillée que celle-ci, dans
un ouvrage féparé.
ï î y a dahs la province de Languedoê pîufïeurs autres
petits canaux, comme je l’ai dit ci-devant ( Be-
iidor T. I Y p • 3 $5.') ; l’on a fouvent parlé d’en faire
d ’ au t res » comme auffi de prolonger le canal royal
jufqu’à l’embouchure du Tarn ou jufqu’à Moiffac.
La navigation de la Garonne étant fort difficile juf-
ques-là, on prétend que ce prolongement ne coûte-
roit que deux millions, ( Yoye^ M. Expilly, Dicliori.
de La France, T. IY .p . 29,. au môt Languedoc ) l’expérience
que l’on à des Avantages immenfes du canalde
M. Riquet, fait qüe naturellement dans ce pays-là
l ’on doit être porté à de fetnblàbles entreprifes. ( M.
d e l a L a n d e .')
C anal de Pic ard ie . ( Archit.HydrauLj On
s’occupe depuis quelques années d’un nouveau canal
«ritre Saint-Quentin & Cambray pour joindre la
Somme à l’Efcàut, & faire communiquer Paris avec
la Hollande , fans courir les rifques de la mer. On
vo it qu’en 1731» les devis de ce canal avoient été
arrêtés par les ingénieurs ; il s’étôit formé pour lors
une compagnie, fous la protection de M. le maréchal
rie Chaitînes ; mais le projet ayant été interrompu, il
i l ’a repris faveur que depuis quelques années.
M. le comte d’Hérouville, lieutenant-général des
armées du ro i, connu par fes lumières & fon goût
pour les arts , avoit les plans de ce canal anciennement
faits par un ingénieur ; il les fit voirà M. Laurent,
télebre dans les mécaniques & l’hydraulique ( Voye^
fon éloge dans le nêcrologe de 1774.) ; celui-ci, avec la
protection de M. le maréchal de Richelieu, reffufeita
le projet, il fut chargé de l’exécution, il s’en eft
occupé jufqu’à fa mort, arrivée le 12 oCtobre 1773 ,
& M. de Lionne fon neveu , lui a fuccédé dans la direction
de ces travaux.
La tête du canal a. été fixée au village de S. Simon
dans le Vermandois, à peu de diftancede la branche
qui unit la Somme avec l’O ife , par le moyen d’une
échtfe fitùée à Chaulny, & qui paffe à la Ferre ; le
nouveau canal paffe à Ham, PerOnne & B on y, âü-
deffons dé cette ancienne petite ville ; il rentre dans
le lit de la Somme , qu’il n’avoit fait que côtoyer &
fe continue âinfi en paffant pârCorbie jufqu’âu deffous
d’Amiens. De l’autre côté, &-&u nord de Saint-Quentin
, le canal paflera fous une montagne dans la longueur
de 7016 toifes,dont il y avoit déjà 4200 toifes
de creufées en 1773. L’entrée de ce fouterrein eft au
’château de Tronquoy, utt peu au nord de Saint Quentin
, & la fortie au village de Vendhuille. M. Laurent
a fait percer fur cette longueur, à diftance« égales,
70 puits,'dont le plus'haut fera de 252 pieds; y
comprisfatour ; les autres Ont 195, 1 3 5 ,6 0 , &c\.
fuivant la fituation du terrein. Ce canal fouterrain
aura 20 pieds de haut fur 20 de large , le paffage de
l ’eau fera dè 16 pieds, fur 5 pieds de profondeur.
La fource de l’Efcaut eft de 60 pieds plus haute que
celle de la Somme. M. Laurent a pris l’Efcaüt à Vert-
dhüille quarante-cinq pieds plus bas que la fource, les
autres 15 pieds, dont l’Efcaut eft plus haut que la
Somme, fe trbuverontfôutenus par une éclufe, pouf
joindre enfemble ces deux rivières.
Le canal eft percé dans une pierre mélangée de
cailloux; On évalue à ib liv. pair toife Cube, là dë-
pehfe de l’efcarpement. Prefquè par-tout au-deffuS
<du canal, à 20 , 30 ou 40 pieds'de hauteur, on
trouve les bancs de pierre dure, mais dans quelques
parties on fêta obligé de faire des voûtes pour fou-
tenir la montagne.
On a âffigné pour ce grand ouvrage deux cens mille
francs par an , & l’on y emploie cinq à fix cens ouvriers.
M. de là Condamirte, dont la terre étoit près de
Ham, &-qui avoit admiré cette entreprife , l’a célébrée
par des vers que l’on trouve dans VEpître d'un
vieillard a un ami de fon dge 9 imprimée en 1773 »
’L'/iomfne depuis iNoé s'àffervijfant les mers
Avoit fu rapprocher les bouts de P univers,
Neptune étoit fournis, Pluton devient traitable f
La terre ouvre fon feïn & devient navigable.
( Le P. Bofcovich a traduit ce paffage çn latin, pàf
leSjVers fui vans :
Exemplo Noêmi hommes maria alta domando ,
Extremos miindi norant conjungere fines ;
Neptjino edomito, nunc tu quoque Pluto domaris ÿ
Francorum [mperio fub terras navibus itur.
Canal de V ersoix , (Archit. hydraul.) L’attention
avec laquelle j’ai fuivi & examiné le canal de
Languedoc en 1773 , fe rapportoit un peu à un autre
canal qu’on a projetté dans la province oii j’ai pris
naiffànce,& dont je defire beaucoup l’exécution. M.
Aubry, ingénieur en chef de la province de Breffe, a
çonfidéré que la jonction du Rhin avec le Rhône, parle
lac de Neuchâtel, feroit une chofe très-importante
pour la France >■ la Suiffe & la Hollande ; l’idée èn
a voit été prôpbfée dès le teins de Néron, mais l’u-
fage des éclufes que l’on emploie aujourd’hui, rert-
droit ce canal bien plus facile.
En cOnféqüence-, M. Aubry a commencé à nivel-
ler lès bords du Rhône, depuis Verfoix jufqu’à Sey-
fel ; il a reconnu, en même tems qu’il y avoit plus
d’eau qu’il n’en falloit pour àlimenter ce canal,fans fe
fervir du Rhône, dont le cours eft trop rapide, &
le lit trop dangereux, pour qu’on puiffe entreprendre
de le rendre navigable entre Genève & Seyffel.
Ce canal commencera au-deffus de Verfoix, la
riviere étant prife trois milles plus haut vers le moulin
de Sauverny ; il paffera à Ferney, puis au-deffous
de Côllonges, fous le fort de la Clufe , 62 pieds au-
deffus du Rhône, delà au pont de Bellegarae, vers
l’endroit où'le Rhône fe perd , & tombera dans lè
Rhône fous Geniffiat, fix millës aü-deffuS de Seyffel’,
à 24 milles de la tête du canal ou de Saiïverny ; la
chute du côté de Verfoix , fera de 250 pieds fur 3
milles de longueur, & du côté de Geniffiat, 607
pieds fur Une diftance de 24 milles ; le devis eft d’environ
huit millions. à caufe de la quantité de rochers
qu’il faudra efcarper,& qu’on évalue à mille francs là
toife couranté. Le Rhône a 114 pieds de pente depuis
le fort de la Clufe jùfqu’aù port de Geniffiat, fur une
longueur de 3 lieues, ôc. 3 57 pieds depuis Genev.e
jufqu’à Geniffiat,fur une longueur de 12 milles1; auffi
le canal décrit avoit environ cent éclufes, une partie
du Côté du lac de Genève, aufùd-eft, le refte dn
côté de Geniffiat 9 au fud-oueft de Verfoix. ( M. d e
l a L a n d e .)
C anal de Rà bOGA en Rùffiè. Ce canal entrepris
par le czar Pierre le grand, pour la communication
de la mer Baltique avec là mer Noire & la mer Cafi-
piënne, fut achevé en 1730 ; mais tout le projet n’a
pas eu lieu, foit que le terrein ait offert des obftacles
infurmontables, loit que la dépenfe ait effrayé les
entrepreneurs , ou que d’autres objets aient empêché
de conduire éelui-'ci au dégré dé perfection dont
il étoit fiifceptible.
La Hollande eft entrecoupée de canaux qui facilitent
extrêmement le-commerce. L’on' va par ce
moyen fort commodément & à bon marché d’un
endroit à l’autre, l’été en bateaux, & l’hiver, qu©
les eaux font gelées ,• en patins où en traîneaux fur
la glace.
On nomme càfiaux de P Y à Amfterdam , des car
riaux fort profonds qu’ôn a pratiqués auprès des
quais pour mettre les gros vaiffeàux marchands à
l’abri des orages & des glaces.
Canal de DrUSUS ;(Géogr. Arckitecl. Hydraul.)
en latin foffa Drufi, canal dans les Pays-Bas qui communique
depuis le Rhin près d’Arnheim jufqu’à
l’Yffel près de Doësbqvirg, & qui a été fait par