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Clô t à IRÉÏII, treizième roi de F r a n c e (première
race. ) fils 6c fucceffeur de Clovis I I , fut couronné
en 655 : il étoit âgé de cinq ans ou environ.
Il vécut fous la tutelle 6c fous l’empire de Batilde ,
fa mere, & d’Erchinoalde ou Archambault, maire du
palais ; quoiqu’il eût dëUx freres , Childeric II &
Thierri II, qui, fuivant l’üfage,dévoient être admis
au partagé d'e la monarchie , il la pofféda toute entière
, il régna feul, ou plutôt il fut feul fur le trône
jufqu’en 660 t ce fut à cette époque qu’il remit à
Childeric I I , fon frere, le fceptre d’Auftrafie ; il fe
contenta dé celui de Neüftrie & de Bourgogne qu’il
tonferva jufqu’à fa mort, qui fe rapporte à l’an 668.
Il reçut les honneurs funèbres au monaftere de Chelles
, où la teihe Batilde s’étoit confacrée : fon régné
n’eft riiarqué par aucun événement mémorable ; 6c
Thiftoire ne nous a point révélé quelle fut fa vie pri-
vée:il àvoït dix-neuf à vingt ans lorfqu’il mourut,& ce
n’eft pas à Cet âge que l’on peut avoir fait de grandes
chofes. D’ailleurs les rois de la première race, depuis
Dagobert I , ne furent point deftinés à jouer un rôle
•'bien intéreffant. Thierri I I , fon frere, qui jufqu’ators
•'.avoit vécu obfcur, lui fuccéda, par les foins d’E-
'broin ; mais la haine qu’on portoit à ce miniftre rejaillit
fur lui, 6c le roi en fut la vif^ime; on le confina
•dans l’abbaye de Saint Denis, d’où il ne fortit que
"lbng-tems après. ( M— Y . )
- § C L O U , (Arts rnich, ) Une obfervation effen-
'lietle à faire pour les perfonnes qui emploient les
'clous, c’eft qu’avant d’en acheter de groflës parties,
il faut les èffayer ; car on en fait de métal, fi aigre ou
caftant, . que fur cent clous qu’on emploie, il s’en
caftera peut-être plus d’un quart ; & quoique la perte
ne foit pas confidérabie , rien ne chagrine plus un
ouvrier qui perd fon tems & une partie de fa marchandife.
Cet ouvrier a calculé, par exemple, que
dans une garniture qu’il fait, il lui faut mille clous, 6c
qu’il doit refter une heure pour les employer ; il fait
fon marché fuivant cela, mais il fe trouve trompé,
fi les clous ne font pas bons ; car il mettra un quart
de tems de plus , & emploiera un quart plus de mar-
chandife, outre que fon ouvrage deviendra défectueux
, parce que les pointes de clous qui fe font
caftes, ne lui permettront plus de les placer dans des
endroits néceffaires ; cela découragera l’ouvrier avec
raifon. Ce détail n’eft point inutile, parce que fi c’eft
un homme de métier qui life ce paragraphe, ilèfpé-
rera que les marchands qui font ce commerce de
clouterie en gros, profiteront de l’avis qu’on leur
donne ic i, qu’ils eflayerontles clous avant que d’en
conclure les marchés, 6c qu’ils obferveront qu’ils
foient faits d’une matière capable de foutenir le coup
de marteau. Si l’on fe donne ces foins pendant quelque
tems, & qu’on rebute'tous ceux qui ne feront
■ pas de bonne qualité , les fondeurs de ces clous fe
conformeront néceffairement aux réglés requifes
pour faire de bonne marchandife , en employant de
bonne matière, qui ait un corps fuffifant, pour les
ufages auxquels elle eft deftïnée. Cette matière doit
être compofée de cent livres de laiton très-doux, &
de trois livres d’étain ou environ, fuivant la prudence
de Pouvrier, le tout fondu 6c moulé proprement &
fans fouflure. Pour les éviter, 6c pour que les fondeurs
aient foin de bien fécher leurs chaflis, avant
que d’y couler la matière fondue, il faut qu’ils obfer-
vent encore d’y laifler des évents convenables, 6c
que la matière foit fondue liquide comme de l’eau.
On voit qu’au moyen de quelque légère attention ,
on peut fe mettre à l’abri de tant de friponneries qui
fe commettent journellement dans ce genre de commerce.
Il en eft de même de toutes les autres qualités de
clous ; ainfi un marchand, qui fait le commerce de
ceu* de fer, doit examiner foigneufement la qualité
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du fer, avec lequel ils font fabriqués, qui doit être
fibreux, 6c par une fuite néceffaire doux & très-
flexible. En caftant quelques clous on connoît fi les
fers avec lefquels ils ont été faits font de la qualité
qu’ils doivent être. S’il paroît à la caflure de ces clous
des grains & des lames, le fer a été mauvais, & les
clous le feront par confequent, & très-fragiles ; fi au
contraire on a de la peine à les cafter, 6c qu’il paroiffe
fur leur caflure un grain fibreux, pareil à celui qu’au*
roit un morceau de bois qu’on auroit cafté en le forçant
des deux mains, cet indice démontrera la bonté
du fer & celle des clous.
, Les inconvéniens qui réfultent de l’emploi de cette
màuvaife marchandife font innombrables; on n’a
qu’à réfléchir fur les différens ufages auxquels elle
eft employée, & à l’importance des travaux qu’on
ne peut perfectionner fans le feeoiirs des clous, pour
convenir de la vérité de ce qu’on vient de dire. ( + ) •
§ CLOUÉ ,.EE , adj. ( terme de Blafon, j ypye{ la
planche fig. 2 24, de Y Art Héraldique, dans le
Dictionnaire raif. des Sciences , &ç.
C L O V I S - / « - Grand, cinquième roi de France $
(Hifioire de France. ) naquit vers l’an 468 de Childeric
Ion prédéceffeur, & de la reine de Thuringe qui ,
n’ayant pu vaincre fa paflion avoit quitté le roi Bazin
fon m ari, & etoit venue trouver ce prince en
France. Si l’on en croit Fredegaire, Childeric eut un
fonge qui préfageoit la grandeur de ce fils , & les
malheurs de fa poftérité. Les cinq premières, années
du régné de Clovis furent employées à des, exercices
conformes à fon inclination : il fomentoit le courage
de fes foldats, les accoutumoît à la fatigue , & s’y
endurciffoit lui-même : il donnoit fréquemment des
jeux publics ; & c ’etoit des courfes de chevaux, des
'Combats d’homme à homme, & contre des bêtes féroces
: il leur montroit fans ceffe. l’image de la guer-;
re» à laquelle il avoit confacré fon régné. Ses états
étoient trop bornés pour un coeur aufli ambitieux:
que le fien : il ne vouloir fouffrir dans les Gaules aucune
puiffance rivale de la tienne , & il afpiroit à eti
chaffer, ou à affujettir les Romains , les Vifigoths 6c
les Bourguignons, qui en partageoient l’empire avec
lui. Ses premiers regards fe tournèrent vers les Ror*
mains ; foit que fa fierté fût flattée de fe mefureri
avec les anciens rois du monde, foit que fa polit;-;
que fûtintereffée à les chaffer, plein de confiance
dansTes talens , dans la' valeur 6c l’intrépidité de fon
armée , il envoya fommer Siagrius, lieutenant de
l’empire Romain dans les Gaules, de convenir du
jour 6c du lieu d’une bataille. Les François furent
long-tems fideles à cet u fage, qu’ils apportèrent de
la Germanie , qui fut le berceau de leur nation : ils
dédaignoient toutes les rufes de guerre, 6c n’efti-
moient que les vittoires où la valeur avoit préfidé;
Vainqueur de Siagrius qui accepta le défit, Clovis
pourfuivit ce général ; 6c n’ayant pu l’atteindre , il
envoya des ambaffadeiîTs à Touloufe , fommer Ala-
ric, roi des Vifigoths, auprès de qui il s’étoit réfugié,’
de le lui livrer, & lui déclarer la guerre en cas de
refus. Alaric ne voulant point s’expofer à fon reffen-
timent, lui envoya le général vaincu, malgré les
droits de l’hofpitalité qv irendoient fa perfonne facréej
Siagrius avoit pour pt,re ce Gilon qui avoit occupé
le trône de France pendant l’exil de Chilperic; Clovis
lui fit trancher la tête, & l’immola ainfi à fa fûreté
& à fon reffentiment. Cependant ce qui prouve que
cette rigueur étoit autant dans fa politique que dans
fon humeur, ce fut fa clémence envers les Gaulois
& les Romains qui avoient obéi à Siagrius ; il leur
laiffaà tous leur religion, leur pays , leurs coutumes,'
leurs loix , & ne voulut d’autre prix de fa viftoire ,
que la gloire de leur commander. Cette douceur af-
fe&ée attacha ces peuples à fa domination : 6c il
n’eut pas befoin d’une autre magie pour les maintenu
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fous fa>puiffance. Les Romains avoient trop d’embarras
en Italie pour fonger à reconquérir ce qu'ils
avoient perdu dans les Gaules. L’entiere foumiflion
du Soïffônnois, fruit de la victoire des François fur
Siagrius fut fuivie de la guêrre de Thuringe : une
invafion, vraie ou fuppofée, fur les terres des Francs
au-dela du Rhin, en fut la caufe ou le prétexte.
Clovis accufoit les Thuringiens d’avoir exercé fur fes
fujets les plus monftrueufes cruautés : fes armes furent
fécondées par le plus heureux fuccès ; tout fut
mis à feu & à fang dans la Thuringe, 6c ce royaume
■ alloit être réduit en province fujette, lorfque rilluftre
Théodoric, roi des Oftrogoths en Italie , défarma
Clovis,6c l’engagea à fe contenter d’untribut annuel.
Une paix de plufieurs années fuccéda à ce traité; les
premiers mois furent confacrés aux nôces de Clovis
avec Clotilde. Cette princeffe , niece de Gondebaut,
roi de Bourgogne , jouiffoit d’uhe réputation qui fé-
duifit le monarque François : Clotilde étoit belle,
fpirituelle , & joignoit à ces heureufes qualités toutes
les grâces & toutes les vertus de fon fexe.Il eft cependant
à croire que le mérite de Clotilde, tout grand
qu’il étoit, ne fut pas l’unique motif qui détermina
Clovis à cette alliance : 6C ce n’eft pas trop préfumer
de la politique de ce conquérant, que de penfer qu’il
regarda ce mariage comme un titre qui l’autorifoit à
dépouiller .Gondebaut du royaume de Bourgogne.
Chilperic, pere de Clotilde, avoit péri par l’ordre
de Gondebaut, 6c fa qualité de gendre fembloit exiger
qu’il fut fon vengeur. La nouvelle époufe avoit
été elevée dans le fein de la religion : elle multiplia
fes efforts pour déterminer Clovis à fe plier au joug
de la foi. Ses premières tentatives furent infru&ueu-
fes : le monarque permit cependant que fes enfans
fuffent levés fur les fonts ; mais la mort d’Inguiomet,
fon aîné , qui mourut peu de tems après la cérémonie
, &. la maladie de fon fécond , qui fut aux portes
du tombeau , s’oppoferent aux voeux ardens de cette
princeffe, ils ne furent accomplis qu’après la bataille
de Tolbiac contre les Allemands. On prétend, que
Clovis, fur le point de perdre cette fameufe bataille,
& fatigué d’invoquer inutilement fes dieux, fe tourna
vers celui des Chrétiens, qui couronna fes efforts-.
Les hiftoriens lui prêtent une affez longue priere,
q ue , fuivant eux, il fit en préfence de fon armée-:
mais c’eût été une indifcrétion incompatible avec le
caraftere d’un aufli grand général ; ce n’étoit pas en
montrant fon défefpoir & en parlant d’abandonner
les dieux de fa nation qu’il pouvoit fe flatter de
ranimer le courage dé fes foldats , qui tous étoient
idolâtres. S i , comme l’ajoutent ces écrivains, il parvint
à exciter de cette forte l’ardeur des Francs, cette
ardeur doit être. regardée comme un miracle. La
déroute dea Allemands & des Sueves, leurs alliés,
fut complette, leur pays fut ravagé ; & tous les habi-
tans auroient été chaffés ou exterminés , fi le même
Théodoric , qui avoit déjà obtenu la grâce des Thuringiens
, ne fût parvenu à calmer le reffentiment
de Clovis. Les vaincus fe' fournirent, le roi leur permit
le libre exercice de leur religion, & leur con-
ferva leurs loix ; mais il fe réferva le droit de confirmer
i’éle&ion de leurs fouverains, auxquels il fut
défendu de prendre le titre de r o i, mais feulement
celui de duc. Cette conquête, qui ne coûta aux François
qu’une feule campagne, donne une haute idée de
leu): valeur. Les Sueves feuls avoient été long-tems
le défefpoir des Romains : Céfar avoit même regardé
comme fort glorieux d’avoir pu mettre le pied
dans leur pays. Clovis à fon retour fe montra fidele
au voeu qu’il avoit fait d’embraffer le chriftianifme i
il reçut le baptême par le miniftere de S. Remi qui
dans cetté augufte cérémonie lui parla avec une magnanimité
finguliere. « Sicambre, dit ce prélat en lui
adreflant la parole, autrefois ii fier, û farouche, S i
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que là grâce rend aujourd’hui fi humble , fi fournis*
plie le co l, adore ce que tu as brûlé, & brûle ce
que tuas adoré >». Remi eût parlé avec plus d’exactitude
, s’il eût recommandé à Clovis d’adorer Ce
qu’il eft impoflible de brûler ; mais là religion lui
pardonne en fàveür du faint ënthoufiafme qui l’ani-
moit. L’exemple de Clovis fut fuivi par une infinité
de François qui demandèrent le baptême. La c'onver-
fion de ce monarque ne nuifit ppint à fës deffeins ;
elle fervit au contraire à en accélérer l’exécution.
L’Eglife étoit infeélée de plufieurs feâes : le roi des
Vifigoths & celui des Bourguignons étoient Ariens j
& leur héréfie excitoit la haine des ortodoxes, qui
formoient le parti le plus puiffant * tous dévoient fe
déclarer en fa faveur contre les fe&aires. Tout le
clergé catholique, même celui de Rome, s’empreffa
de lui donner des marques d’eftime & d’amour. Le
pape , ou plutôt l’évêque de Rome , fuivant le ftyle
en ufage alors, lui parloit fans ceffe d’un dieu qui
devoit donner à fes armes les fuccès les plus écla-
tàns : il l’invoquoit dès-lors comme le proteûeur de
fon églife. « Très-cher., très-glorieux , très-illuftre
fils, lui difoit-il, donnez cette fatisfa&ion à votre fainte
mere : foyez pour elle une colonne de fer ; 'continuez,
afin que le tout-puiffant protégé votre perfonne
& votre royaume , qu’il ordonne à fes anges de
vous guider dans toutes vos entreprifes, 6c qu’il
vous donne la vi&oire ». Une femblable épitrë eût
été capable d’opérer la converfion de Clovis. II ne
tarda pas à entreprendre une nouvelle guerre ; i!
chercha tous les prétextes pour attaquer Gondebaut,
dont les états avoient allumé fa cupidité : les fouve^*
rains en manquent rarement. Gondebaut n’avoit
qu’une petite partie de la Bourgogne ; Godigifile ,
fon frere, en partageoit l’ empire avec lui. Ces deux:
freres nourriffoient l’un contre l’autre une fecrete
inimitié : cette inimitié, plus puiffante fur Godigifile
que les noeuds du fang, le détermina à folliçiter le
roi de France d’entrer en Bourgogne ; ce qui fut bientôt
exécuté. Gondebaut n’ayant pu arrêter l’impétuo-
fité Françoife , fut vaincu & pourfuivi jufques dans
Avignon : il ne conferva fes états qu’en s’affujettif-
fant à un tribut. Clovis avoit conjuré fa ruine ; il né
fe fût pas contenté de ce tribut ; il fit dans la fuite
plufieurs tentatives pour le perdre , 6c il eût réùflî
dans ce projet fans Théodoric qui ne vouloit pas
l’avoir pour voifin. La foumiflion des villes Armo-
riques, c’eft-à-dire ,de la Bretagne* fuivit l’expédition
de Bourgogne : il ne fut plus permis aux Bretons
d’avoir des rois pour les gouverner, mais feulement
des ducs ; ainfi tous les peuples établis dans
les G aules, étoient ou fujets , ou tributaires de no^
tre monarchie. Les Vifigoths feuls avoiént confervé
leur indépendance. Alaric ayant jugé à propos de
priver un évêque de fon fiege, Clovis affefia un faint
zele , 6c feignit de croire qu’il ne pouvoit fe difpen-
fer de prendre la défenfe de l’évêque dépofledé»
Alaric craignoit d’entrer en lice avec ce monarque :
fes fujéts abâtardis par le calme d’une longue paix *
n’étoient pas en état de fe mefurer avec les François :
il eut recours à la négociation ; mais il éprouva
qu’un prince armé par la politique , eft implacable^
Clovis l’accufa d’avoir voulu l’affaflinèr : il étoit bien
plus capable de lui fuppofer ce crime qu’Àlaric né
l’étoit de le commettre. Rien ne put calmer 1 indignation
feinte ou véritable du monarque François;
Théodoric, qui régnoit avec tant de gloire en Italie ,
6c dont le roi des Vifigoths avoitepoufe la fille, lui
écrivit les lettres les plus preffantes, qui toutes furent
infru&ueufes. Les François en partant pour
cette expédition ., firent un voeu qui etoit ordinaire
âux Cattes * l’une des principales tiges de leur nation
; c’étoit de ne fe couper les cheveux 6c la barbe
que fur les dépouilles fanglantes des Vifigoths. Clovis;