
leur nature foncière l’objet de la jurisprudence
qu’elles ont fait naître ; elles font poffédées par le
jroi, les eccléfiaftiques ôc gens de main-morte, ôc
par les particuliers. Les bois domaniaux font tenus
en gruerie, grairie, fegrairie, tiers Ôc danger, ôc par
indivis, autant de diüinâions qui dévoient multiplier
les.formes ôc les frais, ôc faire oublier dans
le code foreftier le fond même des bois pour les
marchés, ies conteftations ôc les fraudes qu’ils oc-
cafionnent. Auroit-on dû s’y occuper davantage de
leur entretien, de leur repeuplement, de l’augmentation
de leur mafle, ÔC s’étendre plus qu’on ne l’a
fait fur les bois des particuliers ÔC les bois fegrais ?
Les plantations éparfes dont la réunion pourra former
un jour un objet important, ne devroient-elles
pas y trouver de la proteâion ? ôc puifque le luxe
confomme la part du pauvre, ôc qu’il n’y a que
les bois blancs dont le prix lui foit acceflible, ne
feroit-il pas à propos d’ajouter à ce code des dif-
pofitions qui tendiffent à favorifer les plantations
des bois de cette nature? C’eft ce que nous n’ofons
décider; mais il eft certain que ces queftions méritent
d’être examinées dans Varticle Forêt.
Jufqu’à préfent nous n’avons vu dans la culture
des plantes qu’un art fimple, qui raffemble les dons
de la nature, qui fuit de près fes procédés, ou qui
fe contente de les favorifer. Il s’agit maintenant de
l’enrichir & de l’améliorer, en la fubjuguant: on feront
tenté d’appeller inftitution des plantes cette dernière
partie de leur culture.
En effet, foit que prenant pour modèles ces pré-
cieufes anomalies que nous offrent des graines heu-
reufement fécondées, on s’ attache à croifer les races
pour fe procurer de nouvelles variétés » foit qu’en
abouchant les vaiffeaux des écorces, on oblige un
arbre ftérile à fe charger des plus beaux fruits, ou
qu’on les améliore encore par le choix du fujet auquel
on en confie le bourgeon ; foit enfin qu’en réprimant
le luxe de la végétation on gouverne une
feve indocile , qu’on l’oblige à s’élaborer en l’arrêtant
dans les branches fécondes, ôc qu’on la verfe,
pour ainfi dire, d’une main habile dans les veines
du fruit qu’elle va grofîir ôc perfectionner, on fe
rend maître des plantes par ces ingénieufes méthodes
, on les façonne à fongré-
Les premiers principes dont elles dépendent découlent
du type végétal, ôc doivent fe trouver dans
l'article Plante ; les féconds s’appuient fur les phénomènes
de la végétation : les uns & les autres font
la bafe des articles didactiques, Variété, Greffe,
Élaguer.
On élague pour élever Ôc drefler le tronc des arbres
, fans nuire à leur groffeur proportionnelle, ôc
quelquefois auffi dans la vue de donner différentes
formes à leurs touffes ; il ne fera pas queftion dans le
dernier article de cet objet d’agrément.
A l’égard des arbres fruitiers, on ne fe borne pas
à les élaguer, on les foumet à la taille q ui, par îon
importance , mérite un article particulier : fi la com-
pofition de ce morceau nous étoit confiée, nous
n’aurions garde de ne confulter que notre propre
expérience ; on ne peut faire mieux que de s’en rapporter
aux lumières du favant abbé Chabol qui n’a
fait lui-même que perfectionner les méthodes éprouvées
depuis plus d’un fiecle par les ingénieux cultivateurs
de Montreuil. Cet article ne doit préfenter
que les réglés communes à . tous les fruitiers : c’eft
dans les articles particuliers de chaque efpeç.e que
feront décrites les méthodes particulières de les tailler
; mais les treillages ôc les abris qui leur conviennent,
appartiennent de fi près à la taille, qu’on feroit
fâché de n’en pas trouver la defcription dans cet
article.
Les arbres fruitiers nous ont conduit au jardinage ;
ils en font la meilleure partie. Quel plus grand plaifit?
que de voir réunies dans les vergers leurs efpeces
les plus précieufes ; d’efpérer au printems dans leurs
belles fleurs ces fruits dont les teintes différentes
annoncent aux yeux autant de nuances de faveur, qui
doivent charmer ie goût !
Les vergers méritent un article particulier : le
choix du terrein, la préparation du loi oit l’on doit
les établir, ôc fur-tout leur entretien, fourniffent la
matière de cet article. On ne peut guère omettre d’y
parler de la cueillette , du tranfport ôc delà confèr-
vation des fruits ; car puifqu’en Botanique on appelle
fruit toute femence pourvue de fon enveloppe ,
quand même cette enveloppe n’eft pas comeftible ,
l’article Fruit ne peut rien préfenter que de généra!.
Relativement au potager, le Traité de CArt du
Jardinier fe trouve bien avancé dans, les articles di-
daâiques qui ont rapport aux fruitiers, aux herbages
ôc aux légumes, ôc dans les articles particuliers
de ces plantes : à l’égard des derniers, il eft k
obferver que certains font plus connus par leurs
noms de jardinage que par leurs noms dé Botanique;
on ne peut cependant déroger en leur faveur à
l’ordre que nous adoptons; ils feront traités fous
le dernier ; mais on trouvera les premiers à leur
place dans l’ordre alphabétique, avec des renvois
à ceux-là.
Pour compléter cette partie, il ne reftera donc
plus à traiter que Y article Potager ; il doit porter
fur fon emplacement, fon expofition,fes commodités
, la préparation des terres, les inftrumens, les
couches, les ados, &c.
Lenom,rhiftoire ôc la culture des plantes fari-
neufes ÔC huileufes, ôc de celles qui procurent au
bétail un bon aliment, compofentune grande partie
de l’agriculture : comme cette partie eft du refforf
immédiat de la Botanique , fes détails fe trouvent
naturellement fur la route que nous fuivons ; mais
l’Agriculture préfente auffi dçs vues générales. Cette
foule d’herbes diverfes dont la nature a tapiffé les
vallons, les prairies naturelles demandent un article
particulier ; les plantes y croiffent pêle-mêle dansi
une forte de fociété : c’eft de fon enfemble qu’il
s’agit, ôc non pas des efpeces qui la compofent.
Dans le nombre des opérations qui peuvent faire
profpérerles prairies, trois fur-tout parodient très-
importantes : en faire le dénombrement pour con-
fèrver lés plantes falutaires ôc les purger des herbes
inutiles ou nuifibles , y verfer périodiquement les
eaux des coteaux voifins , y répandre enfin les fub-
fiances nutritives que renferme la terre ; tels font
les procédés qui doivent être foigneufement décrits
dans cet article.
Soit qu’on confidere les engrais comme un levait*
qui produit dans la terre une fermentation propre à
l’atténuer ôc à mettre fes principes en mouvement,
foit qu’ils lui reftituent en effet les fucs épuifés par
les précédentes récoltes, ils n’en font pas moins
famé de l’agriculture : l’expérience a fait découvrir
plufieurs efpeces nouvelles d’engrais, on a perfectionné
l’ufage des anciens, c’eft dire allez que cet
article .mérite un fupplément..
Les défrichemens font la meilleure conquête qu’on
puifle faire : ils fuppofent le defféchement des marais
, ainfi les hommes, en reçoivent le pain ôc la
fanté. Cette partie importante a été traitée de nos
jours de la maniéré la plus fatisfaifante : on ne peut
guere ajouter aux lumières que la fociété économi- .
que de Berne a raflëmblées fur cet objet ; mais un
ouvrage encyclopédique les doit recueillir.
Lorfqu’un terrein ëft défriché , il s’agit d’en préparer
le fol : la charrue doit le déchirer dans tous les
fens pour le brifer ôc l’ameublir. L’effet du labour ne;
fe borne pas à rendre la terre perméable aux racines $
la glebe expofée par plufieurs faces aux influences
de l'air, aux rayons folaires, aux météores aqueux,
eft pénétrée par les principes fécondans que lui portent
ces véhicules ; elle s’efirichit de nouveaux fucs,
ou du moins elle répare ceux dont elle eft épuifée.
L’importance des laboûrs défend de rien négliger
d’effentiel dans l’article qu’ils doivent remplir.
Ici s’offre à nos yeux une vafte carrière. Une foule
de connoiffahces avoifinent l’agriculture s lé premier
des arts devoit avoir, avec les autres, autant de
relations qu’en a le coeur avec tous les reflbrts de la
v i e , qui en reçoivent l’impulfion. L’agriculture a rapport
à l’économie politique par fon objet , à la jurisprudence
par les aftes dont elle» eft l’origine, à la
finance par l ’afliette de l’impôt, au commerce par
fes matières, à la zoologie Ôc à l’art vétérinaire par
les animaux qu’elle a fubjugués, à la méchanique
par fes agens.
Mais ces relations font trop éloignées pour entrer
dans notre plan , & c’eft véritablement ici que l’agriculture
celle de faire partie de la Botanique.
Rentrons au centre de notre objet. 11 nous refte
à parler de l’ufage des plantes : il s’étend aux alimens,
aux médicamens, aux arts ôc aux métiers, à la décoration
des jardins, ôc aux. complémens des collections
curieufes ôc favantes.
Ce n’eft point l’art qui a découvert les plantes alimentaires,
c’eft. plutôt l’inftindl ôc le befoin. Les
hommes mangeoient des glands ôc grilloient les
épis du bled', bien avant que leur efprit fût capable
de confulter l’expérience & l’analogie ; mais la con-
noiflance de l’effet de ces plantes fur ^économie anir
male , n’a pu être au contraire que le fruit d’une
longue obfervation : lorfqu’on a vu les mêmes phénomènes
fuivre conftamment l’ufage de ces plantes,
ori a pu connoître leurs effets : long-tems ils ont été
peu fenfibles ; un peuple fobre ôc robufte ne devoit
guere fe refleurir des qualités d’un aliment fimple ÔC
quelquefois unique : Ge fut feulement iorfque par
les voyages pn fe fut enrichi des plantes alimentaires
de diverlés régions , Ôc fur-tout lorfqù’une vie
moins uniforme eut produit des changemens dans la
conftitution des hommes, que les effets des plantes
nutritives durent être fenfibles ôc divers.
Ces plantes étant en grand nombre , ôc indigènes
de divers climats, ôc devant agir fur des tempéra-
mens différens , leurs effets ont dépendu dès-lors de
plufieurs caufes, ôc ont dû être par-là même plus
difficiles à faifir. Il importe d’autant plus de les con-
noître , que les1 alimens agiflant continûment fur
l’organe de la digeftion, fur la nature du fang ôc des
humeurs, ils font peut-être les remedes les plus
efficaces comme les plus doux. Il convient dont d’annoncer
les qualités des plantes alimentaires dans
leurs articles particuliers ; mais pn ne doit le faire
que d’après les plus grands médecins, & dans la plus,
grande défiance de l’efprit de fyftême qui régné autant
dans cette partie de l’hygiene ôc de la thérapeutique
, que dans les autres provinces de la médecine.
Quoique la plupart des plantes pharmacopoles
n agiflent guere que, comme les alimens, avec beaucoup
de lenteur,. on ne peut refufer à un certain
nombre dés qualités altérantes ôc d’un prompt effet.
Et quant meme on ne fauroit pas que le bois du
g a y a c , ôc les bourgeons du pin & le quina font des
fpécifiques contre trois maux cruels, leroit-il poffi-
ble de douter que la nature eût refufé à l’humanité'
des remedes aftifs ôc efficaces dans un régné oit la
fureur homicide a trouvé des poifons ?
Autrefois peut-être on connoiffoit plus de plantes
douées de vertus fingulières , qu’on n’en connoît à
préfent. Un heureux hafard en avoit fans doute indiqué
quelques-unes, ôc la voie de l’épreuve en
avoit fait découvrir d’autres. Les remedes éprouvés
formoient toute la médecine des anciens. En Egypte1,
à Babylone, on expofoit les malades des ant les portes
, afin que les pâflans puflent leur indiquer des remedes.
La pharmacie n’emplôyoit encore que les
lotions ôc décodions. Long-tems la médecine des
Arabes ne confifta guere que dans l’ufage de certaines
plantes, & c’eft à quoi celle des jongleurs de
rAmérique fe borne aujourd’hui : quoi qu’il en fo it ,
les Sauvages ont trouvé de bons remedes dans le
régné végétal ,ô c fur-tout des contrepoifons infaillibles.
A l’égard des peuples policés, ils n’eurent pas
plutôt renoué le fil des connoiflances qu’on devoit
à Hippocrate , qu’ils ne voulurent plus abandonner
au hafard, ou au danger d ’une épreuve aveugle, la
découverte des vertus des plantes ; ils fe flattèrent de
trouver dans la chymie qui venoit de naître en
Orient, un moyen fûrde les reconnoître. Ils crurent
pouvoir enchaîner les plantes par l’analyfe forcée
, ôc les obliger à déclarer, pour ainfi dire, leurs
fecrets; mais plus fouples que Protée , elles ont
échappé à la.curiofité deschymiftes , dans le nombre
des principes végétaux mis en défordre par l’action
du feu, les plus fubtils ont difparu , Ôc d’autres
ont quitté leur bafe, pour former de nouveaux com-
pofés : il n’y a guere que les plus fixes qu’on ait pu
dégager dans cette efpece d’analyfe. Comme on dut
être déconcerté , lorfqu’on obtint les mêmés réful-
tats des plantes très différentes ! lôrfqu’on retira,
par exemple , comme l’atteftent lés Mémoires de
l'académie des fciences, des principes femblâbles ÔC
dans la même quantité du ftramonium vénéneux ôc
du choux falutaire.
Rebuté par ce mauvais fuccès, ôc n’efpérant plus
rien d’un élément féroce ôc deftrufteur, on eut recours
à une menftrue toute oppofée. On efpéra que
l’eau dont l’aélion eft lente ôc modérée ôbtiendroit
ce qui avoit échappé au feu ; mais les macérations
ôc triturations n’ont fouvent tiré de plantes différentes
que les mêmes fels qui fe font trouvés quelquefois
lemblables aux fels minéraux. Si cette ànalyfe
en a découvert dans plufieurs qui tenoient à l’èffence
même de la plante, parmi ces fels eflentiéls, il n’en
eft que très-peu dont l ’efficacité foit bien conftatée.
Cependant on a éprouvé que , fi les fubftances
animales font trop analogues a nos humeurs pour y
produire quelque changement notable, les minéraux
au contraire en different trop pour ne pas y
caufer dans plufieurs cas* une funefte révolution.
Quoique les plantes par leur commerce avec le
régné minéral ne puiffent que fe pénétrer de fes
principes, ils y font tellement atténués, modifiés,
édulcorés par la filtration , qu’elles femblent avoir
été fpécialement deftinées par la nature à là cura*-
tion de nos maux.
Combien donc n’eft-il pas déplorable que nous
ayons fi peu de connoiflances fur la vertu des fim-
ples : le nombre de ceux auxquels on en a reconnu
eft fi petit en comparaifon d’un foule dont les propriétés
ne font pas même foupçonnées : on en attribue
de fi diverfes aux mêmes plantes , ôc de fifem-
blables à des plantes différentes , qu’il faut regarder
la thérapeutique végétale comme ttés-défeélueufe.
Ainfi, à l’égard des plantés ufuelles,, que l’on con-
fulte plutôt l’expérience des plus grands médecins
que l’étalage faftueux des pharmacopées, afin de
n’annoncer dans leurs articles particuliers que leurs
vertus les moins équivoques.
Il étoit aifé de s’affurer de l’utilité des plantes
relativement aux arts & aux métiers ries effets des
gommes, des réfines, des jus colorans, des fubfi-
tances huileufes, &c. n’avoient rien qui ne frappât
les fens, ou du moins quelqu’accident a dû bienttô