
préférer à toutes les autres , les boëtes de fer blanc
des étrangers , terminées par un culot de fer , à leur
bafe inférieure : on a renfermé dans ces boëtes, au
lieu déballés de plomb du calibre des fufils de munition,
41 balles de fer battu dont les diamètres
font plus grands pour les pièces de 12 , moindres
pour les pièces de 8, & plus petits encore pour les
pièces de 4. Nous ne répéterons pas ici ce qu’on
peut lire au mot Artillerie de campagne ou de ba-
tâilLe, Suppl, nous y ajouterons Amplement qu’il n’a
pas paru aux partilans de l’ancienne Artillerie qu’on
pût rien conclure des épreuves qui ont été faites
fur cette maniéré d’employer le canon de campagne ,
finon que, dans des circonftances à peu près fem-
blables, on aura à-peu-près les mêmes réfultats. Mais
quand ces circonftances fe trouveront-elles les mêmes
à la guerre ? Suivant le tableau de ces épreuves,
les pièces de 12 ont porté à 300 toifes, 18 balles
dans un but de planches de fapin, épaiffes d’un pouce
, haut de 8 pieds &: long de 18 toifes; les pièces
de 8 à la même diftance, ont por-té au feyt 12 balles,
& celle de 4,11 balles à la diftance de 2"fb toifes* Mais
ce qu’il faut bien remarquer, c’eftqu’il n’y a que
quelques-unes de ces balles qui aient percé le but &
que le plus grand nombre n’a fait que des contufions,
fur les planches de fapin.
On a de plus obfervé que l’étendue horizontale
de tous les coups, a été de 14 à 18 toifes, fur une
hauteur de 8 pieds : or le cône de projeôion ayant
fon diamètre horizontal de 18 toifes , il eft naturel
depenfer que fon diamètre vertical avoit la même
dimenfion,.& que, par cônféquent, partie des balles
a paffé par-deffus le, bu t, partie a donné à terre &
ne l’a pas touché, & que partie de celles qui l’ont
atteint, l’a frappé très-haut. On a remarqué, en fécond
lieu, que les contufions dans les planches, ne
peuvent être attribuées qu’adx mobiles auxquels des
circonftances favorables ont fait faire des ricochets.
Mais lorfque le terrein qui fera entre, l’ennemi &
la batterie , fera mou , labouré , couvert d’arbuftes
ou de plantes fortes & ferrées, lorfque la batterie
fera plus ou moins élevée, lorfque l’efpace qui la
féparerade l’ennemi, fera creux, les ricochets n’auront
plus lieu & l’efFet des coups fera fort différent
de celui des épreuves où le terrein fec & uni & phi-
fieurs précautions ont concouru à produire des effets
moins défavorables qu’ils ne le feroient à la guerre.
On convient qu’on peut comparer le but de 18
pieds de long, fur 8 pieds, de hauteur, à un corps
de cavalerie, comme l’ont fait les novateurs : mais
quelque ferrés que foient les chevaux, il y a du
vuide entre eux & entre les cavaliers, enforte qu’on
cro ît, pour cette raifon & celles, qu’on vient de rapporter,
pouvoir diminuer de moitié le nombre des
balles qui ont porté à de grandes diftances ; réduire
encore à moitié , le nombre de celles-ci, par rapport
à la grande quantité qui n’a fait que de foibles
contufions fur le bu t, par ricochets, & qui ne feroit,
vu leur petifeffe & leur légéreté, qu’un bien
léger effet fur la cuiraffe , & même fur le bufle du
cavalier & fur le harnois du cheval, en fuppofant
d’ailleurs un terrein favorable au ricochet.
Si les cartouches font dirigées fur un corps d’infanterie,
continuent les partilans de l’ancienne Artillerie
, les vuides, car nous le répétons, il n’eftpas
queftion ici d’un exercice de parade & d’un terrein
choifi, rendront beaucoup de balles inutiles, ainfi
que toutes celles qui pafferont à une hauteur de 5
pieds 5 à 6 pouces ; d’où l’on conclut qu’on doit
beaucoup rabattre de l’effet promis de ces .coups à
cartouche , tirés à de trop grandes diftances , lequel
ne fera jamais comparable à celui d’un boulet qui,
projette avec unéfpiece bien proportionnée, pren-
droit d’écharpe une troupe à pied ou à cheval ; &
il eft à remarquer qu’il fera toujours plus facile dë
prendre des prolongemens &c de croifer fes feux
avec des pièces longues , qu’avec des pièces courtes ;
& que les- effets en feront plus décififs à caufe de
l’étendue de leur portée de but en blanc & de ûrjufi
teffe de leur direftion. Si l ’on prend la peine de
comparer la dépenfe & l’embarras de çescoups à
cartouche, avec l’effet-qui doit en réfulter on
pourra réduire ces canonnades à leur vraie valeur.
« Si pour le malheur de l’humanité ( c’eft l’auteur
de l’effai fur l’ufage de l’artillerie qui parle) les in-
convéniens de la pratique ne diminuent rien des ravages
dont les épreuves des nouvelles cartouches
menacent les troupes à découvert, tout l’effet de$
boulets, à l’avenir, fie réduira aux portées extrêmes
tk contre les troupes retranchées ou placées dans des
villages & derrière des haies , comme en Flandre
ou couvertes par des abattis, par des paliffades ,&d.
Quoi qu’il enfoit, jufqu’à ce que tout foitbien conf-
taté par une bonne expérience de guerre, je ferai
toujours d’avis qu’en prenant, pour fe mettre en
mefure avec les ennemis , un plus grand nombre de
ces nouvelles cartouches qu’on en portoit des anciennes
, l’approvifionnement en boulets foit au moins
le même qu’autrefois ; car fi l’on donnoit aux cartouches
à balles, la préférence en nombre dans le même
rapport qu’on la leur donne pour les effets un
ennemi qui en feroit informé ( & de quoi ne l’eft pas
un ennemi a û if? )’ auroit plus d’un moyen de nous
en faire repentir.
A propos de cette fuppofition , il me pàffe par
la tête une idée qui paroîtra peut-être bien folle,
mais qui n’eft pas fans fondement. Le maréchal de
Saxe qui n’ignoroit pas^ que l’effet deftru&if du canon
a fait négliger ou méprifer les armes défenfives,
fouhaitoit cependant qu’on en renouvellât l’ufage, &
que l ’on armât d’un bopclier de fa façon, & à l’épreuve
de la balle, la meilleure infanterie. Il auroit
appuyé bien plus fortement fur fon projet , s’il avoit
pu prévoir que, quelque tems après lui ,1e principal
eff|f:de l’artillerie de campagne confifteroit à porter
fflr les bataillons des cartouches remplies de balles
de fer battu, dont un grand nombre ne percç pas
feulement des planches de fapin d’un pouce d’épaif-
feur. Il feroit fort plaifant, qu’à force de vouloir
multiplier, les ravages du feu, on parvînt à l’éteindre ;
qu’au lieu de fe laifîer détruire de fi loin par de petites
balles, l’infanterie couverte de fes boucliers
marchât généreufemerit aux combats de main , où
le plus brave & le plus ingambe a tant d’avantages.
Qü’arriveroit-il alors ? L’artillerie reprendroit fes
boulets , & ma maxime toute fa force. Les boulets
font généralement plus 'de ma.1 aUx ennemis que les coups
a mitraille ». ■■■•. ...
Ce n’eft pas que l’eftimable auteur que nous
venons de tranferire, & tous les anciens officiers
d’artillerie, ne connoiffent le prix du canon
tiré à cartouche ; mais ils ne le jugent vraiment
meurtrier que lorfqu’on eft fort près de l’ennemi,
c’eft-à-dire , à foixante ou quatre-vingts toifes, tout
au plus. Ils préfèrent d’ailleurs à toutes les cartouches
les balles de plomb de munition renfermées
dans un fac de toile légère. Plufieurs expériences dé
guerre appuient cette opinion ; & celle qui fut faite
en 1760 à la Fere, convainquit tous ceux qui en furent
témoins, que les balles renfermées dans des
facs de toile, étoient préférables aux mêmes balles
de plomb & de munition renfermées dans des boîtes
de fer blanc, & que les unes & les autres percerent,
à foixante-quinze & cent toifes desmadriers de chêne
épais d’environ deux pouees ; effet bien différent de
celui que firent les balles de fer battu dans les expériences
de Strasbourg.
Il s’eft trouvé dans tous les tems des gens à projets
qui
qui ont propofé des changemens dans l'artillerie, &
d’alléger les pièces de canon pour la facilité des manoeuvres.
Les partifans de l’ancien fyftême rappellent
à cette occàfion les avis du fage M. de Valie-
r e .^ k ) >> Je dois avertir, écrivoit ce favant militaire
, les officiers d’artillerie qui fe laiffent emporter
à leur zélé, qu’on ne peut ufer de trop de cir-
confpeûion dans les changemens qifon voudroit
propofer pour l’artillerie. Il n’appartient qu’à une
expériencelongue & réfléchie de préfenter des projets
fur une matière fi importante & fi compliquée.
On doit fuppofer que les incônvéniens qu’on croit
appercevoir, s’ils font réels , ont dû paraître tels à
nos prédéceffeurs , & qu’on ne les a laiffé fubfifter
que pour enéviter de plus grands. Souvent même les
changemens qu’on propole Comme nouveaux ont
déjà été propofés, exécutés & abandonnés, foit en
France, foit chez l’étranger : c’eft ce dont l’hiftoire
de l’artillerie nous fournit bien des, exemples ».
Sans rappeller ici les époques des différens changemens
qu’on a propofé de faire dans l’artillerie ,
nous dirons feulement qu’il fut queftion à la paix de
1736, de fubftituer les pièces de 4 à la Sùédoifeà
nos pièces de 4 longues. On fit fur-tout-valoir le
prétendu mérite de pouvoir tirer avec les pièces à-
la Suédoife onze coups par minute ; ce qui léduifoit
bien des gens auxquels le bruit en impofe, & qui
croyoient que cette qualité de tirer très-vîte compen-
foit amplement la perte réelle qu’on faifoit fur la
portée & fur la jufteffe de la direûion. Les anciens,
officiers d’artillerie prétendoient qu’on ne devoit pas,
fégarder comme un avantage cette facilité de con-
fommer des munitions en pure perte, & qu’il étoit-
bien plus important de les conferver pour les occasions
où on pouvoit en faire un bon ufage ; on ne,
pourra, difoient-ils, fuffire au tranfport des munitions
, & nos pièces de 4 longues tireront tout aufli
vite qu’il le faudra & tireront plus long-tems. Ces.
raifons ne perfuaderent pas les novateurs. Enfin on
propofa de comparer la piece courte & la piece longue
relativement à la célérité de l’exécution , parce
qu’elles avoient été comparées aux autres égards. Il
arriva que là piece longue-ne tira jamais, dans une
minute , qu’un coup de moins que la piece courte,
& quelquefois deux , mais rarement. Ces expériences
décréditerent un peu les pièces courtes ; & elles
perdirent toute leur confidération fous le maféchal
de Saxe qui n’en admettoit que dix dans les plus
nombreux équipages de campagne.
Nous terminerons ici cet article , en priant le lecteur
de vouloir bien recourir au mot Artillerie
de campagne ou de bataille, Supplément, pour fuppléer
à ce qui manque à celui-ci. [Janvier 1773. A A . ]
C AN O N defujil de munition. (Fabrique des armes.)
Le canon eft la piece la plus importante de l’arme à
feu : s’il creve, il eftropie & tue même celui qui le
tire & fes voifins ; on ne peut donc apporter trôp
de foins & de connoiffance dans le choix du fer qu’on
deftine à la fabrication des canons, ni fuivre de trop
près les différens états par lefquels ce fer doit paffer
avant d’avoir reçu fa derniere forme. Dans les ma-
hufa&ures d’armes bien établies & bien conduites,
Où l’on fabrique les armes des troupes, "on corroie
& foude enfemble plufieurs morceaux d’une barre
de fer pour fabriquer la maquette ( Voye% Ma quette
, Sâpplément.'). Cette piece fe chauffe au
foyer d’une groffe forge & fe tràvaille fous le gros
marteau ; elle eft étiree enfuite fous un martinet,
&produit une lame ( Voye^ Lame a C an o n , Supplément.).
Ces deux pièces varient dans leurs dimen-
fions, fuivant celles qu’on veut donner au canon
qu’on fè propofé de faire : le canonniièr fait un tube
(k) Traité de là défenfe des places par les contremines, &c.
page 97.
Tome II.
avec cette îamô , dont il croife les bords dans toutû
fa longueur, lefquels il foude par des chaudes fuc-
ceffives de deux pouces en deux pouces {Poye^ C a nonnier,
Suppl. ). Une de ces foudures manquée
fait indubitablement crever le canon : il creve encore
lorfqu’il eft mal partagé , c’eft-à-dire, lorfque la.matière
n’eft pas également repartie tout-autour en-
forte qu’il fe trouve fenfiblement plus épais d’un
côté que de l’autre : il creve aufli lorfque le fer a été’
brûlé & décompofé clans quelques-unes de fes parties
par des chaudes' trop vives & trop répétées. Le
charbon de terre dontfe lert le canonnier exige beaucoup
de choix , car s’il étoit trôp chargé de foufre
ou de parties'cuivreufes , le fer en feroit décompofé.
Le canon creve, enfin , lorfqu’il eft chambré
C C hambre , Supplément. ) , & lorfqu’il.y a
doublure dans le fer dont il eft fabriqué ( P'oy D qu -
BLÙRE, Supplément J)-., Quelque bon què-fût un canonf
il crevetôit s’il étoit beaucoup trop chargé , ou fi.
avec une charge de poudre ordinaire, on multiplioit
les balles oiiles lingo.ts'fortement tamponés, au point
que la jéfiftance que là poudré auroit à vaincre de
leur p art, fût plus grande que celle dé la matière
même du canon.
Il eft de la derniere importance que le canon foit
bien drefle dedans & dehors ; il fe trouve alors bien
partagé, & la direttion en eft plus fûre (l'oyez
Fo r a g e , Supplément. ). L’extrémité inférieure du.
canon , où le bas du tomuere eft tarodé pour recevoir
une. cul,affe, dont les filets doivent être vifs , pro-r
fonds & fans bavures Q'oy.ei C ulasse, Supplément) ï
Les oiivriers des manufactures d’armes, chargés de.
garnir les canons de leurs ciilaffes , de leurs tenons,
& d’èn percer là lumière, s’appellent garnijjeurs
ÇP'oye^G\RNisSE'URS>Supplément.). Les canons dans
cet état font éprouvés avec leurs vraies culafles fur
un banc fait exprès , où ils font fixés & affujettis
fans pouvoir reculer. On leur fait tirer deux coups
de fuite; le. premier, avec une charge cl e poudre
égale au poids de là balle de dix-huit à la livre ; & le.
fécond avec une charge diminuée d’un cinquième :
à l’un & l’autre coup on met une balle de calibre dans
le canon (P^oye^ Epreuve ^Supplément.). Lorfqu’ils
ont fubi l’épreuve, ils paflent à la revifion, & n e font
reçus définitivement pour le compte du roi,qu’après
ùn mois de féjour dans une falle-bafle & humide , où
ils fe chargent de rouille dans les parties qui ont quelques
défauts , ce qui les indique parfaitement. Voyez
R évision , Supplément.
Le poids du canon de fufil de munition eft fixé par
les ordonnances du roi à quatre livres de marc , fa
longueur à quarante-deux pouces, & fon calibre à
fept lignes dix points ; fa portée de but-en-blan.c,
avec une balle de calibre & la trente-fixieme partie
d’une livre de poudre, eft de 18.0 toifes , comme je
m’en fuis affiné par nombre d’expériences ; je dis fa
portée de but-en-blanc, le fufil étant tiré à l’épaule,
à-peu-près horizontalement, Car elle feroit beaucoup
plus grande, le fufil étant fixé a 45 dégrés*
. Canon de chajfe.— On les forge tout Amplement
avec une lame corroyée & préparée à cet effet, comme
les canons de munition , dont ils ne different que
par leur maffe & leurs dimenfions extérieures & intérieures
, car ils font plus légers & d’un, plus petit
calibre. On préféré ceux qui font à ruban & ceux qui
font tordus à l’étoc*
Les canons à ruban font, à ce qu’on prétend , de
l’invention des Ëfpagnols : il eft au moins certain
qu’on en fait beaucoup en Efpagne, qu’ils font trèsr
éftimés » & qu’on les y acheté fort cher. Comme on
en fabrique en France dans plufieurs endroits, j’en ai
fuivi la fabrication, & je vais en rendre compte.
Le ruban eft une lame de fer de fix à fept pieds de
longueur, fuivant celle qu’on fé propofé de donner
D d