
droite, depuis la prife d’Alzan jufqù’au baffin de
Nauroure dans le canal ; mais le chemin que parcourent
les rigoles eft plus que double | à caufe des fi-
nuofités, par lefquelles l’on a été obligé de faire les
■ collines qui avoient la hauteur convenable pour la
conduite de la rigole.
Le baffin de Saint-Ferriol, qui fournit une partie de
l’eau du canal, eft fitué à 1500 toifes au midi de la
petite ville de Re ve l, à fept milles de Caftelnaudari,
& du canal en ligne droite. Pour former ce baffin,
-on fit choix de l’endroit où le vallon dans lequel
coule le ruiffeau deLandot fe refferre le plus , au-
deil'ous d’un endroit affez large : les deux collines qui
le bordent y ont été réunies par un mur principal de
400 toifes de longueur, & de cent pieds.de hauteur,
garni de part & d’autre d’un terraffement, dont le
pied efi foutenu par un mur plus bas & plus court
que celui du milieu. La forme de ce baffin eft irrégulière
comme les collines qui lui fervent de bord :
fa longueur moyenne eft de 800 toifes, & fa largeur
près de la chauffée', de 400 toifes.
Pour faire écouler les eaux de ce baffin , on a
conftruit une première vanne, près de l’extrémité
nord du grand mur ; elle vuide les eaux fuperficielles
jufqu’à fix pieds de profondeur.
Une fécondé vanne, éloignée d’environ 15 toifes
de la première, defcènd jufqu'à vingt-trois pieds.
Tout le refte jufqu’à fix pieds au-deffus du fohd, eft
vuidé par trois robinets de bronze , de neuf pouces
de diamètre, fcellés avec les plus grandes précautions
dans le grand mur : au-deffous des robinets , il
y a une derniere iffue fermee par une forte porte,
qu’on n’ouvre que lorfque les robinets ne donnent
plus d’eau ; elle fert à faire des manceuvrages, au
moyen defquels les eaux entraînent dans la partie
inférieure du ruiffeau de Landot, le limon & le fable
qu’elles avoient dépofés dans le refervoir.
On parvient aux trois robinets par une première
voûte de 38 toifes de longueur, qui perce le terraffement
extérieur, dont le fol va en pente vers le
grand mur, & eft terminé par un efcalier qui def-
cend aux robinets ; l’eau qu’ils fourniflent s’échappe
par un large aqueduc , plus bas que la ^première
voûte, & bordée par deux trotoirs. Lorfqu’on ouvre
les robinets, tandis que les eaux du baffin font encore
hautes , l’impétuofite de 1 eau eft fi terrible,
qu’on n’entend plus rien ; on ne voit que de l ecume ;
l’air que l’eau entraîne par fa chûte dans 1 aqueduc,
forme un courant auquel on a de la peine àrefifter ;
les maffes énormes du mur & des voûtes en paroil-
fent ébranlées; auffi appelle-t-on voûu d'enfer, ce
pàffage par lequel les eaux s’échappent.
On a foin tous les ans de mettre à fec le baffin de
Saint-Ferriol dans le mois de janvier, pour le nettoyer
-fk. en réparer les murs. La riviere de Sor fournit allez
•d’eau pour la navigation pendant l hiver & le prin-
tems; ainfi, on a le tems de faire les réparations qui
-font achevées avant le mois de Février, & de remplir
enfuite le baffin avant le mois de Juin.
Ce que la riviere de Sor fournit pendant les fix
mois de l’hiver eft évalué à quatre meules d eau ; on
appelle dans le pays une meule d’eau, le volume qui
fort par une ouverture de huit pouces de large fur
fix de hauteur, avec une charge de huit à neuf pieds
de hauteur ; ce qui fufïit pour faire tourner un
moulin.
Quand on met le baffin à fec pour le reparer, on
peut le vuider en huit jours ; mais il faut au moins un
mois pour le remplir, & fouvent deux mois ; il y a
même des années feches où l’on ne parvient pas à
ie remplir, la rigole de la montagne ne fourniffant
pasaffez : ordinairement, vers la fin de novembre,
■ ou au plus tard à N oël, on n’a plus befoin pour ce
canal des eaux de ce baffin, car la rigole de la plaine
fuffit, à caufe des pluies de l’hiver, depuis le mois
de décembre jufqu’au mois de mai.
Pourmefurer la hauteur de l’eau dans le baffin, on
•a conftruit, fur les dèffeins de M. Garipuy, une pyramide
de63 pieçjs dehauteur; depuis 63 jufqu’à 100
pieds, on fe fert du mur de la chauffée.
Quand on vuide le baffin par les robinets,on ob-
ferve qu’il s’abaiffe affez uniformément, parce que
les branches horizontales deviennent plus petites, à
méfure que la preffion verticale &c la vîteffe diminuent.
La fuperficie de la branche fupérieure des eaux
du baffin de Saint-Ferriol étoit de 1 14mille toifes carrées
en 1684, fuivant le procès-verbal dè M. d’A-
gueffeau ; mais alors le réfervoir n’étoit pas plein :
aujourd’hui, lorfqu’il eft plein, cette furface eft da
175 mille toifes, fuivant les mefures prifes en 1769,
par les foins de M. Garipuy.
Lorfque les réparations du canal font achevées &
qu’on veut le remplir, on ouvre les robinets de Saint-
Ferriol; & dans l’efpace de dix jours le canal eft rempli,
fans que l’eau l'oit abaifféedans le baffin de plus
de dix pieds, pour peu que la rigole de la plaine
fourniflè d’eau. C ’eft ordinairement depuis le 20
feptembre jufqu’au 4 oftobre, que le canal fe remplit.
Le baffin peut fuffire, non-feulement à remplir
le canal, mais à l’entretenir pendant trois mois, fuivant
l’eftime des directeurs.
Si l’on ne compte que la dépenfe journalière des
éclufes, on voit que le baffin contient de quoi en
remplir 9390, ou 44 par jour pendant fept mois;
o r , pour defcendre deux barques enfemble , il ne
faut que l’eau d’une feule éclitfe qui accompagne les
barques de baffins en baffins pour les faire monter ,
en fuppofant qu’elles paffent dix éclufes en un jou r,
il faut remplir dix baffins ; ainfi onze éclufes remplies
, fuftifent pour deux barques; & les quarante-
quatre éclufes pour huit barques ; il pourroit donc
paffer huit barques par jour pendant fept mois, avec
la feule dépenfe du baffin de Saint-Ferriol, en fuppo-
-fant que la rigole de la plaine ait fuffi pour le remplir
: c’eft plus qu’il ne faut pour le commerce a&uel
du canal.
Dans l’état a&uel de la navigation & du commerce
de Languedoc, il y a autant d’eau qu’il en
faut ; cependant, on pourroit en manquer, fi l’on
avoir à paffer des barquestous les jours ; mais il n’en
pàffe communément que trois ou quatre, quelquefois
point du tout ; & , fi les paffages augmentent,
on en eft quitte pour envoyer à Saint-Ferriol, & faire
tenir les robinets ouverts plus long-temps que dans
l’état ordinaire. Si le commerce augmentoit quelque
jo u r ,'o n pourroit auffi trouver dans la montagne
Noire une plus grande quantité d’eau.
Indépendamment du baffin de Saint-Ferriol,& de la
rigole ou là plaine, il y a encore quatre prifes d’eau,
qui fourniflent au canal du côté de la Méditerranée
; la plus confidérable eft celle de Ceffe, près du
Somail, -à quinze milles de Beziers ; la fécondé eft
celle d’Orvie l, près deTrebes, à quatre milles de
Carcaffonne,du côté de l’orient ; la troifieme eft celle
d’Oignon, à neuf milles au-delà de Ceffe ; la quatrième,
qui eft celle du Frefquel, trois milles au-delà
d’Orvie l, eft la moins confidérable de toutes : on y
recevoir autrefois beaucoup de torrens qui enfa-
bloient le canal, & l’auroignt rendu peut-être inutile
; ce fut M. le Maréchal de Vauban qui remédia
à cet inconvénient, comme nous l’avons dit, & qui»
eut la gloire de procurer à ce fameux canal le dégré
de perfe&ion où il. eft aujourd’hui. Belidor, Totn.
l y , pag. 3 <515. ) ■ ‘ •• 5 ?
Mais depuis Nauroure jufqu’à Touloufe d’un
Côté, & jufqu’à Carcaffonne de l’autre, il n’y a
plus
plus de prifes d’eau ; les rigoles &c le baffin fuffifent
pour fournir à la navigation.
Après avoir parlé des principaux objets qui rendent
le canal remarquable, il me refte à le parcourir
dans toute fa longueur, pour infifter fur différens
détails qui méritent d’être connus; & je commencerai
par la table des diftances itinéraires, mefurées
exa&ement tout le long du canal,d’une éclufe à l’autre.
Table des dijlances des éclufes, ou de la longueur des
foixante - deux retenues depuis Vembouchure orientale
du canal dans C étang de Thau, du côté de
Cette , jufqu’à C embouchure occidentale dans la
Garonne , prés de Touloufe.
Retenue de l’étang, y compris
l’éclufe du Bagnas...................... 1533
Retenue du Bagnes.............. ... • 1530
Traverfée dans la riviere d’He-
603
Canalet entre la partie fupérieure
de la riviere d’Hérault & l’éclufe
Ronde................................ 199
Canalet entre l’éclufe Ronde & le
port d’Agde. ............................. 270
Retenue de l’éclufe ronde. . . . 6614
Retenue de Portiragne.................. 2297
Retenue de Ville-Neuve. . . . w
Retenue d’Ariegés. . . . . . . . 1883
Canalet entre la demi - éclufe des
moulins neufs, & la riviere
268
Navigation dans la riviere d’Orb. 446
Canalet, depuis la riviere d’Orb
jufqu’à l’édufe Notre-Dame. 113
Retenue de Notre-Dame jufqu’au
deffus des éclufes de Fonferane. 459
Retenue de Fonferane.................. 27532
Elle fe termine à l’éclufe d’Argens,
entre Narbonne &Ça rcaffonne,
près de Roubia.. . .
Retenue d’Argens......................... 1311
Retenue de Pêche-Laurier. . . . 1408
Retenue d’Ognon........................... 344
Retenue d’Hçmps.............. ... *893
Retenue de Jouarre...................... 3267
Retenue de Puicheric.................. 1552
Retenue de l’Aiguille, près l’étang
de Marfeillette........................... 919
Retenue de S. Martin.............. ... 638
Retenue de Fontfile...................... I662
Retenue de Marfeillette. . . . . 4802
Retenue de Trebes, près Carcaffonne............................................
2336
Retenue de Villedubert.............. 410
Retenue de l’Evêque................... 1958
Retenue de Frefquel. . . . . . . 736
Retenue de Viltaudy ou de la
Chau............................................. l 80O
Retenue de Foucaut...................... 1 792
Retenue de la Douce.................. 708
Retenue d’Herminis...................... 158
Retenue de la Lande..................... 2544
Retenue de Villeleque. . . . . . 3832
Retenue de Beteille..................... 2868
Retenue de Bram......................... 633
Retenue de Saufens...................... 864
Retenue de Ville-Pinte............... ip ï»
Retenue de TrebouJ. |............... 715
Retenue de la Criminelle. . . . 257
Retenue de la Peyruque. . . 562
Retenue de guerre. . . . . . . . 482
Retenue de S. Sernin. . . . . . 306
De Vautre p d r i.....................
Retenue de Guillermi. \ . . . .
Retenue du V ivier^'. . . . . . .
Retenue de Gay. . ..................
Retenue de S. Roeh.....................
Retenue de la Planque..................
Retenue de la Doumergne. . . .
Retenue de Laurens-. ..................
Retenue .du Roc......................... ...
Retenue de Montferran ou du
Médecin, au partage des eaux,
près le baffin de Nauroure.. .
Retenue d’Embourel ou de Vignonet...........................................
Retenue d’Encaffan................... ...
Retenue de Renneville..................
Retenue de Gardouch..................
Retenue de Laval. .....................
Retenue de Negra........................
Retenue du Sanglier......................
Retenue d’Aigue - V iv e s, ou de
Ticaille............... ... .....................
Retenue de Montgifcard. . . . .
Retenue de Vie. . . . . . . . .
Retenue de Caftanet.....................
Retenue de Bayard, près Touloufe..............................................
Retenue de Matabian..................
Retenue des Minimes. . -. . -. .
Retenue du Béarnois.
Retenue de l’embouchure. . . .
L’Éclufe du baffin de la Garonne.
87179
247
837
829
2238
633
628
641H
toifes,
2516
2151
786
1498
2102
729
2169
1883
784
1638
3864
864
6261
166
640
505
48 6
64
Ainfi la longueur totale du canal,
fuivant le calcul, eft de 122716 toifes.
M. le Marquis d’Aubais a donné, en 1759, dans
fes Pièces fugitives, pour fervir à l’hiftoire de France,
le toifé du canal, fuivant la vifite de 1684, qui a
été également imprimé à Touloufe, & qui donne,
pour la longueur totale, 122406 toifes. M. Belidor
donne 125681 , & M. l’Abbé Expilly 142226 : j’ignore
fur quel fondement ; mais l’évaluation de
122716, eft la plus exa&e.
En reprenant le canal par l’orient où par la Méditerranée,
on y entre en fuivant l’étang de Thau ,
qui a trois lieues de long: c’eft une partie de mer peu
profonde, bordée par des fables & des atterriffe-
mens : cet étang eft le plus grand & le plus profond
de ceux qui régnent le long de la côte méridionale
du Languedoc, depuis Aiguemortes jufqu’à Agde ;
ils communiquent tons entr’eux par des canaux; on
a fait auffi des branches de canaux qui vont de Ma-
guelône,de Lunel & d’Aiguemortes jufqu’aux étangs,
& la province en commence un de trente milles,
depuis Beaucaire jufqu’à Aiguemortes. On a fait des
digues & des chauffées même au travers de Fétang
de Thau, fur une longueur de trois milles, pour diriger
la navigation, faciliter le tirage, & garantir les
barques des coups de mer qui pénètrent eficore
quelquefois même dans ces lagunes. L’etang finit à
trois lieues de Cette , du côtéd’Agde , & c’eft-là que
commence le canal de M, Riquet, à l’extrémité occidentale
de l’étang. La partie du canal qui avance dans
l’étang eft bordée par des jettées en^ pierre, comme
les autres canaux creufés dans les étangs ; & 1 on le
propofe d’élever à l’extrémité de la jettëe une pyramide
qui ferve de monument à cette làmeufe entreprife.
Après qu’on a quitté l’étang de Thau , & qu’on
a fait quatre milles dans l’intérieur des terres en fuivant
le canal, o.n arrive dans la riviere d’Hérault, un
peu au-deffus d’Agde, & l’on defeend cette riviere
d’environ 600 toiles, jufqu’à l’éclufe ronde , qui eft
un des ouvrages remarquables du canal,à 4863 toifes
de fon embouchure dans Fétang de Thau.