
la faignée étoit d'autant plus efficace, qu’elle étoit
faite plus promptement, & dans des parties plus
rapprochées de celle où étoit l’engorgement. Deux
faignées du cou pratiquées dans l’intervalle d’une
heure . diffiperent, comme par enchantement, une
apoplexie accompagnée des convulfions les plus
violentes.
34. M. Puzos fait obferver qu’il ne faut pas renoncer
aux faignées , quoiqu’on ait perdu les premiers
inftans, qu’elles deviennent néceffa.ires toutes les
fois que de nouvelles douleurs annoncent de nouveaux
dépôts, & que li par ce moyen on ne prévient
pas toujours la fuppuration, on arrête du moins les
progrès de l’inflammation , & l’on prévient la gangrené
; l’expérience m’a encore convaincu de la
.vérité de cette affertion.
Ce remede enfin eft d’une fi grande importance,
qu’on ne peut trop recommander d’y avoir recours ;
c’eft même par cette raifon que je me fuis plus particuliérement
arrêté fur cet o b je t , & que j’ai tâché
de fortifier les raifonnemens par l’autorité des plus
célébrés praticiens.
35. Tous les dépôts laiteux aigus n’exigent cependant
pas indifpenfablement la faignée. Il en eft que la
nature peut réfoudre d’elle-même ; on les reconnoî-
tra par le peu d’intenflté des accidens, par la fou-
pi efîe & la molleffe du pouls , par l’humidité de la
peau, par l’écoulement foutenu des lochies & du
lait, & par la liberté des différentes excrétions. Les
boiffons abondantes , mucilagineufes , ou légèrement
diaphoniques, fi les couloirs de la peau font
libres & difpofées à recevoir la matière laiteufe ;
des diurétiques légèrement falins, fi la nature paroît
tendre à évacuer le lait par les urines ; des lavemens
émolliens & minoratifs , quand le ventre étant
amolli, des borborigones annoncent qu’il va s’ouvrir
, rempliront toutes lés indications.
36. Lorfque, la vivacité des accidens a forcé le
médecin à employer les relâchans les plus efficaces ,
& qu’il a eu le bonheur d’établir le relâchement
defirable , alors guidé par les efforts même de la
nature, il doit chercher k porter le lait fur lesorga-
fles excrétoires que les circonftances & l’obferVation
lui défigneront. Les reins & les ïnteftins, voiI3*ceux
par où l’évacuation des matières putrides laiteufes s’évacuent
en plus grande quantité, & plus heureufe-
ment. Le médecin emploiera donc avec confiance les
purgatifs , lestifanes & les apozemes diurétiques. La
célérité n’eft pas moins'néceffaire dans l’ufage de ces
remedes, que dans celui de la faignée. Le temspreffe,
de nouvelles ftafes peuvent occasionner' un nbuvel
Orage , la maffe humorale viciée peut contrarier un
dégré d’acrimoine qui feroit naître d’autres accidens
plus fâcheux, & pourvu qu’on ait égard aux forces
de la malade , on peut faifir les- rémiffions, &, rapprocher
les remedès fans inquiétude.
37. Cependant , malgré l’attention du médecin à
faifir les occafions , pour diminuer le travail de Ta
nature y & favorifer la dépuration de la- maffe humorale
, la crife faftice Ou naturelle peut être incom-
plette, la réfolution des engorgemens imparfaite,
& le dépôt fe changer d’aigu éh chronique.
Les indications à fûivre relieront les mêmes , &
feront prifes de la nature des embarras; Il faudra
continuer à favorifer Pexcrétion des urines par des
diurétiques plus animés. Le fel de duobus , celui dé
tartre à la dofe de fix à huit grains par verrée , &
d’un gros ou un gros & demi par jou r, méritent en
ce càs-là beaucoup de confiance , en lés aflociant
aux racines & aux feuilles dé pariétaire, aux racines
d’afperges & de petits houx , &c. aux feuilles-des
chicorées , 6*r. Les-purgatifs, tels que le féné-j là
rhubarbe, affociés aux chicoracées1, & diftribiïés de
façon à entretenir une diarrhée modérée, produiront
aufîi les effets les plus defirables. La nature ;
en procurant fouvent d’elle-même cette diarrhée ,
avec lé plus grand avantage , nous a montré la route
à fuivre. Puzos a reconnu le bon effet de cette méthode.
J’ai vu une démence chronique produite par
\e dépôt laiteux guérie par ce moyen. J’ai vu des
infiltrations, des tumeurs en apparence fchirreufes,
céder à l’ufage des purgatifs affociés aux diurétiques.
Mais une attention importante à faire eft que les purgatifs
réveillent quelquefois les douleus , & qu’ainfi
l’on doit les employer avec circonfpeétion.
38. Les maladies locales exigent qu’on réunifie
les topiques aux remedes internes. Ils doivent être
pris parmi les émolliens dans les dépôts inflammatoires.
On y affocie les réfolutifs quand l’inflammation
eft diminuée. Ceux - ci font principalement
néeeffaires quand le relâchement eft complét, &
qu’il y a infiltration. Les cataplafmes de farinés réfo-
lutives animées par les fels de duobus & de tartre 9
font recommandées par les praticiens , & je les ai
trouvées très-efficaces. J’ai vu employer avec beaucoup
de fuccès, par M. Enaux, profeffeur des ac-
couchemens à D ijo n , les cataplafmes de feuilles
de jufquiame, & de fleurs de furreau fur des tumeurs
indolentes & dures. Je m’en fuis fervi avec
un égal avantage.
Le véficatoire appliqué fur le poing dans les pleu-
réfies qui réfiftoient aux faignées , ou dans lefquels
le pouls ne permettoit pas d’y avoir recours. Le
même emplâtre appliqué fur les douleurs fixes des
membres dans les rhumatifmes chroniques, m’a réuffî
dans un grand nombre d’occa fions/J’ai même pour-
fuivi avec fuccès par ce moyen une douleur qui
chaffée de l’aine étoit paffée a la cuiffe , enfin fur la
jambe.
39. Mais lorfque lès dépôts tournent à fuppuration
, on compteroit en vain fur tous les fecours
( 36 à 38.). Il faut donner iffue au puS, & l’on doit fe
conduire ici par les réglés de la bonne chirurgie.
Laiffer à la nature le foin dé terminer les abcès formés
dans les glandes , & ouvrir tous les autres dès
que la fuppuration eft fènfible.
40. Il eft d’autres accidens qui exigent encore
d’autres remedes que cèux dont je viens de faire
l’énumération. Ce font les éruptions véficulaires
( Ï 4 ,2 5 ) , & les hydropifies abdominales ou de
poitrine. M. Puzos recommande d’ouvrir les pullules
dePefpece défignée dès qu’elles font pleines, &
d?en réitérer l’ouverture fi elles fe rempliffent. Je
n’ai point vu cette efpece d’éruption, mais les ob-
fèrvations de ce célébré accoucheur, l ’analogie de
ces pullules avec celles dé la petite vérole, dont j’ai
toujours fait ouvrir avéc fuccès les pullules, & le
raifonnement, me perfuadent qu’on ne peut mieux
faire que de fuivre ce confeil.
41. Quant aux hydropifies , elles font formées par
une matière âcre ; il eft difficile que cette matière*
puiffe être abforbée par les vaiffeaux, & évacuée-
îans retour. Ces raifons me portent à croire que le-
meilleur parti à prendre eft de recourir à la paracen-
thefe. Je n’ai pas été dans le cas d’employer ce re-;
mede én pareille circonftance ; mais j ’y aitrois re-*
cours dans l’dçcafion, & je crois pouvoir le confeiP
1er comme le feul capable de favorifer l’effet des’
autres remedes , & de s’oppofèr à la perte de la
malade.
L’excès des douleurs quand elles ne dépendent?
pas d’une inflammation forte, doit engager à recourir
aux narcotiques , & même à en forcer la dofe/
J’ai vu ces remedes détruire des doïtleiirs opiniâtres*
& locales. J’ai vu même dans l’hypôgaftre des tu-*
metirs qui avoiértt l’appârence de fchirre , qui fém-*
blbîent menacer de s’âbcéder, & qui étoient accom*>
pagnées de douleurs très-aiguës , fe diffiper par
l’ufage des narcotiques affociés aux cataplafmes
émolliens , & aux remedes diurétiques.
42. L’opiniâtreté de quelques dépôts chroniques
ne doit pas faire prononcer l’incurabilité des malades.
M. Puzos cite quatre obfervations où l’on voit
qu’une nouvelle groffeffe a guéri des dépôts très-
rebelles ; c’eft une reffource fur laquelle il eft permis
de compter. ( M M. )
DÉPOUILLE, ( Gravure en bois.') Taillé ou gravé
en dépouille, fe dit d’une choie qui va en augmentant
vers le fond de l’ouvrage, le talon ou le manche ; ce
qui eft particuliérement en ufage chez les gaîniers ,
& néceffaire à la gravure en bois & à la cifelure, faites
pour mouler de la pâ te, de la cire , du beurre ;
& la terre ou le fable dans lefquels les fondeurs jettent
le métal, &c. pour en faire certains ouvrages,
comme fers à dorer les livres, moules & enveloppes
de cartes, timbres à papier, &c. Sur quoi il y a
quelques obfervations à faire fur l’exécution de cette
forte de gravure & de cifelure , entre celles faites
pour imprimer la pâte, la cire, &c. & celles faites
par les fers à dorer, moules & timbres. Voye^ Gravure
EN BOIS , Dict. raif. des Sciences , &c. ( + )(
DERCIS , ( Aflron. ) nom d’une déefte que l’on
a quelquefois confondue avec Vénus , & dont quelques
auteurs ont donné le- nom a la conftellation
des poiffons. ( M. d e l a L a n d e . )
DERENBOURG , ( Géogr. ) château , ville &
feigneurie d’Allemagne, dans la baffe Saxe, & dans
les états du roi de Pruffe qui en confie l’adminiftra-
tion à la régence d’Halberftadt : l’abbaye impériale
de Gandersheim en eft fuferaine. ( D . G.)
* § D E R O T E , ( Géogr. ) ville d’Egypte, fituée
dans une île qui fo rm e .... life£ que forme , &c.
Lettres fur V Encyclopédie.
DESCENTE DES PLANETES VERS LE SO L E IL ,
( Aflron. ) c’eft le tems qu’elles emploieroient à
tomber par une ligne droite, fi la force de projeélion
qui anime les planètes & leur fait décrire des orbites
, étoit détruite. Lorfqu’elles font dans leurs
moyennes diftances au foleil, la force centrale les
précipiteroit vers le foleil ; daijs les tems fuivàns ,
mercure y arrivéroit en 15 jours & 13 heures;
vénus en 39 jours 1711; la terre en 64 jours ioh ;
mars en 121 jours ; jupiter en 290 jours ; faturne
en 767 jours ; la comete la plus éloignée que nous
conno'iffioris en 66 mille jours ; la lune tomberoit
fur la terre eh 4 jours 20. heures ; les fatellites de
jupiter tomberoient fur leur planete en 7h , 15h ,
30h, & 71'k ; ceux de faturne en 8h , i 2h, 'i9h-y 68h ,
336h, refpeélivemenf ; une pierre tomberoit au
centre de la terre, fi le. paffage étoit.libre_en.2i/ f .
"Whifton , Afironomicalprincipl.es oj religion , p. 66.
La regle qui fert à faire ces calculs, confifte ä dire ,
2828 eft à 1090, c’eil-à-dire , la racine carrée du
cube de 2 eft à 1 , comme la demi-durée de la révolution
d’une planete eft au tems de fa chute jufqu’au
centre de l’attraûion , Friß de gravitate , p. 100.
L’opération feroit beaucoup plus fimple , fi l’onpou-
voit fuppofer que les planètes defeendiffent par un
mouvement uniforme ; mais il eft évident que cette
chute doit être extrêmëment accélérée. ( M . d e
l a L a n d e . )
DESCRIPTION, f. f. {BeUcs-LettreS.)Lz deferip-
tien ne fe borne pas à cayadlejifer fon objet ; elle en
préfente fouvent le tableau dans fes détails les plus
mtéreffans & dans toute fon étendue. Ici le goût
confifte à bien choifir, i° . l’pbjet que l’on veut peindre;
2°. le point de vue le plus favorable à l’effet ;
qu’on fe pröpofe; 30. le moment le plus avantageux,
fi l’objet eft changeant ou mobile ; 40. les
traits qui l’expriment le plus vivement tel qu?on a
deffein de le faire voir ; 50. les oppofitions qui peur
vent le rendre plus faillant & plus fenfible encore.
Le choix de l’pbjet doit fe régler fur l’intention du-
poëte. Le tableau doit-il être gracieux ou fombre,
pathétique, ou riant ? Cela dépend de la placé qu’il
lui deftine, & de l’effet qu’il en attend.
Omnia conflits preevij,a aniriiôqué volenti.
Le point de vue eft relatif de l’objet au fpeéa-'
teur: l’afpeâ: de l’un, la fituation de l’autre,,, con-
çourent à rendre la defeription plus ou moins inté-
reffante ; mais ( ce qu’il eft important de remarquer)
toutes les fois qu’elle a des auditeurs en feene ,1 e
leéleur fe met à leur place, & c’eft de-là qu’il voit le
tableau. Lorfque Cinna répété à Emilie ce qu’il a dit
aux conjurés pour les animer à la perte d’Augufte,.
nous nous mettons, pour l’écouter, à la place d’Emilie
; au lieu que s’il vient à décrire les horreurs
des proferiptions : ' •
Je lès peins dans le meurtre à Venvi triomphons ;
Rome entière noyée au fang de fes enf,ans; -
Les uns affaff nés dans les places publiques ,
Les autres dans le fein de leurs dieux domef iques ;
Le méchant par le prix au crime encouragé ;
Le mqri par J a femme en fon lit égorgé ;
Le fils tout dégouttant du meurtre de fon péri ,
Et fa tête a là- main demandant fon falairé.
Ce n’eft plus à la place d’Emilie que nous fommes,'
c’eft à la place des conjurés.
Tous les grands, poètes ont fenti l’avantage de
donner à leurs deferiptions des témoins qu’elles in-
téreffent., bien fûrs que l’émotion qui régné fur la
feene fe répand dans l’amphithéâtre, & que mille
âmes n’en font qu’une quand l’intérêt les réunit.
Mais abftraftipn faite de cette émotion réfléchie r
le point de vue,direél;de^ l’objet à nous, eft plus ou
moins favorable Ma poëfie comme à la peinture, félon
qu’il répond plus ou moins à l’effet qu’elle veut
produire. Un poëte fait-il l’éloge d’un guerrier , il le
voit comme Hermione voit Pyrrhus:
Intrépide y & par-tûut fuivi de la victoire, i
Il oublie que fon héros eft Un homme , .& que. ce
font des hommes qu’il fait égorger. Sa valeur , fon
affivité, fon audace, le don de prévoir, de difpo-
fer,de maîtrifer les événemens, l’influence d’uné
grande ame fur des milliers d’ames vulgaires qu’ellè
remplit de fon ardeur : voilà ce qui lé frappe. Mais
veut il lui reprocher fes triomphes ; tout change de
face, & l’on voit,^
Des murs que la flamme ravage ;
Des vainqueurs fumant de carnage ;
Un peuple au fer abandonné ;
Des mer es pâles & fanglantes,
Arrachant leurs, filles tremblantes '
Des bras d'un foldat effréné, (Rouffeau. )
Ainfi, cette Hermione qui dans Pyrrhus admiroit
un héros intrépide , un vainqueur plein de gloire 8c
de charmes, n’y voit bientôt plus qu’un meurtrier
impitoyable, & même lâche dans fa fureur.
Du vieuxpere d'Heclor la valeur abattue
Au x pieds de fa famille expirante a fa vue,
Tandis que dans fon fein votre bras ‘enfoncé,
Cherche un refit de fang que Page avoit glacé;
Dans des ruiffeaux de fang Troie ardente plongée ;
De votre propre main Polixene égorgée,
Au x yeux de tous les Grecs indignés contre vous c
Que peut-on refufer a ces généreux coups r
Ce changement de face dans l’objet que l’on peint,
dépend fur-tout du-moment que l’on choifit, & des
détails que l’on emploie. Comme prefque toute la
nature eft mobile, & que tout y eft compofé , l’imitation
peut varier à l’infini dans les détails ; & c’efl: