
de plufieurs autres villages ie même nom ; Sans b «
province eft une paroifl'e du bailliage jie Beaune , a
trois lieues oueft-nord-oueft de Beaune , cinq ,d Au-
tun, & à un quart du village d’Ivry;où paffent en ete
■ les yoitures de Paris à Lyon. • • - . '
A deux portées de fufil de Cujfy, tirant droit au
nord, dans un fond affez ouvert, au pied des chaumes
d’Auvenet, connues par le gibier & les plantes
curieufes qu’on y trouve, 6c par la voie Romaine
qui traverie ce canton, on voit une colonne de pierres
en plusieurs affifes : elle a deux pieds trois pouces
6c demi de diamètre par le bas, 6c elle eft elevée
fur un double piedeftal. Voye{ planche I & I I ,
colonne de Cujjy, dans nos planches £antiquités.
S uppi. -
Il ne refte de ce monument que les deux pie-
deftaux, 6c environ les deux tiers, de la hauteur de
la colonne ; le refte y manque , favoir, le chapiteau
6c l’entablement.
Le premier piedeftal n’eft qu’ un foubaflement,
il a fept pieds de hauteur, compris fa bafe, qui n’eft
qu’un champfrain, fans moulure 6c fans corniche ,
qui fe termine en gorge ; il fait un plan quarré, ayant
cependant les angles en pans-cowipés & les faces
concaves ; fa corniche eft un plinthe de fept pouces
d’épaiffeur, faifant le même plan que le deffous, 6c
fur lequel pofe le fécond piedeftal, qui eft celui de
la colonne. Dans le Pere Montfaucon, les trous ronds
qui font marqués fur ce plinthe, font imaginaires.,
il n’y en a point fur le lieu.
Le fécond piedeftal eft différent dufoubaffemeot,
en ce qu’il fait un plan o6k>gone parfait ; c’eft-à-
dire , qu’il a huit faces égales, fur lesquelles il y a
de belles figures en demi-reliefs, qui repréfentent
des divinités, 6c dont on verra l’explication plus
bas ; il n’a point de bafe, & il a quatre pieds neuf
pouces de hauteur, compris fa corniche, qui fe termine
aufîi en gorge , & qui eft très-belle ; on y voit
trois modifions fur chaque face avec des rofes entre
deux.
Sur ce piedeftal s’élève la colonne, dont la bafe
qui eft attique eft d’une très-belle proportion, le
refte du fût de la colonne compris. La bafe eft de
treize pieds trois pouces de hauteur, faifant prefque
les deux tiers de fa hauteur entière. Celle de tout
l’édifice eft à préfent de vingt-cinq pieds fept pouces
, non compris le chapiteau &: l’entablement qui
manquent. Le P. Montfaucon n’eft pas ex a ft, en
portant la hauteur à vingt-huit pieds. Le P. Lempe-
reu r, Jéfuite, d it, dans les Dijfertations , imprimées
chez C o t , Paris 1706, que les gens de Cujfy affu-
roient de fon tems, que la cotonne étoit une fois
aufli haute lorfqu’elle étoit entière ; mais c’eft une
erreur, les proportions ne permettent pas de le
croire.
Le fût entier de la colonne étoit orné de fculpture,
à en juger par ce qui refte ; le bas eft une efpece de
mofaïque qui a trois pieds deux pouces de hauteur
deffus la bafe ; cette mofaïque eft compofée de
plufieurs petites bandelettes d’un pouce de largeur
quife croifent en rampant autour de la colonne, 6c
dont les vujdes forment de grands lofanges , remplis
par de beaux fleurons ; le refte de la colonne eft
chargé de plufieurs feuilles d’eau, la pointe en bas:
on en compte encore feize. étages. Toute cette partie
de l’édifice eft mal représentée dans le plan qu’en
donne le P . Montfaucon, Suppl, t. I I , page 224;
les bandelettes foîmant les lofanges n’y font point
exprimées, 6c il prend les feuilles d’eau pour de
petites écailles, ce qui fait un mauvais effet. .•
Tout ce monument eft conftruit .d’une fort belle
pierre rouffâtre qui a pu être polie comme du marbre
; chaque affile eft d’une feule pierre , elles, font
îoutes pofées à fe ç , c’eft-à-dire, fans mortier ni
ciment, niahiere de bâtir volontiers obferveê par les
anciens dans les bâtijnens de conféquence. Le P.
Lempereur dit que c.es affiles etoient retenues par
des crampons d’airain qui ont été enlèves par un
feign.eur de Cujfy.
M. .Thomaffin avoit toujours regardé cette colon-«
ne comme étant d’ordre Corinthien par fon renfler,
ment, qui eft toujours, au tiers de fa hauteur par en
bas ; car ce tiers fe trouve ici de peu plus de deux
diamètres 6c demi du bas de la colonne : cette conjec-»
ture fe vérifia par la découverte qu’il fit en feptem-
bre 1724, de la partie fupérieure du chapiteau de
cette colonne , qui eft à la grange d’Auvener, métairie
à une lieue de la colonne, où un feigneur de Cujfy.
la fit tranfporter pour faire une mardelle au puits
de cetteùnétairie. M. Thomaffin trompé par la mau-
vaife defeription du prétendu chapiteau , donnée
par le P. Lempereur & par la ridicule anecdote
qu’on en débitoit dans le pa ys, avoit négligé d’aller
yifiter cette pierre ; mais s’y étant trouve par ha-
zard, il fut furpris d’y voir la figure du chapiteau
Corinthien ; en ayant pris les dimenfions, il trouva
que cette mardelle ne pouvoir venir que de la co-
lonnt de Cujfy : même goût de travail 6c même pierre.
Suivant le diamètre du bas de la colonne, ce chapiteau
devoir avoir trente-deux pouces de hauteur ;
il étoit apparemment de deux affifes, car la partie
fupérieure, la feule qui fe trouve, n’a que vingt pouces,
celle du defl'ous devoit en avoir douze de hauteur
; & félon toutes les apparences elle portoit les
premières feuilles du chapiteau, mais on n’en voit
plus aucuns veftiges.
Ce chapiteau déplacé n’eft pas moins fymbolique
que le piedeftal de la colonne ; au lieu des rofes du
tailloir on y voit fur chacune des quatre faces une
tête de divinité payenne, auxquelles on a donné
une groffeur confidérable pour les mieux faire distinguer
d’en-bas de la colonne, enlorte qu’elles occupent
une bonne partie des faces du chapiteau, ce qui
a empêché d’y mettre des volutes, des ygéttes, des
colicoles, &c. ce font feulement de grandes feuilles
d’acanthe qui garniffent le refte de chaque face du
chapiteau, dont les revers du fommet qui fe recourbent
fous les angles du taillant, font l’effet des volutes.
On voit dans Vignole des exemples de pareils
fymboles fur des chapiteaux Corinthiens anciens,
où au lieu de rofes du tailloir, ce font dès têtes de
divinités , quoiqu’elles ne foient pas d’une pro*
portion fi groffe que celle du chapiteau en queftion.
L’une de ces têtes eft environnée de rayons 6c n’a
point de barbe, ce qui la fait aifément reconnoîtré
pour celle d’Apollon; l’autre tête .ayant une barbe
fort touffue 6c un air majeftueux, . fembleroit être
celle de Jupiter ; la troifieme tête, quoiqu’affez effacée
, eft auffi d?un homme barbu : elle eft frufte 6c
porte quelque chofe qui peut donner l’idée d’une
dépouille de lyon & annoncer Hercule ; pour la dernière
tête il n’y refte que la place, 6c l!on n’y peut
rien diftinguer : les trois autres font belles 6c de
grand goût.
Il eft aifé de fe convaincre que cette pierre, que
M. Thomaffin affure être le chapiteau de la colonne
( elle n’eft point fur le deffin ) , a été portée à Au-
venet pour en faire la mardelle du puits > puifque le
diamètre du puits eft plus grand que fcelui de l’ouverture
de la pierre, qui n’a pas permis d’en faire
une plus grande. Suivant la tradition du payS, la
métairie. d’Auvenet appartenoit. autrefois à un feigneur
de la Rochepot 6c de Cu ffy , fans goût pour
les belles chofes, qui détruifit, il y a plus d’un fiecle,
ce qui manque de cette colonne , pour en .prendre
des matériaux à bâtir ; on lui a du moins l’obligation
de ne pas l’avoir entièrement détruite. Le P. Lem-
pereur, qui tient le fait des gens^duiieii, dit que
ce feignes tpériteroifBifn çi’ètf.e.nommé, &: qu’qfl
H fon éloge.; c’eft.en ;effet .cette ftnpiée ignorance
qui a occaflônné la deitaffion des plus beaux n o - I
.d on t on empl^oit ,à de.nou-
velles conftruftioris les matériaux tout préparés.
Il y a une autre grande pierre dans le cimetiere
de Cujjy ,‘qu’on peut voir fur le plan, 6c qu’on donne
ordinairement pour le chapiteau de la colonne, mais
il eft aifé de voir que c’eft une erreur dans laquelle
ont donné les P. Lempereur 6c D . Montfaucon ;
le premier dit que cette pierre a huit pieds de diamètre
, 6c qu’elle a la forme d’un parafol à l’antique,
avec des compones d’efpace en efpace , au nombre
de dix ; le fecQnd en donne le plan comme étant celui
du couronnement de la colonne ,■ dans le fait cette
pierre eft o&ogone , ayant fept pieds un po«ce d’un
a n oie extérieur à l’autre, 6c dix-neuf pouces d’épail-
feur. 11 eft vraifemblable qu’elle portoit fur huit
petits piliers ou colonnes, qui avec les ceintres qui
font à chacune des huit faces, formoient autant <1 arcades
, & qu’elle fervoit de couronnement à un
maufolée ; car il n’y a ni ftruâure ni çaraûere qui
puiffe en donner connoiffanç.e., il y a au njijlieu de
cette pierre un trou rond d’un demi-pouce d’épaiffeur
6c de quatorze pouces de diamètre, qui annonce
qu’elle étoit encore foutenue dans fon .milieu , ou
par une colonne plus groffe que les autres , QU par
Une grande urne qui renfermoit des cendres, mais
jamais elle n’a pu fervir de chapiteau à la colonne
de Cujfy.
Pour revenir è cette colonne, les figures de fon
piedeftal font des efpeces de niches peu enfoncées,
terminées alternativement, les unes en pointe, les
autres en ceintres furbaiffés ( ce qui n’eft point dif-
tingué dans le plan du P. Montfaucon ) , ces figures
étant prifes dans l’épaiffeur de la pierre ont peu de
relief. I . . , .
La première qui regarde le m idi, repréfente Minerve
; fon cafque 6c fa chouette la font aifément
çonnoître.
La fécondé tournant à droite eft Junon , habillée
en matrone , qui tient de la droite une patere qu’elle
femble préfertter à fon paon , 6c de la gauche une
ha f ia pur a , qui eft une pique fans fe r , marque de fa
divinité.
La troifieme eft un jeune homme prefque nud ,
qui a le pied gauche monté fur une pierre ou fur un
cippe, 6c la main droite élevée ; il eft difficile d’.ex-
pliquer cette figure, parce que les fymboles en font
prefqu’entiérement effacés : cependant M. Thomaffin
croit avoir apperçu un foudre à fa main droite ;
en ce cas ce feroit un Jupiter fans bai.be , ainfi qii'U
elt repréfenté fur quelque médaille, avec la légende
Jovi crefcenti.
La quatrième figure eft un homme, tenant fo,ii$
fon bras gauche un poulet, auquel il donne à manger
dans une patere qu’il tient de la main drpite, au
lieu d’un cafque , ce qui acheye de le faire connoî-
tre pour un augure.
La cinquième figure repréfente un jeune Bacchus,
appuyé fur fon bâton, qui pouvoit être uji thyrfe ;
il eft orné de la dépouille d’un tigre, & il a un jeune
mâtin à fes pieds.
La fixieme femble annoncer une divinité marine ;
c’eft une femme prefque nue , appuyée de la, main
droite fur un timon ou gpuyernail de nayifce., 6c
foutenant de la gauche une urne renverfée, qiii ré-
pand de l’eau jufqu’en-bas.
La feptieme eft un Hercule, appuyé de la droite
fur fa clave ou maffue, 6c tenant de la gauche là
dépouille du ly.on ; ce n’eft point un Hercule .Gaulois
, dont il,n’a pas les fymboles.
La huitième 6c derniere figure eft un captif qui a
l’air abattu ôc les mains l i é e s i l n’eft çpnyert que
d*une Ample tunique, ceinte par le milieu du-corps,
6c qui ne le couvre que depuis les épaules jufqu’aux
genoux , ayant les bras 6c les jambes découvertes.
Cet habit ne défigne ni un Romain , ni un Gaulois ,
çar les Gaulois pprtoient leurs habillemens fort longs
avec de grandes manches : feroit-ce l’habit d’un Hel-
vétien ? en ce cas la conjecture du grand Saumaife
feroit pleinement vérifiée. M. Thomaffin le foupçon-
ne auffi, & il ajoute que la beauté de ces figures ne
permet pas de douter q.u’elles ne foient du haut
empire , vers Augufte ou Tibere au plus tard.
On voit que la defeription de ce beau monument
eftaflez différente de celle qu’en donne le P. Mont-r
faucon , & même de la figure ci-jointe qui m’a été
communiquée par un ami ; mais j’ai cru devoir préférer
ce qu’en ont dit d’habiles gens qui ont examiné
cette colonne avec attention , à des deffins fou vent
altérés par les deffinateurs. Le P. Lempereur ne
donne aucune defeription de ces figures : il dit qu’elles
ont fouffert des injures de l’air, qu’on y diftingue
feulement un homme qui a le doigt fur la bouche
( c’eft apparemment l’attitude de la Minerve qui lui
a fait faire cette bévue ) , 6c un autre en habit fa-
cerdotal : on croiroit que ce jéfuite n’a parlé auffi
légèrement de ce monument que parce qu’il ne l’a
pas. vu.
Je vais ajouter quelques éclaireiffemens pris dans
une lettre écrite le 15 Oélobre 1753 , à M. Lardi-
lion , par M. Tifferand , ancien curé de Crugé 6c de
Savigny, mort fort âgé en 1760; il étoit allé vifiter
la colonne avec M. Parifot de Crugey , maître des
requêtes, qui y fit faire des fouilles en 1703.
Selon M. Tifferand , la bafe de la colonne qui eft
d’une feule pierre, eft de quinze à feize pieds de
circonférence : elle a été potée, comme on le reconnut
par les fouilles, fur un fondement de cou-
roy ou maftic , dans lequel on avoit jetté à pierres
perdues du laverin ert pointe.
Dans la fouille du cô(té du levant, on trouva à
un pied de profondeur, les offemens de trois corps ,
la tête contre la colonne, 6c chaque offement dans fa
place , avec fix médailles , dont trois de petit bronz
e , & trois de moyen b«onze, toutes repréfentanÇ
Antonin le pieux, dont le nom étoit dans la légende,
ç’éioit apparemment pour payer le droit de Caron.
En creulant au couchant, on trouva encore des
offemens 6c des médailles d’Antonin le pieux : on fit
auffi creufer fous la colonne même , enforte qu’on
paffoit par-deflbus, mais on n’y trouva rien. Le nou-
yel hiftorien de Beaune dit que dans les différentes
fouilles on n’eut pas l’attention de foumurer les deux
grandes pierres qui portent la colonne , 6c forment
un quarré de fix pieds de chaque face , ce qui les a
fait furbaiffer au milieu où elles fe joignent, enforte
qu’il eft à craindre que cette inattention ne caufe un
jpur la ruine de ce monument : il rapporte auffi qu’on
a trouvé par la fuite , aux environs de cette colonne ,
des médailles d’Augufte 6c d’autres empereurs. M.
Tifferand » qui étoit préfent à çes fouilles, & qui les
place en 1703 6c nop en 17 16 , comme l’hiftorien
de Beaqnp, ne fait point mention de c,es pierre?
quarrées qui fervent de fondation à la colonne.
. Lors de la vifite de M. Parifot de Crugey, on l’afr
fura que dans le bois voifin , appellé la Pompéiane ,
à deux,cens pas de 'la'colonne, en mpntant le coteau
qui conduit aux chaumè? d’Auvenet , on, trouvoit
beaucoup de corps humains & des tombeaux > de
diftance en diftance, avec leurs couvercles, qu.ifem-r
blpient Atre les cercueMs dp? chefs, pjirce que fur le
même alignement on trouvoit des corps de fofdats j
| ayant feulement des pieçres rangées pour couvrir la
tête ; la plupart de ces tombeaux avoient été enlevés
par. les.payfans p,our en faire des auges. M. Pa-
rifpt s’y étant fait çpnduire, on en trouva un-entier ,