
xrai font plus connus par leurs généraux que par
leurs propres aôions. Le -régné cl Heshan n eft mémorable
que par la défaite des Mufulmans à Tours,
-oîi ils perdirent trois cens foixante &C quinze mille
hommes: perte qui femble exagérée.Cette viéloire
remportée par Charles Martel, délivra l’Europe de
i ’efclavage dont elle étoit menacee. Valid qui lui
fuccede eft abhorré par fes. cruautés : la rébellion
éclate dans plufieurs provinces, & il perd le trône
& la vie. Il étoit impie, débauché & gourmand : fa
paffion pour le vin le rendit plus odieux à fes fujets,
que fa cruauté & -fes autres vices. Sa mort fut
le premier coup porte à la famille des Ommiades.
Yefid:, troifieme du nom, prend les rênes de l’empire.,
que fes mains, trop foibles ne peuvent gouverner.
Des fujets r.emuans, fous,prétexte de venger
fon.prédéceffeur, faufilent par-tout l’efprit de
révolte, & c’eft en épuifant le trèfar public qu’il.en
arrête les ravages, 1| meurt de la pelle à Damas,
après un régné de près de lîx mois. Ibrahim, Ion
Crere, qui monta fur le trône, fut un prince fans.vice.
& fans vertu. Mervan, prince de fon fang , arracha
le fpeptre de fes débiles mains ; & placé lur le trône
par la victoire, il montra que, s’iLavoit été heureux
à vaincre, il n’étoit pas,moins habile à gouverner.;
mais un empire qui n’eft point foutenu par la lo i,
•n’eît qu'un rofeau que fait plier l.orage. Lefprit de
rébellion fennentoit dans, les provinces : Mervan
n’eut que des fujets à punir. La molle complaisance
de fes prédéceffeurs qui en avoient été la vi&ime,
lui inspira une politique barbare , & il crut que fa
puiflance ne pouvoit être cimentée que par le lang.
La févérité de fes vengeances.multiplie les réb.elles;
les peuples commencent à rougir d’être, prollernes
•devant un.maître.fanguinake, tandis que la famille
•de leur prophète gémit dans l’oppreffion. Les Abbaf-,
fuies, plus riches que les Alides, réunifient les voeux
de l’empire ; la S yrie, l’Arabie, l’Egypte , la Mefo-
potamie & toutes les provinces méridionales proclament
Abbas, devenu le chef, de cette famille infortunée.
L’a â if Mervan s’empreffe d’étouffer le feu
de la révolte : il fe livre un combat fur Jes bords de
'l’Euphrate, où les deux, partis donnant également
des preuves de cet acharnement qu’inlpire le fana-,
tifme, tiennent long-tems la viûoire incertaine. Mervan
emporté hors des rangs par fon cheval fougueux,
•ne peut plus diriger les mouvemens de fon arpiée,,
qui fut taillée en pièces ; il s’enfuit à Damas, donj.
o n lui refufa l’entrée; il. va chercher un afyls en.
Egypte , & il y trouve la mort. Ainfi finit la puiC
fance des Ommiades, maîtres fanguinaires, moins,
par penchant que parla néceflité de gouverner, avec,
lïri feeptre de fer un peuple indocile & féroce.
La famille de Mahomet rétablie fur le trône donne
également des. feenes de carnage. Les Ommiades
font frappés d’anathêmes, ô£foixante,mille.périflènt.
par le glaive dans l’étendue dé l’empire. Abdéra-
mene , refte infortuné de. cette famille., fe dérobe
au maflacre, & paffe en Efpagne, où il forme un
état indépendant. Les Abbafîides délivfés.des enoe-r
mis de leur maifon, rétabliffent.la mémoire d’Ali,
& pourfuivent avec fureur fés defcendans. Poffel-
feurs paifibles du trône, ils y font aflèoir les fcien'ces
les arts avec .eux : la littérature Grecque & Romaine
devient familière à un,peuple greffier, qui.
s’étonne de.lajbarbarie de.fes ancêtres.,On ouvre
des écolesdé philofaphie ,.oii.là.raifon triomphe des.
préjugés, populaires ; l’aftçonomie y découvre les-
mouvemens dé ces globes ilottans dansri’irmnenfité;-
mais dans fa naiffance, on abufe de lafaibleffejpour
la défigurer, & elle n’eft encore que l’art impofteur
-qui féduit la crédulité, avide de dévoiler l’avenir. La
médecine à peine fôrtiede l’enfance, parvint fubi-
îenient à fon âge de maturité; mais fes traits furent
^Itérés par des fympathies myftérieufes qui firent
la réputation des charlatans des impofteurs. Des
villes nouvelles.s’éleverent, où l’archite&ure fit briller
fes premiers effais ; la chymie qui pénétré dans
tous les fecrets.de la nature, développa les richeffes
dont on abufa pour fe livrer à la.découverte chimérique
de la pierre phiiofaphale. Ainfi, -tandis que
les ièiences & les arts font exilés de l’Europe par
les. Go.ths & les. Vandales , la cour de Bagdat leur
•fert d’afyle, où Mahadi & Aaron Rafchid appellent
&; récompentent tous ceux qui fe diftinguent par le
génie. Ü eft vrai que les lettres à leur renaiffance jet-
terent pLutôr quelques, étincelles qu’une véritable
lumière ; mais elles fuffirent pour nous remettre ou
nous guider dans nos routes.
Le goût des Abbafîides pour les arts n’affoiblit
point leur ardeur pour la guerre : tout, jufqu’à leurs
fêtes, fervoit à entretenir les inclinations belliqueu-
fes de la nation : c’étoit des joutes ou des. combats
d’animaux, où chacun pouvoit exercer fan adrefle
&; fon courage. L’empire, en devenant plus éclairé,
devint plus redoutable ; l’Atlas & l’Immaiis, le Tage
& l’Indus étaient fous le même feeptre, & deux mille
lieues.d’étendue formoientle domaine d’unfeul maître.
Dix-huit princes Abbaffides régnèrent fitcceffive-
ment avec autant de gloire pour eux que pour la félicité.
de. leurs peuples qui réuniffoient leurs voix
pour bénir leur régné. Un empire aufiî étendu devait
s’écrouler fous fon propre poids ; il eft un certain
période de grandeur.où un état n’eft ;pas plutôt
parvenu , qu’il, fait des pas vers fa ruine ; plus il
prend d’accroiflemens, plus le. pouvoir arbitraire fe
déborde fur la liberté naturelle des peuples« Le. fpee*
tacle de tant de nations profternéés infpire l’audace
de tont.ofer &.de tout enfreindre; le.defpote ivre
de fon pouvoir, s’endort dans une fauffe fécurité ;
le bandeau de l’illufion ne lui laiffe point apperce-
voir qu’il ne faut qu’un chef à . des peuplés mécon-
tens pour .être rébelles. Les- derniers Abbaffides envoyèrent
dans les provinces éloignées des gouverneurs
armés du pouvoir, qui s’en rendirent les fou-
verains : la.facilité de fe rendre indépendans leur en
fit naître l’ambition. Dans .une. monarchie héréditaire,
il ne faut qu’un homme médiocre, pour dé-,
truire l’ouvrage de vingt héros.
Après .le régné de Vatek , le trône ne fut plus
occupé que. par des hommes incapables d’en fo u tenir
le. poids ; fon fuccefieur , abruti dans les plus
fales débauches, expire fous les coups de don fils
qui femble le punir d’avoir donné la vie à un. monf-
tre fi dénaturé. Ce parricide met tout, l’empire en
confufion. ; les gouverneurs des provinces profitent,
de cette fermentation générale pour élever
l’édifice de leur, fortune. Ceux des.*-provinces
d’Afrique donnèrent., l’exemple ; & ils eurent
bientôt.des imitateurs , q u i, tous complices du
même, crime , ientent la néceflité:.de fe prêter
de. mutuels fecours. Les Fatimites , ainfi nommés
parce qu’ils defeendoient d’Ali & de Fà!time,
réclament alors, leurs droits,, & ils fondent en Afrique
un empire rival: de celui de Bagdat, & la
conquête de l’Egypte le rendit encore plus redoutable.*
Les querelles de- la religion préparèrent la ruine
des ,■califes. La religion déchirée par des fchifmes
enfantoit des haines Si des guerres, ; les Mufulmans
difputoient, le fer & la flamme à la ^main , pour
établir .des dogmes dè fpéculations, indifférens aux
moe,urs &c à l'harmonie de la fociété; Plus les quef*
tions difeutées ctoient enveloppées d’obfcurités,
plus elles.infpiroient de fureurs religieufes. L’Arabie
étoit furchargée. d’une foule de dévots prêts à s’entre
dévorer,.; St: qui tenant d’une main le’cimeterre ,
& de.I’autre, le K.oran Jançoient réciproquement
les uns fur les autres, les anathèmes de la religion
& les foudres de la guerre.
• Dans- ces circonftances , un homme fans talent &
fans lumière , mais tout'brûlant de zele, demande
au calife des millionnaires pour l’aider à convertir
à I’iflamifme , des peuples épars dans les déferts de
l ’Afrique. Ces apôtres ignorans font des conquêtes
rapides ; & enorgueillis par leurs fuccès, ils fe
croyoient des intelligences pures, dont le foufle du
fiede pourroit corrompre la fainteté. Ces pieux in-
fenfés forment une confédération ; ôt fous le titre
ânfidieux de réformateurs, ils deviennent rebelles.
On les pourfuit avec févérité, & ils favent mourir
avec confiance : leur fang devient la femence féconde
d’où naît un pëuple de fanatiques. Leur chef
ceint fon front du bandeau royal ; pontifk & ro i,
fous le nom de Miramolin, il fonde un empire qui
menace d’engloutir tous les autres dans fon fein.
Motamafem, huitième calife Abbaffide , fe défiant
de fes fujets , avoit confié fa garde à des étrangers.
Un peuple forti des bords de la mer Cafpienne, qui
•n’avoit d’autre métier que la guerre, & d’autre
vertu qu’un courage féroce, s’étoit emparé d’une
province de l’Afie méridionale; ce furent ces Tur-
comans que les califes de Bagdat choifirent pour être
les foutiens de leur trône. Leurs chefs , d’abord fans
ambition,raffermirent l’empire ébranlé; leur valeur
& leurs fervices frayèrent à leurs chefs le chemin
aux premières dignités : accoutumés à foutenir le
trône, ils fe crurent bientôt dignes d’y monter. Ce
n’eft point ordinairement la milice qui jette la fe-
mënce des troubles, mais c’eft elle qui en fait profiter
pour fixer le dëftin des états. Sous Moftader ,
dix-huitieme calife, la religion Mufulmane comptoit
trois chefs qui fe foudroyoient réciproquement par
des anathèmes ; quatorze fouverains indépendans
avoient refferré le calife Arabe dans .quelques provinces
orientales, qui refpeftoient fa dignité fans
lui montrer plus d’obéiffançe : les Turcs combat-
toient pour lui pendant qu’il languiffoit dans les
délices de fon férail : ils fe lafferent enfin de répandre
leurvfang pour défendre un empire gouverné
par des femmes & des eunuques. Moûader eft dé-
p o fé , & les rebelles l’immolent à leur sûreté. Son
frere Kader prend le feeptre qu’il eft indigne de porter
: fes cruautés & fes perfidies le rendent odieux ;
& les Turcs qui l’a voient élevé rqugiffant de leur
ouvrage, le renferment dans une prifon d’où il ne
fortit que pour demander l’aumône à la porte
d’une mofquée.
Sous le régné de Rhadi, fon fucceffeur, le califat
ne fut qu’une ombre fans réalité : les gouverneurs
devenus indépendans, n’envoyerent plus à Bagdat
les tributs de leurs provinces : les intérêts du trône
cefferent d’être confondus avec ceux de l’autel. La
puiflance du fucceffeur de Mahomet fut reflferrée
dans l’enceinte du temple ; les arbitres des nations
né décidèrent plus que de la do&rine : les Turcs
furent armés du pouvoir, &c les califes n’eurent que
l ’extérieur du reîpeél : il s’élève une foule de petits
tyrans, qui fous le nom d’émirs & de foudans, pour
ne pas heurter, les préjugés fuperftitieux, demandent
l’inveftiture au chef de la religion, trop foible
pour les refufer ; & quoiqu’ils fe profternent devant
lui & qu’ils le révèrent comme le miniftre de Dieu
fur la terre, ils^le dépofent ou ils l’immolent fans
remords. Depuis cette révolution neuf califes mont
r e n t fur la chaire de Bagdat, mais ils ne fe mêlèrent
plus des fondions de l’empire. Le petit-fils de
Gengis , en fe rendant maître de cette ville , fit
mourir le calife , dont le titre fut aboli l’an 1158 de
Jefus-Chrift. Cette dignité fubfifta plus long-tems en
Egypte, où Selim qui en fit la conquête, prononça
fon extin&ion en 1517 de notre e r e , 6c toute îa
Tome I I .
puiflance facerdotale fe réunit dans l’Iman de la
Meque. Les Mufulmans fe policent, & la barbarie
de l’intolérance ne fit plus de martyrs que chez les
Miramolins, monftres enfanrés par le fanatifme,
qui fe fert du pretexte de la religion pôur juftifiei*
fes fureurs. Le gouvernement devint militaire; chefs
de la religion, les califes ne furent plus que des
fimulacres muets & fans force , qui firent mécon-
noître les fucceffeurs de Mahomet. ( T-n . )
CALIFORNIE , ( Géogr. Hiß. des découvertes. )
« Wytfliet ( dit M. Buache, dans fes ConfidèradonS
Géographiques, article 111, page & fuiv. ) affure ,
en 1598 , que l’Amérique feptentrionale touche
prefque l’Afie par fon extrémité occidentale , &
qu’on avoit cm qu’on pouvoit aller du cap d’Engano
à 3d. fur la côte occidentale de la Californie, par
terre aux régions de Sina & de Tartarie.
Il y a plus de 180 ans, dit-il, que le4 meilleurs
géographes de ce tems ont commencé à mettre
un détroit entre l’Afie & l’Amérique, auquel ils
donnoient le nom d’Anian, dont l’entrée méridionale
étoit entre cent quatre-vingt & cent quatre-vingt-dix
dégres de longitude , & qui s’étendoit depuis le cin-
quante-fix de latitude jufqu’au-delà du foixante-deux.
On marquolt à fon entrée , vers l’eft, un cap
Fortune, jufqu’où l ’on défignoit une longue cô te,
qui venoit du cap Saint-Lucar de la Californie. J’ai
exprime cette cô te, &c. conformément aux cartes
de 1570 d’Orteliùs & autres, d’après une ancienne
carte marine Hollandoife qui paroît faite avec foin ,
& dont il donne le titre : America tabula nova multis
locis tarn ex terreßri persgrinatione , quàm recentiori navigations
, ab exploradßimis nanclerisy & multb quàm
anteà exactiof édita. Il continue : l’attention qu’on
fit enfuite, fur-tout à la navigation de François
Dracke , en 1579, &c. fit retrancher la partie la
plus au fud de la longue côte en queftion , dont il
femble néanmoins qu’on auroit dû conferver une
idée plus au nord.
Divers écrivains célébrés cherchèrent enfuite
les fondemens du détroit d’Anian; & leurs efforts
n’ayant rien pu produire , ce détroit devint fort
incertain , & peu-à-peu difparut des meilleures cartes,
quoique les favans convinffent qu’il devoit y
avoir un détroit au nord de la mer du fud, &c.
Cependant, avant qu’on en vînt jufqu’à retrancher
entièrement le détroit d’Anian, retranchement
qui faifoit perdre toute idée du tableau des anciennes
connoiflances , ce détroit fut tranfporté dans la
carte originale de Texeira en 1649, du cent quatre-
vingtieme dégré de longitude où il étoit auparavant,
vers le deux-centieme. Dudley mit en 1647 > ^ caP
Fortune, par conféquent le détroit d’Anian, près du
deux cent-vingtieme , félon" lui deux cent vingt-
neuvieme. Enfin, ce détroit eft tranfporté près du
deux cent quarantième dégré entre les latitudes de
cinquante-un à cinquante-trois par l’écrivain du
Vâifl’eau la Californie, &c.
Aujourd’hui nous connoiffons un détroit vers le
nord , près des côtes de la Tartarie , &c. ne pouvons
nous pas dire que c’eft celui auquel nos anciens
ont donné le nom d’Anian ? Les reffeniblances me
paroiffent à remarquer;Pun & l’autre ont leur entrée
au fud,vers le cent quatre-vingtieme dégré;ils fe trouvent
entre les côtes orientales d’Afie ou de Tartarie
& celles du nord-oueft de l’Amérique ; ils s’étendent
jufqu’au cercle polaire, après quoi les terres
tournent du côté de l’Amérique feptentrionale, au
nord-eft; & du côté de la Tartarie, &c. au nord-
oueft. Enfin nos anciens marquoient dans leur détroit
d’Anian, près du foixante ou foixante-unieme
dégré de latitude, du côté de l’Amérique, une
grande riviere , nommée grande Corrientes, qui
répond à la riviere de Bernarda, Tout cela ne peut-ij