
travaux de cette nature, & qui doivent fe faire avec
le plus de célérité poflible, il eft très-rare que l’on ne
perde plufieurs chofes, & l’on fe trouveroit très*
embarraffé, fi les matériaux venoient à manquer au
milieu de la manoeuvre.
Comme l’on ne trouvera pas toujours des bateaux
dans le pays où l’on porte la guerre, & comme quelquefois
le terrein eft coupé par des montagnes, à
travers defquelles il eft impoflible de conduire un
équipage de p o n t, il ne reliera au capitaine d’ouvriers
que la feule reffource des radeaux. Pour former les
radeaux, on aura foin d’avoir des arbres longs de 38
à 40 pieds ; chacun de ces radeaux fera compofé de
34 arbres, de 9 à 12 pouces de diamètre : 60 radeaux
peuvent former un pont de 400 toiles de longueur:
les agrès indifpenfables à la conftruélion de ces ponts,
font les perches, les traverfes, les liens d’ofier, lés
chevilles & les planches pour recouvrir.
En général, on doit pofer pour principe certain,
que la lenteur dans la conftru&ion des ponts proviendra
toujours delà négligence de celui qui eft chargé de
leur conftruftion : les deux objets principaux que le
capitaine d’ouvriers ne doit jamais perdre de vu e,
fon t, i° . la prévoyance des cas qui peuvent arriver
pour le paffagè des rivières dans tel & tel pays; z°.
les foins qu’il doit employer à raffemble'r de bonne
heure les matériaux & les agrès^néceffaires à la conf-
tru&ion des ponts.
Cependant comme les fleuves, rivières, torrens,
peuvent être d’une nature à exiger beaucoup de foin
& d e tems, pour pouvoir y conftruire des ponts, foit
par l’efcarpement de leurs rives, foit par leur prodigieux
courant, foit enfin par d’autres caufes que le
génie humain ne peut prévoir, & que la nature préfente
des obftacles dans l’inftant même où l’on s’y attend
le moins, il fera toujours prudent de faire paffer
à l’autre rive fept à huit mille hommes, qui, en fé
retranchant, pourront donner au capitaine d’ouvriers
tout le tems néceffaire à vaincre la réfiftance que la
nature oppofe. On peut aifément faire palier ce nombre
de foldats par le moyen des radeaux faits de
peaux de bouc enflées. Voye^ l'article P o n t VO LANT
de peaux de bouc enjlèes , Suppl. Un chariot chargé
de ces peaüx en contient affez pour faire paffer
7500 hommes.
Les peaux de bouc font d’une utilité indifpenfable ;
mais elles deviennent d’un ufage dangereux , fi l’officier
chargé de la conftrucHon des ponts, ne prend
pasunfoin particulier de les examiner & delesvifirer
fouvent : la moindre ouverture qui pourroit donner
iffue à l’eau, deviendroit périlleufe. Nous ne faurions
trop recommander les vifites les plus fcrupuleufes
fur ces fortes d’agrès: il feroit utile d’avoir à la fuite
d’une armée deux ou trois chariots chargés de ces
peaux.
L’on a peut-être négligé mal-à-propos l’idée des
anciens, renouvellée par le chevalier. Folard, au fu-
jet des peaux de bouc. Cet auteur prétend qu’il feroit
aifé de faire traverfer un fleuve à la cavalerie;
& voici en général le procédé qu’il propofe pour
cette manoeuvre. A l’ouverture de la peau eft une
machine fort fimple pour faire entrer l’air & enfler la
peau: c’eft une foupape folide qui coupe la communication
de l’air intérieur avec l’air extérieur; ces
peaux font affujetties de la maniéré la plus folide aux
deux côtés de la felle, le cavalier fur le cheval les
enfle par le moyen d’un fouflet; enfuite il paffe les
jambes fur ces peaux enflées & traverfe. Rien n’eft
plus ingénieux: nous préfümons que fi l’on faifoit
des expériences pour connoître la façon la plus avan-
tageufe de difpofer ces peaux par rapport à la maffe
du cheval & à la façon dont il nage, on pourroit en
tirer un très - grand parti. Au refte, c’eft l’expérience
la plus, réfléchie qui doit toujours décider dans les
manoeuvres d’une telle importance.
Nous entrerons dans des détails plus circonftanciés
dans l'article P o n t . N ous nous efforcerons même de
donner des principes, fûrs, fondés fur l’expérience,
& d’après lefquels on pourra manoeuvrer. Nous fom-
mes perfuadés que la perfeéfion dans cette partie,
dépend bien moins des découvertes que l’on a a faire,
que de la vigilance du chef qui conduit l’ouvrage.
Nous ne faurions trop le répéter, les machines que
l’on tâchera d’inventer ; entraînent toujours avec elles
l’embarras des tranfports, & toutes ces découvertes
fe réduiront toujours à des bateaux, faits différemment
, qu’il faudra mettre en place §£ arrêtera •
Nous ne prétendons pas au refte méprifer les machines
que l’on pourroit donner dans cette; partie ;
mais en imaginant une machine de guerre de quelle
nature qu’elle foit, l’on ne doit jamais s’écarter de
ce principe fondamental de la taûique, fo lid ité, jim - ,
pli cité, uniformité. (H . D . P .')
ÉQ U IPAG E DE SIEGE., ( Artmilit. ) Lorfqu’on fe
propofe de former un équipage deJîege, l’on ne fauroit
apporter trop d’attivité & de foins pour connoître
la force , la fituation de la place, &: l’état de
fa garnifon; fi l’on peut y former une ou plufieurs
attaques;.fi, pour fe mettre à couvert d’une armée
d’oblervation, l’on fera obligé de creufer des lignes
de circonvallation. On doit donc connoître tous les
environs de la place, fur-tout les forêts & les taillis ,
pour en tirer des bois propres aux conftruélions,aux
fafcines, gabions!, &c.
Si la place que l’on fe propofe d’attaquer n’eft fuf-
ceptible que d’un front d’attaque, il faudra moins de
pièces de canon & de mortiers, mais plus de munition
pour chacune de ces armes ; car lorfqu’on peut
attaquer une place par deux ou trois points différens,
l’effort des affiégés fe trouve divifé, & par ce moyen
le fiege n’eft pas fi long. Il faudra donc plus de pièces
& de mortiers, mais moins de munitions, que lorf-
que la place n’eft attaquable que par un feul endroit,
où l’effort des affiégés réunis doit contribuer beaucoup
à la durée du fiege.
Si la place eft refferrée, les bombes y feront un
grand effet : l’on aura foin d’en avoir quantité. Je ne
prétends pas au refté juftifier la barbarie qui porte un
général chargé de la conduite d’un fiege, à détruire
de fond en comble les maifons de la place ; je veux
dire feulement, que lorfque les ouvrages d’unè place
qu’on affiege, fe trouveront fujets à être enveloppés,
tels par exemple, que les ouvrages à cornes, à couronnes
, dont les côtés feront longs, on peut attendre
tout le fuccès poflible en y jettaht des bombes.
Si l’on eft près de plufieurs villes dont on eft le
maître , fi l’on peut avec fureté en tirer des approvi-
fionnemens, & fi les chemins ne font pas expofés à
devenir impraticables, par les pluies, les torrens,
&c. on pourra regarder ces places comme faifant des
féconds parcs, & il feroit inutile de former des amas
prodigieux de munition, dont on fe trouveroit embarraffé
à la fin du fiege; mais dans ce cas, il faut être
bien fur que l’armée d’obfervation ne pourra point
couper les communications & rendre inutiles les fe-
cours que l’on peut tirer de ces places.
Si l’on eft obligé de former des lignes, il faudra fe
munir de quantité d’outils à pionniers : un tiers de plus
que le nombre qu’on emploie à l’ouverture de la
tranchée, fera fuffifant : dans le cas où l’on fera forcé
de faire des lignes, il faudra beaucoup d’artillerie de
campagne pour les garder. Si l ’on n’ufoit pas de précaution
, il pourroit arriver que l’armée d’obfervation
vînt attaquer dans le même tems que la garnifon
feroit une fortie ; pour lors on feroit forcé dé lever le
fiege. 11 eftvrai que fi la garnifon eft foible, l’on ne doit
point craindre fes forties, parce que ces attaques
n'ont de réufîite qu’autant que les affiégés font nombreux.
Si la place eft fituée fur des hauteurs & qu’il n’y ait
pas un fond affez çonfidérable de terre, il faudra
beaucoup de pics à roc, peu de bêches, un appro-
vifionnement çonfidérable pour les mineurs : on ne
fauroit trop fe munir de facs à terre, & fur-tout de
lacs à laine. Si la place eft environnée de rocs v ifs ,
■ ou fi les' ouvrages font taillés dans le ro c , ou enfin,
fi Ton ne trouve pas un fond de terre affez confi'dé-
rable pour former les lignes d’approches ; dans toutes
ces circonftances, on doit employer les facsàlaine
& réferver les facs à terre pour la conftruûion des
batteries, parce que ces o'uyrages qui exigent de la
folidité, font plus expofés à l’artillerie de la place :
l’intendant doit fournir les facs à laine.
Si la place eft fituée dans de la bonne terre, il faudra
fe pourvoir de quantité de bêches: fi elle eft fituée
dans une terre légère & fablonneufe, on aura
foin d avoir plus d’efcoupes que de bêches, quantité
de bois pour les farines & beaucoup de facs à terre ;
car les fables ne donnent jamais un liaifon affez con-
ïidérable pour, former des batteries folides & à l’épreuve
dès boulets. En fe fervant de facs remplis
de terre, on peut établir une batterie qui réfiftera
mieux à 1 effort des boulets, que fi l’on fe fût feulement
fervi des terres légères & des fafcines pour la
conftruire.
Si la place eft fituée dans un terrein marécageux,,
fujet aux inondations tant naturelles qu’artificielles;
fi les foffés font remplis d’eau, il faudra fe fournir
de tout ce qui eft néceffaire pour y faire des ponts ,
ou de bateaux, on de chevalets, ou fur pilotis;
alors il eft effentiel d’av,oir, 1®. quantité de bois pour
la conftruftion des fafcines ; 2°. des bois de charpente
; 30. des gros madriers, parce que l’on fera
obligé de former les batteries fur des digues, & l’on
doit obferver que ces digues ne feront point d’une
grande folidité, fi l’on n’a pas l’attention de recouvrir
les terres tranfportées par de forts madriers : on emploiera
aufli des madriers pour les petites communications;
cardans une terrein marécageux, on eft
obligé d’ouvrir un foffé pour l’écoulement des eaux,
& fur ces foffés l’on ne fauroit faire trop de communications
pour pouvoir fe porter avec célérité à tel
ou tel point d’attaque.
^ Si la place eft coupée ou avoifinée d’une groffe rivière
, on fe fervira des bateaux du pays pour les
tranfports dés munitions; il faudra fe fournir d’un
équipage de pont proportionnel à la largeur de la
riviere ; l’on en reconnoîtra le fond & le courant : V.
ci-dejfus ÉQ UIPAG E d e p o n t : fi l’eau eft dormante
& qu’elle ne foit pas fujette à déborder, on pourra
faire paffer fur un pont de pontons de cuivre , des pièces
de 1 4 , chargées fur des charriots à porte-corps;
l’on aura foin de doubler les pontons, y. P o n t s d e
p o n t o n s , Suppl. Si la riviere eft fujettè à fe déborder
, ou qu’elle ait un courant rapide, il ne faut point
fe fervir de cette efpece de ponts. L’on doit obferver
que dans une attaque, les ponts que l’on jette fur les
rivières, doivent être à demeure pour fervir de communication
, & que les ponts de pontons de cuivre
ne peuvent pas réfifter long-tems: dansce cas,
;il fera plus prudent de conftruire des ponts fait
avec des bateaux du pays ou des pontons de bois,
tels que ceux que l’on exécute à Strasbourg & à
Metz.
SL Ion trouve des bois près de la riviere, pour,
lors , avec dès foins & de l’induftrie , on pourra épargner
beaucoup de dépenfes au fouveràin : fiJ’on ne
trouvoit pas des bois taillis près de la.riviere, il fau-
droitfe pourvoir ailleurs de piquets, fafcines, brancards
, gabions, blindes, chandeliers, chaffis de mine :
mais ces fortes de tranfports caufent toujours un embarras
prodigieux.
Le commandant dé l’artillerie ignore quelquefois
fur quelle ville le général a fixé fes deffeinsc fouvent
memè la cour fe contente d’ordonner qu’on affem-
blera fur un certain point un équipage de Jîege, elle
fixe pour l’ordinaire le nombre des pièces & des mortiers
, fans autres détails ; dans ce cas, le chef de l’artillerie
doit fe rappeller qu’il vaut mieux pécher par
une trop grande abondance que par défaut d’appro-
vmonnement. Dans l’attaque d’une place, le défaut
d’approvifionnement peut faire échouer l’entreprife,
& occafionner la levée d’un fiege.
Dans les fieges les plus confidérables, on peut fe
reg’er fur 1000 boulets-par pièce; 500 bombes de
12 pouces de diamètre, pour chaque mortier du même
calibre ; 700 bombes de 8 pouces, & des bombes
dobus, [tour chaque obufier ou mortier de ce diamètre.
A l’égard du nombre des pièces, il eft difficile
d en fixer un état précis, parce qu’il dépend de la place
affiegee & du nombre d’attaques que l’on fe propofe
de faire.
. Si la défenfe eft opiniâtre & que le fiegè traîne en
longueur, on aura le tenis de. fe procurer des fe-
cours : mais dans tous les' cas, il eft de la derniere
conféquence, i° . détenir un état exaél de tout ce
qui fe corifomme chaque jour; z°. de connoître les
provifions du parc, fa fituation , les chemins par lefquels
on fait venir les approvifionnemens , & le
tems que les voitures emploient pour arriver au
parc.
• apporter la plus grande économie dans
les munitions de poudre, fur-tout lorfqu’on n’eft
encore qu’à la première parallèle, c’eft-è?dire, à
trois ou quatre cens toifes du corps de la place. Le
commandant de l’artillerie doit employer les repré-
fentations les plus vives pour empêcher l’abus de ces
canonnades qui ne mènent à rien, pu if que l’incerti-
tnde des coups ne permet pas de fe propofer un grand
effet de leurs feux. Il ,en eft de même des batteries:
.1 on doit faire attention à ce qu’pn ne les multiplie
pas inutilement, & faire des repréfentations à ce
fojét. Il nous paroît que dans les circonftances où il
s’agit de la diftribution des canons, &/..;on devroit
s’en rapporter à la prudence du chef de l’artillerie-,
officier qui n’arrive jamais à ce grade que par une
expérience confommée, & par des talens reconnus.
Dans XarticleSiégé , Suppl, nous entrerons dans des
détails plus circonftanciés. ( H. D . P. )
ÉQUIPONDÉRANCE, f. f. Équipondérable,
a<^J• ( PJyJîquz. ) On a cru dé voir conferver ces
mots déjà employés par quelques chymiftes , pour
exprimer une idée que ne renferme pas affez exactement
le terme d’équilibre. L’équilibre eft une égalité
de forces qui, agiffent en fens contraires. Véqui-
pondérance eft l’égalité de pefanteur ou d’attraftion
au centre de la terre. L’équilibre dépend des rapports
compofés des maffes, des vîteffes, des réfif-
tances, de la longueur des leviers, &c. L'équipons
derance ne dépend que de la gravitation propre des
deux corps comparés. Un corps eft équipondérable
à l’eau, lorfqq’ii fe foutient indifféremment dans
toutes les parties de ce fluide, fans éprouver aucune
aftion qui tende à le déplacer ; c’eft-à-dire, lorfque
ni cç'.corps , ni le fluide ne font attirés .avec une
force fupérieure. Il y a plufieurs moyens chymiqueS
de produire ou de détruire 1 'équipondérance entré
deux corps ; mais tous çes moyens fe bornent à
changer la gravitation propre de l’un des deux.
y<>ye%_ D issolut ion, dans ce Suppl, ( M. d e
Mo r v e a u . )
§ ÉQUIPPOLÊS, adj. pl. {termede Blafon.) fe dit
quand un écu eft rempli de neuf quarrés en forme
d’échiquier, que l’on nomme points; ceux des quatre