
rèconnoît enfin , avec l’un de nos meilleurs écrivains,
Thomas Raynal, que les diftindions accordées
à la haute nobleffe fo n t, dans la plupart des
gouvernemens de l’Europe , exceffives & ridicules ,
qu’elles accoutument nos grands fëigneurs a
penfer qu’ ils font d’une efpèce particulière ,
qu’elles leur a {furent un état & un rang , quoiqu’ils
ne faflent rien pour s’en rendre dignes •,
que nous- devons à cette inftitution tant de
miniftres médiocres & de mauvais généraux.
M. de L. envifageant la même queftion fous
tin autre point de vue , dit : c’ eft un vice eflen-
tiel dans une" conftitution- militaire de _ faire redouter
les combats aux principaux membres des
corps aux chefs de toutes les troupes particulières
qui les compofent -, or c’ eft les leur faire
redouter que ne leur offrir aucune perfpeéiive
agréable en compenfation de leurs travaux & de
leurs dangers* donc notre conftitution eft vicieufé-,
elle ouvre en effet du premier pas la porte des»
hauts grades- à des jeunes gens qui fôuvent ne
portent d’autre titre que le hafard d’un nom , &
elle en ferme inhumainement l’ entrée à l’ officier
couvert de blelfùres» qui ne fait pas intérefler en
la faveur les folîiciteurs de" grâces. A cette première
réflexion M . de L. . . • en joint une fécondé
aufli forte. Un jeune homme de qualité, quelque
ftupide qu’il puiffe être , eft toujours jugé capable
de commander un régiment, d’où il efl élevé pro-
greflivement & fans difficulté jufqu’aux plus hauts
grades. Pour être admis.* aux diverfes profeffions'
de. l’ordrq c iv il, il faut au moins, faire preuve de
quelque, capacité; Mais on peu# , fans montrer le
moindre talent parvenir aux emplois de la
guerre les plus-importans- & les plus difficiles. A
ïa. fâyeur du. nom- on a. été infcrit fur le tableau •,
a. la faveur du. tableau oh arrive à tout.
| Cès principes font inconteflables^ & ils con-
d uifent, ce me femble , par une fuite de termes
nd'entiques à cette1 maxime vraie : dans toute
■ Bonne conftitution militaire ,. le. commandement des
rémmens doit être donné, non à la naijfance, mais
au. mérite. Les. deux écrivains, que je viens dè
citer ont certainement tiré de leurs- principes
cette conclulion naturelle *, mais ni l’iin ni
Eautre ne l’a. énoncée car le premier a dit :
lîon peut élever au. grade de colonel tout, homme
âgé de vingt-cinq ans & qui a fept années de
fervice y 8c le fécond a lailfé la place de colonel
& une de celles de chef de bataillon- à la feule
naiffance^ Ces deux militaires eftimâbles ont été
entraînés» fans doute par les. préjugés- régnans *
car je. ne croirai jamais» qu’ ils, aient voulu ,. fui-
vant l’expreffion de Phn d’entre eux , diriger cetce
partie, dé leur conftitution: militaire non vers
lier bien, généralmais» vers, le bien perfonnel d’un
petit nombre d’individus.-, ou-,. en d’autres .termes ,-
oamçter. les» gens: de-la» cour. pour, tout 8c l’état
jjourr rien;. M.. de; B« ... . . a.exigp.,, i l e f t vrai: r
que les fept années de fervice qu’ il demande
fulfen^ bien employées -, il admet les lieutenans-
colonels 8c les majors aux places de mejlre de camp ;
il fait préfenter au roi cinq fujets par le confeil
de guerre * il rend publique la lifte des officiers
prélentés , & il veut que tout officier préfenté
cinq fois fans avoir été choifi obtienne le brevet
de colonel. Mais l’ intrigue ne réufliroit-elle pas
bientôt à exclure de cette lifté les lieutenans-
coionels 8c les majors , ou du moins n’empêcher
oit - elle pas qifils fufient préférés ? Eft-ce
que le major ou le lieutenant-co/one/ qui auroit
été rejeté cinq fois ne feroit pas- plus cruellement
bielfé par cinq refus confécutifs , que
flatté par un brevet fi long-temps & fi formellement
refufé , & c ? Ces colonels à brevet , ces
colonels furnuméraires ne feroient - ils pas d’ailleurs
des êtres à charge à l’état militaire ? Us
n’auroient aucun emploi fixe , 8c cependant on
ne pourroit leur refufer d'es appointemens pro*
portionnés à leurs grades. N’en doutons point ,
dans la conftitution propofée par M. de B . ._., tous-
les colonels feroient bientôt pris parmi les gens de
la cour, & aucun n’aüroit plus de vingt-cinq ans.
S’il étoit permis aux régimens de nommer leur
colonel , & fi on leur donnoit à choifir entre
un homme de vingt-cinq ans-qui auroit rempli
les conditions demandées-par M. de B . . . , & un
homme de trente ou trente^cinq. ans: qui auroit
été élève au grade de capitaine par l’ ancienneté
feule , 8c qui, après trois, ou quatre ans de com-
miffion , auroit été nommé d’abord major',,
puis-lieutehanc, en e f l - i l un fëul qui- donnât
la préférence à l’homme de- vingt - cinq ans ?
Si je demandais» à M.. de B. . . . lui - même ,,
étiez - vous , Monfieur , aufli capable à l’âge
de vingt-cinq, ans de commander un corps que
vous l’êtes aujourd’hui ? non , fans-doute, me1
répondroit ce militaire éclairé-, mes connoilfanees
; fe font accrues-, mes talens développés & mes
qualités, heureufes fortifiées- : comment pouvez-
; vous croire ,. repartirois-je alors , que le re flè te s
[ officiers françois., eux qui ,. comme vous , n’ont
: point confacré leur jeuneffe à l’ étude & à la ré--
flexion , puiflent dès l’âge de vingt-cînq ans être
j capables-de bien commander un corps militaire ?
En dbnnant deux dès quatre places dp com-
;/ mandant de bataillon aux capitaines les plus,
anciens , M. de L. . . a. rempli1, il eft v ra i, une:
des. principales: conditions dè toute bonne confti-
i tution militaire, celle qui veut-qu’ bn accordé aux1
a officiers- le prix légitimement dù à leurs fervices ;■
: mais ne paroît-il point avoir oublié le principe.
; fage qui nous dit , « le premier chef de chaque
: corps» militaire doit avoir alfez d’expérience &
: de talens» pour bien conduire fes füb ordonnés dans;
| toutes, lés circonftancès poffibles- , & alfez- de
; force pour maitrifer toujours fes.propres pallions ;i
j celui; qui: nous, enfeigne que nous, devons offrir
aux guerriers des motifs alfez puilfans pour les
déterminer à faire à la patrie tous les facrifices
qu’elle, exige ? celui qui nous apprend que nous
devons allumer dans l’ame des militaires le feu
d’une vive émulation , 8c que cette émulation
ne peut exifter quand on met des bornes à leurs
défirs &' à leurs efpérances ?
Nous nous garderons de blâmer les opinions
que nous venons de tranfcrire : elles étoient, au
moment où elles oijt été énortcées , un effort de
liberté & de juftice. L’ ariftocratie étoit dans fa
force', la preffe dans l’efclavage * 8c l’on remarque
aifément que les deux auteurs cités n’ont point
développé leur véritable penfée. Si MM. de B. . .
& de L. . . avoient écrit aujourd’hui , ils diroient
avec nous : une haute nailfance peut accorder les
honneurs du Louvre , mais, le mérite combiné
avec l’ancienneté peut feul donner les honneurs
militaires. Voyei G r a d a t io n 8c H ié r a r c h ie .
C olonel commandant. l es ordonnances militaires
rédigées d’après les avis du confeil de la
guerre , ont fubftitué au grade, de brigadier celui
de colonel commandant.
Le colonel qui s’eft fait diftinguer à la guerre
par une-action d’éclat bien conftatée ., doit obtenir
le titre de colonel commandant. Ce titre lui donne
le commandement fur tous les officiers de fon
grade , quoiqueplus anciens de fervice que lui.
Le colonel commandant porte pour marque dil-
tin&ive une étoile d’or ou d’argent fur. les épaulettes
& fur le 1 cordon de la- dragonne de fon
grade.
Le brevet de colonel commandant doit fpécifier
en outré le nombre d’années de fervice dont fera
gratifié celui qui l’obtiendra , afin de parvenir
plutôt au grade d’ officier général.
Dans une conftitution militaire qui donnoit le
nombre des années de fervice pour bafe de l’avancement,
la création des majors , des lieutenans
colonels & des colonels commandons , étoit fans
doute nécelfaire y elle le feroit aufli dans une
conftitution militaire où l’ancienneté feroit le feul
mérite * mais le feroit-elle èncore dans une conftitution
où les chefs 8c les pairs de chaque
militaire feraient les feuls juges du mérite.9 non
fan^ doute. Dans une pareille conftitution , le
guerrier qui feroit une attipn éclatante , une
aélion utile , une ad-ion qui méritfcroit une grande
récompenfe & qui annonceroit un grand talent,
obtiendroic certainement bien plus qu’un brevet
de commandement -, il feroit élevé par- acclamation
au premier grade fupérieur. vacant.
COLONNE. Oh fé fert généralement du mot
colonne pour défigner un corps militaire, ordonné
de manière que fa» profondeur eft plus» confidé-
rablè que fon front ; ainfi l’ infanterie , la cava-
Iterie ,, les. troupes légères a. pied, ou à. cheval
forment des colonnes toutes les fois qu’ elles
font difpofées de la manière que nous venons
d’indiquer : on fe fert aufli du mot colonne pour
défigner une longue file d’affûts , d’avant-trains,
de caillons , de chariots deftinés à tranfporter des
vivres ou des bagages : on emploie encore le même
mot pour défigner le chemin que l’une de ces
colonnes fuit.
§• I.
Des colonnes en général.
Les colonnes font naturellement divifées eii
deux clalfes *, en colonnes de troupes 8c en colonnes'
de chariots. Les colonnes de troupes peuvent être
confidérées comme fubdivifées en colonnes pour la
marche 8c en colonnes pour le combat ,* la dernière
de ces deux clalfes a un nombre alfez confidérable-
de nouvelles fubdivifions , dont nous nous occu-',
perons dans le cours de cet .article.
Les colonnes de chariots font fubdivifées en-
colonnes de bagages 8c en colonnes *d9artillerie*
Voye£, pour les colonnes dedjaga'ges , les articles-
B agages 8c Eq u ipa g e s , & pour les colonnes
dlartillerie ■, le diûionnaire'de l’artillerie.
§. 1 1 .
Des colpnnes pour la marche.-
Comme on dut s’apercevoir de bonne Heure’
qu’ il eft" impoffible à une armée entière de fé
tranfporter déployée1.en bataille , d’iine pofition»
ou d’un camp qu’ on vouloit lui faire abandonner,,
à une pofition' , à un camp nouvéau qu’on vouloir
lui1 faire occuper , on dut chercher de bonne
heure comment on pouvoir lui faire parcourir avec
plus de facilité , l’efpacé compris entre les deux
pofitions * & bientôt aufli on dut reconnoître
qu’ il falloir pour cela la divifer en plufieurs-
parties, à chacunedefquelles on donneroit beaucoup
plus de profondeur que de front : comme
chacune de ces- divifions d’une armée ayoit- plus,
de longueur que de largeur , 8c comme elles»
obfervoient entre elles des diftances à peu près:
égales , on crut remarquer vraifemblabiement
qu’elles avoient quelque relfemblance avec les»
piliers dont l’architeélure fe fert pour foutenir &.
pour orner les bâtimens & de là on leur donnai
le nom de colonne que portent.ces piliers : mais:
abandonnons de vaines & inutiles» conjectures 8c fans chercher à faire le romtîfi des colonnes de:
marche , en les. fuivant depuis^ leur- nailfanc-ei
jufqù’à ce jour , conlignons plutôt dans»cet article!
; ce que les. écrivains- les. plus fer.fés & les. généraux
les. plus habiles ont penfé fur le nombre, de;
■ colonnes, de marche■ qu’une armée doit former,,
fur leur mécanifme. intérieur ,, fur." leurs, dimenv
» fions.-