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il ne peuft defcouvrir la rufe , & fe rendit Ÿies
& bagues fauves ».
Gn trouve enfin , dans les mémoires de Boivin
du Villars, uri troifième exemple du môme ftra-
tagôme. « En ce temps-là , dit le baron du
Villars , le duc d’Alve. furprint un^ paquet de
Gonnort, tout en c h if fr e,qui s’adreffoit à Bonnivet.
Il l’envoya à Florence , où tout fut déchiffré , &
fur icelui une lettre dreffée aufii en * c h ijf r e au nom
du Marefchal , par laquelle il mandoit a Bonnivet
de fe rendre -, mais la fineffe ayant été préveue ,
advis en fut donné à Bonnivet, a ce qu’il fe tint
plus rélbluement fur fes gardes que Jamais , car
il feroit fe couru.
CHOC, (aâion de choquer.) Dans le moment
où deux corps militaires marchant l’un
contre l’autre, viennent à fe rencontrer, exifte-
t-il un c h o c réel , un c h o c phyfique ^ je veux
dire, le c h o c eft- il en raifon compofée de la
maffe ou profondeur des troupes, & de la yitéffe
avec laquelle elles fe meuvent?
Les partifans de l’ordre profond tiennent pour
^affirmative i ceux de l’ordre mince prétendent
qu’il n’y a que le premier rang qui choque, &
dont les forces agiffent. Cette queftion importante
ayant été difcutée avec autant de clarté
que d’impartialité, par un écrivain moderne dont
nous avons eu déjà occafion de citer l’opinion
aye éloge, nous allons tranfcrire ici fes propres
paroles.
« Quoique je me prépare, dit M. Mauvillon,
a foutenir l’ordonnance moderne , je ne puis
m’empêcher d’accorder, aux partifans de l’ordre
profond, comme un point inconteftable , que
deux corps d’infanterie, s’abordant l’un l’autre,
dont l’un fera rangé fur une grande profondeur,
& l’autre fuivant l’ordonnance moderne, le premier
percera, battra, emportera infailliblement
le fécond. C’efi un' pur fophifme de dire qu’il
n’y a que le premier rang qui donne le choc ,
parce que les hommes d’une file ne font pas
liés entre eux comme les particules d’un corps
phyfique. Quoique la chofe foit vraie à la rigueur,
c’eft en tirer une très-fauffe conciufion, que de
foutenir que la. profondeur n’influe point fur le
fuccès de la charge. En voici la preuve. Lorf-
que des hommes marchent d’un pas vit a la
fuite l’un de l’autre, l’obftacle que le, premier
rencontre ne fe faifant pas fentir a l’inltant au
fécond , ne fauroit l’arrêter , & ne peut par
conféquent, & encore moins, arrêter le troifieme,
le quatrième &c. Pour en ^voir la preuve, on
n’a qu’à ranger un bataillon en colonne ferree,
le faire marcher au pas redoublé, & commander
halte à la tête , fans avertir ; on verra les rangs
fe précipiter les uns fur les autres , a moins
qu’ils ne foient fort attentifs, ou que, prévenus
«ne l’on va faire ce commandement, Us ne gs
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retiennent ïnfenfiblement en marchant ce n’ere
même que pour cela qu’on a imaginé ,• pour
les marches par le flanc, ce- pas racourci, cette
efpèce de pas de cheval, qui fatigue beaucoup,,
mais qui laiffe l’homme toujours maître de fore
corps , & qu’on peut employer utilement pour
de petites diftances. Si les rangs qui fuivenfe
ne fauroient s’arrêter tout de fuite au mot de
halte , qu’ ils entendent pourtant tous au meme
inftant, comment s’arrête roient - ils au momeno
où le- premier rang rencontre l’ennemi, qui eft
proprement celui du c h o c ? Il eft vrai que , pour
celui-ci, ce n’eft jamais que le premier rang
qui le donne y mais à l’inftant où ce rang eft
arrêté, ceux qui fuivent tombent fur lui, 8c la
pouffent en avant avec leur force réunie. Alors
le bataillon moins profond fera infailliblemens
emporté, non pas par le c h o c meme , fi on ls
veut ainfi, mais par l’impulfton qui le fuit. Je
laiffe à penfer, au refte, fi cette différence eft
bien importante. Le fond de la chofe refte toujours
le même , c’eft-à-dire , que le bataillon
profond mettra toujours l’autre en défordre
Il fuit de cette obfervation fur la manière
dont le ch o c s’opère entre deux corps d’ infanterie
, que l’effet du c h o c , ou celui qui en refaite
, ne peut s’étendre que jùfqu’à une eer**
taine profondeur, & que tout ce qu’on y a;ox-
teroit au delà ne fauroit le rendre plus efficace*
II' n’y a point d’aâion fans réaâion •, ainfi le c h o o
ne fe donnant pas par tous les rangs à la fois
mais fucceffivement, le fécond rang trouve la
premier arrêté par la contre-aâion de l’ënnemî*
lorfqu’il tombe fur lui. Ce premier rang réagif-
fant fur le fécond, rompt en partie fa force,
8t l’empêche d’agir pleinement avec elle fur l’ennemi.
Le troifième perd encore davantage de fa
force par la réaâion de deux rangs, & ainfi de»
autres , jufqu’à un certain point, où la réûftance
des rangs antérieurs empêche l’action de ceux qui
fuivent de parvenir , & de fe faire féntir jufqu’à
l’ennemi. u Que l’on faite feulement attere?
,, tion , dit M. de Maizeroi, à ce qui arrive dans
, un lieu où il y a une foule d’hommes raf-
,, femblés & preffés y par exemple au parte rm
„ de l’opéra y ceux qui font à un bout fé
,, trouvant fouîés'& mal à leur aife, pouflent leurs
„ plus proches voifinsy ceux-ci, les autres-, &
,, dans un moment le mouvement fe coin m u -
,, nique jûfqu’à l’autre extrémité y d’où il re-
,, flue vers ion origine par la réaâion des. der-
,, niers, qui repouflent ou qui- réfiftant. Il ère
,, eft de même à l’égard d’une troupe militaire
,, qui en choque une antre ennemie
Telles font fes paroles & les, idées de ce militaire,
& , généralement parlant, elles font juftes;
mais elles ont befoin d’être reâifiécs par bien
des oblërvations. ultérieures , pour en tirer des
résultats lumineux , 8c les calculs qu’il établi^
c h o
fur ccs idées ne doivent pas être regardés
comme mathématiquement démontrés & pouvant
fervir de bafe à la formation d’une ordonnance.
Il eft .Ar qu’au moment du c h o c , le premier
rang' arrêté rompt l’effort du fécond rang •, les
deux premiers celui du troifieme, 8c ainfi des
autres -, il eft tout auiïi clair , que le eh o c des
rangs qui fuivent les premiers , le faifant fuc-
eeHivernent, tou's ces momens réunis forment a
la fin un efpace de temps fenfible, Des que
Celui-ci eft égal à celui où l’aâion du premier
rang fur l’ennemi ceffe totalement , alors l e ch o c
des rangs fui vans ne parvient plus julqu’à l’ennemi
, & eft inutile pour l’effort du c h o c : il
«.’enfuit donc naturellement qu’il n’y a qu’une
certaine profondeur qui foit capable d’agir dans
le ch o c ; tout ce qui eft au delà eft inutile. Je
crois même, fans entrer dans les calculs de
M. de Maizeroi, que le nombre de feize rangs
eft le plus grand, dont l’effort réuni puiffe fe
rendre fenfible à l’ennemi, dans lé petit efpace
de temps que l’on peut nommer le c h o c .
Mais cela n’eft exaâement vrai que lorfque
vous confidérez l’homme comme un agent purement
phyfique, & il faut pourtant' faire entrer
fa volonté 8c fon ame pour quelque chofe dans
ces matières - là y cette volonté fait, d un côté,
qu’après que dans le c h o c l’aâion du premier
rang a été arrêtée par la contraâion de l’ennemi,
il renaît une nouvelle tenfion de forces de fa
part contre l’ennemi. Cette aâion fécondé d’abord
l’effort des derniers rangs & les met en
état d’agir fur l’ennemi , même après le moment
où ils ne pourroient plus le faire naturellement,
s’ils n’étoient que des corps phyiiques
féparés, qui n’agiroient jamais qu’en raifon compofée
de leur maffe 8c de leur vîteffe y c’eft ce
qui m’a fait porter à feize le nombre des rangs
dont le ch o c peut taire effet fur l’ennemi y fans
cela il auroit, je penfe , fallu le fuppofer moindre.
En fécond lieu, l’aâion de tenfion contre l’ennemi
, fucçédant à celle du c h o c , peut avoir
lieu de la part de tous les rangs réunis fur quelque
profondeur qu’une troupe foie rangée. H
s’enfuit que . cette aâion de tenfion fera plus
forte de la part de feize rangs que de celle de
bu i f , & de. la part de trente que de celle de
feize. Cela pol'é , il s’enluivra qu’ iine profondeur
de bien plus de feize rangs pourra fervir
à rompre l’ennemi, non pas. à. la vérité par la
violence du c h o c , mais par la force de l’aâion
de tenfions , où les hommes n’agiffent point
par leur maffe & leur vî-teffe, mais, uni que nient
par leur maffe mile en aâion par leur volonté.
Le flux & le reflux d’un peuple occupé à regarder
quelque fpeâacle ne forme pas ici. un objet
de comparâifon exaâ , parce que cette foule
occupée à toute autre chofe fe laiffe aller entièrement
à toutes, les impulftons qu’on veut lui
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donnery maïs l’affaire principale 8c unique des
combattans , c’eft d’ouvrir , de percer, de culbuter
leurs ennemis. Là, à moins d’une' fupério-
rité de forces décidée , les deux aâion s fe
détruîfent jufqu’à ce que l’une gagne le deffus.
Suppofez deux corps, d’infanterie qui fe choquent y
fuppofons encore que feize rangs -agiffent dans
le c h o c ; fl le corps A a feize rangs , & le corps
B trente , le^ c h o c • aura ceffé dès que le dernier
rang du corps A aura ferré fur tous les autres,
mais alors le feizieme rang de B aura ferré aufii,
& en fuppofant, comme il le faut, égalité de
force & de courage , aucun parti n’aura cédé.
Il fe fera alors un effort de tenfion qui durera
toujours un certain temps. Quelque court qu’on
■ l’admette, il fuffira pour que les quatorze rangs
de B fe ferrent fur les autres , & ils emporteront
alors par leur effort réuni, le corps A infailliblement.
Il s’enfuit évidemment que plus
un corps eft profond, plus il eft affuré, toutes
chofes d’ailleurs égales, de percer 8c de vaincre?
Pennemi y 8c il eft faux de vouloir donner des
bornes à la profondeur par le principe de la
ceffation d’aâion lorfqu’elle a atteint un certain
point. D’autres raifons peuvent 8c doivent y
faire mettre des bornes, mais non pas celle-là.
Cependant ce n’eft pas là encore tout c e
qu’il faut confidérer. L’homme ne choque pas
fon ennemi avec fon corps feulement , il y
joint fon arme y il n’eft pas non plus mis en
mouvement par le feul in fl in â de vaincre & de
repouffer fon adverfaire y la vue & la crainte du
danger, dont la rencontre de fon ennemi armé
lé menace, agit aufii très - vivement fur lui',
précifément parce qu’il n’eft pas Amplement un
être phyfique ou animal, mais aufii un être moral.
"Cette crainte doit fans doute influer fur
le c h o c ,- le ralentir, le rendre inégal* Elle
peut mèmè faire que les premiers- rangs, au lieu
de pouffer contre l’ennemi , réfifteront à ceux
qui les fuivent, & au lieu d’augmenter l’effort
de la profondeur de leur côté, agiront dans le
même Cens que l’ennemi y & ajouteront par conféquent
prefque autant à lbn aâion , que 's’ils fis
trouvoient de fon parti. Cette crainte“ varie
fouvent, fuivant les occafions, dans les mêmes'
hommes, à plus forte x rai fon chez le même
' peuple dans différens temps. Elle empêchera
.donc toujours de calculer avec, une précifion fou-
tenable l’èffet de. la. profondeur dans les comestst
M'ais^ en général il eft conforme à la nature,
des choies, qu’un corps rangé fur l’ordre profond
batrra toujours celui qui- ne Te.ft pas ÿ
lorfqu’il le joindra».
C IB E on C IB L E . Ge mot n’eft' eorrfigné
dans aucun, de nos- diâionnaires de la langue
. françoife mais il eft. uût-é dans, y armée , ruais;
il eft néceffaire , il eft donc fait peut trou-vei; place,
dans- notre Yocabulaite*