
barbarie des anciennes guerres 3 oi\ le fanatifme
& l'efprit de •parti ont armé les peuples , voila
ce que l ’on feroit renaître.
Tout ce que nous venons d’obferver , n’a
que trop été prouvé , 8c éprouvé dans la guerre
louteuue par la France pour fa liberté. Loin
de nous cependant de vouloir diminuer un instant
la valeur des facrihces imme.nfes qu’ont fait
tant de généreux patriotes , de leurs biens 8c
de leur vie pour défendre la liberté. Loin de
nous 3 de n’ êtrq pas un des plus zélés admirateurs
de la bravoure inconcevable de nos
guerriers immortels s mais nous n en verfons pas
moins de larmes amères fur ce grand nombre de
jeunes combattans , moiffonnés à la fleur de leur
âge par le fer de l’ennemi , 8c bien plus encore
dans nos hôpitaux 3 pour n’avoir pas mis affez
de foin à ne faire marcher que le nombre
d’hommes qu’il falloir, 8c furtout ceux-là feuls
, qui avoient l’âge 8c la force néceffaire pour fup-
porter les fatigues de la guerre , fe plier a la
difcipline, 8c s’inif ru-ire facilement dans le maniement
des armes, la marche.cadencee oc les
évolutions indifpenfables. Nous ne calculons pas
avec moins de peine, les fommes énormes prodiguées
fans mefure , 8c prefque toujours en
pure perte : puifque prefque toujours nos mal-
, heureux foldats manquoient de tout. Nous n en
regrettons pas moins de voir tant de femmes
veuves 3 tant d’enfans orphelins 3 tant de jeunes
gens eftropiés 8c mutiles, pour avoir trop mal
employé les imraenfes moyens de défe.nfe qu’ of-
froit la France devenue libre, à quiconque auroit
voulu les employer, avec le fecours de la rai-
fon 8c de l’expérience, mifes a la place de 1 exaltation
, de l’ignorance, de la prévention, de
l’étourderie 8e de la terreur.
Toute la nation doit être deftinée à défendre
l’empire ; raais-'dans l’âge fait de la virilité 8c
de la force; mais fucceffivement ; mais après
avoir été exercée ; mais 'de la manière la moins
onéreufe aux citoyens, 8c cependant la plus
avantageufe à la république, 8c la plus analogue
à l’art de la guerre.
Si l’on rènouvel.loit l’idée fabuleufe de deux
génies tout-puiffans chacun dans leur genre ,
8c gouvernant les deftinées des hommes ; après
que le génie du mal fe feroit épuifé à créer
le fléau de la guerre; le génie du bien auroit-il j
pu imaginer un. plus fub ime moyen de l’adoucir
, 8c de le rendre moins défaftreux pour le
genre humain, que d’y feire concourir toute
une nation ; mais un feül inftant de la vie pour
chacun des citoyens , 8c dans l’âge de la force ,
de la; vigueur, de la bravoure, de l’indépendance
8c des facrifices.
En effet, de quelle manière plus heureufe
pouvoit-on réfoudre ce grand problème^ Etablir
une force publique, deftinée à repoufter les
ennemis du dehors, toujours prête à être mife
en aéfivitê, fans être fous les armes, infiniment
nombre ufe, fans être à charge a la maffe des
citoyens; mais feulement à quelques-uns momentanément
8c fuccelfivement ; toujours a fl urée
d’être ou remplacée dans fes pertes, ou augmentée
en raifon de l’augmentation des ennemis,
fans devenir . beaucoup plus onereufe ; tellement
combinée cependant qu’aucui citoyen ne feroit
expafé à fervir ou à faire la guerre plus de
deux ans pendant fa vie, 8c que tous panes oient
fuccelfivement par un tems d’exercices 8c de-
preuves militaires, de manière qu après un certain
tems, 8c enfuite toujours la nation toute
entière , ou chaque citoyen , auroit paffé par le
régime militaire fans en avoir ete ni fatigué
ni dérangé dans fes affaires.
§ V I.
Comment faut-il employer la force publique ?
Nous l’avons déjà dit dans un affez grand ouvrage
qui parut en 1780, 8c pour lequel on
eut quelqu’indulgence. Il ne'fuffit pas d avoir
donné des moyens de lever des troupes, il elt
encore effentiel de rendre ces troupes les meilleures
, en les rendant les plus utiles ; ce qui
doit fuivre de l'emploi le mieux calculé de leur
tems 8c de leur force. D’abord, comme jeunes
gens deftinés un jour à défendre la patrie, d’ou
l’importance d’attacher à tous les genres
d’éducation, quelques notions de la partie militaire
, 8c même quelques écoles fpecialement
deftinées à cet objet, puifque tous les citoyens
doivent arriver à l’âge où ils peuyent etre chargés
fpécialement de défendre la patrie, 8c que tous
aufli doivent parcourir une période de leur vie,
où ils formeront la force publique inattive au-
dehors, mais furveillante au-dedans, 8c prête
à agir 3 foit pour la police , foit pour taire
refpe&er 8c exécuter les lois, puis comme citoyens
plus- effentiellement foldats ; d’où la formation
militaire, l'inftruâiofl théorique & pratique fur
l’art de la guerre , 8cc. ; enfin, comme citoyens
accidentellement foldats, d’où des exercices purement
remémorât! fs.
Emplois des Français entrant dans, l'âge de fe'vçe
ans jufqua celui de vingt-un.
Chaque Français devant être claffé, dès l’âge
de feize ans dans le rôle de k milice, pour
acquérir des connoiffances militaires, jufqu a
celui de vingt-un ans ; rien de plus naturel que
de l’aftreindre à prendre des notions fur cet objet,
dès-l’inftant où fon corps 8c fa tête font ful-
ceptibies de s’y prêter. c>eft
Ç ’eft fans doute une fatalité, que dans la
Société politique, l’homme ne puifle fe pafler1
d’éducation. Le malheur encore eft que l’éducation
qui n’eft pas excellente , eft très-mau-
vaife , 8c que n'en point -recevoir, c’eft avoir
la pire. Il faut donc que le gouvernement s’applique
à la donner telle qu’elle doit être. Ces
réflexions ont fervi à décider la néceffité pour
le militaire 8c pour la nation de deux écoles
fpéciales par divifion , l’une pour donner des
inftruétions théoriques 8c pratiques fur l’artillerie
8c les fortifications;-l’autre pour donner des
leçons fur l’art de la guerre, 8c oompofer des
livres élémentaires , qui à la portée de j..s les
jeunes gens , piïffent leur donnèr les idées né-
ceffaires fur les éléinens, 8c même fur les, grands
principes de cet art; car il en eft de la fcience
de la guerre, comme de toutes les autres dont
on avoit fi grand foin fous le délpotifme d’éloigner
le peuple. On vouloit aufli des foldats
machines 8c ignorans; mais fous le régime de
la liberté 8c rde l’égalité, là où les connoif-•
fances , la bonne conduite, les belles a étions,
feront les' feuls titres pour parvenir dans les
grades, il eft important au contraire, que tous
les citoyens puiffent être inftruits.
De tous les tems, on a fenti que la théorie
devoit être la bâfe d’un art où la pratique eft
fi fouvent fautive 8c malheure-ufe,
«’Nous fommes encore bien reculés, dit le
« maréchal de Puifégur, fur l’éducation mili-
» taire; le plus grand nombre des chofes que
sd nous faifons rî’eft pas bon , 8c le peu que 3D nous enfeignons, eft ou impraticable en prélerice
de l’ennemi 8c dans les combats, ou
33 minutieux 8c puéril.
>3 Si, faire beaucoup de campagnes , fe trouver
»3 dans un grand nombre de combats étoient des
» moyens par eux-mêmes fuffifafis pour rendre
s? un homme capable des emplois à la guerre,
33 il s’enfuivroit que la plupart de nos capo- 3o raux feroient fufceptibies de les remplir.
33 Avec la feule pratiqne fans théorie qui foit
33 forîdée fur des principes, on montera à des
» tranchées, mais on ne faura pas cçnduire une
»3 attaque devant une place, ni fe précaution-
33 ner contre des forties ; on fe fera trouve a
» des circonvallations, on n’en faura pas faire.
» On aura fervi dans des armées d’obfervations, 3D on ne fauroit pas couvrir un liège. Enfin,
» on a été l’inftrument de beaucoup de chofes,
33 qu’il feroit impoffible d’imaginer ou de con-
» auire par foi-même. 33
Apres avoir brillé fous les Grecs 8c les Romains,
l ’art de la guerre étoit tombé dans la barbarie,
avec toutes les autres fciences. Depuis la re-
naiffance des-lumières, il a été continuellement
An Milit. Suppl. Tome IV.
étudié 8c perfectionné, 8c la guerre eft devenue
plus que jamais une profeflîon dont il faut étudier
& apprendre les règles. Et quoique le hafard,
les circonftances 8c le moment puiffent fouvent
favorifer l’homme de guerre, qui fait les faifir
8c en .profiter, toujours fera-t-il vrai de dire
qu’il faut inftruire les citoyens deftinés à être
foldats , 8c furtout qu’il faut leur forger des
âmes & des corps.
Et certes, où pouvoir trouver plus de moyens -
pour l’un & pour l’autre , que dans les infti-
tutions qu'exige l'éducation républicaine. Des
officiers de morale dans chaque chef-lieu de
canton, ‘8c dans toutes les communes un peu
populeufes, chargées en même tems de veiller
fur les moeuts 8c fur l’inftruélion, des fêtes républicaines
, des affemblées de'jeunes gens où
l’on pratiquera tous les exercices de la gym-
naftique 8c du militaire; des jeunes citoyens,
d’autres un peu plus avancés en âge, des vétérans.,
des vieillards même fe mêlant à ces exercices,
pour donner l'exemple ou pour y pl'é-
ïïder, que de caufes d'émulation, que de moyens
de réumte.
Des houles, des quilles, la paume à la main ,
le battoir , Je mail, le palet, la courfe, l’efi-
crime, la lutte, la natation, &,c, ; tels feroient
les exercices regardés comme jeux. Les exercices
comme devoir, devtoient côiiipreiidre effen-
tieilement ceux qui ne font propres qu’à l’art
de la guerre, qui doivent être'les principes
les plus eflèntiels de fon ‘mécanifme & dont il
faut faire la bâfe des marches > des évolutions ,
8c de la manière la plus avantageufe de fe fervir
des. différentes armes que l’on voudra employer
à la guerre. Mais plus ces!exercices font impôr-
tans , plus il feroit effentiel de les rendre
infiniment Amples , 8c furtout invariables. Ce
font bien moins, les difficultés -qui .révoltent,
que l’inconftance 8c la variation dans l’infinie-
tion 8c dans les chofes dont on inftruit.
Marche. .
1 La marche exige què Ion place ihamme que
l'on veut faire marcher.
T Que l’on détermine quel doit être le méca*
nifûie du pas , c’eft-à-dire la manière, dont doivent
fe faire ie mouvement des pieds 8c le tranfport
du corps.
Que l’on fixe le pas par rapport à fon étendue
, en le comparant à une mefure connue 8c
Confiante, afin de pouvoir juger du nombre
de pas qu’on doit employer pouf parcourir telle
ou telle étendue de chemin.
Que l’on confîdère aufli le pas par rapport à