
U B O U
volonté, ce qui ne.pourroit cependant Jamais
être général... ? Rft-il tvès-aifé aux délivreurs des
fourrages , de fafciner les yeux de ceux qui les
reçoivent ? . . . Seroit-ce que dans une grande li-
vraifon qui emporte nécefîairement beaucoup de
tems , on fe borne à examiner fcrupuleufement
les premières bottes & les premières mefures,
& on fe néglige fur les autres?.. Quoi qu’il en
foit y 8c quelles que puifîent en être les caufes ,
rieu n’eft: plus certain que le manque de poids
dans le foin , & de mefure dans l'avoine, que
I on délivre pour les chevaux des troupes à cheval.
J ’ai ouï dire à une perfonne bien digne de foi, 8c
parfaitement inftruite fur cet objet, puifqtfdle
avoir été Ion g-tems employée dans la partie
des fourrages.... que l'on avoit des mefureurs
affidés qui avoient l'art de mefurer de manière
q u e , lorfqu’on achetoit, les douze mefures fe
trou voient réduites à onze 5 & lorfqu'on déli-
v roit, les onze mefures, en produifoient treize.
Ainïï fur douze mefures, on en gagnoit trois 5
mais outre l’infidélité dans le poids 8c dans les
mefures , il y en a de bien plus nuifibles dans la
qualité. Pour obvier à d’auffi grands inconvéniens,
on fëntira aifément qu’il faudroit prendre, pour la
partie des fourrages, des moyens qui ne pouroient
être faciles 8c avantageux que dans une confti-
tution militaire & une geftion des objets qui la
regarde, abfolument differente de celle à laquelle
on eft fournis. Le Chevalier de Servan:
BO T T IN E S . Arme défenfive.Tous les peuples
qui ont fait ufage d'armés défenfives' ont couvert
au moins une des jambes de leurs foldats
avec du bois, du feutre, du cu ir , du cuivre
ou du fer. Gette partie de l'armement connue en
France fous le nom de bottines t étoit défignée cnez
les Grecs par celui tfoemides. Voyei dans l'article A rmes le paragraphe confacré aux armes défenfives/
BO U CHE S INU TILE S.. On donne ce nom
à toutes les perfonnes q u i, dans -une place allié-
g é e , ne peuvent être d'aucune utilité pour la dé-,
fenfé.
Il eft difficile d'imaginer une fituation plus
cruelle que celle dans laquelle fe trouve lè commandant
d'une place affiégée, lorfqu'il voit fes
magafi.ns de vivres fur le point d'être épuifés,
& tous les accès au ravituaillement étroitement
fermés. Il entend d'un côté la voix du devoir
qui lui crie : » Raffemble les vieillards/les femmes
8c les enfans, & force tous ces êtres inutiles
à la défenfe , d'évacuer la place : il entend
de l'autre celle de l’humanité , qui lui dit : p Que
vont devenir tous ces êtres, que leur fojbleffe
.même rend intéreffans ? Si l'ennemi eft auffiinexorable
que t o i , ils périront tous fur les glacis ,
Victimes de la faim, des élcinens 3 des Coups des
B O - U
ennemis , ou de ceux que tu dirigeras toî - même.
*> L'honneur rèprend auffi- tôt : » S itu ne
mets point dehors les bouches inutiles, on t’ ac-
cufera d'avoir manqué de réfolution, de fermeté,
de courage, ta réputation fera perdue 8c ton nom
flétri à jamais. » Oui il fera flétri, reprend la
pitié 3 mais la flétriffure dont on te menace n’eft
pas celle que tu recevras j tu as défendu pendant
îong-tems ces .remparts avec intelligence 8c avec
bravoure; tu as rempli ton devoir dans toute
fon étendue, tu ne dois donc pas craindre le
furnom de lâche , mais celui de cruel, de barbare.
La gloire lui montre alors des récompenfes brillantes
qui l’attendent 5 mais comme la fenfibilité
déployé devant lu i, en même-tems, les maux auxquels
vont être expofés les êtres qu’il a juré de
défendre , de conferver, de rendre heureux , il
retombe dans la perplexité cruelle dont il croyoit
être forti : alors un grand cliquetis d’armes fe-fait
entendre s fes foldats s'approchent , ils l ’entourent
en foule , ils ne parlent p as , ils rugiffent,
leurs yeux font étincelans , leur bouche écu-
mante, leurs traits défigurés par la colère, ils
paroiffent tranfportés par la fureur de combattre
& par la crainte de céder ; ils n'ont en un mot
dè l'homme que les apparences. » Que t'importe,
lui difent-ils , la vie de ces femmes , de ces en-
fàns l ce font ces remparts, ces baftions que tu
dois défendre , conferver, & tu ne peux y parvenir
fi tu nous obliges de partager le peu de
vivres qui nous reftent , avec ces êtres fans
force 8c fans courage î la difette a déjà affoibli
nos bras, bientôt la faim aura épuifé le refte de
nos forces, ceux à qui tu nous facrifies n’en périront
pas moins, & nous aurons la honte de
périr avec eux 8c comme eux 3 garde tous ceux
d’entre eux qui nous font nécefiàires: 5 'fotige en
faifant ce choix que nous pouvons nous trouver
dans des extrémités plus cruelles encore , & hâte-
toi de renvoyer le refte 5 chaque moment que tu
perds en délibérations enlève plufieurs jours à
notre gloire. »"A peine ces furieux l’ont-ils quitté
que des voix douces , quoique plaintives 8c Igé-
minantes, cherchent à s’élever jufqu’à lui : C'eft
pour nous , difent-elles enfemble , que ces murs
ont été conftruits , ces remparts élevé s, 8c cependant
vous nous en voulez chalfer. Notre fort
eut été moins cruel fi vous n’aviez pas entrepris
de nous défendre, lui difent les vieillards >■ la
fuite ,. des afÿles fecrets nous auroient peut-
être dérobés aux pourfuïtes de nos ennemis ;
peut-être , fi votre confiance n’avoit point fermé
leur coeur à là pitié , nous aurions trouvé
grâce. à leurs yeux , ou dii moins ne ferions-?
nous morts -qu'une fois. » Les femmes, Je vifâge
baigné de larmes , .h pâleur de la mort, & la
crainte de l'ignominie fur le front , lë prient, le
foliicitent1, le prelTent à genoux 3;les-petits- enfans
tendent vers lui. féurs bra^s, foiblés-6e innocens,
ils lui fouxi'ent ;, ils le carelîeiu , on dirait qu'ils
B O U
favent combien il leur importe de Je fléchir.
Tirons le rideau fut. ces (cènes déchirantes , &
gardons-nous de prévoir le parti que prendra le
gouverneur encore incertain j fâchons plutôt comment
il doit agir pour n’être jamais le témoin
de ce fpedtacle d’horreur. C ’eft en tenant dans
tous les tems fon pofte muni de tout ce qui peut
être nécelfaire pour, fa défenfe, que le gouverneur
d’une place préviendra cette cruelle, extrémité.,
8ç en pourvoyant de très-bonne heure à la
fûreté des êtres, que la rudefle militaire a fur
nommés bouches inutiles , qu’il fe mettra a 1 abri
d’opter entre deux partis également pénibles pour
. fon coeur , également dangereux pour fa renom-;
. niée. Mais que fera-t-il> fi un ennemi habile l’a
mis , par des opérations favantes & par des
; marches combinées avec autant de fecret que
de prudence, dans l’impoffibilité de prendre
ces précautions ? Qu’il porte dès le premier jour
du ïiègë une attention très - fcrupuleufe dans la^
recherche des vivres enfermés dans la place 5 qu’il
me,tte dès cet inftant l’ordre le plus grand dans
la diftribution des objets qu’il aura raflemblés $
■ qu’il donne l’exemple de la fobriété, de l’abfti-
nençe même, 8c il préviendra la difette des vivres
, ou la fera fupporter , fi ce n’eft fans peine,
du moins fans murmures. Koye% V ivres j Gcru-
v erneur , 8c Défense de p la c e s .
On parle fouvent, avec enthoufiafme, de ces
fieges fameux par leur longueur, dont l’antiquité;
nous fournit des exemples célèbres 5 je les ad- j
mire , mais je n’en préfère pas moins ceux de 1
nos jours : nos canons, nos tranchées & nos
mines valent mieux que les beliers , les tours
8c les tortues des anciens 3 ils abrègent la durée &
la multiplicité des maux que la guerre fait éprouver
aux hommes-.
Le commandant d’une place’ affiégée p'eut, je
le conçois, refter en fufpens lorfque les cir-
conftances femblent lui preferire de fe débarraffer
des bôucftes inutiles ,• mais le chef dé l'armée
afiïégeante ne peut, lui , ce me femble, être j
jamais incertain fur le parti qu'il doit prendre
lorfque l’alfiégé a forcé les vieillards , les femmes
8c les enfans à fortir de b ville. Et que peutdl
gagner à biffer mourir fur un glacis dés êtres;
qui ne peuvent jamais devenir dangereux pour
|uf ? Efpèré - t - il que les afliégés touchés de
comtriiférafion rouvriront leurs portés à leurs
concitoyens? Vaine efpérance 5 ce n’eft point
apres des démarchés de cette nature qu'on revient
fur fes pas î au moins l'hiftoire ne nous a-t-elle
trànfmis, je crois , aucun exemple de ce genre :
ce ne font pas des murs délabrés , des ’ rfbifons
défertes que 1 affiégeant veut conquérir 3 des
remparts fans^ habitans ' ne font ' bons: à; rien :
ce ne fonr point det honimes qu’il veut; a'fiervir 3
des efclaves ne 'font pas des fujets : il veut
gagner des citoyens -il veut conquérir des coeurs 5
B’O U :
8c peut-il efpérer d’y réuffîr en fe montrait
cruel, en fe faifant connoître pour un barbare ?
On trouve bien daus les annales du monde quelques
généraux qui ont repouffe avec autant d’inhumanité
que de confiance les malheureux que leurs
concitoyens avoient rejettés 3 mais ils font rares
ces exemples, mais l ’hiftoire les place ou dans
dés tems reculés du nôtre, ou chez des peuples à
demi-policés , ou chez des nations rendues féroces
foit par une fureur religieufe, foit par des d i f -
cordes inteftines 5 mais les hiftoriens ont pris le
foin de peindre avec des couleurs repouflantes les
auteurs de ces a étions atroces, tandis qu’ ils ont
parlé avec de grandes louanges des chefs des
armées qui ont accueilli avec commifération , avec
bonté, les infortunés repoufles par leurs frères»
Comme nous avons inféré dans le paragraphe
X V I I I de la IV feétion de nôtre article G é n é r
a l , le nom de quelques-uns des chefs qui ont
agi avec cette magnanimité que nous croyons
devoir être .aujourd’hui généralement adoptée,
car on feroit inutilement barbare 3 nous nous
bornerons à citer dans cet article la conduite
de Louis X IV au fiége de Namur 3 elle.nous
a paru bien cheÿalerefque , bien noble , bien
françoife , bien digne en un mot d’être tranfi-,
crite ici.
; Louis X IV inveftit Namur 3 les dames les plus
cônfidérables de la ville envoient à ce prince
une députation pour obtenir un paffe - port ;
le roi le leur refufe, mais il emploie les exprèflions
les plus galantes 5 il ne veut pas fe priver, dit-il,du
plus beau fruit de la viéioire. Elles envoient
une fécondé députation , elles reçoivent la même
réponfe : Eh bient ! dirent-elles alors, allez annoncer
au roi que nous ferons très-glorieufes de
nous rendre fes prifonnières de guerre , & fut
le champ elles fe préparent, à évacuer la place.
Louis X IV envoie plufieurs de fes courtifans
au-devant de ces dames 3 ils les conduifent jufqu’à
des tentes qu’on avoit préparées pour elles, 8c
. où l’on avoit dreffe des tables magnifiquement
fervies : dansvl’après-midi les carrofles du roi
les conduifirent-dans une abbaye voïfine 5 elles
y furent traitées non-feulement avec égard, maïs
même avec diftinélion : les foldats français eux-
mêmes aidèrent les gens de ces dames à tranl-
p or ter tous les objets qu’elles avoient voulu
faire fbftir deTâ place j cëtte galanterie ne retarda
pas d’ un inftant la chute de Namur , 8c
acquit à Louis une efpèce de gloire dont il étoit
prefque aüffi jaloux que de celle des armes.
BOUCLES. Le foldat fantaffin a dans fort
équipement , fon'armement où: fon habillement,
au moins z 1 boucles. Toutes ces boucles font-
elles néceffaires ? J’en doute fi elles le font,
rien de plus compliqué que notre manière d’armer
, de vêtir, d’équiper le foldat» Parmi ce