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chargé de la défenfe du troifième étage, le corn*
mandant en chef ne devant conferver pour lui
aucun pofte particulier ; il doit être occupé également
de tous : il donnera à chacun de fes fubor-
aonnes, fi ce font des officiers , un nombre de
fous-officiers & de ioldais proportionné à détendue
& à l’importance du pofte qu'il leur, aura
confié; il obligera le commandant de chaque étage
à défigner, pour chaque partie du mur, un nombre
déterminé de fous-officiers & de foldats; il
rédigera enfuite par écrit l'ordre général & particulier
qu’il voudra qu'on fuive dans la défenfe;
il remettra copie de cet ordre au commandant dans
chaque étage, & il en fera afficher au moins un
exemplaire dans un endroit où chacun puiffe le lire
& le confulter au befoin.
D e la m a n ié r é d e d éfen d r e u ne m a ifo n .
Quelques-uns des principes généraux que l’on
doit adopter dans la défenfe d’une maifon, étant
femblables à ceux néceffaires dans la défenfe d'un
ouvrage en terre , il ne nous refte à parler ici que
de la défenfe d:§ portes , des fenêtres , des tambours
, des mâchicoulis & des différens appartenons
j de la manière de repouffer une efcalade, du
moment ou 1 on doit faire pleuvoir fur l’ennemi ,
des cendres brû’antes, de la chaux vive , de l’ eau,
& de l’ufage des réferves & de la retraite.
Lorfque L’affaillant, malgré les différens feux dont
on a fait ufage, & les obftacles qu’on a cherché à
prodiguer fous fes pas, eft parvenu jufqu’au pied
gu mur, & qu’il cherche, pour pénétrer dans l’intérieur
de la maifon , à forcer une porte ou une
fenêtre du rez-de-chauffée ou à faire une brèche,
ou à donner l’efcalade.
Si l’affaillant entreprend de forcer une porte,
on garnira de fufiliers les créneaux qui l'avoifine-
ront 5 les mâchicoulis qui la Surmonteront & les
tambours qui la flanqueront, le feu bien ajufté qui
fortira de ces différens endroits, parviendra peut-
être à rebuter l’ennemi & à l’empêcher de paffer
le foffé. Si malgré le feu de votre artillesje & de
votre moufqueterie, l’affaillant comble le foffé
ou le paffe fur un pont, vous ferez tomber fur lui,
du haut des murs , & par les ouvertures des mâchicoulis
, des gros morceaux dé bois, des troncs
d’arbres, des pierres de taille, des briques, des
cendres, de la pouffière brillante-, de l'eau bouillante
ou froide, &c. L’ennemi n’a - t - i l pas été
rebuté par cette grêle de coups ? effaie-t-il d’en^
foncer la porte avec des haches, des leviers, ou
avec un bélier ? placez derrière cette porte des arbres
taillés en abatis, & des hommes qui, pourvus
d'armes de longueur, aideront les fufiliers à
empêcher l’affailiant d’entrer; pénètre-t-il néanmoins
dans la maifon ? les foldats placés dans l'étage
fupérieur garniffent auffitôt les ouvertures
pratiquées dans le plancher ; ils jettent par les
grandes ouvertures, des quartiers de pierres, des
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tuiles i des briques ,‘&c. ; ils font pâffer parles médiocres,
des armes de haft, &ils font feu par, les
plus petites ; les détachemens portés dans les appartenons
voiiîns. effaient de rechaffer les affail-
lans, en venant de moment en moment les charger
avec impétuofité ; cependant l’appartement
dans lequel l'ennemi a pénétré, fe remplit peu à
peu , alors les affiégés l'abandonnent, ils fe retirent
dans les chambres voifines ; ils en ferment les
portes, & ils les barricadent, ils garniffent les
créneaux qui donnent fur la pièce dans laquelle
l’ennemi a' pénétré ; le combat fe renouvelle , &
chaque chambre exige un nouveau fiège.
L ennemi, parvenu à la faile d’armes, y trouve
plus de réfîftance que partout ailleurs : la réferve
fait des forties vives & fouvent répétées , & fi,
par fa conduite pleine de valeur, elle ne parvient
point à chaffer l’ennemi, elle donne au moins, au
refte des défenfeurs de la maifon, le tems d’abandonner
le rez-de-chauffée, de gagner le premier
étage , & d’enlever les munitions de guerre & les
échelles: l’affaillant n’a plus alors d’autres moyens
à employer que celui du feu ; s’il tranfporte du
bois, s’il aâlùmé un grand feu au milieu d’une des
pièces du rez-de-chauffée, on fait tout pour l’éteindre
& en prévenir les effets ; fi le feu fait des
progrès , il faut bien battre la chamade, ou plutôt
il faut fe raffembler dans un des appartemens , en
fortir l'épée à la main, marcher tête baiffée, & fe
faire jour à travers les ennemis furpris.
Quand l’ennemi attaque une fenêtre, on fe conduit
comme pôur l’attaque d’une porte.
Quand il veut forcer une brèche qu’il a faite,
ou une retirade qu’il a conftruite, on a encore
recours aux mêmes moyens.
Si l’affaillant donne l’efcalade ou lance fur les
foldats qui montent par les échelles des objets
femblables à ceux jetés aux foldats qui yeulent
forcer une porte, une fenêtre, une brêc;hè , &c.
on fait paffer auffi par les trous pratiqués dans le
mur, des armes de longueur, des fourches, 8t c .
avec lefquelles on rênverfe les affaillans & même
les échelles.
De quelque manière que l’ennemi ait pénétré
dans le premier étage , les hommes qui le défendent,
doivent fe conduire comme ceux qui étoient
chargés de la défenfe du rez-de-chauffée , & lorf-
qu’ils fe voient fur le point d’être forcés, ils doivent
fe retirer dans le donjon , & n ’en fortir que
pour faire un coup de main vigoureux ou pour
figner une capitulation honorable.
Si la maifon eft entourée d'un ouvrage en terre,
on défend d’abord cet ouvrage extérieur, & on
fe retire enfuite dans la maifon, où, après avoir
fermé les portes /on fe conduit comme nous venons
de le dire.
Tels font les principes enfeignés par les maîtres
de l’art ; tels font ceux qu’ils ont fuivis quand ils
ont voulu fortifier, garder ou défendre une maifon.
Les officiers qui prendront ces principes pour
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règle de leur conduite, feront affûtés de s’illuf-
trer par une longue réfiftance, peut-être même
obligeront-ils l'ennemi à conduire du canon pour
s’emparer d'une miferable bicoque, d’où s’enfui-
vra le retard néceffaire de la marche de l’armée
ennemie , & une gloire à peu près égale à celle
d’une viétoire pour l’officier qui aura fait une auffi
belle défenfe.
D e V a tta q ue d e s m a i fo n s .
Un détachement chargé de fe rendre maître
d’une maifon, traînera de l’artillerie après lui, ou
il en fera dépourvu. Dans la première fuppofition,
il viendra facilement à bout de fon projet ; mais
dans la fécondé , ce ne fera qu'avec beaucoup de
peine & de bravoure, furtout s'il a en tête un
ennemi intelligent & courageux.
Le détachement pourvu de canon pourra, fi fon
adverfaire en eft dépourvu, l’obliger à fe rendre
en étàbliffant fon artillerie au-delà de la grande
portée du moufquet, & en la dirigeant contre
les angles de la maifon.
Si les défenfeurs ont de l’artillerie, l’affaillant
conftruira des batteries volantes, & à l’abri de
ces batteries il pourra encore détruire la maifon
fans compromettre la vie de fes foldats.
Comme il importe toujours de fe rendre promptement
maître d’une maifon, on fe borne rarement
à la canonner : on cherche à faire une brèche
dans les angles de l’édifice ou les autres endroits
qu’on a reconnus pour les plus foibles. Dès que la
brèche eft faite & praticable, on marche avec ira-
pétuofité , on joint l'efcalade à l’affaut, & en fe
conduifant enfuite ainfi que nous le dirons en parlant
d’une attaque fans artillerie, on eft bientôt
maître du pofte.
Un détachement dépourvu de canon, & qui eft
chargé de fe rendre maître d’une maifon fortifiée
d’après les principes que nous avons donnés ci-
deflus, doit s’occuper d’abord à faire taire le feu
de l’affiégé ou à le rendre inutile.
Pour éteindre le feu de l’ennemi, on conftruira
avec d’épais madriers une efpèce de parapet à quelque
diftance de la maifon, on placera des fufiliers
derrière ce parapet percé de créneaux ; ils viferont
aux créneaux de la maifon, & s’ils font adroits,
aïs parviendront à éteindre ou à diminuer le feu de
l’ennemi : convenons cependant que cette opération
devant être fort longue, il vaut mieux chercher
à rendre le feu des affiégés inutile.
Pour y réuffir, on dirigera fon attaque vers]les
parties de l'édifice qui feront lé plus dépourvues
de créneaux, & vers celles qui ne feront ni fur-
montées par des mâchicoulis ni flanquées par des
tambours : les angles de la maifon réunifient affez
communément ces trois conditions.
Le feu qui part des créneaux percés au rez-de-
chauffée, eft le plus difficile à éteindre : on ne peut
même efpérer de le calmer qu’en employant des
A r t M i l i t . S u p p l. T om e I V .
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facs à terre , encore ce moyen eft-il fouvent inutile
& toujours dangereux.
Quand on a réuffi à éteindre ou à calmer le feu
de l’ennemi, il faut, pour fe rendre maître de la
maifon, faire une brèche à fes murs, ou en forcer
les portes, ou en efcalader Iîs murailles.
Pour faire une brèche à une maifon , il faut,
quand on eft dépourvu de canon , recourir à la
fappe ou au bélier. ( V o ÿ e% Bélier. )
Quand on ne pourra pas faire ufage du bélier ,
on recourra à la fappe. Avant d’entreprendre de
fapper un mur, il faut avoir éteint les feux qui
pourroient troubler les fappeurs ; c’eft vers les
angles de l’édifice qu’on doit diriger la fappe : il
faut commencer par dégarnir extérieurement toute,
l’ouverture qu’on veut faire; ainfi toute la brèche
eft faite en même tems. Dès l’inftant où l’on découvre
l’intérieur de la maifon, on pofte des fufiliers
qui, par un feu violent, éloignent l’ennemi ;
& auffitôt que la brèche eft faite, on donne l'af-
faut avec impétuofité.
Quand on n’a pu faire brèche ni avec le bélier
ni avec la fappe, on cherche à forcer une des porte
s , on commence à tirer un grand nombre de
coups de fufil contre celle qu’on veut forcer, on
s’en approche enfuite avéc viteffe, on eft muni de
haches pour achever de la brifer , & de forts leviers
pour la jeter en dedans-: pendant ces dernières
opérations , on fe tient collé au mur afin
d’éviter les coups de l’ennemi. On peut encore,
pour forcer une porte , allumer fur fon feuil un
feu ardent qui puiffe en embrâfer bientôt les bat-
tans ; mais au préalable il faut avoir comblé les
foffés.
Si l’ennemi a terraffé les portes, on fait des
tentatives contre quelques fenêtres ; quand on ne
peut ni faire une brêcne, ni forcer une porte, ni
enfoncer une fenêtre, on prend le parti de donner
l’efcalade en plufieurs endroits en même tems :
on dreffe les échelles contre les parties de l’édifice
les moins crénelées & les moins vues par l’ennemi
; on monte avec vivacité, & on parvient, ou
à entrer par quelque fenêtre du premier étage, ou
à gagner le haut de l ’édifice.
On n’attend pas toujours d’avoir épuifé tous les
autres moyens pour effayer l’efcalade : on peut 8c
on doit même, dès le premier abord, les employer
tous en même tems.
Si dès l ’inftant où l’on a pénétré dans la maifon,
les affiégés ne battent pas la chamade, on les pouffe
avec vivacité d’appartement en appartement ; le
meilleur, le plus prudent, eft cependant d’allumer
un grand feu dans une des pièces, ou d’y tranf-
porter un baril depoudre qu’on enflamme au moyen
d’une longue traînée ; il ne faut cependant, l’humanité
l’exige , prendre ce dernier parti qu’après
avoir fommé l’affiégé & l’avoir averti du danger
qui le menace.
Il eft bien difficile que les défenfeurs d’une maifon
attaquée par des affaillans valeureux, & qui
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