
pour l’ àîder dans fes travaux. Mais, en 1786 . . .
comment aye?-vous pu vous faire entendre à la
lagefle de fa majefté comment avez - vous pu
exciter fa bonté . . . non, non , le roi n’a point
été inftruit , & il n’ a ligné line pareille loi que
fur des expofés informes ou imparfaits. . . . D ’après
• cette Véfité.accablante , n’ofant ni tout accorder,
ni tout nier , vous allez prendre votre milieu ordinaire'
; vous allez erier de toutes vos forces cela
e j l exagéré ■ mais mefurons exactement ma prb-
pofition pour en ‘ féparer ce qu’il pourroit y avoir
de faux, au lieu de la rejeter tout entière avec
d é d a in .... Pour cela revenons , & je vous
■ demande fi c’eft une exagération de foutenir
qu’ un roi. qui eft bon & fenfible n’auioic jamais
pu fe décider , s’il avoît été bien inftruit à
.établir un nouvel ordre de peines contre des
citoyens , dont prefque aucun ne peut être véritablement
coupable d’après la manière dont ils ont
contracté leurs engage me ns , les lois continuellement
changées auxquelles on les foumet fans
leur cpnfentement , & fur-tout l’interprétation
trop arbitraire que. chaque chef donne à la loi ,
qu’ il aime bien mieux changer à ion gré que
fuivr'e à la lettre. Éft-ce une exagération de dire
comme, une vérité générale , que le roi n’a pas
-,connu Une ordonnance, où en fupprimant la
peine de la chaîne on la remplace par les galères
.pour^t'ôujours ou pour un temps, avec le fouet
;ct 1 a, marque ;•; . . . ou par les baguettes , avec
.prolongation de .fervice en ajoutant à cette puni-
tlop qu'elle .ne fera point Jlétrijpinte, & que ceux-
qui 1 ^auront. fiib-ie feront eonfervés au fer vice.
Gomment un commis des bureaux de Ye r fa r lles -
fe croira'aflez puiffant pour détruire les- préjugés
d’un traire de pluxiîe 1 il écrira , il fera imprimer ,
il ordonnera que l’opinion publique change à
fbh gré il croira que ce miracle s’opérera-,
& on fera ligner au roi de pareilles abfurdrtés ,
& on voudra fa ire c ro ire aulli qu’il le s a- connues !
Non , non , cela eft aufii impoilible qu’il le fera
à Fopinîon de ne pas regarder comme infamante
îâ peine' dés Daguet tes.
A cela vous répondrez peut - être , n’accufez
donc pas la loi , mais l’opinion publique qui a
tort. . T . A quoi je vous, dirai d’abord , eh ira.®
réimporte à moi , quand je fouffre que îès lois
me tourmentent ou me jaifferit., tdurnienter1 les
lois font tout le mal quelles n'empêchent pas. . ,
Je vous dirai enfuite, eft-èè la loi ou vous quï
avez dit la peine des courroies ou bretelles
étant infamante ceux qui l’auront fubie feront
chàfle.s -, quoi, vous confultez l’opinion publique
pour les courroies ou bretelles do fufils , 8c vous
hè la consultez pas pour les baguettes. . . . Vous
voyez donc bien que tandis que l’ennemi feul
devroit tuer vos foldats , ce font les abus qui les
font mourir. Car ne vous y trompez pas : vouloir
garder un foldat qui a fubi la peine des baguettes
d’ après ce que vous avez décidé que cette
peine n’étoit pas fîétriflante , c’eftr l ’expo fer y
quoique vous ayez imprimé , au mépris de fes camarades
, ce qui doit le forcer à une fécondé défer-
tion ou au déshonneur ( car le mépris en eft un )
& c’eft ou garder un mauvais foldat ou en perdre
un qui probablement étoït très-bon avant fa faute...
D ’un autre côté chafiqr un foldat qui a fùbi- la
peine des courroies , ç’eft. fi elle a- été infligée
avec jufti.ee , jeter dans la fociété un mauvais
fujet, & le mener bien vite à la mort fi la police
eft exaéle , & fi la peine a été ordonnée injustement,
c’eft déshonorer un citoyen & le forcer
probablement à être coupable 8c puni.
À l’égard de la peine infligée â tout foldat quî
p a (Te par les baguettes, de i ’ervir encore un certain
nombre d’années fuivan-t les dilférens cas énoncés
dans l’ordonnance , dilons avec M. de Mirabeau-
( tom. 4 , 2e partie de la- Monarchie Pru(Jienne,
fiv. 7 , pag. 76 ) , « que fi vous avez un grand
nombre de mauvais fujets dans votre armée , ils
gâteront les autres : aufii deyr oit-on établir dans
toutes les troupes que l’on vent avoir bonnes 9
le principe immuable de ne jamais prendre un
aéferteur : bien moins encore d’en prendre, un de
fes troupes qui revient ( a). Ils ne fervent qu’à
înlpîrer à leurs camarades lTefprît de delertion ;
ils font mutins, railbnneurs indifeiplinabies,. 8c
ces qualités répandues dans vos régimens. , peuvent
influer fur votre armée, même au moment du
combat, parce qu’enfin ce n’èft que• le préjugé
:: ( à )■ C-’ étoit une loi chez les Romaines (au m^ins le. jurifeonfulte Atrius Ménander l’afliife ) un foldat chajje avec infa~
Unit tu dcyoii jamais etre reçu de nouveau.. ., Une coutume qui leur étoit absolument inconnue & qui ne l’a point été
en Allemagne , c’eft la refthution de l’honneur perdu par ^attouchement des drapeaux. Wada ,• proleflewr en .droit à Kcenis-
iberg. a écrit une Differtaii’on fur ce fujet. Je trouve dans un moa-ceau intitulé Recherches Jur ks honneurs que les Romains
tendaient à lents drapeaux ( Mémoires de la Société des Antiquités de Cajjél, ) une anecdote fingulière à ce fujet qui indique
les procédés qu’on y obfer-voit. * Un- pipeur du régiment Helfois de wolchwr, qui iv o it été déclaré infime, de-
manda' la reflimtion ,ce fon honneur : il étoit brave homme & slétoit fort diftingué dans quelques combats. On lui accorda
« fa demande. Tout le régiment fut affemblé; lè coupable fe mit à genoux a vingt pas des- drapeaux: comme l ’Auditeur
n lui avoît fait un ligné de s’approcher, il s’avança j.ufqn’aux drapeaux. Là, les portes-er. feignes demandèrent : qui eft là ?
»> Le coupable-fépo'ndit : un coquin; Què tfem; Ji'de-t-il * interrogea-t-on de nduVeaâ ? Son honneur perdu répondit le cou-
» pable. Nous te le nhdcms au nom de fon Altejfe notre très-gracieux prince, répondirent les p 0 r ces-enfe ignés : ils touché«
a rent fon corps des drapeaux. Après ces demandes & ces réporsfes l’Auditeur lut une ordonnance, laquelle défendôit fevé-
ç remerit de faire dès reproches au réhabilité, ou d’infulter en aucune manière lis nouyuu ïrade qui reçut par la mairt
$ Us ion colonel arljnés de fon habillement & le joignit à la compagnie ;j>
qui fait qu’ une poignée d'officiers contient 8c
range à l’obéiffance votre armée ô or en courant le |
monde , on fe défait des préjugés , 8c l’ on apprend
à connoître les chofes fuivant leurs forces 8c
le.urs, propriétés réelles. Mais quand de pareils
hommes ne feroient pas fort à craindre pour le-
moment 'du combat , ils le font infiniment pour
tous ceux qui le précèdent. Ce font eux. qui déferrent
& vont inftruire l’ennemi de vos' mouvement.
Vous ne prenez peut-être pas un déferieur,
un vagabond , qui ne vous coûtent deux hommes.
Si vos gens fe trouvent un moment dans le malêtre
, un de ces coureurs n’a qu’à dire : Ah ! que
chez l'ennemi on ejl mieux à cet ég a rd À & vingt
foldats vont s’y rendre le même jour : tant il eft
dans la nature de l’hpmjne de ne .voir que les
éélagremens de là fituation préfente , 8c les agrfinie
ns de fa fituation paffée >3.-
« Les Prufiiefls , non cenitens de prendre des
déferteurs , des vagabonds , n’ont, fait aucune
difficulté d’ enrôler de a malfaiteurs. Feule Land-.
grave de Hefie répugnoit à punir de mort &
condamnoit la plupart des criminels aux fers & -
aux travaux publics. De temps à autre il envoyoit
quelques douzaines de ces malheureux à fon rég-i-
ment à W e fe l, ( n°. 45-) , où ils ctoient^ reçus
avec plaifir. On n’ eft pas plus délicat dans les
autres corps; Cet ordre de chofes peut être tolérable
dans les garnifons où la discipline 8c des :
arrangemens ftables lavent contenir de tels fujets.
Mais quand les troupes *fortent pour aller :en
• campagne , l ’effet pernicieux d’une pareille eonf-
titution le montre dans toute là force. On ne
peut compter, fur rien avec une telle «fpèce
d’hommes , & l’on emploie plus d’ art , plus de
foin , plus de fatigues pour les retenir , pour
confcrver parmi eux l’ordre & la difcipline , qu’il
n’en faut pour fe garantir des entreprifes de
l’ennemi ».
L’ auteur du mot Déferteur dans la partie mili-
■ taire de ce. dicHonnaire , s’eft donc aufii trompé
lorlqu’il a propofé dé faire rentrer au lervice les
foldats qui auroient déferré. . . A la bonne heure
que î^ori prolonge le lervice de ceux qui après
avoir quitté les drapeaux les. re;joindroient d’eux-
mémes après un certain efpace de te;mps fixé.
Mais jamais ne faites fervir plus long-temps ni
de nouveau un foldat" qui aura déferté', & que
l’on aura arrêté, comme, tel; Détruifez d’abord
toutes les caùles qui nécefiitenr pour ainfi dire
la désertion , 8c ii vous avez encore le malheur
d’être obligé de purrir dès d é f e r ie u r s , imaginez
des punitions qui en rendant le coupable utile
à Ta panie , lui donnent les moyens d’expiér fa
faute par fes 'travaux > & lui permettent de
rentrer dans là fociété fans en être regardé
comme infâme ; mais pour ne pas être trompé
dans vos vues , gardez-vous fur-tout de jamais
confondre l’homme dont la punition devra être
momentanée , avec celui que vous voudrez punir
pendant toute fa vie y ce feroit l’avilir à les
yeux 8c à ceux de les compatriotes. L’opinion
publique le-confbndroit bientôt comme vous l’avez
fait vous-même , & il ne pourroit plus redevenir
citoyen. Ayez des galères perpétuelles pour les
derniers , vendes - les comme efclaves pour vos
colonies1 > Sic') mais ayez pour les premiers de
■ fimpies travaux où ils foient plutôt furveillés
: qu’enchaînés , & où ils pui fient fe fou mettre fans
•honte à méritèr par leur afliduité & leur réfi-
gnation que leurs cdn'citoyens oublient leur faute 8z les voient avec plaifir finir le temps de leur
peine pour revenir parmi eux ( a ).
Mais, me diront encore les faifeurs de loi. i
Vou s ., q u i p a r le r , ê t e s -v o u s du m é t i e r ? Non , non, 8c mille fois non , je ne fuis pas de votre métier
y mais je fuis foldat , & j’ofe dire la vérité 5
fi retois commis ou. officier général , je ne
voudrois pas la dire. Mais quand le commis ou
l’officier général d’une loi m’enchaîne ou m’aflàf-
fme , je n’aurai donc rien à demander , rien même
à dire à la loi ? En ce cas- c’eft une choie bien
étonnlnte qu’ une loi militaire , & c’eft une bien
pente choie qu’ un homme qui fait la iottife d’être
foldat.
Enfin, il y a encore ürie des plus irréplicables des
(a ) Je me bornerai à vous inftruire d’un ufage qui|s’obferve à Sâlonique en tenïps de guerre par rapport à la ihifiçe.
.A mon arrivée dans cette ville je .trouvai quantité -de compagnies de' volontaires Turcs prêtés à marcher fous leurs
' Baraihs relpeclifs, ( c'es- compagnies font - compôfées Ve deux-ou trots gc-kis hommes' qui. s’obligent à ùrvir fous un chef
dont ils reçoivent de l’argent, des armes ou des habits à titre Jd,e»-gags*eflti ) »Quelq,ues-uns 'do' céS. Baraiks devant partir
pour la Bofttie;, deux ou. trois leurs foldats.;qui réfléchirent lur les triftes tffets de la guerre & qui permirent ainfi
leur courage p.iimitif, ju^erept à propos de détecter, pour retourner" à* leàts maiions & re'ftë.r dans la ville...,. Suivant la
difcipline Européenne on les auroit regardés comme déferteurs & condamnés à lubir la peine attachée a ce crime. Il n’eu
eft pas de même en Turquie: quand le cas arrivé les chefs emploient divers moyens pour les rappeler , & les parens ou
les amis du timide foldat s'efforcent' dfe lui ouvtir lés'yeux fur .le déshonneur qü’il fe caufe par une telle lâcheté ; mais
enfin lotfquè la poltrot.neiie l’emporte.- fur. l-honneur & que le lâche-perfifte à refufer , les voiont»»res de fa compagnie
s’affemblei t pour mmifefter leur indignité., .& voici comment ils s’y ' prennent. Us font _uue cfpèç©. de proceffio», ayant à
leur tête des joueurs d’inftrumens St un homme qui porté une' quenouille? ; après avoir ainfi marché dans les rues les plus
fréquentées, ns vont attacher la quéiiouulë à la porte' de la mai tari;; du làdhe , ptouft a-noncec qu’il n’eft propre qu’à sr,c-
Cuper comme inè femme, au lieu dVxèrc.er leÿ lonfiions mjlitaires, - puis • ils le déclarent indigne de; jamais Iervir dans Lu f
compagnie. Cet ufage.a une origine fort ancienne „ 'Xèrcès indigné, contre le chef de Ion e.cadre qui avoit fnâîïq.ué
ùe courage à la bataille de $a a^iine , lui envuyà une quenouille pour le punir e» l'humiliant. N o v e l l e litttrmte Ài
ffirtn\e, ■
Lettre de L’Abbé F s 5 î i N 1 j de Salonique, 1 Mai 17$^,