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Si l’on veut obferver la pofiti -n refpe&ive de
tes forts, on fe convaincra que l’inveftiff'ement
de chacun d’eux eft impofiîble, puifque chaque
fort eft fous le fëu du canon de fon voifin, que
par conféquent l’efpace qui les fépare eft fous
le feu c.roifé des deux», & que de plus les
redoutes ou forts en fécondé ligne font un troisième
feu qui s’y oppofe également de ce côté.
Dans une pareille pofition, on fentira combien
il feroit difficile de fe rendre maître de ces forts,
dont les garnifons cependant ne doivent pas être
de plus de deux cents cinquante hommes pour
le fort triangulaire , & de cent cinquante
pour chacun des fept autres. Ainlï, avec treize
cents hommes de gardes nationales, cette enceinte
avancée feroit à l’abri de toute entre-
prife de la part de l’ennemi : à l’égard des
redoutes de la fécondé enceinte, elles doivent
être garnies de cinquante hommes chacune,
détachés de la garnifon de la ville , uniquement
pour conferver la communication des forts à la
la ville:voilà donc encore huit cents cinquante
hommes j & comme il fuffiroit de mille hommes
dans une ville ainfi couverte, trois mille hommes
fuffir oient pour garantir ce port, même d’un bombardement.
Quant à l’enceinte de la ville, l’auteur adopte
une manière différente des précédentes, il propofe
une enceinte de murailles difpofée de la
manière la plus fimple j afin de.fermer une ville
de cette importance, & pour empêcher ce mur
d’être ouvert par du canon , l ’auteur établit en
avant fon couvre-face général tel qu’il l’a pro-
poféj les développemens de ce couvre-face &
tous fes avantages doivent être lus & médités
dans le troifième volume. Après cet examen,
il fera facile de juger du degré de force dont
cette méthode eft fufceprible ; mais il eft évident
qu’un couvre-face général formant une enceinte
avancée, qu’il faut prendre avant que le
grand rempart puiffe être entamé, eft un obftacîe
bien grand à oppofer à laffiégeant, & qui peut-
Je retenir bien long-tems , .pour peu que le ter-
rein lui foit difputé. Cependant, lorfqu’il fera
parvenu à s’en rendre maître , il n’aura encore
rien ; il faut renvérfer ce mur cafematè , il faut
fe loger fur ce grand rempart fous le feu des
traverfes de maçonnerie qu’il faut prendre, ce
qui ne peut fe faire qu’en les r a faut avec du
canon qu’il faudra placer fur le parapet du grand
rempart, fous le feu de flanc & de face de
ces traverfes, bien plus folides que les épaule-,
mens qu’on tentera de lever contre ces trave rfes,
outre que les derrières de ces batteries, ainfi
que Je logement à conftruire fur ces pàrapets,
,ne font nullement allurés, les alfiégés pouvant
continuellement attaquer la communication en
débouchant parlefoffqfeçi & d'un & d'autre côté ,
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J par ! s arcades fubfiftantes du grand .mur cafe-
maté. 11 attaquera le pont même, fait fur le
grand fofiê, qui ne ceffera jamais d’être battu
par les dix pièces de canon, placées dans les
cafemates de la caponnière oppolee $ & tant
que l’affiégeant ne fera, pas en paifi.ble poffeflîon
de fon logement fur le grand rempart , tant
qu’il n’aura pas du canon établi bien tranquillement
dans des batteries fur ce même rempart,
pour battre le dernier mur d’enceinte, l’aliiégé
n'aura point de capitulation à propofer ni à accepter
j o r , pour peu qu’on ait d expérience dans
l’art des neges , on fent que ce ne fera jamais
fans beaucoup de tems, beaucoup de peine &
fans des pertes confidérables que l’affiégeant parviendra
à ce point, effentiel d’avoir des batteries
en brèche ,N établies folidement & imperturbablement
fur le grand rempart de la place, fans
lequel il ne pourra jamais réussir.
A ces raifopis fe joint l’économie : le projet
de Belidor contiendroit environ foixante mille
toifes cubes de maçonnerie dans fes remparts, &
non compris les éclufes , & les baffins des. deux
ports, les jettëes & toutes les conftru&rons
relatives au pont, qui feroient néceffairement
communes à tous les projets que l’on pourroit
faire.
Dans*Ie projet de l’auteur, on pourroit réduire
tout ce qu’ilpropofe à trente mille toifes cubes,
au moyen defqûelles on- auroit une enceinte de
quatorze à dix-huit cent toifes de rayon autour
de cette place i dans laquelle l’ennemi ne pourroit
entrer qu’après s’être rendu maître de
quelques-uns des torts environnans , après un
fiége long & d’un fuccès des plus incertains.
Refte à parler des forts deftinés à défendre la
rade , qui diffèrent entièrement de ceux dont
l’auteur avoit fait mention précédemment.
Les ports de mer ne doivent pas feulement
être garantis du côté des terres , il n’eft pas
moins important de couvrir l'entrée de leurs
rades. Les vaifteaux, ces fortereffes mobiles fi
multipliées aujourd’hui, menacent également les
côtes des quatre parties du monde, leurs attaques
, auffi promptes que le vent qui les mène,
auffi deftru&ives que la foudre , ne peuvent être
repouffées qu’en leuroppofant des moyens qu’elles
aient à redouter elles-mêmes. Il eft certain qu’un
vaiffeau peut être coulé bas avant qu’un fort
folidement conftniit foit rafé... Ce combat, d’un
fort contre un vaiffeau ^ devroit donc être célui
du pot de fer contre le pot de terre ; cependant
l’avantage jufqu’à préfent refte ordinairement au
vaiffeau ,ce qui prouve que c’eft alors le vaiffeau
qui eft le pot de fer-----Ainfi le fort de l’île
d’Aix
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d’Aix ne fut pris que par la fupériorité énorme
que les vaifteaux qui l'attaquèrent avoient fur
lui ; mais qu’étoit ce fort, une fimple batterie
découverte de quatorzepièce« de canons bordant
la mer.- La moufqueterie des hunes commandoit
la batterie de plus de 50 pieds, ce qui rendoit
le fervice du canon impofiîble. li en eft de- même
de toutes les batteries que l’on place fur des
côtes dans la vue de les défendre. On élève à
la hâte y en tems de guerre:des épaule mens
pour les couvrir qui font renverfés à la première
bordée qu’ ils effuient des vaifteaux , & l’on fe
fonde fur de pareils exemples pour prétendre
que le feu de mer eft fi fupérieur à celui'de
terre, eue ce dernier eft incapable de lui xér
fifter.. / Ici l’auteur propofe un nouveau fort,
conftruit de manière qu’il paroît n’avoir rien à
redouter des flottes ennemies , quelques nom-
breufes quelles puiffent être. G’eft un^ triangle
équilatéral dont les deux pointes du côté de la
mer, font terminées par deux tours angulaires
de dix-huit toifes , quatre pieds, de diamètre >
ces. tours & la partie du fort du côté de la mer ,
font couverts par une batterie baffe environnante
cafematée y & après avoir examiné les différens
deffeins des développemens du plan général,: on
croit pouvoir demander, avec l’auteur , s’il feroit
poflîblé que des vaifteaux de quelque rang & en
quelque nombre qu’ils fuffent, puffent paffer à
portée d’un tel fort fans être coulés à fond. Ils
ne pourroient s’approcher à portée du fufil, ris
feroient dominés dans toutes leurs hunes les plus
élevées î quant au canon il paroît calculé qu’à
cent cinquante toifes un vaiffeau feroit expofé
à recevoir cent foixante boulets de canons à la
fois , c’eft-à-dire , par décharge, & quatre cents
coups de fufil par les créneaux feulement. Cependant
le toifé d’un pareil fort n’eft que d’environ
fix mille cinq à fix cents toifes cubes de maçonnerie,
ce qui eft un peu plus qu’un feul front
baftionné n’en contient. Rien ne feroit donc plus
néceffaire & plus utile que de pareils forts à
l’entrée des rades de nos ports en France & dans
les colonies.
Ce projet exécuté à la pointe de f'île d’Aix ,
cette rade auffi utile que néceffaire, deviendroit
auffi sûre que la rivière de Rocheforç. .
Un autre grand avantage de ce fo* t , c’efr que
fa défenfe n’exige point de troupes réglées^, il
ne s’agit que de tirer des coups de canon & des
coups de fufil j quelques hommes inftruits parmi les
gardes nationales du canton, rempliront mieux cet
objet qu’aucune autre troupe. Gn peut voir dans
l’ouvrage , pag. 658c fuivantes , la;formation des
corps deftinés à la garde & à la defenfe de'ces
forts en,paix ou en guerre ; on petit voir auffi
au mot {force publique, fupplément. ) Mais comme
dans une pofition moins expofée,:onpourroit faire
An Milit. Suppl. Tome ÏV.
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affez avec un fort moindre , ce qui diminueroit
Ja dépenfe & le nombre d’hommes pour la défenfe
j l’auteur a cru important de propofer des
batteries auffi redoutables du côté de la mer que
du côté de la terre ; mais n’ayant pas plus de
deux mille cinq cents toifes cubes de maçonnerie.
Batterie de mer.
On cohnoît, par tin grand nombre d’exemples,
le peu d’effet des batteries de canons placées le
long des côtes i de-là .ce mépris général qui exifte
parmi les. militaires-, .de. .terre & de mer fur ces
fortes d’ouvrages,, & 4e préjugé-où l’on eft que
le feu des vaiffeaux éteindra toujours celui des
batteries de terre. Lê généialMontalembert croit
non-feulement que ces batteries font mal construites
& mal armées ; mais encore que l’on n’a
point déterminé jufqu’à préfent ce qui .étoit le
plus avantageux de faire à cet égard. La batterie
d’une conftruftion de mer n’eft pas fi fimple qu’on
pourroit fe l’imaginer , rarement en trouve-t-on
deux qui doivent être conftruites de même pour
l’être bien , c’eft-à-dire , pour être capable d’un
grand effet. La.nature du fol , fon élévation plus
ou moins grande, la profondeur de la mer, la
divêètion des'bas fonds, celle des courans doivent
influer fur les -proportions, là forme & la com-
pofition de ces fortes d’ouvragesj car il ne fuffit
pas encore qu’ils foient conftruits affez folidement
pour ne pouvoir être détruits par les
vaifteaux , il faut qu’ils puiffent les détruire s'ils
en approchent.
On fait qu’en élevant avec beaucoup de dépenfe
une maffe énorme de pierres, elle réfiftera
à l'artillerie de plufieurs vaiffeaux j mais ce fera
une dépenfe en pure perte, fi cètre màffe n’eft
pas difpofée de manière -à rendre, inabordable lé
rivage qu’elle doit défendre. Ainfi, cette conf-
tru&ion doit être foumife à de certains principes.
Principes.
i°. Les boulets de canon ne commencent à
avoir des effets certains qu’à la diftanee de trois
cents toifes.
2°. Les fufils ne peuvent tirer de coups certains
qu’à cent cinquante • toifes.
3°. Les batteries marines ne doivent point être
à barbette ou fans embrâfures , à moins que ce
ne foit fur des côtes plates d’où les gros vaiffeaux
ne peuvent approcher.
40. Si l ’on fe décide à fiùre des batteries pour
s’oppofer aâx entreprifes de l'ennemi, il faut les
faire plus fortes que les ‘vaiffeaux quelles auront
à repouffer &• entièrement en maçonnerie.
5°. Les moyens à employer doivent être plus ou