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prife , devroit changer la face de l'Europe ,
8c cette idée pleine de juftice & . d’humanité,
rempliront de fatisfa&ion famé des gouvernans
qui la mettroient à exécution , 8c celle des
peuples pour lefquels iis en feroient la tenta-.
tive. Les foupirs de l'homme vertueux, pour
la profpérité des nations , feroient-ils donc toujours
vains ? tandis que ceux de l'ambitieux &
de l’infenfé font fi fouvent fatisfaits 8c fécondés
par le fort. Non, tous les gouvernemens ne
font pas inacceffibles aux progrès des connoif-
fances utiles au genre humain. La politique,
éclairée par la raifon, s'unit déjà à la philo-
fophie, pour foutenir cette grande vérité : que
la félicite des peuples doit feule régler l ’exercice
de l’ autorité, que la force eft l’inftrümc-nt
du defpotifme fur les efclaves j mais que les
bonnes lo is , la modération, la douceur, font
les feules chaînes qui unifient les vrais citoyens ,
à leur gouvernement.
Malgré les preftiges de l’opinion & de l’ erreur,
les hommes les plus opiniâtres ,. font forcés
d’avouer que dans une nation libre, tous les
citoyens deviendront foldats loifque le .befoin
Fexigera, que cés foldats deviendront autant de
Spartiat s , intéreffés comme eux à la défenfe
de ia patrie j qu’ alors l'ennemi ne gagneroit rien
.en gagnant une bataille , parce qu’il trouvèrent
toujours, une réfiftance nouvelle , tant qu’il réitérait
ade nouveaux citoyens en état de combattre.
' . ~ , .......... ... i , , . -
_ C e fut en France, où pour la première fois
on .introduifit le fyfiême des armées fur pied ,
8c la France la première en éprouva les fu-
freftes 'effets. Que ce foit en France où l ’on
donne le premier exemple d’une réforme aufli
importante, & la république fera la première
à en relfentir tous les immenfes avantages.
§ I I.
Combien la France doit-elle avoir de troupes pendant
la paix.
Si l’on perfiftoit dans la déplorable habitude
d’avoir des troupes continuellement fur pied,
il faudroit faire entrer une grande quantité d’elé-
mens dans la folution de cette qùeftiôn , 8c
prendre en b'orifidération , une grande quantité
d ’objets, pour déterminer la force numérique
de l’ armée. La pofition de la* république , fa
politique extérieure , la nature & l ’étendue de
(es frontières & de fes côtes', fa .population,
le pied d’armement des puiffanc.es ^voifines pendant
la paix., ce qu’elles:peuvent y ajouter en .
0ms de guerre, Toit en.employant, leurs moyens, i
foi: en les forçant; les diverfes hypoihèfes d’unè j
guerre ordinaire de continent ; de la même gue: re
jointe i une guerre maritime > & enfin, ce-le 4
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d’une grande guerre du continent, ou feule|
ou compliquée avec une guerre de mer, les
moyens d’augmentation combinés relativement à
ces diverfes hypothèfes, & ces moyens d’augmentation
tellement combines qu’ ils puiffent être
mis en exécution fans créer de nouveaux corps
& fans faire des incorporations de recrues fi
fubites 8c fi nombreufes, qu’ elles puiffent détériorer
la compofition, la difeipline ou l’inf-
truélion des corps qui les reçoivent.
Toutes ces hypothèfes de guerres ex igent,
pour être bien calculées, un bon apperçu général
du fyfiême offenfif ou défenfif de la république
, y compris la défenfe def* côtes, la protection
des colonies, les matelots 8c les garnirons
des vaiffeaux de guerre.
Il ne fuffiroit pas même de déterminer vaguement
la force numérique, il faudroit aufli
fixer, d’après des bâfes fondées fur de bons
principes, fur les localités 8c fur les circonstances
éventuelles, la .proportion des troupes
de chaque armée , 8c enfuite les calculs d’augmentations
qui lui font relatifs.
Enfin, l’organifation intérieure de la république,
Tefpèce de conftitution donnée à la force
publique du; dedans, la connexion qu’auroit ou
que n’auroitpas cette force avec l’arméè, fuivant
que l’ on prendroic le parti de les coalifer ou de
les rendre indépendantes l’une de l’autre.
Mais en repouffant bien loin le fyfiême aufli
impolitiqué qu’immoral des armées continuellement
fur pied j en admettant l’obligation fi naturelle
à tous les citoyens fans diftinélion de
défendre la patrie, & de veiller à fa fureté &
à fa police intérieure & extérieure, les données
de ce grand problème deviennent moins nombreufes,
moins compliquées, & le problème
lui-même- dévient moins difficile à réfoudre.
Ainfi d’ après des idées tirées du gouvernement
républicain, & que nous développerons fuccef-
fivement, il fuffira de favoir d’abord que tous
les hommes en état de porter les armes dans la
république françaife depuis tel âge jufqu’à tel
autre, feront deftinés à compofer la force publique
; une. partie, pour lui préparer des défen-
feurs ; une partie pour agir contre les ennemis
du dehors j, tout, le refie pour affurer la tranquillité
& la lureté dans l’ intérieur ; pour s’ erre
affûté tous les moyens d’avoir à fa volonté ,
le nombre de défenfeurs de la patrie fuffifant
pour la fureté du dehors 8c du dedans.
En effet-, on fe convaincra facilement combien
en deftinant à la force publique, environ fix
millions 1 de citoyens; on s’alfurera^tous les
moyens de pourvoir à. la fureté des frontières,
ioit dans les villes fortifiées, foit fuî les côtes-
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A la fureté du dehors, par les citoyens que t
Fon exercera , afin de remplir cet o b je t, &
à la fureté du dedans, pat la grande, quantité
d'hommes défiiinés'à y veiller; & tous dans
chaque claffe de là manière la moins, onéreùfe
poiu eux > 8c - là plus avâutàgeufe pour la chofe
publique.
Il ne fuffit pas cependant d’avoir fait apper-
cevoir la folution de ce grand problème politique,
il faut encore le développer, le détailler
& le montrer dans fon epfemble, ainfi que dans/
tous fes rapports.
§ I I I.
Comment faut-il fe procurer 'les hommes néceffaires
- d la force publique ?
Pour répandre plus de clarté dans les idées à
propofer fui ce fujet, 8c fe prouver une plus
grande facilité dans , les détails , l ’on pehfe qu’il
faudroit fuppofer la ^république frànçaife, 'même
en y comprenant, les pays, ; conquis fur la rive
gauche du Rhin, divifée en< foixante départe?
mens à-peu-près égaux en population, c’eft-
à-dire, environ cinq cents- mille âmes chacun,
en fuppofant trente millions d’habitans de tout
fexe 8c de tout âge dans la république. ’ , .
' En ne fe , bornant pas non plu$ à diminuer le
nombré' ’des départ'emens j mais eû diminuant
aufli' celui' des' c a n to n s o n fuppofe qu’on les *
réduisît à cinquante par chaque nouveau dépâr- *
tement'd’environ dix mille âmes chacun, ce qui ;
produirait trois mille cantons ; que pour la commodité
on clafferoit par diftriét à raifon de cinq !
par département, trois cents pour la république. ■
Ces dirtri&s n’étan.t que pour faciliter la'divifion, i
& emportant «u plus un fyndic ou un commif-
faire national chargé dé‘ furveiller fur tous les
objets qui intérefferoient le gouvernement dans
fon afrôndiffement, & d’en rendre compte- au
cotnmiflaire près le département.
Ces divifions déterminées, on croit pouvoir
fuppofer avec raifon qu’il r y auroit fix millions
d’hommes depuis l’âge de feize ans jufqu’ à c.elui
de quarante :én état de'porter lés armes, parmi,
lés qüinzé millions de tout âge auquel on porte
'la ! population mafeuline. Ce nombre accordé
donnerbit celui de cent mille citoyens pour la
force publique dans chaque département, lefquels
feroient divifés en trois claffes.
La première, depuis feize jufqu*à vingt-un an
exclufîvement, deftinée à unè a&ivitë d’ inf-
truttion 8e à un fervice très-peu aé lif, mais de
fecours de théorie 8c fort peu de pratique.
La fefc'onde, depuis vingt-un an jufqu’à trente
incluiiyement, defiinée à repouffer les ennemis
Art Milit. Suppl. Tome I
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de l’extérieur, à compofer les armées aélivès,
8c à être inftruits dans la théorie 8c dans la *
pratique.
L'a troifièmô, depuis trente ans jufqu’à quarante
inclufiveinent,, deftffiée au fervice de l’intérieur.
À ces trois claffes, on en.ioîndroit une quatrième^
ridn eomprife dans le' dénombrement
ronofé, nullement deftinée à agir, fi ce n’ eft de
on..e volonté, 8c pour donner, mais toujours^
dans fes foyers la "claffe des honjines de quarante
à foixante ans.
On fuppofera encore que*dans les trois premières
claffes dont on vient de-parler, : la
première contiendroit douze cents mille hommes,
chacune des deux autres- deux million* quatre
cents mMle hommes-en regardant comme peu
important le plus ou le moins qui ne pourroit
jamais êtré bien-confidérable. /
Partageons ehfuite la république en fix grandes
divifions militaires, composées* de dix dêparte-
mens, chacune deftinée-à former-tne armée pour
laquelle il y auroit deux cents quarante mille
combattans, foit pour la compofer d'abord , foit
pour la recruter. Si Fon fuppofe l’armée en activité
de foixante 4à foixante-dix millfe yomb.attans:.;
la république pourroit avoir - ffir:.pied:, environ
quatrq cents, mille; hommps.,^ çqmpofa;nt fix: ar-
méss.' Mais d’ après'* 1. s idées..que nous
lopperons ffucceffivement , indépendamment de
cés fix armées V formant-à-peu-près q'iiàtte ;cents
mille combattans, il y auroit toujours ‘derrière
, elles deux millions d'hommes prêts à; les recruter,
i parmi lefquels on prendrait les ' -bataillons, foit
: pour garder les places fortes, foit'pour-garder
les côtes, & les hommes néceffaires à ,la. marine
, ; comme matelots , , canonniers, 8c combattans.
Les mouffes doivent être pris dans la
première cl af feon croit pouvoir fuppofer que
deux-cents mille hommes férpîeht plus que'fuf-
fifans pour remplir ces differens objets y mais
de la manière i i moins onéréufe atix citoyens 8c
à 1 Etat , puifque tous ces hommes employés
a la,défejffê de la république^ le:ferôient prefque
entièrement .à ceile.de leurs propriétés , de leurs
familles-8c de leurs pénates Quant à la défenfe
dès coidniès 8c à leur police, oh difeutera cet
objet en particulier.
Outre les fix grandes divifions, à la tête de
chacune defqueiles feroit un général en chef,
8c dan$ chacune defqnelles devroit fe trouver
non-feùlenlent route efpèce de troupes 8c d’armes
néceffaires dans chaque armée , mais encore tout
ce qui peut y avoir le moindre rapport. L’ on
diviferoit chaque grande divifion, d’ abord en
c in q , ou par deux departetnen's; à la tête de