
à charger les fufils par la culaffe. La raifon en
eft que la pièce deftinée à fermer le canon a
du jeu ou n'en a pas à volonté 5 car pou* con-
ferver au clapet la même liberté de s’abaiffer &
de s'élever , il 11e doit point remplir exactement
l’ouverture faite au canon j il fuffit que lorfqu’il
eft é le vé , fa furface antérieure joigne exactement
l'ame du canon pour qu’il remplifle parfaitement
fon objet. Or c’eft une fonction que
Ja vis du tarreau eft chargée de remplir. Cette
vis mue par la fous-garde avec le doigt de celui
qui tient cette arme, faifant un petit mouvement,
alors cette vis avançant ferre avec force
le clapet contre le canon, de manière à ne laifler
aucune ouverture dans cette partie j c’eft par
la puiflance d’une telle vis qu’ on oppofe un obf-
tad e infurmontable aux efforts de la poudre
enflammée contre le clapet. Il ne peut pas absolument
reculer de la millième partie d’un cheveu
; & l’expérience confirme entièrement ce
que le feul efprit conçoit. Jamais dans la multitude
de coups qu’ on a tirés avec cette arme ,
il n’eft forti la moindre fumée par la partie antérieure
du clapet j mais dans l’ inftant que le coup
eft parti, la fous-garde étant ramenée à fa place
par le même moyen qui l’en a fait fortir, le
clapet alors fe trouvant par le mouvement en
arrière de la v is , occuper un efpâce qu’il ne
remplit pas à beaucoup près, tombe de lui-même
par fon propre poids, &: laiffe la liberté d’introduire
la balle & la poudre. Alors on remonte
avec le doigt ce même clap et, candis que de
la même main on retire la fous-garde, afin de
ferrer de nouveau le même clapet , & tirer un
fécond, un troifième, un quatrième , un cinquième
.coup, & c . ; manoeuvre qui fe répète
avec une très-grande promptitude. Et ce mouvement
de charger eft fi rapide, que l'expérience
a prouvé qu’on pouvoit tirer f ix , fept & kuk
coups contre un, avec les fufils à baguettes en
ufage.
A ces moyens, le générai Montalenabert a
joint d’avoir beaucoup Amplifié la conftruétion
intérieure de la platine j de manière que fon grand
reffort occupant beaucoup moins ae place, on
en entaille d’autant moins le bois de fu fil, ce
qui lui eonferve plus de force & le rend d’une
plus longue durée.
Terminons ces détails, par ceux de quelques
expériences faites avec le fufil à clapet, comparativement
avec ceux de munition des gardes-
françoifes, le 16 mai 1778.
Le fufil des gardes-françoifes pefoit huit livres
quatre onces j fon calibre intérieur étoit de huit
lignes*
La cartouche côntenoit trois gros , q u arante-
d e u x grains , dont douze grains dans l’amorce.
La balle pefoit fix gros, trente-trois grains,
c’ eft-à dire dix-neuf un quart à la livre.
Le fufil de munition à clapet pefoit fept livres
huit onces 3 donc douçe onces de moins.
Le calibre étoit de fept lignes trois quarts aulieu
de huit ; la balle exactement üune once, con-
féquemment fei^e à la livre.
La chambre du fufil ne contenant que deux
gros, cinquante-quatre grains de poudre , donc
quarante-deux grains de moins.
A cinquante-cinq toifes , la balle du fufil de
munition des gardes-françoifes, n’a pu percer
franchement un madrier de chêne blanc de deux
pouces d’épaiffeur, c’eft-à-dire , qu’ayant donné
près le bord du madrier, aulieu de le percer
n e t, le madrier-s’ eft fendu, & la balle n’a pu
conferver allez de force , pour aller frapper un
autre madrier qui avoit été placé fix ponces en
arrière.
Tirée enfuite avec le fufil de munition à
clapet, chargé de foixante grains de moins que
le fufil des gardts-fiançoifes , & avec une balle
de feiçe à la liv re , aulieu de dix-neuf & demi;
la balle de feize a percé franchement un madrier
de chêne noir très-compact, de trois pouces &
demi d’épaiffeur, & a frappé à fix pouces en
arrière un autre madrier où elle eft entrée d’un
demi-pouce.
Cette expérience comparative, répétée nombre
de fois depuis, a donné les mêmes réfultats.
De façon que ce nouveau fufil avec moins de
poudre & une balle plus pefante , a des portées
beaucoup plus étendues que celui de munition
en ufage ; & comme il fe charge avec une beaucoup
plus grande promptitude, 'il réunit tous les
avantages qu’on peut defirer dans une pareille
arme.
La cavalerie ou les troupes légères à cheval
armés de femblables moufquetons, il en réfiil-
teroit deux grands avantages.j que la balle ne
pourroit plus defcendre dans la pofition où le
cavalier eft obligé de le tenir le bout en bas,
& l’autre de pouvoir charger à cheval, avec
autant de promptitude qu’ il pourroit le faire
étant à pied ; tandis que dans l’état a&uel avec
le moufqueton à baguette, la charge à cheval
eft difficile & demande un tems plus long, qui
feroit fouvent à "defirer qu’il ne le fût.
Il feroit inutile de dire comment &: pourquoi
dans une aftion long-tems continuée, ces armes,
par cela feul qu’elles fe chargent par la culaffe ,
auroient un très-grand avantage fur les autres j
pourquoi elles feroient moins fujettes à s’échauffer
& à fe détraquer. On concevra facilemént'com-
ment le tube fera plus facilement - rafraîchi,
quand il prend l’ air par fes -deux extrémités, &
comment l’air atmofphérique, chaque fois qu’on
donnera le jour au tonnerre par l'ouverture de
la culaffe , fe précipitera pour remplir le vide
occafionné par la détonnation. On ne doit pas
craindre de déperdition du fluide, & l’ouverture
de la culaffe ne peut entraîner dans aucun
inconvénient, mais bien affurer de grands avantages.
Le général Belair affure avoir trouvé des
moyens d’augmenter les propriétés d’une arme
déjà fi avantageufe j mais pour les multiplier,
il faudroit peut-être faire une plus grande attention
à ce qu’a écrit Bonnard , fur les balles
de fer battu. « Les balles de fer ( dit cet officier
d’artillerie ) coûtent à-peu-près le tiers de
» celles de plomb , vont beaucoup plus loin
33 quoique plus légères, parce que leur réfif-
» tance maintient leur forme & les empêche
33 de fe. pelotonner au fortir de la pièce. La
» manière de les faire eft facile & prompte,
» puifqu’ un homme qui a l’habitude en fait trente
33 & plus par heure. Il faut dans l’enclume dont
33 on fè fert, un trouquarré, dans lequel puiffe
» entrer la queue du morceau de f e r , à l’ex-
33 trémité duquel fe trouve creufée une partie
33 de fphère, qui forme le tiers de la balle à
33 forger. Le marteau dont on fe fert eft de même.
33 Il faut que la partie creufée, qu’on nomme
» eftompe foit dans l’ un & dans l’autre, d’acier
M trempé dur.. . Le forgeur met au feu plufieurs
» barres à la-fois, & quand elles ont acquis à
» leur extrémité le degré de chaleur convenable
pour les travailler, il les arrondit dans
33 les dimenfions préparées par les inftrumens
»o qu’ il emploie j il a deux lunettes pour efiayer
33 ces balles qui doivent paffer dans l’une & non
33 dans l ’autre. L’étude qu’ il fait de fa matière,
» lui en indique le retrait & lui fert de loi pour
33 lé calibre à donner aux lunettes qu’il em-
33 ploie j le fer de la plus mauvaife qualité eft
33 îuffifant pour la confection de ces balles. 33
D’après ces différentes obfervations, il paroît
démontré que les armes à feu de l’infanterie &
de la cavalerie, font fufceptibles de très-grandes
perfections 5 mais ce qu’il eft heureux d’obferver
en même tems,, c ’eft que des officiers inftruits
& de bons artîftes, ont déjà fait à ce fujet des
découvertes très-heureufes, & fur lefquelles on
ne fauroit trop s’empreffer de faire des expériences,
afin de s’aflurer de leurs effets & d’adopter
selles dont les avantages feroieut démontrés.
* FUSTIBALE. Le fuftibale étoit une fronde
placée au bout d’un bâton ou le vie r, long de
trois pieds, fept pouces, huit lignes, mis en
mouvement avec les deux mains, & qui jéttoit
des pierres à-peu-près comme l’onagre.
FUSTIGATION. L * fuftigation a été employée
à Rome & en Francecomme une punition
militaire 5 cette peine n’étoit point infamante a
Rome, mais elle l’eft en France, car c ’eft le
bourreau qui l'inflige.
Il- a exifté dans le corps de l’armée françoife ,
une punition du genre de la fuftigation, qui
avoit beaucoup d’avantages & que les ordonnances
militaires ont bannies y elle fe nommoit
correSlion fraternelle ; le coupable étoit conduit
dans une des chambres de la compagnie en pré-*
fence de tous fes camarades , on le faifoit placer
fur la table de l’ordinaire ou fur un banc j les
derniers hommes de recrues, armés de martinets
, deftinés à époufleter les habits, lui don-
no ient fur les feflës par deflus la chemife, le
nombre des coups auxquels il avoit été condamné
par le chef du corps, d’après l’avis du
capitaine ou du commandant de la compagnie*
Cette punition étoit infligée à un jeune homme
qui laifîoit remarquer un penchant violent à
quelque vice honteux} qui avoit été furpris
s’appropriant des petits effets qui ne lui appar-
tenoient point, qui avoit vendu quelques-unes
de fes hardes fans permiflion &c. On employoit
aufli la même punition , mais avec moins d’apparat
contre un enfant de fei\e a dix-fept ans,
qui avoit fait quelqu’efpièglerie trop foire qu’oiï
ne vouloit pas punir par la prifon, parce que
l’on craignoit qu’elle n’achevât de corrompre
fes moeurs, ou parce qu’on redoutoit que fa
fanté n'en fouffrît. C ’étoit fon caporal q u i, au
point du jou r , lui infligeoit cette corre&ioiT
vraiment paternelle.
Si tous les officiers; & fous-officiers étoient"
comme ils devroient l ’être des pères tendres ,
conftamment occupés de l’éducation de leurs
enfans, peut-être auroit-on dû laifler fubfifter,
autorifer même cette dernière efpèce de fuftigation.
Quant à la première, il feroit intérèf-
fant de la remettre en vigueur, & la loi pourroit
l’ indiquer comme un intermédiaire entre les
châtimens & les punitions, comme une peine
en un motj laiffant à la fageffe du chef du corps
le befoin de la faire infliger, d’après la demande-
du commandant de la compagnie.