
Cinquième Connoiflance. Panfement.
On a dit avec raifon qu’un cheval bien panfé
étoit à moitié nourri, & cependant , rien n’eft
plus rare chez nous qu’un excellent palefrenier.
Il eft donc très-important qu’un- écuyer con-
noifle parfaitement cette partie , foit pour , en
inftruire les palefreniers , foit pour veiller à
l’exécution, ainfi que ’fur -la ma ni èrede manier
la peau dés chevaux pour faciliter leur tr.arif-
piration , celle de lès bouchonner , de les étriller ,
de les laver § de les tenir toujours très-prb-
prement •, lés foins 'qu’il faut avoir de ne pas
lès faire pafler du chaud au froid trop fubi-
tement -, de ne pas les laiflfer trop chaudement
dans les .écuries , parce qu’ une trop grande
tranfpiration les énerve. & les fatigue , de ne
pas les expofer fans précaution au froid , à la
pluie., aux frimats , fur-tout quand ils viennent
de courir , &c.
Sixième Connoiffance. Ecuries.
La manière dont on' doit loger les chevaux
n’eft pas la moins importante des connoiffances
de Vécuyer • on ne fait pas allez qu’en général
il y a fort peu de très-bonnes écuries ; il faut
qu’elles ne fpient ni trop chaudes , ni trop
froides, qu’elles ne foient point humides , qu’elles
foient fuffifamment aérées & à portée de l’eau ,
&c. ; il faut fur-tout aulli qu’on puiffe les tenir-
très-proprement -, il faudroit donc en général
qu’elles fuffent voûtées ou plafonnées -, fans ces
précautions , les ais , les planchers , n’étant
jamais bien joints , il tombe continuellement
fur le corps du cheval ou dans fon manger des
ordures ou de la poulïïère qui le fatiguent pour
l’extérieur , & qui font très - nuilîbles pour
l’ intérieur. Il eft aufli très-elfentiel qu’il n’y ait
dans les écuries aucune ouverture par où l’on
jette le foin •, on a remarqué que l’odeur qui
s’exhale du foin, & qui eft attirée dans l’écurie
par la chaleur & refpirée par les chevaux , leur
eft très-dangereufe v il pafle aufti par les mêmes
ouvertures une affez grande quantité.' de la
pouflière du foin ou autre qui , lorfqu’elle tombe
dans les mangeoires , eft très-nuiïïble aux chevaux
qui ne peuvent guères s’empêcher d’en avaler
avec leur nourriture. Toutes ces obfervations
font d’autant plus eflentielles qu’une grande
partie des troupes à cheval, foit en quartiers,
foit même''dans pluïïeurs garnifons , font expo-
l ’ées à avoir de très-mauvaifes écuries , & dont
on pourroit diminuer en partie les dangers fi on
les connoilfoit mieux, & fi on cherchoit plus
afïïduement à y obvier.
Septième Connoiflance. Ferrure.
ü n eft obligé de dire que plus il feroit eflen-
, tîel qu’il n’y eût que des maréchaux tros-inftruits ,•
& plus il femblè qu’on ait laiflë fe multiplier
■ les mauvais maréchaux., . . Dans les campagnes ,
dans les villages , dans les villes même , élève
qui veut une boutique de maré chal...- , aufli
eft,-il incroyable quelle eft la quantité de chevaux
qui font eftropiés par ces foi-difans maréchaux.
. . Au moyen" des écoles vétérinaires , il
S eft arrivé dans quelques parties de chaque province
quelques hommes jnftruits, mais en beaucoup
trop petit nombrei l eft donc très-important
que Yécuyer fâche comment on doit ferrer
un cheval 8c lâche le ferrer lui-même. On oublie
trop fouvent que le fer n’a été imaginé que pour
préferver le Jabot de la trop grande fatigue ,
& que l’art du maréchal conlifte principalement
( dans la partie de la ferrure ) à lavoir conftruire
fon fer de manière qu’il correfponde à la con-
fo rmation du pied, du cheval , 8c à éviter de
vouloir , pour ainfi dire , plier la corne à la
forme d’un fer ‘ fabriqué d’avance pour cette
partie fi intéreflante 8c trop négligée : Yécuyer
c on fui te ra fa-ns doute M. La Fofle dans fon Parfait
Maréchal.
Otftre les inconvéniens fans nombre qui doivent
s’enfuivre d’une mauvaife ferrure pour la partie
des pieds , ç’ eft qu’il arrive fouvent que la douleur
qu’éprouvent aux pieds les chevaux malferrés
leur fait paroître les épaules douloureufes ,
& leur ôte^ leur foutien -, ce qui donne à toutes
les autres parties un mouvement contraint &
forcé qui ne tarde pas à les altérer : ce qui prouve
toujours davantage combien il eft néceflaire" que
Yécuyer connoiffe à Fond la manière dont il faut
ferrer les différens chevaux.
Huitième Connoiflance. Bride & Mors.
Quelques éperoniers peuvent mériter la con*
fiance qu’on leur accorde pour ertiboucher des
chevaux , mais il y en a ’fi peu , & encore même
les plus habiles agiflent fi fouvent par pratique
plutôt que par théorie , qu’il eft indifpenfable à
Yécuyer de s’occuper de la connoiflance des differentes
parties de la bouche de chaque cheval ;
les lèvres;, la mâchoire, les gencives , les barres ,
la langue , & c , doivent être bien connues $ afin
de donner à chacun un mors analogue à la conformation
de fa bouche ; bien ou mal embouché
un cheval eft facile ou difficile à conduire ,
foirple , docile ou vicieux -, 8c de la réfiftance
que peut faire un cheval mal embouché doit
s’enfuivre de la part de Yécuyer une mafle de
force qui nuit aux articulations de l’animal. .
La monture de la bride demande à être ordonnée
avec grâce & méthode , fans quoi elle diminue
la grâce de la tête du cheval. Un écuyer ne doit
pas négliger ces différens détails , & il feroit
très-fâcheux qu’ il les regardât comme minutieux«.
'Huitième Connoiflance. Maniéré de feller les
chevaux.
' Une felle doit contribuer à la grâce du cheval
&: de Yécuyer^ eMe doit être commode à tous les
dèuxi elle l’eft au cheval quand elle- ne peut
pas le blefler, qu’elle eft légère 8c qu’elle ne
gène pas (es moüvemens-, elle eft commode au
cavalier quand elle le met dans l’àffiette la plus
fiable, qu’elle lui donne le plus de point de
liaifon 8c le plus d’ aide qu’il eft poflible: parce
que .plus le cavalier fe trouve à ion aife, plus
il pjut fe lier au cheval, plu/ il opère moël-
leufement, plus .il donne de la confiance à fon
cheval, plus il fe prête à l’obéiflance, plus elle
lui devient douce, & plus Yécuyer foulage fes articulations.
Il ieft donc néceflaire que ce foit un
écuyer inftruit qui dirige le fellier^dans la manière
dont il doit conftruire les iel^s-, 8c pour le faire
bien plus1 sûrement il eft à propos qu’il con-
noifle très-bien cette partie.
Qualités.
Après avoir parcouru les connoiflance» que
nous avons cru que devoit avoir indifpenfable-
ment chaque écuyer, nous allons nous occuper
des; qualités phyliques 8c morales nêceflaires à
chacun d’eux.
Q u a l i t é s p h y s i q u e s .
Première qualité. Conf rmaiion.
La première des qualités que l’on doit rechercher
pour faire un excellent homme de cheval
, doit être ce femble la conformation. On
fe trompe peut-être affez fouvent fur ce point_
la vraie conformation n’eft donc pas en général
dans la très - grande . taille , parce que’ dans lès’
grands hommes le bufte étant rarement en proportion
avec les cuifles & les épaules, il dérruit
leur liaifon 8c permet rarement le lien qui eft
néceflaire dans les nerfs-, d’ailleurs on a obfervé
que les très-grands hommes , avoient les aides
molles &: écartées, 8c que pour les mettre dans
leur proportion '8c leur donner les moyens de
tirer parti des avantages qu’ils, pourroient avoir,
il leur falloit de très-rgrauds chevaux ■, on fait
aufli par expérience que les jeunes chevaux acquièrent
moins de Force , fous les hommes
grands 8c lourds...... Il eft bon en même temps
d’obferver qu’il ne faut pas confondre un beau
corps avec un bon corps..... une belle.avec une
bonné conformation. Tel homme pourroit avoir
un beau corps & une conformation avantageufè,
qui au travail fe trouve roide, le S reins mous
foibles, & c . tandis qu’un autre moins bien
conformé en apparence i'e trouvera liant & nerveux..
La vraie conformation fômbleroit donc devoir
ê tre, d’avoir le lêorps plutôt court que long,
une grande liberté dans tous les moüvemens ,
afin de pouvoir être le maître d’employer dans
les différentes opérations du nerf ou du Jien.
Lès bras longs donnent plus de grâce au cavalier
, & plus de liberté dans les moüvemens ;
quant aux cuifles, il faut les avoir un peu longues
8c plates. . . . D’après le -travail qu’il faut pour
faire acquérir aux muf'cles la difpolition & l’habitude
néceflaire pour que Yécuyer puiffe fe lier
avec Ion cheval, on fentira aifément combien
il doit être avantageux d’avoir la meilleure conformation
poflible pour être un bon homme dè
cheval & acquérir ce taél fi rare qui tranfmee
le fentiment de tout ce qui fe pafle dans l’animal
au phyfique & au moral afin d’opérer convenablement.
Seconde qualité. Santé & force.
Comme la feiençe de Yécuyer néceflite plus
de pratiqué encore que de théorie , comme indépendamment
des connoiflances qu’ il doit avoir,
il faut qu’ il foit continuellement a cheval, afin
de ne faire qu’un pour ainfi dire avec l’anim*al
qu’il veut drefler, comme les différens chevaux
qu’il monte ont prefque tous des yiçes ou des.
défauts, que les uns l'ont nerveux, fufceptibles,
fauvages , ’ les autres rebours , gais , 8cc ; que
plus d’une fois 1 a vie du cavalier eft en danger
, ''il ne fera pas difficile de concevoir combien
la fanté 8ç la force font des qualités effear
tielles à Yécuyer.
Q u a l i t é s m o r â l e s .
Première qualité. La confiance.
En réfléchiflant aux obftacles fans nombre qu’on
ne peut furmofttër dans l’éducation des chevaux
que par la confiance , on fentira bien vite de
quelle importance doit être cette qualité pour
Yécuyer.... Sans elle il fera bientôt rebuté par
les difficultés-, il n’aura pas lé- courage de mettre
dans fon travail cette fuite qui peut feule oc-
cafionner les bons réluhats -, ainfi que les hommes
lès animaux ne s’ inftruifent trop fouvent que
par l’habitude, 8c l’ habitude de selle ou telle
chofe n’eft que le réfuicat de la répétition continuelle
8ç confiante de cette chofe....... Si l’écuyer
le rebute, il manquera une occafion de
s’inftruire 8c laiflera l’animal avec des vices *,
fi au contraire il a le courage Se la confiance
de luivre fon ouvrage, peut-être ne. rendra-t-il
pas le cheval parfait, mais au moins le mettra-
t-il au point que l’on puiffe en tiret parti.
Seconde qualité. La patience.
Un cheval eft - il jeune , foible-, avec des