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AN TE ( d e s S o l d a t s ). Pour contribuer
au bien-être de nos frères d'armes , autant qu'il
peut etre en nous , il nous a paru intéreffanf de
communiquer ici un mémoire des médecins &
chirurgiens en chef des armées des Pyrénées, remis
par eux à Touloufe, au général en chef, le
premier février 1793.
Le citoyen Servan , général en chef de l'armée
des Pyrénées, ayant invité les officiers de fanté
de cettè armée à donner leurs avis fur les moyens
les plus propres à empêcher que les maladies en
general, mais furtout les conragieufes , fe propageaient
le moins poffible, ils font convenus que
le premier & le plus fur de tous, étoit de ne pas
j.P?ettre dans les hôpitaux fédentaires aufïi in-
diftindlement & avec une facilité auffi pernicieufe,
tous les foldats qui s'y préfentent 5 car.de cette
facilité il refaire que beaucoup de maladies , naturellement
fi m p le s , fe compliquent néceffaire-
ment, maigre 1 ordre & les foins qu’on apporte
dans le régime de ces établi ffemens , parce que
tout jocal ou féjburnent continuellement un grand
nombre d'hommes, & furtout d'hommes malades, ■
devient toujours de plus en. plus une habitation ;
mal-faine.
11 feroit utile en confequence, fous une infi-
de rapports, que toutes légères bleffures , 1
dépôts, tumeur , indifpofition , accidens qui ne
doivent point avoir de fuites fâcheufes , fuffent
traités, en tems de paix comme en tems de guerre
par les chirurgiens - majors de bataillon eu de régiment.
Çes foldats, dans les circonftances qui l’exige-
roient, feroient difpenfés du ferviçe, d'après une
atteitation par écrit dés chirurgiens-majors, qui ,
en garnifon ou en cantonnement, & meme en
tems de guerre, furtout dans la belle faifon, pourr
o n t pareillement être chargés du traitement des
galeux & des vénériens de leur régiment, & ils
auroient en confequence l'ordre pofitif de n'eh-~
voyer aux hôpitaux que les galeux & les vénériens
qui , par la complication bien marquée de ces, maladies,
exigeroient des foins & des traitemens particuliers.
Q , , ; ; -
Le confeil de fanté feroit prié de faire un réglement
pour tout ce qui a rapport à l'ordre ,
I ’adminiftration & la comptabilité, comme auffi
de donner en français, & fans abréviation, un mode
clair & précis pour ce qui regarde la méthode curative.
-
Le miniftre de la guerre en feroit adreffer des
exemplaires à tous les régimens & bataillons de
volontaires.
6
Pour fubvenir aux frais du traitement de ces
maladies , on pourroit donner, par chaque galeux
& vénérien, un fupplément qui, avec celui de la
folde concernant les revues, pourroit être porté
a 1fous par journée de ces malades, qui confer-
veroiént en fus leur pain de munition.
Cette 'Tomme de 16
fous peut fuffire d'autant
mieux pour toutes dépenfes, qu’il eft rare que
les galeux aient befoin d'un ordinaire différent
que celui auquel ils font habitués.
Il feroit utile que les ordres relatifs à la difci-
pline à faire obferver parmi ces malades fulfent
très-pofitifs.
Pour la comptabilité du fupplément de 16 fous
par galeux & vénérien, & pour prévenir des abus
qu’il feroit trop long de détailler, il feroit indif-
penfable que le chirurgien-major & l’officier particuliérement,
chargés de tout ce qui a rapport à
ces malades, en arrêtaffent la dépenfe, jour par
jour. ■ ■ ■ ■ ) . .
U devroit y avoir auffi un regiftre fur lequel il
feroit lofe rit la date de leur traitement & celle de
leur guérifon.
Çe regiftre feroit certifié tous les huit jours,
par l'officier, le fergent-major ou le fourrier de
chaque compagnie qui auroit fourni des malades,
ainfi que par l'officier chargé particuliérement de
cette partie & le chirurgien-major.
Chaque chirurgien-major auroit deux cahiers
de. vifite ; .un pour l'ufage journalier & inferiré
les prefcniptions > le fécond ne feroit qu’un relevé
de ce premier : il feroit pour être confervé &
produit félon les demandes qu'on pourroit lui en
faire.
L'un & l'autre feroient lignes jour par jour.
Chaque chirurgien-major auroit, pour lui aider
dans tous les details qui le concernent, un aide
par bataillon ; il feroit au fetil choix du chirurgien-
major, & , pour qu'il fût tout entier à fon devoir,
il feroit à defirer qu'il ne fut point foldat.
Les chirurgiens majors feroient refponfables de
leur exactitude & de tous les détails de leur fer-
vice. I ?
... Ces aides” auroient au moins par mois yo livres
d’appointement 5 ils feroient tenus à leur entretien.
Us auroient un logement en route, en garnifon,
quartier ou cantonnement.
Si le régiment étoit campé , ils feroient avec
le chirurgien-major.
En garnifon ou dans les camps, les chirurgiens-
majqrs ou leurs aides feroient, tous les jours,uoe
vifite exade des foldats.
Si le régiment faifoit une route, Us auroient
foin' de remettre la note & le numéro de leur logement
au corps-de-garde , afin que-, pour tout
officier ou foldat qui en auroit befoin , on fût ou
les trouver auffitôt. •
Il devroit être permis à chaque chirurgien-
major d'avoir , fur le fourgon à la fuite du régiment
, une caiffe où feroient renfermés les objets
jiéceffakes au traitement journalier des malades ;
cette caiffe feroit à compartimens, pour y -câfer
les divers remèdes ufueîs , ainfi que quelques linges
pour des premiers appareils en cas d'accident.
Il feroit de même utile que chaque chirurgien-
major eût un ou deux tourniquets,pour les appliquer
fur le champ en cas d'hemorragie : beaucoup
de foldats peuven t périr faute de ce moyen.
Ces foldats auxquels le chirurgien-major auroit
appliqué ce premier appareil, feroient accompagnés
par fon aide jufqu'à l’ambulance;
Quant à l'établiffement & aux fournitures particulières
aux galeux Se aux vénériens, au lieu de
fuivre le mode ufité lors de l’exiftence des infirmeries
régimentaires, on éviteroir bien des in-
convéniens fi les municipalités des lieux où les
régimens feroient en quartier ou en garnifon ,
étoient chargées d'y pourvoir : tout feroit ftatué
relativement à la force & aux befoins de chaque
régiment.
. Le confeil d’adminiftration feroit tenu de nommer
un officier pour recevoir, & le local, & les
fournitures : il en feroit dreffé deux procès-verbaux
j l'un, pour le régiment5 l’autre, pour la municipalité
qui feroit autorifée à exiger les réparations
du local, comme les remplacement des objets
perdus ou détériorés, fi le tout n'étoit pas dans
l'état confia té au procès-verbal.
Pour le s galeux & les vénériens dès régimens qui
forment l’avant-garde de l’armée , comme pour
ceux des autres régimens que des circonftances
impérieufes empêcheroient d’être traités par les
chirurgiens-majors, on pourroit former à la fuite
de l’armée un établiffement général, deftiné au
traitement de ces maladies ; établiffement difpofé
de la manière la plus utile & varié félon la faifon,
les circonftances & les localités ,.■ & d’après les
ordres qui feroient donnés par le général ou l’officier
qui en auroit été chargé.
U feroit attaché un régiffeur particulier à cet
hôpital ambulant & à chaque mouvement ordonné
par le général. Ce régiffeur fe tranfporteroit à
l’emplacement défigné, pour y‘préparer les choies
néce fiai res.
:■ Plus il feroit à portée du quartier - général 3
plus il feroit fufceptible d’ordre & de difcipline.-
• U y auroit une ou deux Voitures- couvertes en
fo rtne de foutgo’n', uniquement defiinéesj à cet
hôpital : on y.feroit des' compartimens pour'y ca?'
ferles diffère ns remèdes dont on auroit un befoin
journalier.
Ces remèdes fèroiént tirés de la pharmacie de {
l'ambulance: ce moyen feroit économique, & on
feroit affuré de leur bonté.
Le fervice de fanté y feroit fait par des officiers
de fanté pris dans l'ambulance, et particuliérement
attachés à cet établiffement.
Les officiers de fanté en. chef de l’armée- en
fuivroient & furveilleroient tous.les détails avec
la plus grande attention.
Ces officiers de fanté défigneroient le nombre
néceffaire , ainfi que la nature du fervice de tous
les employés.
Us feroient autorifés, félon le befoin, à appeler
un aide-chirurgien dès régimens de deux bataillons
, & ces aides ne pourvoient retourner à leur
corps que d’après l’ordre ou la permiffion qu'ils
en auroient reçu d'eux.
Si on trouve des inconvéniens à cette innovation
, on y verra l’inappréciab’e avantage de ne
pas éloigner le foldat de fon régiment , comme
on pourra y trouver le feul & vrai moyen d’empêcher
que la gale ne fe propage 5 car , quand de
î’armée on envoie lés galeux dans les hôpitaux
fédentaires, ils infe&ent les lits fur la route qu’ils
font pour s’.y rendre 5 ces lits font prefque tou-
j jours les mêmes pour les foldats qui rejoignent
l’armée , ou pour ceux qui en partent pour fe
rendre à d’autres deftinations j ce qui propage & f
multiplie cette maladie d’une manière incakuh-
; bis : d’où naiffent ehfuite une dépenfe non moins
i incalculable & une diminution très-fenfible dans
le complet de l’armée j car tout homme qu’on en
1 éloigne trop, eft, pour l’ordinaire, un hommer
perdu pour la campagne.
On pourroit dire auffi que fes effets, fes armes'
& fon fourniment ne le font pas moins. Tout fo!-:
dat qui part de fon régiment pour aller à l’hôpital,
laiffe ces objets à fa compagnie'. Si le régiment1
i fait une marche, on met les facs, les porte-manteaux,
les armes, tout pêle-mêle fur des voitures
n
d’ordonnance que l’on charge & décharge tous
les jours : tout le brifè , fe rouille ou fe perd ; ce’
quinéceffite, en réparations ou éremplacement,'
des dépenfes d’autant plus urgentes, qu’on en a un ■
befoin preffant.
Ces observations peuvent fort bien s’appliquer'
en tout aux vénériens: ~ -
D’ailleurs, fi ori préyoyoit Une aétion, on pourroit
tirer- dè cés établiffemens les foldats les moins
incommodés, à aider à tranfporter leurs camarades1
bleffes’, au moyen des brancards deftihés a cet effet
ou bien de toute autre manière utile, félon l’occa-
fion ou l'urgence du moment.
Ce feroit auffi fervir l'humanité, 8c empêcher
la diminutionfenfible-du complet de1 l’armée , que ^
de donner encore plus d’extenfion au moyen que
préfente cet hôpital ambulant', en y admettant ,
mais d’une manière bien diftinéte , lé foldat fouf-
ifrant, ou qui fe dit ffouffrarit fans, fyiriptomés dé- '
terminés , & celui qui, des. hôpitaux revenant à.1
l'armée, n'eft pas encore en état de faire fon fer- '