
exécutées arec une précifion due à la mobilité
dans l'ordonnance imaginée par Epaminondas ,
» coup de javeline à travers l’ eftomac. » ( P/«-
tarque, in Epaminondas. -
Cette bleffure qui fut mortelle empêcha Us Thé-
bains de combattre avec le même ordre qu’ils avoient
obferv.é jufqu’alors. La trille nouvelle de la bleffure
de leur -général, étant bientôt fue de tous
les foldats, leurs chefs attérrés comme eux de la
perte de ce grand homme , firent fonner la retraite.
Ici les ta&iciens font dîvifês 3 les uns avec le
chevalier Folard admirent la manoeuvre d’Epami-
nondas comme une des plus favantes, faifant un
très-grand cas de l’attaque fur le centre, au moyen
dé laquelle on Cep are les deux ailes : il relie encore,
difent-ils, de grandes rellources à une armée battue
dans une de fes ailes 3 mais rompue dans fon centte,
elle ell fans efpérance de fecours.
D autres tacticiens blâment Epaminondas- de
n avoir pas, comme à Leuétres , pris le parti d’attaquer
1 aile gauche des Lacédémoniens, après'avoir
pris celui de renforcer fa droite, dans lefpérance
où il étoit de voir la cavalerie lacédémonienne ren-
verfée par la thelTalîenne. Ne fe feroit-il pas afiùré
une vidloire plus facile} car on ne peut pas regarder
comme une viéloire les avantages remportés
par les Thébains à Mantkiée , & l’on ne doit
pas oublier la néceflité où fe trouva Epaminondas
de fe mettre lui-même à la tête d’une troupe particulière
, pour arracher cette victoire encore
incertaine.
Ce n’ell pas ici le moment de réfoudre un
problème de radique auffi elïentiel 5 on croiroit
cependant n’être pas en droit de' s’appuyer de la
bataille de Mantinée, pour prouver les avantages
des attaques fur le centre.
On voit encore ici les Lacédémoniens fe laiffer
tromper par Epaminondas, au moment où il fit
halte fur les hauteurs 3 ils crurent qu’il s’arrêtoit
pour camper & ils ne furent défabufés qu’au moment
où il s’ébranla, & fit exécuter fa manoeuvre pour
les attaquer 3 manoeuvre qui dut encore les laiffer
quelque tems dans l'incertitude de l’endroit où il
vouloit porter les premiers coups.
Les Lacédémoniens ne commirent pas, comme
à Leudres, la faute de placer leur cavalerie devant
leur infanterie, mais en la plaçant fur les aîles &
la formant fur une fi grande profondeur, ils lui
ôtèrent fa légéreté & la vélocité, & donnèrent
de plus grands moyens aux ThelTaliens, formés! par
petits efcadrons & fécondés par leurs troupes légères,
de l’envelopper & de la mettre en fuite.
Enfin les Lacédémoniens ne firent aucun ufage
de leurs hommes armés à la légère ils avoient
on peut juger des nouveaux progrès faits en
auffi peu de tems par l’art militaire & la fcience
de la guerre. C e qui peut aider à concevoir
un fait auffi furpFenant , ce font les Grecs, qui,
non contens de s’adonner à tous les exercices
du corps propres à former l’homme pour la
guerre, s’appliquoient encore , d’une façon particulière,
à cultiver la tadique & à la perfectionner.
Sans cefië en proie à des divifions in-
tefti e s .- o u menacés par des voifins puilfans *
ils crûrent important de faire de cette fcience
une partie des obligations d’ un bon citoyen ,
& de la faire entrer fur ce pied dans leur plan
d'éducation pour la jeuneffe»
En conféquence , ils avoient établi dans toutes
les villes des écoles de tadique , dont les
maîtres étoient entretenus aux dépens du public»
Pour être admis à y faire fes prémières armes ,
il falloit s'y être nourri l'efprit des piincipes
de l'art 3 par ce moyen , les difpofitions de ceux
qui naiffoient avec un génie vraiment militaire,
fe développoient plus rapidement, & ils deve-
noient capables de rendre plus tôt & plus long-
tems à leur patrie des fervices fignalés» Quant
aux autres, ils s'inftruifoient de tout ce qui devoir
être pratiqué, & connoifloient avant
d'entrer dans la carrière , toute l’étendue de
leurs obligations. On droit enfin de ces leçons
faites en public, & fous les yeux des plus illuf-
tres membres de l’E ta t , l’avantage de fixer une
uniformité de méthode & de préceptes, & de
ne point abandonner à la fantaifie des particuliers
un art devenu malheureufement fi néceffaire.
Après la bataille de Mantinée ,. Athènes &
Sparte fe trouvoient humiliées. Thèbes n’étoit
plus. La guerre qui avoir celTé , laiffoit après elle
dans là Grèce tous les maux qui en font les fuites
inévitables , & l’impuilfance où fe trouvoient
les différ entes républiques de commander les
unes aux autres , paroiffoit- feule affurer à toutes
la même liberté : ainfi- ne fe redoutant plus en-
tr’elles , elles crurent n’avoir plus rien à redouter
, & fe mirent dans Timpuiffance de fe
réunir contre une ennemi commun. Chez les
Athéniens même , la gloire des armes , portée
auparavant jufqu’au fanatifme n'avoit plus aucun
attrait, & les talens militaires, dégradés,
y devenoient tous les jours plus rares.
Cependant il fe formoit une pùiffance qui ,
auffi négligé d’avoir une réferve, qui aurait pu
leur être fi utile pour arrêter les progrès de la
colonne thébaine, lorfqu’elle eut percé le centre.
Dans ce moment elle devoit offrir des guerriers
mal en ordre, très-peu ferrés & qui pouvoient
être attaqués avëc avantage par une réferve arrivant
en bon ordre au fe cours du corps de la bataille.
voyant les Grecs de très-près , 5c s’habituant à
ne plus les craindre, forma le projet d’envahir
la G rèce, & l'envahit.
Philippe: — Cette puiffance étoit la Macédoine
: fon roi étoit ce même Philippe, élevé à
Thèbes dans la maifon du père d’Epaminondas,
o ù , en. y acquérant des .connoifiances & de
grands talens, il y étoit devenu a é lif, vigilant ,
laborieux & infatigable 3 il s’y étoit inftruit dans
le métierr-'des armes , le plus néceffaire à' fon
ambition, & il y avoit appris à former des foldats
, à les conduire & à les faire vaincre.
Imbu de tous les meilleurs principes de la tactique
grecque, à peine Philippe étoit-il fur le
trône , & déjà il avoit levé un corps de fix mille
Macédoniens , auquel il fit prendre le nom de
phalange. Il le conferva toujours fur p ied , &
il s’appliqua à le perfectionner, au moyen de
la féverité des lois , de l’éclat des récompen-
fes , de la pratique confiante des exercices &
de la bonté des armes- Ce fut auffi lui q u i, ne
voulant pas fe borner à l’ordre habituel des phalanges
, imagina l’ordre en échiquier , qui pré-
fentoit cinq lignes , au lieu de quatre , & don-
noit de plus grandes facilités pour mouvoir les
différens corps, en mettant des intervalles en-
tr’eux. ( PVyq- Phalange macédonienne- )
Cet établiffement de la phalange , qui dut être
regardé comme un des perfeClionnemens de l’art
militaire, fut l’époque de la gloire de Philippe
& de celle de la Macédoine, Dans la f u i t e c e
corps fut augmenté, mais il retint toujours lé
.nom de phalange macédonienne , qui le dif-
tinguoit des autres troupes qui compofoient
l’armée 3 & nous allons voir ce corps , fous
Alexandre , contribuer à fes victoires & aux progrès
de la fcience de h guerre, dans cette époque
qui peut être regardée comme la plus brillante
de la taClique grecque.
Alexandre. Philippe avoit affervi la Grèce,
& projettôit de pouffer fes conquêtes en A f ie ,
lorfqu’ il fut affaffiné. Les Grecs crurent voir
dans cet événement le moment de fecouer le
joug 3 mais Alexandre , vainqueur des Barbares
qui avoient aufli voulu fe fouftraire à fa nouvelle
domination,le fut bientôt après des Grecs,
& s’occupa uniquement enfuite à exécuter les
projets de fon père contre l’empire des Perfes.
Pour en venir à bout, il part avec trente mille
hommes d’infanterie , cinq mille chevaux ,
foixante & dix talens, & des vivres pour un
mois. Après avoir gagné la bataille dTffus , il
parcourt, pour ainfi dire , la Syrie, traverfe
l’ Egypte , y bâtit Alexandrie , & vient en Affy-
rie pour y combattre Darius qu’il, rencontre à
Arbelles , où il lui livra cette bataille fi fa-
meufe dans les faites militaires.
, Bataille d*Arbelles. IIe. d ispo sitio n .
Des hauteurs où il étoit campé Alexandre examina
le terrein, il médita enfuite fes difpofitions
, & en inftruifit fes généraux.
Après avoir formé une première ligne de fa,
phalange &c des agirafpides, il en compofa une
fécondé de l’ infanterie étrangère , avec ordre
de faire front en queue , au cas que l ’on feroit
tourné 3 à la gauche il plaça la cavalerie des alliés
& les ThelTaliens qui fermoient la ligne. A la
droite, il plaça les compagnies royales , renforcées
des troupes de fa garde & de quelques
autres troupes d’élite. A côté & devant les compagnies
royales , il plaça un corps d’infanterie
légère 3 & comme il vouloit attaquer obliquement
par la droite , il la renforça de deux corps
de cavalerie , placés directement l’un devant
l’autre, & en avant du corps d’infanterie légère
qui fermoit la ligne 3 il mit auffi à l ’aile
gauche , derrière la cavalerie qui la fermoit, un
corps de cavalerie en potence , & en avant un
corps de cavalerie grecque , afin de s’oppofer
aux ennemis qui voudroient le tourner:
Après avoir recommandé à fes généraux de
faire garder aux troupes inv profond filence &
de jetter des cris à propos , Alexandre , au lieu
d’ aller de front aux ennemis, tira vers fa droite
en marchant par fon flanc, de façon qu’ il avan-
çoit fur la gauche des Perfes , en laiffànt la
fienne dans l’éloignement. Bientôt 1-aCtion fut
engagée, & finit par la défaite entière de T’armée
de Darius.
Ainfi dans cette journée mémorable Alexandre
fut mettie en pratique , 8c , pour ainfi dire, créer
même ce grand art de manoeuvrer devant T’enf-
nemi pour lui donner le change, le dépaffer
enfuite brufquement par de grandes évolutions,
& embraffer fou flanc par la formation même de
Tordre de bataille 5. où les troupes de l’armée
macédonienne exécutèrent avec la plus grande
régularité ce qui leur fut prefcrit, & firent recueillir
à Alexandre le fruit des inftruélions
qu’ il leur avoit données en Macédoine , ou ,
fous fes yeux , les généraux , les officiers & les
foldats s’étoient fait une étude des plus favantes
manoeuvres.
En effet, toute l’armée fe formant en oblique
pour attaquer une partie de la ligne ennemie ,
d’autres obliques à l’extrémité de .chaque aile
deftinés à foutent la cavalerie ou à dépaffer l’ennemi
; des quarts de converfion ordoi nés pour
prendre -l’ennemi en flanc 3 une fécondé ligne
derrière fa phalange , afin de s’oppofer aux attaques
à dos & à flanc qui étoient à cramdre ,
ayant affaire à un ennemi autant fupériair en
nombre. Ces dépîoiemens fublimes , au moyen