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X du reglement pour le fervice de l'infanterie en
campagne.
•BLAME. Punition militaire. La punition du
blâme' confille en une corre&ion verbale, prononcée
contre l’accufé.
Les raifons qui nous ont engagé à placer l’admonition
au rang des punitions militaires , nous
o n t auffi décidé à y mettre le blâme. Voyei A d m
o n i t i o n j mais le blâme devroit être placé vers
les degrés les plus élevés de l’échelle des peines ,
car H porte l'infamie avec lu i, & tout homme déclaré
infâme doit être banni des armées. Ainfi le
blâme devroit toujours précéder le renvoij il devroit
être prononcé avec plus d’appareil quel'admonition,
etre accompagné de quelque cérémonie humiliante
: parlons en même-tems aux yeux & aux oreilles
ces hommes , ce n’eft qu’en agiffant ainfî, que
nous ferons fur eux des impreffions vives & profondes.
C ’eft principalement avec les officiers & les '
bas-officiers que le blâme pourroit être mis en
ufage; ils confervent dans le crime, & même
dans la baffeffe , un certain amour-propre, une
vanité qui les rend fenfibles aux punitions mo-
* a puHÎtions étant d’ailleurs plutôt
deftinees pour ceux que l’on conferve , que
pour ceux que l’on renvoie, plus le blâme k ra
nweux , plus fon effet fera grand de certain. Voyez
D é g r a d a t i o n .
BLASPHÉMÉ. Par les ordonnances que le
maréchal de BrifTac établit dans l’armée qu’il
commandoît en Piémont, on puniffoit le premier
blafphême par le chevauchage du canon.Voyeç C a n
o n j & le fécond, en faifant percer la langue
du coupable.
Deux ordonnances du roi , une du i o mai
i 68j , une du premier juillet 1717 , ont défendu
depuis aux foldats de jurer & de blafpkémer Je
faint nom. de D ie u , de la fainte Vierge & des
faims, à peine d’avoir la langue percée d’un fer
chaud.
j Toutes les réflexions fages qu’ont faites les
écrivains qui ont parlé de la peine prononcée
contre les citoyens blasphémateurs, étant applicables
aux militaires qui profèrent des blafphêmes,
nous nous contenterons d’indiquer les ouvrages
dans lefquels ces réflexions font confîgnées. Voyez
dans le di&ionnaire de jurifprudence , la fin de 1 article Blasphème. Voye% les oeuvres de M. de
Voltaire, édition de Baskerville, tome 19 , p. 210
& fuiyantes, 298 & fuivantes; tome 50, page
3 i j . Vi>ytf fur-tout dans la bibliothèque de
1 homme d'Etat & du citoyen, ü 'aitide B l a s -
iH lM Ï, „ '
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| t-aifler dans le code pénal, qu'on lit ou qu'on
doit lue tres-fouvent au foldat, l'énoncé d'une
defenfe qu il viole toujours impunément, n'eft-ce
pas courir le rifque d'avilir ou du moins d'af-
toiblir Je relie des articles qui y font contenus ?
BLESSÉS. Le mot bUJfés s'emploie fubftantive-
ment, pour defigner les hommes qui ont reçu
quelque bleffure à la guerre.
Quand on a lu les différens ouvrages qui traitent
ne la grandeur & de la décadence des Romains
on a une rdee nette de la plus grande partie deî
carnes qui ont procuré à ce peuple des conquêtes
aufli valtes que rapides ; il en eft cependant une
que 1 on ne connote pas encore, 8c qui étoit
pourtant bien digne de fixer les regards des
oblervateurs : je veux parler des foins tendres
oc empreiles que ce peuple prodiguoit à ceux
de les guerriers qui avoient été bkjfés dans les
combats. Les Romains tenoient plus de comme
aux chefs de lelirs armees de la confervacion
a un citoyen -, d un fimpie légionnaire, que de
la mort de plufieurs foldats ennemis. C e ne fu t ,
m parce que Fabius Gruges avoit été battu par
les hamnites, ni parce qu'il avoit perdu trois
mille hommes dans l'aâion , que le fénat 8c le
peuple le rappellerait unanimement, & voulu-
rent le dépofer par un décret public ; Rome avoit
elluye des défaites plus confidérables & plus fan-
glantes que celles-là, fans fonger à punir les généraux
a qui die les pouvoir attribuer ; mais ce
rut parce que Fabius avoit négligé de faire donner
aux bkjfés les fecours qu'ils ont droit d'attendre,
& que Ja république vouloit qu'on leur
donnât. Ces memes romains furent meilleur gré
a lrajan des foins qu'il prodiguoit à fes foldats
bicJJ's I que des vteftoires qu'il remporta ; ils le
tournent davantage parce qu’il avoir déchiré fes
Habits ahn de fournir aux légionnaires de quoi
bander leurs plaies, que parce qu'il avoit recule
bornes de l'empire.
Tous les hommes que le fort à placés au rang
de fujets font trop mtérefles à ce que lès hommes
eleves en dignité adoptent les principes des Romains
pour ne point chercher à rendre ces principes
generaux & à leur donner de la force
foit en les répétant fouvent, foit en les exaltant
avec confiance j aufli les écrivains blâment-ils
les fouverains , m qui quoique pénétrés des fèn-
timens de l'humanité la plus tendre n'ont pas fu
fe faire valoir eux mêmes, en faifant aux hommès
qui ont ete bkjfés à leur lèrvice , cet accueil-prévenant
qui confole la'nature humaine, 8c qui
eft leur première récompenfe. » ( Voltaire , éloge
funèbre de Louis X V . ) Aufli les peuples demandent
ils toujours compte aux généraux des hommes
morts des fuites d? leurs blefliires. Le chef, d mis aimée, que fes vîftoiies ont rendu iUultie,
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avant perdu, après une affaire, la plupart des
foldats qui avoient été bleJfes dans 1 aélion, entendit
un grand nombre de voix lu. reprocher
hautement qu’il avoit donne ordre de laifïer ou
id e faire mourir tous ceux q u i, ne pouvant point
; continuer leurs fervices , deviendraient a charge
à l’Etat : les hommes fenfés n ajoutèrent point
■ foi à ce conte, auffi a.bfurde qu affreux } mais I comme la claffe des hommes fenfes eft peu nom-
breufe , & comme c’èft le peuple qui rait d abord
I la renommée. cette calomnie a terni, ou du moins
Mais les chefs des nations & ceux des armées
font-ils moins intéreffés que le relie des citoyens
& des guerriers à ce que les blejfés reçoivent les
fecours les plus empreffés & les plus tendres ?
N o n , fans doute} ces fecours confervent beaucou
p d’hommes d ’une valeur éprouvée, qui au-
roient, félon les apparences, péri des fuites de
i leurs; bleffures : ces foins augmentent la volonté
de toy£ les guerriers, parce qu’ils rendent, à leurs
yeux , les coups des ennemis moins funelles. Les
hommes font volontiers le facrifice de leur vie
à leur pays lorfqu’ il peut être utile j mais la
;'douleur qu’on pourroit leur épargner abat leur
courage j mais l’idée du délaiffement les révolte »
Jils craignent beaucoup plus la dureté, la négligence
, ou même l’inattention d’un officier de
fanté, d’un fimpie infirmier, qu'une mort prompte
fur le champ de bataille : ces foins pour les guerriers
blejfés, ces foins que la renommée s’empreffe
toujours .de publier , attirent d’ ailleurs à l’armée
.beaucoup d’hommes qui en auroient, fans doute,
été éloignés par des avis contraires ; ils concilient
encore aux généraux l’amour de leurs foldats
y & l’on fait que ce fentiment fuffit feul
quelquefois pour fixer la viétoire. Voye% A mour
du so ld a t . Ils fourniffent enfin aux gens de
lettres un fujet inépuifable d’ éloges, & contribuent
ainfi à l ’immortalité des chefs des armées.
On aura perdu depuis long-tems le fouvenir des
geftes d’Alexandre, & d’un grand nombre d’autres
généraux célèbres , qu’on fe fouviendra de
, leurs foins paternels pour leurs foldats blejfés.
Voye[ la quatrième feêiion de notre article C a p it
a in e î le paragraphe 20 de la quatrième Teélion
de notre article G énéral , & notre mot H um a nités
. Un général, qui prodigue à ceux de fes fol-
dàtfc qui ont été! blejfés, tous lés foins que l’hu-
manité exige , a donc déjà beaucoup fait pour
fa gloire.} il rt’ell cependant affuré de l’obtenir,’
qu’aptarit qu’il étend fon humanité jufques fur
Lies, foldats de j'ennemi, que" le fort des armes
.a mi;s eh ' fon pouvoir. Son intérêt propte, la
loi qes^ repréfai’lles , & la voix de l’humanité' *
. le lui commandent ' également. ‘ Voyez ^es hiots;
i P r is^oniér dé G üerre , RÉpkisAiLLÉ-s V iè
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cêutf que nous avons cités à la fin de l’alinéa précédent.
BLESSURE. On a donné particulièrement le
nom de bleffure à l’effet produi^fur le corps des
guerriers , par les atteintes des armes de l ’ennemi.
Quels font les principes qu’ un adminiflrateur
militaire doit adopter relativement aux bleffures ?
L’Etat doit, ce me femble} i° ; faire guérir à
fes dépens tous des hommes qui ont été bleffés
à fon fervice j 20. il doit donner des dédom-
magemens à tous ceux qui ont été grièvement
bleffé^ } 30. proportionner les dédommagemens
à la gravité dés bleffures} 4°* employer des de-
dommagemens analogues à la pofition fociale des
hommes qui ont été bleffés j j ° . enfin les fixer
par une loi pofitive.
UEtat doit faire guérir à fes dépens tous les
hommes blejfés a fon fervice : exiger en même
rems des hommes, dans les conflitutions militaires
modenes , le facrifice de leur vie, & celui
de leur fortune , c’efl leur demander beaucoup
trop } c’efl leur demander plus qu’il ne veulent*
& peut-être plus qu’ils ne peuvent donner : on
entend peu de guerriers regretter le fang qu’ils
ont verfé pour l’État, fe reffouvenir avec amertume
des bleffures qu’ils ont reçues} mais on les
entend prefque tous gémir fur les dépenfes qu’ils
ont été obligés de faire, pour fe tranfporter
aux endroits où la nature a placé, dans des boues ou
des eaux minérales, la guérifon de la plupart
des bleffures reçues à la guerre : on donne quelque
fois pour cet objet aux officiers bleffés une gratification
de quatre ou cinq cents livres > c’eft
bien quelque chofe que cela , mais c en ’eft point
affez, car ce n’efl pas tout. Le gouvernement
qui ne s’impofera pas la loi de fournir, fans
fafte, mais auffi fans léfine, à toutes les dépenfes
qu’occafionne la guérifon des bleffures reçues à
la guerre , verra nécefïàirement bientôt le nombre
de fes défenfeurs diminuer, ou du moins leut
courage & leur volonté s’ affoiblir.
, L'Etat doit des dédommagemens a tous les militaires
griévemént blejfés : je dis des dédommagements
& non des récompenfes, parce qu’on
ne doit des récompenfes qu’aux allions grandes,
utiles & à l’exécution defquelles la volonté a
eu part ? & l’on fait bien que les bleffures ne
peuvent être mifes dans cette claffe : j’ ajoute qu’on
ne doit des dédommagemens qu’aux perfonnes
qui ont reçues des bleffures graves : fi l’on don-
noit des dédommagemens aux militaires qui n’au-
roient reçu que de légères contufions, de petites
égratignures , on épuiferoit avec promptitude
le fïfc & le tréfor des grâces , & l’on
fe mettroit dans î’impoffibilité de dédommager
ceux qui auroient réellement mérité de recevoir
dés dédommagemens 5 tels font les guerriers qui