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Quel eft le général qui o feroit combattre
ayant une place de guerre derrière lui , s'il
n'en étoir pas le maître > combien au contraire
©n ofera davantage avec ce fecours.
Les places de guerre déterminent donc tous
.les mouvemens des armées , foit à l'avantage
des puiffances qui les polie dent, foit au defa-
vantage de celles qui en font privées.
Sans doute que les places de guerre coûtent
à entretenir & à conrtruire i auill ne, faut-il
avoir que celles qui font absolument nécefiaires,
les mieux placées & les mieux tortillées : alors
feuement on eft affuré qu’à la guerre elles
défendront le pays du feu 8c du fer deftru.éteur
de l'ennemi.
Après ces idées préliminaires que nous avons
cru importantes dans un moment où la France,
vient de reculer fes limites, dans un montent
où il faut décider enfin quelles font les -places
de guerre qu'il faut détruire , quelles font celles
qu'il faut conftruire , où il faut les placer , &
quel fyftême il faut préférer pour les rendre
fupérieures dans leur défenfe à l'attaque qui
jufqu'à préfent à acquis une ïï grande fupério- .
rite. Sans nous permettre d’entrer dans de plus
: grands détails : mais convaincus qu'on aura la
fageffe- ëe donner la préférence à la fort fication .
perpendiculaire ,. foit pour les conftrucb'ons
nouvelles , fok pour les réparations ; nous présumerons
qu'il fufarok de cinquante forts ou
places fortes ,- ( non compris les places ou forts
fur les côtes ) pour' affurer à la France une dé-
ferfive infiniment irhpofante ; & d’après ces idées,
nous avons cru devoir borner à dix-huit mille
citoyens tirés dés départemens de l'intérieur ,
le nombre de ceux qui cômpoferoient le fond
des deux cents quarante compagnies formant
trente bataillons de garnifon, qui peut-être
pourroient fuffire , attendu qu'aux dix-huit
mille jeunes gens tirés annuellement des diffé-
rens points de l'inferieur , on pourroit en adjoindre
momentanément dans chaque compagnie
autant qu'on le croiroit néce flaire-, toujours
p; is dans l’âge de vingt-un ans , mais
dans les forts ou places fortes , ou dans1 les
communes * fur les frontières feulement, comme
auxiliaires, & pendant le jour ou le moment
exigé pour le fervice de la place, ou l'exercice
d’inftrucfcion , regardant comme infiniment important
, de deftiner aux réparations & à ;la
défenfe de ces places , les hommes qui font les
p'us intéreffes à leur confervatîort ; puifqn'en
u ms de guerre elles feroient leuf refuge & les
mettrok à même de repouffer vigoureûfement
Fennemi. D’ailleurs , dans le fyftême du général
Monialembert 3. la défenfe des places aifiégées
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étant fondée fur le nombre des bouches à feu
fupérieur à celui de l'afiiégeant, 8c toutes pouvant
être fervies à couvert 8c fans aucun danger
pour le canonnier j tout homme fera fufceptible
de pouvoir être employé à la defenfe des places;
& en prenant la précaution d'exercer au fervice
du canon 8c aux connoiffances relatives à la
dé fente des places , non-feulement les jeunes
gens de l'intérieur qui fe trouveroient en garnifon
, & auxquels on donneroit des notions
militaires toujours utiles , mais- encore 8c , de
préférence tous les jeunes citoyens employés
comme auxiliaires au fervice des forts ou places
fortifiées; de maniéré que la majeure pattie des
jeunes gens dé" vingt-un ans, habitant fur les
frontières , 8c à portée des places fortes, étant
exercés chaque année à leur défenfe , bientôt
il y auroit prefque autant de défenfeurs qui
leur feroient affurés , qu’il y auroit de citoyens
en état de porter les armes. C'eft-là auftl où fe
borneraient les exercices de liège ,. d’autant
qu’en inûruifant fur la défenfe ,. rien ne feroit
plus naturel 8c plus facile que de donner des
notions fur l’attaque.
Mais après avoir familiarifé dans les camps le
foldac avec ,des repréfentations fimulées de, tout
ce qu’il doit faire à la guerre, on pourroit
s’attacher à fortifier 8c à affouplir fon corps
en profitant des momens & des intervalles né-
cefi!lires qui fe trouveroient dans- la journée
avant & après les manoeuvres > pour les; faire
livrer à des jeux qui entretiennent Ja force &
la gaîté' ; ils acquerroient par ce moyen plus
d’adreffe 8c de Force pour porter des fardeaux ,
remuer la terre, faire des marches forcées &
travailler avec adrtffe ; par ce moyen , on
banniroit des camps la mo'.leffe 8c l’ennui ,
& l’on -* préparerort de- longue main-, pour
la défenfe'de l’Etàt ,. des foldats inftruits &
propres à tout ce à quoi on voudrait les employer.
Cependant pour ne rien l'ai fier à délirer, fur
ce qui peut avoir des rapports avec la guerre,
on s'otcuperoit dans jes camps d'inftmétion de
tout ce qui tient à la fubfilbnce des troupes,
& l'on adopterait une méthode moins coûieufe
8c moins jffujettiffmte que celle fuivie de nos
jours ; point de foupe, moins de pain , plus de
viande 8c de légumes ; on fe ferviroit des fours
& des moulins propofës par M. de Launai,
dans Ton traité des fubfiftances ; on, .accoutu-
meroit le foldat, un jour à avoir dés rations
moins fortes , un autre jour à avoir du bifcuit;
quelquefois .on ne lui donnerait que de la farine
de riz ou de froment , qu'il feroit oblige
de préparer lui-même ; quelquefois il n'auroit
pour fa nourriture, que du pain & de la viande
froide > enfin h on varierait fouvent afin d’accou-
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t u m e r l e s t r o u p e s à n e p lu s r i e n t r o u v e r d e d i f f i c
i l e à la g u e r r e ( 1 ) .
Il ne feroit pas moins effentiel d’obliger les
officiers à la même habitude : on feroit des
marches forcées , à la fuite defquelles on ne
fouffriroit que les vivandiers des compagnies ,
& Pon ne permettroit qu’un domeftiqu'e à un
ou même plufieurs offiriers. Les officiers généraux,
non plus que les1 colonels, ne pourroient
jamais donner à manger pendant le tems qu'on
camper oit ; on accoutumer oit par là les officiers
à la frugalité & à la patience, ainfi que les
foldats ; on les entretiendrait dans les principes
de force 8c d'adreffe qu’ils auraient reçu
(1) Par ces moyens auxquels on fe borne, parce
qu’il eft aifé de voir tous ceux que l’on pourroit
fe procurer, les vivres feroient infiniment moins
coûteux pendant la guerre, & les généraux pourroient
agir plus vivement, plus légèrement & plus
feerètement.
On veut une, compagnie des vivres pendant la
paix ; pour en avoir une , dit-on, pendant la guerre ;
mais comment la compagnie qui fert pendant la
paix , -acquiert-elle des connoiffances pour le fer-,
vice en tems de guerre ? Les vivriers en tems de
paix , ne font autre chofe que des boulangers,
qui faveur la quantité de pain qu’ils doivent fournir
à point nommé , & qui en conféquence ont
foin d’avoir pour cet objet, tous les. grains ne-
ceffaires ; & plus fouvent encore fouftraitent avec
des, hqulangers de profelTion ; mais-.comme il ny
a point de concurrence , & que le foldat eft oblige,
de, prendre le pain qu’on ,lui donne, il arrive que
prefque toujôufs le pain eft mauvais, que le poids
n’y eft jamais, parce qu’on le livre chaud & qu a-
lors l’èau que l’on y emploie n’a pas eu le tems
de s’ëfluÿer, & ne fait qu’un poids faétice pour le
moment ,, qui devient un déchet dès que le pain
eft froid. D’ailleurs, rien n’eft plus fulceptible de
couvrir les accaparemens & les monopoles que les
compagnies chargées de fournitures confiderablès.
Enfin je le répète, le .vivrier fixé, à telle ou telle ;
ville; n’apprend là, que la façon dont doit être ’
fait & diftribué le pain ; mais il ne s’inftruit pas
dés moyens que l’on aura dans tel ou tel endroit
où-l’on fera la guerre, foit pour y faire parvenir
les grains de chez foi, foit pour les tirer des
alliés, foit pour les avoir de chez l’ennemi; foit
enfin pour profiter de ceux qui pourroient fe trouver
dans les endroits où 1 armée pourra ou devra camper
plus ou moins’ long-tems; & jamais on ne pourra
trouver une véritable analogie entre le fervice pai-
fibie monotone & commun des vivres en tems
de paix , & celui pénible plein d’intelligence dangereux,
& qui exige autant de précautions & de
connoiffances pendant la guerre.
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dans leur commune 5 ces qualités font vraiment
celles qui conftituent un homme de guerre ;
mais on les a trop négligées, 8c on les a même
tournées en ridicule,
Ainfi les fêtes & les délaffemens des jeunes
citoyens feroient déformais confacrés à 1 exercice
des armes.
Six camps d'exercice, à des diftances convenables
des frontières, recevaient fucceffiyement
les jeunes citoyens de vingt-un ans, deftinés apres
les exercices à relever les garnirons, & ceux de
vingt-trois , défignés pour remplir les cadres.
L à , ainfi que nous l’avons fait appercsvoîr ,
ils feroient exercés à la tactique élémentaire , &
à la grande ta&ique.
On verroit ainfi ces maffes énormes comme
les flots d’un vafte océan , s’ébranler, fe. groffir
fe renouveller fans ceffe, & faire paür Jes ennemis
qui oferoiept fonger un moment à troubler
la tranquillité d’une grande nation , continuellement
fous les armes.
Et après un certain nombre d'années.3 la majeure
partie des jeunes citoyens composant la
fécondé clafle, auroit été exercée & aüioir pris
fur le terrain de grandes idées pratiques de l'art
de la guerre.
§• v i l .
Quelle fomme faut-il employer pendant' la paix
pour Ventretien de la force publique ?
C'eft avec taifon , que même pendant la paix ,
le département de la guerre doit être regardé
comme le plus difpsndieux de tous. Il eft en
effet impoffible que la république françaife entourée
de rois puiffans qui ont conftamment fur
pied des armées formidables , poffédant des colonies
nombreufes , devant protéger deux républiques
voifines naiffantes & foibles, ayant une
très-grande étendue de cotes & de frontières a
garder , beaucoup de places fortes, demagafins&
d’arfenaux à conferver ; il eft impoffible , dffons-
nous , que la république n’entretienne pas conf-
tammenc des forces 8c des moyens capables d’en
impofer à des voifins haineux & jaloux , & de
fe faire' rechercher & refpe&er par le refte de
I l’Europe. Ainfi même , pendant la paix , 8c
I quelque fyftême militaire , politique 8c admi- 1 niftratif que l’on adopte , les dépenfes du dé-
I partement de la guerre feront tou;ours tres-
i fortes , 8c même effrayantes pour tout autre que
I le peuple français.
1 Après cette première vérité très-iqcontef-
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