armes défenfives des Romains une idée bien faufte;
elles étoient de métal, mais extrêmement minces;
ils ne leur avoient donné que l'épaiffeur indifpen-
fablerpour rendre nul l'effet des flèches & des
pierres. Les Romains pouvoient d'ailleurs porter
des armes défenfives , parce qu'ils ne faifoient que
des courfes peu confidérables, parce que leurs
marches étoient plus promptes que les-nôtres,
& qu'ils fuivoient toujours des chemins fermes
& unis. C e n'eft donc ni notre manque de force,
ni notre mollefte qui nous ont obligés à bannir
les> armes défenfives, mais l ’împoffibilité d’en fabriquer
qui puifient nous être réellemment utiles.
Des armes défenfives- devroient, pour être utiles
, être à l’épreuve du fufîl, car fi elles ne l’é-
toient pas , ce feroit, comme le remarque M.
Mauvillon : ( EJfai fur l'influence de la poudre a.
canon fur la guerre moderne. ) « çe feroit la couverture
la plus perfide, puifqu'eile ne ferviroient
qu'à ouvrir , déchirer , envenimer la plaie , en
y portant les éclats de fon fer , ou du moins en
ÿ caufant une meurtrifiure plus cruelle que la
plaie elle-même, m Mais pour être à l'épreuve , il
faudrait que les armes fufient suffi lourdes que
les anciennes cuirafies : mais puifque les cuirafies
ont été abandonnées par la cavalerie à caufe de
leur poids , à plus forte raifon doivent - elles*
l'être par l'infanterie. A cela on répliquera deux
çhofes , dit encore l ’auteur eftimable que nous
venons de citer, & qui nous a fourni une grande
partie de ce paragraphe. » Quand même on ne
pourroit pas , me dira-t-on, donner au fantaffin
une armure plus grande ou entièrement à l'épreuve,
ce feroit toujours quelque chofe de-lui
en donner une comme à nos cuiraffiers. Car n'a-
t on pas fou vent vu que le plaftron du cavalier,
& même le hauffe-col de l'officier, ont arrêté des
balles, dont ceux qui les portoient auroient été
blefies ? » Ces cas ont exifté fans doute; mais
quelles balles étoient-ce ? Mortes , 8c fur la fin
de leurs courfes , le moindre obftacle fuffifoit
pour les arrêter. C e ne font pas ces balles-la qui
font des blèflures fort à craindre , 8c contre lef-
quelles on doive prendre beaucoup de précaution.
En un mot , il faut que l'armure foit ab-
folument à l'épreuve pour être vraiment utile ; 8c
alors il eft queftion de favoir, fi le petit nombre
de blefiures, réellement dangereufes , dont un
plaftron , ou même un corcelet, pourroient garantir,
valent la peine d'appefaotir une. armée
dans tousfes mouvemens, comme on feroit en donnant
un nouveau poids de trente à quarante liv.
au moins , à porter à chaque foldat ; car il faut
obferver qu'une armée, avec une armure fembla-
ble , feroit appefantie dans toutes fes manoeuvres
, dans la même proportion que le feroit
chaque homme. Mais en fuppofant même qu’un
fouverain voulu?: , pour ménager le fang de fes
foldats, courir tous les rifques de cet appefan-
siiTemeot, & leur donner de. telles armes défend
fives, il eft très-douteux qu'il trouvât fes foldats
difpofes à les porter. L ’homme calcule tout, Se
meme le danger. Pour un centième de péril de
plus, 8c c'eit porter les chofes bien haut, le
foldat ne voudra pas fe charger d’un poids intolérable
pendant toute une campagne ; d'un poids,
qui par la fatigue, réchauffement, le mal-aife de
toute efpèce l'expoferoit au danger beaucoup
plus grand & plus certain de mourir de maladie ;
c eft ainfî que les hommes pefant tacitement
le danger 8c la peine , ne fe foumettent à
celle - ci qu'autant qu’ elle ne furpafle pas l'autre.
C'eft ce calcul qui a fait rejetter toutes les armes
défenfives pour l'infanterie dans toute l'Europe,
& pour la cavalerie dans quelques fervices ; ce
qui eft d'autant plus raifonnable , que par le peu
d'attention qu’on fait à la fabrique du plaftron ,
il n’eft pfefque‘plus qu'un ornement incommode.
Là-defifus on dira encore, 8c ce fera la fécondé
objection : « Que voilà le mal ; que les hommes
font trop foibles & trop parefleux pour vouloir
porter des armes défenfives.jjOn fera intervenir les
Grecs, 8c fur-tout les Romains , pour prouverque
les hommes , lorfqu'ils font endurcis au travail ,
peuvent porter des poids bien plus confidérableSé
’ A cela je répondrai, que quand cela feroit, quand
le luxe, la mollefle, ou je ne fais quelles caufes,
auroient. rendu les hommes moins capables de
foutenir la fatigue , 8c leur auroient ôté , ou la
force ou l’envie de porter de grands fardeaux, il
faut/les prendre comme ils fon t, & s'en.fervir
en conféquence. Car vouloir réformer lefpèce
humaine , c'eft un objet que des écrivains militaires
devroient ne pas former. »
» Je conclus detout ceci, que non-feulement
l ’invention de lai poudre à canon eft la vraie caufe
de l'abolition des armes défenfives , mais encore
une caufe jufte 8c néceffaire. Il ne me paraît-pas
que l’on puifle raifonnablement rien changer à
notre façon d’armer nos troupes , tant que la
poudre à canon formera la bafe de notre art militaire
-, & fi jamais celle-ci fe voit obligée de céder
la place à quelque autre invention, ce fera, fans
doute^, à une plus meurtrière. Alors on aura ,
peut-être , des armes.offenfives d’ une autre efpèce
8c d’une autre figure, mais il fera encore plus
impoffible de faire des armes défenfives capables
de leur réfifter. Ainfî, il me femble que celles-ci
ont été ehafifées à jamais par la poudre, m
Q u o i q u 'i l f o it d é m o n tr é , p a r c e q u e n o u s v e n
o n s d e tra n f e r ir e , q u 'il e ft im p o ffib le d e fo n g e r
à c o u v rir le fo ld a t d'armes d é fe n fiv e s , 8c le g a r
a n tir d e s c o u p s d e Varme à f e u , n e d o it- o n p a s
c h e r c h e r i m e ttr e fa t ê te 8 c fe s é p a u le s à l’a b ri.
de‘s c o u p s d e Varme b la n c h e ? o u i , fa n s d o u t e , o n
l e d o i t , 8c t o u t e p u ifla n c é q u i n e s 'o c c u p e ,p o in t
d e c e t o b je t e ft b lâ m a b le .. Voyez C a s q u e 8c É p a 'çh
L£TT E$*
Quoique les armes défenfives foient inutiles
pour notre infanterie de ligne , nous ne devons
pas moins en raffembler dans nos arfenaux ; f .
en avoir à la fuite de nos armées. Elles font ne-
ceflaires dans les villes affiégées, pour les hommes
chargés de défendre les brèches , pour les fenti-
nelles placées dans des endroits découverts par
l’ennemi, en un mot pour tous les hommes portes
dans des endroits commandés par le fufil. Voyez
C o m m a n d e m e n t . Elles font néceflaires dans
l’armée affiégeante pour couvrir les hommes qui
vont reconnoître les brèches , 8c pour ceux qui
protègent les travailleurs; on pourroit en donner
encore à ceux qui forment la tête de l’afifaut, qui
montent les premiers à l’efcalade , ou qui fervent,
des batteries découvertes , ou des batteries: à barbette.
Obfervons que dans toutes les circonftan-
ces pour lefguelles nous avons demandé des armes
défenfives , ceux à qui elles font deftinées n’ont
qu’un petit nombre de mouvemens à faire , 8c
qu’ils peuvent par conféquent fe couvrir d’armes
alfez épaifies pour être à l’épreuve des armes de
portée moyenne.
Armes, hommes d’armes. On donnoit jadis le nom
d’hommes A'armes au cavalier armé de toutes pièces
; on les appella enfuite gendarmes. Voyeç
G e n d a r m e . ,
Armes y pafifer par les armes , punition militaire.
Paffer un militaire par les armes , c’eit lé
faire mourir à coups de fufils, d’après le jugement
d'un confeil de guerre.
Cette punition étoit infligée autrefois pour une
infinité de fautes qui paroiftent d’une gravité 8c
d’une nature bien différentes. Le foldat que le
fommeil avoit furpris pendant qu'il étoit en faction
, 8c celui qui avoit dès long - tems choifî
pour déferrer le moment où il feroit en faériotf,
fubiflbient tous les deux cette même peine : quoiqu’on
ait déjà fait éprouver quelques changemens
heureux à notre code militaire pénal , il n'en
offre pas moins encore un grand nombre d’im-
perfeél-ions. Voyez M o r t , P e i n e d e m o r t .
Armes , fufpenfion d'armes ,* c ’eft la ceflation
de toutes fortes d’hoftilités entre deux puiffances
qui font en guerre. Voyez S u s p e n s i o n d ’a r m
e s 8c T r ê v e ,
Aux armes ; c r i d e g u e rre p a r le g u e l o n a v e rtit
u n e tro u p e d e g e n s d e g u e rre q u ’e lle d o it p r e n d
re les armes. Voyez C O N S IG N E 8c H O N N E U R S
M IL IT A IR E S .
Armes , prendre les armes. On dit qu'un régiment
prendra les armes à telle heure, pour dire
qu'il fe montrera armé, à telle heure,hors de fon
quartier, ou fur le front de bandière de fon
camp.
Armes y mettre bas les armes. On fe fert de cette
expreffion pour défigner Faétion par laquelle on
s’avoue vaincu, 8c l'on pofe les armes»
Arrhes , maniement des armes. Voyez M a n i e m
e n t .
A RM O IR IE S , récompenfe militaire. Le dictionnaire
confacré à l'art du blafon renferme tous
les détails relatifs aux armoiries , à leur inftitution ,
à leurs différences , 8cc. C e n'eft donc point traiter
de ces objets, que nous confacrons cet article,
au mot armoiries , mais pour examiner s'il eft bon
de les placer parmi les récompenfes militaires
françoifes.
Plufîeurs raifons doivent frire placer les armoi-
ries au rang des récompenfes militaires françb-ifes*
Il faut promettre 8c accorder aux hommes les
récompenfes qu'ils prifént, qu’ils aiment le plus.
Les François prifent beaucoup les récompenfes
q u i, vifibles à tous les yeux , difent à la nation ,
voilà un citoyen qui s'eft rendu recommandable
par des hauts faits ou par des vertus guerrières ;
ils défirent , comme le refte des hommes , que
le fouvenir de leur vie foit confervé, 8c que leurs
defeendans participent aux récompenfes qu'ils ont
obtenues; o r , comme les armoiries rempliflent
ce triple objet, elles font faites pour être adoptées.
Il faut que les récompenfes accordées â un citoyen
ne puifient fous aucun afpeét tourner au
détriment du refte de la fociété ; or , les armoiries,
ne coûtent rien à l'E tat, ne donnent *à ceux
qui les obtiennent aucune prérogative à charge
a leurs concitoyens , ne peuvent même donner
naifîance à aucun vice , donc elles méritent d'être
placées au rang des récompenfes militaires françoifes.
Les^ armoiries ont encore cet avantage, qu'avec
peu d'art on peut les varier à l ’infini, 8c proportionner
toujours la récompenfe à l'aétion. Les
armoiries méritent enfin d'entrer dans notre code
triomphal, parce qu'il eft inutile de créer des
récompenfes nouvelles quand il en exifte d'anciennes
dont la bonté eft reconnue , 8c l ’on fait
que plufîeurs de nos rois 8c plufîeurs autres fou-
verains , ont fait avec fuccès ufage des armoiries
comme récompenfes militaires. Tranfcrivons quelques
uns des exemples de ce genre dont l'hiftoire
a confervé la mémoire ; il elt bonde rappeller,
toutes les fois qu'on le p eut, 8c le fouvenir des
actions glorieufes 8c celui des récompenfes qu'elles
ont obtenues de la reconnoiffance des peuples 8c
de celle de- leurs chefs.
Philippe - Augufte voulut que la maifon de
Montmorenci portât.feize aiglons dans fes armes ,
parce- que Matthieu II. de Montmorenci avoit
pris fur l'ennemi .feize étendards à la bataille de
Bouvines.
Le même prince accorda à la maifon d’Eftaing
le droit de porter les armoiries de France. & de