
Quelques-uns ont donné à l’angle flanqué ƒ , 1
(3) plus ou moins de degrés félon les proportions
qu*ils ont jugées, néceflaires à la l i g n e s ,
que 1 on appelle la perpendiculaire > d’autres
le font attachés à combiner de toutes les façons
poflibles les dimenfions des faces, des flancs
& des courtines , allongeant & raccourciflant les
unes ou les autres félon leur gré ; mais les
flancs fur-tout ont donné lieu aux differta-
tîons les plus étendues & aux difputes les plus
vives.
Errard plaçoit fon flanc à la face g , h , (a.)
afin, difoit- il , de le dérober au canon de
l affiègeant. Mais s’il n’étoit que très-peu vu, il
voyoit aufli très-peu , ainfi il annulloit fon flanc
en^prétendant le cacher.
Le chevalier de Ville tira fon flanc g, i»
(5) perpendiculaire à la courtine, & il en devint
meilleur.
Mais le comte de Pagan trouvant avec raifon
que M. de Ville n’en avoir point affez fait ,
voulut que Ion flanc g, k 3 (6) fût perpendiculaire
à la ligne de défenfe/, k.
C etoit la véritable pofition du flanc , parce
que la défenfe perpendiculaire doit être regardée
comme la meilleure. On n’eftime les ouvrages
extérieurs placés devant le baftion &
la courtine , qu’autant qu’ils fe flanquent perpendiculairement
j & fi l’on a été obligé d’en
tolérer l’obliquité , c’eft que jufqa’ à préfent on
a regardé comme impoflible de donner des dé-
fenfesperpendiculaires à tous ces ouvrages.
La difpute devoit finir après les idées du
comte de Pagan ; mais on ne voulut pas s’en
tenir là. On prétendit que de tout fon flanc
le feul point k étoit perpendiculaire à la face,
que tous les autres points de la ligne du flanc
etoient ce que l’on appelle fichands; erfin l’on
o fa faire ce raifonnement : le feul point f de
l’angle flanqué étant le feul à confiderer , il
faut que le flanc foit placé de la façon la
plus avantageufe pour le défendre, comme fi
toute la largeur du fofle l ym , où fe fait le
pont pour fon paffage , n’ëtoit pas infiniment
plus eflentielle.
Lé maréchal de Vauban ofa adopter ce principe
, & fit faire à fon flanc g , u , .( 7 ) un
angle aigu avec la ligne de défenfe moins aiguë
cependant que celui g 3 i ( i d e m ) de M. de
Ville 5 il ne fon flanc p 3 q , ( idem ) concave
( 7 ) Planche Icre, fupplémenr, figure 5.
dans la vue de l’expofer moins au ricochet j
enfin il adopta l’ori Ion r , . ( ‘ dem ) déjà connu,
en facrifiant le tiers de fon flanc pour que les
deux autres tiers fulfent moins expofés aux
batteries dts afliégeans, & pour conferver une
feule pièce vers q 3 (idem) qui n’eft vue
d’aucune part de la campagne, parce quelle ne
peut voir que la face du baftion oppofé ; ob-
fervez cependant que cette pièce, ainfi que
toutes celles du flanc , peut étrç prife en rouage
, & démontée par le ricochet.
Pour prétendre enfuite à l’honneur de créer
un fyftême, chacun a. voulu ajouter ou retrancher
quelques toifes aux faces , aux flancs & aux
courtines.
Mais fi les différentes pofitîons des flancs ont
partagé les plus habiles ingénieurs, lesavantages
ou les défàvantages des féconds flancs n’ont pas
moins exercé leur plume.
On appelle fécond flanc la partie de la courtine
qui -peut défendre la face du baftion oppofé
, lorfque la ligne de défenfe aboutit à
quelque point de la courtine & non à fon
extrémité.
Ainfi la ligne de défenfe ƒ , c , ( 8 ) abou-
tiffant au point c fur la courtine,, la ligne n3 0
( idem ) de la courtine .s’appelle fécond flanc ,
parce qu’elle flanque obliquement la face a 3
( idem ) du baftion oppofé.
On a fait contre les féconds flancs deux objections
principales.
La première , qu’ ils défendoient très - obliquement
la face 3 qu’ ainfi leur valeur devoit
etre confidérée non pas félon l’étendue de la
ligne n3 c 3 (idem) mais feulement félon l'étendue
de la ligne n , o ( idem) ; d’où l’on voit
que cette objection n’en eft pas une , car la
ligne g 3 0 (idem) défend mieux le baftion dans
fa face que le flanc g , n ( idem ) puifqu’il eft
plus'étendu.
La fécondé, que pour fe procurer des féconds
flancs, il falloir rendre plus aigu l’angle
flanqué ƒ (idem). Mais comme l’ori eft convenu
que cet angle pou voit être depuis 60
jufqu'à 110--120 degrés fans inconvéniens , &
. que dans les poligônes au-déflus du pentagone,
on peut avoir des féconds flancs , fans que
l’angle flanqué foit moins de Co Réglés ; cette
( 8 ) Planche Ie ,e , fupplément, figure 8.
fécondé
fécondé objection ne vaut pas mieux que1 la
première, & l’on ne fait pas pourquoi dans
les principes adoptés on n’a pas fuivi plus généralement
cette méthode.
Le maréchal de Vauban voulant être auteur
d’un nouveau fyftême, n’imagina que des tours
baftionnées & des contregardes à flanc, qui ne
font que des baftions détachés & formant
une double enceinte i mais fes contregardes ne
couvrent point affez le rempart que l’on peut
également battre en brèche, dès que l’on eft
établi fur la crête du glacis. D’où il fuit que
le corps de la place étant ouvert, en même
tems que les brèches , aux contregardes, feront
praticables > il ne fera point néceffaire d’établir
des batteries fur la contregarde : pour ouvrir
le dernier rempart , il fuffira d’y étendre le
logement iufqu’aux flancs de droite & de gauche,
pour préparer l’affaut au corps de la place, à
quoi il eft vifible que les tours baftionnées ne
peuvent apporter aucun obftacle.
On peut v o ir , à ce fujet, ce que dit le chevalier
de Saint-Julien, dans fon architecture militaire.
Défenfe des remparts anciens depuis Vinvention de
ta poudre jufqu aux remparts baftionnés.
Nous avons déjà dit que la fortification des
anciens fe bornoit à une enceinte flanquée de
grofl’es tours , & précédée par un fofle. Les
murailles qui formoient l ’enceinte étoient des
murailles confidérables par leur épaifleur & leur
hauteur ; elles étoient quelquefois doubles &
triples dans certaines parties , fk elles furent
fufceptibles d’une très-grande défenfe, même
depuis l’invention de la poudre.
Tous les auteurs fixent l’époque de cette
invention au quatrième fiècle ( 1 ) , & comme
ce n’eft que vers le milieu du feizième fiècle
que les remparts baftionnés commencèrent à être
en ufage, il fuit 'que les anciens remparts ont
eu à réfifter aux efforts du canon , pendant
deux cents cinquante ans j & pendant cet efpace,
il y a eu plus de lièges levés qu’ il n’ y en a
eu depuis; au moins ces remparts apporrèrent-
ils toujours une réfiftance .aufli grande que celle
de nos enceintes baftionnées.
Conftantinople.
En 1453, Conftantinople attaquée par Maho-
X i ) On annonce une differtation du citoyen
Hermann, profeffeur à Strasbourg, dans laquelle il
d ém o n tre que la poudre à canon f a i f o i t partie des
fecrets des prêtres d’Egypte, qui la tenoierit de
Moïfe.
Art Milit. Suppl. Tome i y .
met TI, avec quatre cents mille hommes, quoiquè
très-mal défendue par Conftantin Dracofe avec
au plus cinq mille hommes, & battue dès hs
premiers jou rs , par une artillerie formidable
ne fut forcée qu’après deux mois de liège.
Belgrade.
Ce même Mahomet fe préfenta devant Belgrade,
en mai 145 6 avec les mêmes forces &
la même artillerie que devant Conftantinople ;
mais Hunniade défendit la place, & après trois
mois d’attaque-& plufieurs affauts , l’empereur
turc fut obligé de fe retirer en abandonnant
fon artillerie, & une partie de fes bagages.
Rhodes,
Le grand-vilîr Paléologue , le 23 mai T480,
après avoir ouvert les murailles de Rhodes , en
divers endroits par une artillerie formidable ;
après avoir livré plufieurs affauts , fut obligé
le 18 août, après avoir perdu la moitié de
fon armée, de lever lé fiège & de fe rembarquer.
Mety.
En i y j 2 , le duc de Guife fut afliégé dans
Metz par Charles-Quint. Metz n’avoit alors qu’une
fimple enceinte très-négligée, un fofle très-étroit
& comblé dans quelques endroits.
Le duc de Guife fit rafer les fauxbourgs St
élever plufieurs cavaliers au-dehors pour y placer
du canon ; on éleva des remparts derrière les
murs, on y conftiuifit de grands retranchemens.
La garnifon fut portée jufqu’à cinq mille
hommes de pied, & fept à huit cents chevaux.
La précaution qu’avoit eue le duc de Guife
de fe fortifier en dedans de fon enceinte, fut
feule la caufe dè fa belle défenfe 3 d’ où il réfulte
que l’ efpacé derrière les anciens remparts étant
vafte, de grands & bons retranchemens pou-
voient y être pratiqués, & fournir une vigoureufe
défenfe.
Après foixante-cinq jours d’inveftiture, & quarante
cinq depuis que les batteries avoient battu,
la place, l’empereur "leva le fiège.
Voilà donc une armée de plus de cent mille
hommes, ayant fait plufieurs brèches confidé-
rables dans des murailles anciennes , fe trouvant
toujours écartée par des retranchemens inattaquables
derrière toutes ces brèches, & ne Tachant
comment pouvoir donner l’ affaut.
Il eft donc vrai que d’anciens remparts de places
R r r