
que l’infanterie , dans les points découverts ,
foit pour aller plus, promptement donner des avis
-au camp.
M. de Saint-Germiin dans fes mémoires ,
parle des avantages de compofer chaque jour
toutes les grandes gardes du même . régiment
ou de la même brigade, & de le s faire fur-
veiller par les officiers généraux attachés à ces
troupes, afin qu’én cas de deiordre on fâche
à quoi s’en prendre , ce qui eft fouyent une
caufe. pour les empêcher.
* GRAND. Dans la démocratie il n’y a de
grands que les magiftrats, ou plutôt il n'y a de
grands que le peuple. Les magiftrats ne font
grands que par le peuple & pour le peuple,
c’eft fon pouvoir, fa dignité, fa majelté qu’il
leur confie : de-là vient que dans les republiques
bien conftituées, on faifoit un crime autrefois
de chercher à acquérir une autorité perfonnelle.
Les généraux d’armée n’étoient grands qu’à la
tête des armées, leur autorité étoit celle de
la difeipiine, ils la dépofoient en même tems
que le foldat quittoit les armes, & la paix les
rendoit égaux.
Il eft de l’eftence de la démocratie, que les
grandeurs foient éleCtrices , & que perfonne n’en
foit exclu par état.
Dans les gouvernemens républicains, les grands
revêtus .de l’autorité, l’exercent dans toute fa
force j dans le gouvernement monarchique, ils
l ’exercent quelquefois & ne la poffèdent jamais :
ç’eft par eux qu’elle pafle, ce n’eft point en
eux qu’elle réfide, ils en font comme les canaux,
mais le prince en ouvre & ferme la fource,
la divife en ruiffeaux , en mefure le volume , en
obferve & dirige le cours.
Dans le gouvernement defpotique, les grands font
les efclaves du tyran , & les tyrans des efclaves ,
également prêts à vendre l’Etat au prince, & le
prince à l’E tat, chef du peuple, dès qu’il fe
révolte, & fes oppreffeurs tant qu’il eft fournis.
* GRANDEUR. En morale, ce terme eft
relatif & porte l’idée de la fupériorité. A-t-on
jamais entendu parler de la grandeur de Sparte^
incorruptible par fes moeurs, inébranlable par
fes lois, invincible par la fageffe & l’auftérité
de fa difeipiine 5 eft-ce a Rome vertueufe 8c
libre que l’on ptnfe en rappelant fa grandeur?
l’idée qu’on y attache eft formée de toutes les
caufes de fa décadence. On appelle fa grandeur
ce qui entraîna fa ruine, l’éclat des triomphes,
le fracas des conquêtes , les folles entreprises,
les fuccès infoutenables, les richeffes corruptrices,
l’enflure du pouvoir, & cetçe domination
vafte dont l’étendue faifoit la faihleffe, &
qui allpit crouler fous fon propre poids. .
GRANDEUR D ’AME. Il eft difficile -de ne
pas fentir dans ,.un homme qui maîtrife la fortune,
& qui par des moyens puiflans arrive à
des fins élevées, qui fubjugue les autres hommes,
par fon activité, par fa patience ou par de profonds
confeils, il eft diflicille de ne pas fentir
dans un génie de cet ordre, une grande fupériorité.
La grandeur d’ame eft donc un inftinCt élevé
qui porte, les hommes au grand de quelque
nature qu’il foit, mais qui les tourne au bien
ou au mal, félon leurs payions, leurs lumières ,
leur éducation , leur fortune &c. 5 égale à tout
ce qu’il y a iur la terre de plus, élevé, tantôt
elle cherche à foumettre par toutes fortes d’efforts
ou d’artifices les chofes humaines à elle,
& tantôt dédaignant ces chofes elle s’y foumet
elle-même (ans que fa foumiflion l’abaine. Pleine
de fa propre grandeur, elle s’y repofe en fecrer,
contente de fe pofféder} qu’elle eft belle quand
la vertu dirige tous fes mouvemens, mais quelle
eft dangereufe alors qu’elle fe fouftrait à la règle.
Que manquoit-il à Céfar? que d’être né fouve;-
rainj il étoit bon, magnaniihe, généreux, hardi,
clément j perfonne n’étoit plus capable de gouverner
le monde & de le rendre heureux ; s’il
eût eu une fortune égale à fon génie, fa vie
auroit été fans tache j mais s’être placé lui-
mêir.e par la force fur le trône, le fait compter
au nombre des tyrans.
Il y a donc des vices qui n’excluent pas les
grandes qualités , & de grandes qualités qui
s’éloignent de la vertu. Ceux qui veulent que
les hommes foient tous bons ou tous méchans ,
abfolumentgrands ou petits, ne connoiffent pas
1^ nature, tout eft mé'ange dans les hommes, tout
y eft limité, & le vice même y a fes bornes.
* GRAND-HOMME. Le titre de grand-homme
ne convient proprement qu’aux grands génies
de deux efpèces de profeflions illuftres & im-
portaus.i les plus intéreffans font ceux dont le
motif de leur entreprife eft la plus grande utilité
publique. Ainfi Henri IV pourra être regardé
comme un grand-homme 3 au contraire Charles V ,
Epaminondas rendit d’importans fervices, non-
feulement à fa patrie, mais à toute la Grèce ,
en détruifant la tyrannie des Lacédémoniens} il
eft donc un grand-homme. Alexandre n’eft qu’un
grand conquérant. Scipion eft véritablement grand-
homme } le dernier Caton a droit de marcher
à-côté de Scipion $ C.éfar eft un grand capitaine.
GRENADIERS, Les officiers inftruits fe (ont
toujours plaints avec raifon, que l’on fe fervoit
des grenadiers fans aucune diftinCtion 3 il paroi-
troit bien plus naturel de ne fe fervir de cette
troupe d’ élite, que dans des cas prenants, &
dans des endroits & des momens où il feroit
important d’employer une troupe d’une bravoure
décidée j on fentira même combien cette
idée communiquée, aux grenadiers peut être fuf-
ceptible d'augmenter leur valeur 3 ces raifons
devroient déterminer à les placer en inter-ligne,
d’où ils pourroierit fe porter partout où l’on
en auroit befoin. Placés vis-à-vis & en arrière
des intervalles, ils fortifieroient ces endroits
foibîes} on pourroit aufli en faire des bataillons,
dont les ..uns protégeroient les flancs de l’infanterie
& de la cavalerie, les autres marche-
roient à l’avant garde, qui dans la grande tactique
deviendroit au moment de 1’aCtion, ou
me réferve ou un corps deftiné à renforcer les
parties attaquantes.
GUERR.E. Ce ne font plus les nations qui
fe font la guerre} dans les monarchies , les def-
potes la font au nom du peuple & avec fon
argent 5 chacun vit pendant ce tems à fa manière,
excepté deux claftes d'hommes, celle des guerriers
qu’il faut mieux payer & qui confomment
davantage, celle des entrepreneurs 8e des ufu-
riers qui s’enrichiffent à prêter leur argent pour
les dépenfes extraordinaires.
Les guerriers fe font tuer & mutiler , vieillirent,
s’épuifent la fanté, dérangent leur fortune
j il faut les récompenfer 8e les dédommager :
les uns , pour avoir vécu dans les camps comme
des Sybarites , obtiennent des biens exorbitans 3.
les autres en obtiennent fi peu , qu’ils font convaincus
d’avoir fait un métier de' dupes.
La nation cependant refte tributaire des ufu-
lievs qui ont prêté de 1 argent 3 & la guerre la
plus heureufe, loin de la rendre ou plus belii-
queufe ou avec des avantages quelconques , la
laiffe accablée d’impôts j tandis qu’elle voit s’accroître
dans la maifon des ufuriers un luxe qu elle
Voudroit imiter , 8e qui la perd.
• Ainfi la guerre des defpotes , au lieu de corriger
les peuples , les détruit; elle les avilit, au
lieu de les ennoblir 5 elle .n’eft qu’un prétexte
pour les réduire en fervitude, 8e leur en donner
tous les vices } elle eft le plus terrible fléau
de l’efpèce humaine } elle eft dans la main des
princes un moyen de tout, envahir au - dedans ,
fans leur rien faire acquérir au-dehors.
La tyrannie, en faifant en forte que la bravoure
fupposât le moins de vertus poflibles , eft
parvenue à avoir la puiflance la moins avanta-
geufe poffible à l'efpèce humaine , & à ne faire
la guerre qu’à fon détriment..
En prenant l 'in d i g e n c e pour enrôleur, en fubf-
tîtuant le befoin 8e l’amour de la folde au befoin
qu’on appelle honneur , amour de la gloire
8e de la patrie } la pareffe, qui fait les mendians
8e les foldats , à cette noble inquiétude qui fai-
fait que l’ame ne manquant de rien , fe battoir,
dans' la crainte de tomber dans le mépris, &
ambitionnoit une eftime mieux motivée , & plus
de confidération, n’ étoit-ce pas le moyen d’avilir
les peuples, 8e de ne les remplacer que
par des machines de guerre, parmi lefquelles la
folde fait agir un coquin comme un honnête
homme ? Ce n’eft: pas la même chofe de payer
ou de combattre , d’être fournis devant l’exécuteur
ou fier devant l’ennemi , de prêter fon
bras pour un emploi noble , ou de donner fon
argent, avec J e q u e l celui auquel on le donne
peut foudoyer des affalfins.
Plus on y réfléchit, 8e plus on eft forcé de fe
convaincre que la guerre , qui eft déjà un fléai*
fi terrible , devient encore pais funefte entre les
mains des defpotes , 8c que dans un pays où l’on
aime la liberté, elle ne doit être confiée qu’à
dès citoyens qui auront un grand intérêt à défendre
l’Etat, 6c que l’on y aura préparés dès
l’enfance , en les exerçant au milieu de leurs
foyers 8e des travaux des arts 8c de L'agriculture.
On ne peut fe refufer de mettre ici quelques
idées très-philofophiques fur la guerre, qui onç
paru récemment dans le Vieux Tribun.
» On doit fa fortune 8c fa vie à la république
, quand la république eft en danger j mais
prenez-y garde : qui la défend ? Le pauvre. Quel
; eft cependant celui qui n’eft jamais en état de
guerre avec un gouvernement étranger ? Le
: pauvre..... Le pauvre , qui n’a ni voté pour in-
j; ftuencer la guerre , ni propriété pour l’entre-
: tenir, dont la vie n’eft pas même comptée pour
une propriété, doit avoir au moins fon induf-
; tre à lui toute entière. 3 il doit trouver exempts
de taxes directes & indirectes tous fes moyens
: de fubftftance. Soyez, sûrs qu’a l o r s - , & feulement
alors ,. commencera l’infenfible 8e bienfaifanté
révolution qui éteindra toutes les guerres , corrigera
d’énormes abus , répandra quelques rayons
de lumière 8e de bonheur d a n s ces detniers
rangs de la fociété >• dont le courage , la patience
& tant de vertus dont nous avons be-
» foin, pâroifîant alors dans tout leur éclat , ame-
; neroient fenfiblement le perfectionnement de-
l’e f p è c e *>..
» Jufque- là , vous aurez là guerre , bella »
horrida b è lla à moins qu’une invention plus ter-,
rible encore que le canon , les inondations 8c
les mines,, vienne partager plus é g a k m a n s le»