
nent à la partie militaire j les uns appartiennent
aux fortifications , & font confiés au génie j les
autres à la guerre , & font confiés à l'artillerie.
Les premiers font les ponts dormans 3 fiottans, le -
•vis 3 tournons. Le pont dormant eft ordinairement
en charpente , conftruit à demeure fur le foffé
d'une place de guerre* pour communiquer de l'enceinte
principale avec les ouvrages extérieurs &
la campagne 5 ces ponts ne traverfent pas toute la
largeur des foffés 5 ils fe terminent à douze ou
quinze pieds du revêtement , & là ils font fup-
pléés par des ponts-levis. Quelquefois* quand les
ponts-dormans font très-longs * on conftruit un
pont à bafcule au milieu de leur étendue : dans
des foffés pleins d'eau * dont il feroit facile de
foutenir l'élévation à volonté * & à une mefure à
peu près confiante * on pourroit fubftituer des
ponts de bateaux aux ponts-dormans * & en cas
d’attaque* fubftituer aux uns & aux autres des ponts
fiottans * avec très- grand avantage. Un citoyen
nommé Befnières avoit propofé des bateaux qu'il
croyoit infubmerfibles ; mais il ne fut pas écouté,
quoique fa découverte fût excellente fous beaucoup
de rapports * & pût peut-être être portée
très-facilement au dernier point de la perfection.
Cette découverte eût été d’une utilité incalculable
pour conferver la vie à cette foule de citoyens
qui eft annuellement engloutie dans les
eaux des fleuves * des rivières , & même des bras
de mer qui avoifinent nos côtes. On auroit pu
aufli en tirer parti pour conftruire des ponts flot-
tans pour les fortifications & pour la guerre * ces.
bateaux infubmerfibles devant être à l’abri d’être
coulés bas* à moins d'avoir été expofés à recevoir
un très-grand nombre de coups de canon.
Les ponts f lo t to n s font des ponts formés avec
des caiffes de fapin bien étanchées , fur lefquelles
ont pofe des madriers qu'on fixe avec des cordes
ou d'une autre manière. Ces ponts fervent de
communication entre les différens ouvrages. Pour
les grandes communications* on pourroit faire les
caiffes à l'inftar des cales de certains vaiffeaux des
anciens * qui étoient divifés * dit-on * intérieure- ■
ment* en un grand nombre de compartimens rem- :
plis de liège en tout ou en partie. Ces compartimens
devroient être bien calfatés * afin que l'eau
qui pourroit entrer dans un ou plufieurs * ne pût
pénétrer dans les compartimens voifins : telles font
les idées que l’on offre à la méditation des officiers
mécaniciens * & qui font deftinés par état à
travailler au perfectionnement de cette partie de !
l'art militaire.
Pont- le v i s . C'eft un pont mouvant fur des tourillons
que l’on abaiffe pour pouvoir paffer fur le
pont-dormant, et qu’on lève quand on veut intercepter
la communication. Il y a des ponts-levis
à flèches, & des ponts-levis à bascule. Belidor a
inventé une manière très - ingénieufe de faire
mouvoir avec facilité les ponts-levis qui font aux
portes des places militaires. Il fe fert de deux
cylindres d'une pefanteur convenable * auxquels
font attachées les chaînes qui doivent imprimer
le mouvement qu'il eft befoin de communiquer
aux ponts, dans une courbe de fon invention
nommée f in u fo 'id e . Les cylindres, en parcourant
cette courbe en defcendant * font lever les ponts
auxquels on applique cette mécanique. Ces mêmes
ponts s'abaiffent dès l’inftantoù l’on facilite par
le moindre effort aux cylindres les moyens de parcourir
en montant la f in u fo ïd e ,
Pont -tou rn a n t. Ce font des ponts de charpente,
qui fe meuvent fur un arbre placé verticalement
ou fur un pivot. On les emploie à peu près aux
mêmes ufages que les ponts-levis* c’eft-à-dire * à
pouvoir facilement interrompre à volonté les communications
qu'ils établiffent.
P o n t m i l i t a i r e , deftiné au paffage des.fleuves*
des rivières, &c. L'art de conftruire les
-p o n ts -m ilita ir e s d'une manière très-prompte* fur
tous les obftacles que les eaux oppofent aux armées
* celui furtout de les conftruire avec des
équipages* qui* joignant la folidité à la légéreté,
puiffent être manoeuvrés par très-peu de bras * &
portés rapidement partout par très-peu de charrettes
légères ou par des mulets-, cet art, l'un
des plus effentiels auquel auroient dû s'appliquer
les officiers chargés de cette partie importante,
paroît être encore dans fon enfance, fi on le
compare aux découvertes étonnantes & aux progrès
de la mécanique & de la chimie depuis quelques
années. Nous ne connoiffons aucun traité
fatisfaifant fur cette partie. Plufieurs perfonnes
ont propofé des moyens de former des ponts portatifs
* mais presque tous pèchent par la folidité
ou par trop de pefanteur et de complication.
Le pays ,où l'on doit faire la guerre étant ordinairement
coupé par des fleuves, des rivières,
des ruiffeaux ou des marais , il eft de la dernière
importance d'avoir un équipage de pont à la fuite
de chaque armée. Sans cette précaution elles font
arrêtées dans leur marche, foit en avant, foit en
arrière. Si elles font arrêtées dans leur marche en
avant, de là peuvent s'enfuivre des maux incalculables
* les occafions perdues de furprendre l'ennemi
, de le tourner, de le battre & de voir avorter
tous les projets les mieux combinés d’une campagne
j fi elles le font dans leur marche en arrière,
on fentira facilement les dangers auxquels elles
feront^ expofées , fi c'eft une retraite de circonf-
tance à exécuter, ou une retraite après la perte
d une bataille, &c. Mais jufqu’à prefent, quelles
font les précautions prifes pour remplir cet objet?
Des ponts, de pontons de cuivre, portés fur des
haquets extrêmement lourds, & traînés par une
grande quantité de chevaux j des ponts faits avec
des chevalets, des pilotis ou des bateaux \ des
ponts-volans fur des peaux de bouc enflées j des
ponts de cordes > des ponts appelés cou p s - de*
main , pour paffer un ruiffeau 5 des ponts de radeaux
fur des tonneaux, &c.
P o n t s d e p o n t o n s . On nomme p o n to n s , dans
l’artillerie, des bateaux qui, placés fur un fleuve,
une rivière, des canaux, des foffés , &c. à une
certaine diftance, fupportent des poutrelles qui,
recouvertes de plancnes qu’on nomme l'établi*
forment les ponts fur lefquels on fait paffer les
troupes & l'artillerie. Il y a eu plufieurs fortes de
p o n to n s , les uns en bois, fort légers } d'autres en
ofier poiffé & couverts en toile cirée ; quelques-
uns faits de cordes, ceux-ci avec du cuir bouilli*
plufieurs autres en fer-blanc i enfin ceux en cuivre
* qui font actuellement le plus en ufage * &
font portés fur des efpèces de chariots très-lourds*
nommés h a q u e ts * traînés par fix ou huit forts chevaux.
On peut coüfulter , fur les différentes formes
%C dimenfions des p o n to n s , les M ém o ir e s d ’a r tille
rie de Saint-Remi, tom. I I , pag. 3 66 & fui-
vantes.
P o n t s A c h e v a l e t . Ils s'établiffent au moyen
de plufieurs chevalets que l’on place dans la rivière
ou le ruiffeau que l'on veut paffer , & de
poutres ou poutrelles fur lefquels on met des
madriers > le tout porté fur les chevalets.
Po n t s a p i l o t i s . Ce font des ponts établis
fur des pilotis que l'on plante dans la rivière, &
fur lefquels on place les madriers qui doivent fer-
vir à faciliter le paffage fur les pilotis.
P o n t s d e b a t e a u x .Une quantité fuffifante de
bateaux, & proportionnée à la largeur du fleuve
ou de la rivière, ayant été raffemblée fur le bord
ou l’on veut paffer, on les amarre à une certaine
diftance les uns des autres, & on les couvre en-
fuite* comme les pontons, de poutrelles & de madriers,
pour pouvoir paffer de l'un à l ’autre, &
arriver au bord oppofé.
P o n t s - v o l a n s s u r d e s p e a u x d e b o u c
e n f l é e s . C ’eft un radeau p o r t é fur des peaux d 'o u tre
enflées.
P o n t s d e c o r d e s . Ils font furtout en ufage
dans les pays de montagnes, & ne pourroient fer-
vir à la guerre, que pour paffer de l'infanterie fur
quelques torrens, de même que les ponts à coà p s -
d e-m a in .
P o n t s d e r a d e a u x s u r d e s , t o n n e a u x .
Ceux-ci font, comme les ponts-volàns, fur des
outres, à l'exception des tonneaux fubftitués aux
outres.
Tels 'font à p eu près tous les moyens employés
pour faire paffer des troupes fur des fleuves, des
rivières, des ruiffeaux, des foffés * &c. fur lefquels
nous ne nous fournies pas permis d'entrer i
dans de grands détails, foit parce qu’ils fe trouvent
en partie dans les M ém o ir e s de Saint-Remi ,
foit parce que les trouvant tous très-incommodes
, très-infuffifans , ou fouvent impraticables ,
nous n’avons pas voulu ennuyer le leéteur de détails
faftidieux 8c inutiles. Nous fommes cependant
obligés de dire quelque chofe de chacun des
ponts dont nous venons de parler, afin d’en faire
fentir les inconvéniens.
P o n t s d e p o n to n s . De l’aveu des officiers d’artillerie
les plus inftruits, ces ponts ne peuvent
fervir que pour paffer des rivières au plus de quatre
vingts toifes de largeur , encore fi l’on doit
s'en fervir pour paffer de l’artillerie de fiége , eft-
on obligé de doubler les p o n t o n s , afin d'éviter les
accidens. On ne peut pas cependant fe paffer de
traîner après foi un ou deux équipages de p o n to n s ,
foit par la néceffité de former au moins trois ponts
pour paffer une armée, l'un pour l’infanterie,
l’autre pour la cavalerie, le troifième pour l’artillerie.
foit aufli par la néceffité de doubler les
p o n to n s pour le pont où l’on voudroit faire paffer
de_ l’artillerie de fiége. Mais ofons faire i’enu-
mération des attirails indifpenfables pour un feul
équipage, qui pourroit fervir à deux ou trois ponts,
fur une rivière de quatre-vingts toifes de largeur.
Les officiers d’artillerie exigent cent haquets 8c
dix de rechange, dix nacelles, foixante-dix ancres,
cent cordages d’ancres, huit cinquenelles
de deux cents toifes de longueur, douze cabef-
tans, quatre-vingts leviers pour le fervice des ca-
beftans, quatre-vingts piquets frétés, de quatre
pieds de long ; vingt-quatre combleaux, deux
cent quatre-vingts traverfes , deux cent quatre-
vingts amarres , fix cents poutrelles, fept cent
vingt mairins de quatorze pieds de longueur, un
pied de large & deux pouces d’épaiffeur ; foixante
rames, cent vingt efcoupes, foixante crocs à bec
droit. trente maffes, 8c tous les outils de charpentier
, néceffaires au montage du pont.
P o n t s h c h e v a le t . Pour conftruire ces ponts
il faut fe trouver à portée d’un bois pour y couper
ceux néceffaires pour conftruire les chevalets ,
8c fe procurer les madriers , les poutrelles 8c les
planches qui font néceffaires. S’il n'y a point de
bois affez à portée, il faut prendre tous les objets
dans les villes ou les villages les plus rapprochés ,
8c s’ilsne s’y trouvent pas, il faut démolir quel-,
ques bâtimens pour fë les procurer.
P o n t s à p i lo t i s . Ces ponts font abfolumenc
néceffaires, difent les officiers d’artillerie , fur les
torrens, furtout ceux qui font fujets à rouler de
groffes pierres, 8c fur lefquels on ne pourroit
hazarder ni des chevalets qui feroient bientôt ren-
verfés, ni des bateaux dont les ancres feroient
chaplé.es par la viteffe des eaux, ni des paniers
d’ofier remplis de groffes pierres, qui auroient
le même fort.