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la découverte întérefiante , en feroit le rapport à fort
commandant. Cette diftinftion que je viens d’indiquer
paroît encore plus néceflaire pour le
bien du fervice que pour la clarté du difcours..
Si on l’ad.optoit, les ordonnances militaires ne
devroient-elles point prefcrire de rendre tous les
comptes à l ’officier ou au bas-officier auquel on
eft immédiatement fubordonné , mais de faire le
rapport au chef fuprême du corps dont on fera
partie? On peut multiplier fans danger les échelons
, quand il ne s’agit que de faire favoir au
commandant d’un régiment que tel ou tel foldat
eft entré en prifon , ou en eft forti ’, mais îl
n’en eft pas de même quand il s*agit de rapporter
un événement militaire : le plus-petit changement
dans le rapport peut devenir funefte -, la
contenance de celui qui a vu , en dit quelquefois
plus que fes paroles; il dit plus avec quatre
paroles que tout autre avec cent. Il trace les
objets avec force , avec énergie : que dis-je , il
les grave , il les peint. A ces raifons, que je
4>uis nommer phyjiques ,. je pourrois en joindre
de morales qui ne laifferoiettt pas d’avoir leur
poids , telles font la promptitude , le fecret, &c.
JVlais il me paroît inutile d’entrer dans de plus
grands détails fur.,éet objet-, fi mon idée eft heu-
reufe, les hommes faits, pour donner des lois ,
en découvriront la bonté d’un coup d’oeil-, fi
elle préfente des inconvéniens que je n’ai, point
tu s , ils les découvriront avec la même facilité.
Paffons donc à la manière preferite par les ordonnances
pour rendre les comptes.
Les. caporaux & les brigadiers doivent rendre
compte de tout ce qu’ils découvrent qui n’èft point
conforme aux lois-, ils doivent rendre compte auflî
de la manière dont ils ont remédié aux abus ,
& des. peines qu’ils ont infligées : c’eft an has-
©fficier dont ils dépendent immédiatement qu’ils
rendent ces comptes , c’eft à. dire au maréchal
des logis, ou au. fergent de leur fubdi.vifion. Les.
iergens & les. maréchaux des logis rendent compte
au fergent- majpr,. ou au. maréchal des.logis en
chef. Le fergent-major rend compte au lieutenant
de femaine , lors des appels auxquels, cet officier
doit affifter. Le lieutenant chargé de faire
l’appel rend compte au. capitaine, eu fécond.-, le
capitaine en fécond au capitaine-commandant.;
le capitaine-commandant au màjor , le major
au lieutenant-colonel", le lieutenant-colonel au
colonel, & celui-ci au,commandant de la placé.
Les bas- officiers & les officiers fobalternes
doivent, rendre compte^ des événemens., même
les moins importans, arrivés dans leur compagnie,
mais, le commandant du corps, ne. doit au commandant
de la glace que le mouvement journalier.,
c’eft à. dire, qu’il, doit l’inftruite feulement
du nombre-d’hommes qui;font entrés.-à l’hôpital,
©u; qui. en font, fortis., & du. nombre de ceux-
qui font fortis de. prifon eu qui y font. entrés 3,
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11 n’eft même pas obligé de détailler les motif*
de la détention des prifonniers , fi c’eft toutefois
pour des fautes contre la difcipline. C ’eft après
avoir rendu compte , que le commandant du
corps demande au commandant de la place fon
co-nlentement pour faire fortir tels & tels hommes
de fon régiment qui font en prifon.
A l’armée le commandant du régiment rend
compte à fon brigadier, le brigadier au maréchal
de camp attaché à fa brigade , le maréchal de
camp au lieutenant-général commandant la di-
vifion, & celui-ci au général.
Nous ne parlons point ici du compte que doivent
rendre les officiers , de&événemens militaires, c’eft
dans l’article R a p p o r t que nous en parlerons.
La plupart des échelons qu’on a introduits
dans la. manière de rendre les comptes , font aifez
communément regardes comme inutiles : pourquoi,
dit le lieutenant, rendrois-je le compte au
capitaine en fécond, puifque le fergent de femaine
le lui a rendu ? le capitaine en fécond d it,
puifque le fergent-major a rendu le compte ait
capitaine-commandant, pourquoi le lui rendrois-
je ? le capitaine-commandant en dit autant en
parlant du major. J’obferverai que cette derniere
manière n’eft point légale -, mais le fût-elle , les.
échelons ne feroient point inutiles : ils font que
tous les officiers font inftruits. de ce qui fe
paffe dans leur compagnie -, on devroit donc les
conferver avec foin, & veiller à ce que les comptes-
les parcoururent toujours, tous.
CONCLUSIONS. Tout ce qui eft relatif aufc
concluions du major d'e la place dans les procès.
criminels qu’on fait aux foldats eft configné
dans, la fèélion I re de l’article C o n s e i l . Voye£
ce mot
CONCUSSION. Prendre , pendant la paix, au
delà de ce que la loi donne, & pendant la
guerte, au delà de ce que la néceffité-exige, c’eft
fe rendre coupable de concuffion.. Tout concul-
fionnarre. eft coupable du crime de lèfe-lbciétés.
Il en eft de même-de celui qui n’empêche point
ceux à qui il commande de commettre des cône-
enflions.
Des- lois pleines de- fagefle ont mis. un. frein
aux- concufjfons que les gens de. guerre exeiv-
ç oient jadis, fur les. paifibles citoyens.. Ces lois
ne peuvent être maintenues avec allez de foin.
La concujjïpn la. moins, criante commife par un-
militaire. doit être punie, avec, une rigueur, exr
trême.
Si l’ on avoit jamais la. fâgeffé de faire un
catéchifme moral pour les- foldats, on devroit
leur répéter fouvent qu’ils bleflent les lois-de
la probité & de l’honneut- dès qu’ils.fe rendent
coupables- de concuffion ■ dès qu’ ils .exigent-du
citoyen qui. les. loge un grain de fol .qui: ne leur.
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eft point accordé par la loi. On devroit répéter
fouvent au bas-officier qu’il eft coupable du
même crime lorfqu’il le tolère, & qu’il eft avili
dès qu’il le permet de faire fur fes foldats le
gain le plus léger. Quant aux officiers fubal-
- ternes , grâces en foient fendues aux lumières
qui ont pénétré parmi eux, ils regardent leurs
concitoyens comme leurs frères , leurs foldats
comme leurs enfans. Si s’élevant jufqu’aux chefs
de corps on entreprenoit aufii de tracer un catéchifme
pour eux , on devroit leur dire qu’exiger
des hommes qui achètent leur congé , un
fol au delà de ce que la loi prefcrit, c’eft fe
rendre coupables de concuffîon. Prefque tous, font
tourner , il. eft -vrai , au bien du fervice, les
femmes qu'ils exigent au delà du taux fixé
par la loi -, ainfi ils pallient leurs torts , mais
ne les rendent pas excufables.
Ce feroit da.ns le catéchifme de guerre qu’on
trouveroit l’occafion. de donner de grands déve-
loppemens à l’article. C o n c u s s io n . On y raon-
treroit au général qu’il eft concufiionnaire toute
les fois qu’il fait fupporter à l’ennemi des contributions
exorbitantes -, toutes les fois qu’il
fait détruire des chofes qu’il pourroit conferver !
fens que la caufe qu’il défend en fouffrît. On
démontreroit là que ces maux , quoiqu’ils ne
tombent pas directement fur la patrie , ne lui
en font pas moins des bleffures profondes , parce
que la loi des repréfailles eft connue & malheureu-
fement fuivie. Si le chef d’une armée tranfpor-
toit aujoufd’hui en campagne les-lois d’une exaéte
probité générale , il s’immortalifêroit , & il ,
auroit la gloire de voir fon antagonifte imiter fon
exemple. L’Europe ne demande qu’un grand
exemple en ce genre*
CONDOTTIERI. On donnoit ce nom, dans le
? Je. fiècle , aux chefs des brig'ands difcipîinés, ou
plutôt raffemblés en corps de troupes, qui louoient
leurs fervices aux princes, aux états, & même aux
particuliers qui les pouvoient payer. Quelques-
uns des Condottieri ont acquis & mérité de la
célébrité, mais rarement leurs troupes avoienc
beaucoup de bravoure. Il n’y a pas beaucoup de
peuples, beaucoup d’hommes qui méritent de
la gloire quand ils ne combattent que pour de
l’argent.
CONFIANCE. L’homme qui, conduit par
un guide dans lequel il n’a point1 une entière
confiance, traverfe, pendant une nuit obicure,
une vafte forêt, coupée par un grand nombre
de chemins bordés de précipices, eft dans une
grande anxiété d’efprir -, celui qui, doué d’un
naturel ardent, aime une femme légère, ou dont
la fidélité lui' eft fufpeéte, éprouve aufli des
peines bien cruelles : cependant les hommes
qui compofent une armée commandée par un
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général qui n’ a point obtenu leur confiance font
encore plus à plaindre : il leur femble que
chacun de leurs mouvemens doit les conduire
à la mort ou à la’ honte-, & comme cette image
eft la feule que leur imagination troublée leur
préfente , ils marchent avec crainte , combattent
avec répugnance , & voient prefque toujours
leurs preffentimens fe. vérifier.
Voyez au contraire une armée qui a accordé
à fon général une confianceà, méritée , elle ref-
femble au voyageur qui eft aflu-ré de fon guide,
à l’homme certain de la fidélité de fon amante;
comme ils n’entrevoient point de danger que leur
chef ne puiffe leur faire furmonter , ils les
bravent tous , & voient prefque toujours le fuccès
couronner leur confiance. Pour mettre ces deux
vérités dans tout leur jour, nous n’aurions qu’à
parcourir l’hiftoire des généraux nommés par
l’intrigue , & de ceux qui ont été nommés par
leur mérite *, mais bornons-nous à un petit
nombre de faits : pour être reconnues , ces vérités
n’ont befoin que d’être montrées.
Les fuccès conftans qu’obtinrent les François
fous Charles VII , à qui les durent-ils ? ce ne
fut ni à leur roi , ni à l’habileté de leurs généraux,
ce fut uniquement à la confiance aveugle qu’ ils
avoient mife dans la Pucelle d’Orléans. Cette
défaite célèbre que nos troupes efluyèrent à
Saint-Quentin , 8c qui ébranla le trône des Valois,
eut pour première caufe le peu de confiance qu’elles
avoient dans leurs généraux -, & la bataille de
Ramilles , ne s’accorde-t-on point à dire que les
François y furent battus, parce qu’ils avoient peu
de confiance dans leur chef. L’hiftoire du duc
d’Albe m offre une anecdote que je dois tranferne.
Un détachement de fon armée fait un fiége difficile,
fes troupes font découragées parla réfiftance opiniâtre
des ennemis , elles font prêtes à fe mutiner ;
le duc d’Albe écrit à fon fils , qui commande ce
détachement , il lui ordonne de continuer le
fiége , il l’affure de la prife de la place : Frédéric
lit à fes foldats'les lettres de fon père. Le courage
renaît dans l’armée & Harlem ouvre fes portes.
Quand on demandoit aux foldats de Frédéric de
Tolède d’où, leur étoit venue-leur confiance : notre
vieux général nous avoir commandé , difoient-
ils , la continuation du fiége , & nous lavons qu’il
ne nous donne point d’ordre qu’ il ne fojt sûr de
fa réuflite. On s’attend bien fans doute que
je nommerai dans cet article l’ immortel Turenne,
lui dont la vie offre un nombre infini de preuves
des effets heureux que produit la confiance. Per-
fonne n’ ignore ni l’aneçdote de la pie , ni celle
que Mde de Sevîgné raconte dans fes lettres , &
dont elle dit avec tant de raifon : Voila de ces
chofes fimples & naturelles qui font fon éloge
Iaulli magnifiquement que les Fléchier & les
MafcarOns. On connoît enfin le trait de confiance
individuelle que le brave Chevert infpira
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