
Je duc de Parme, donnoient de grandes prtuves I
de leur capacité dans Part militaire..
Peu de te ms après, la Hollande qui avoit
fecoué le joug de la tÿrannje efpagnoîe, vit fuc-
ceffivement à la tête, de Tes armées , Guillaume
Maurice & Frédéric Henri de Naiïau } qui affermirent
la puiflance de cet état naifiant. La vie
de Maurice furtout, fut une chaîne rarement
interrompue de combats, de fièges & de victoires
: il pofféda l ’art de la guerre en grand
maître .& la fit toujours en héros. Son camp
devint l'école univ.erfelie de .’l ’Europe-. Après
avoir puifé dans les maximes romaines tout ce
qui pouvoit perfectionner la fciënce des armes,
il fit revivre l’ordre dans les campemens & dans
les marches; on lui doit la forme des lignes
de circonvallation & l’art de fe retrancher dans
les camps. Il fut exécuter des marches favantes,
prendre des portions avantageufes, rendre des
places imprenables , faire fubfifter des armées
dans le pays le plus ftérile & le plus ruiné.
Si l’on en croit le chevalier Folard, il fut un
des plus grands officiers d’infanterie qui eut paru
depuis les Romains. Il profita non-feulement des
inventions des autres , mais il inventa lui-même ;
on lui dut le premier de fe fervir dans les
armées de lunettes de longue vue, des galeries
dans les fièges, de l ’art d’enfermer les places,
de pouffer un fiège avec plus de vigueur, de
défendre mifux & plus 1 >ng-tems une place
affiégée 3 enfin on lui doit la renaiffance de
prefque toutes les parties les plus effentielles
de l’art militaire , à l’exception de la taélique.
Ces détails doivent faire juger jufqu’ à quel point a cette époque, aidé de la connoiffance des
anciens, un Fui homme avoit pouffé la fcience
de la guerre. Mais n’oublions pas cependant de
J’obferver, toutes ces chofes s’exécutèrent, parce
qu’elles dépendirent de la volonté d’un feul homme,
& cet homme qui vouloic fermement, avoit
le pouvoir de faire exécuter aux autres toutes
fes volontés.
Mais un héros fe formoit alors fur les mêmes
principes dans les glaces du Nord. Appelé en
Allemagne par le parti proteftant, Guftave ( i)
devint bientôt la terreur de la puiffance autrichienne
, & déploya dans deux campagnes la
fcience des marches, des campemens, de la
difpofition des troupes dans les batailles , &
furtout 1 art trop peu commun de faire fervir
les fucçès à l’entretien de fon armée, & de
nourrir la guerre par la guerre.
’(,1 ) Guftave éc’ipfa tous tes guerriers de fon
fiée le, & laiffa à ceux qui dévoient lui fuccéder, les
plus grands exemples & les leçons les plus inftruc-
tives. Dans le tems où ce légiflateur du grand art de
Bataille de Leipzick. Quand on lit avec
attention les détails de la bataille de Leipzick,
on eft étonné de la manière favante dont Gufla
guerre parut à 'a tête des armées’, l’infanterie étoit
divifée en enfeignes de quatre à cinq cents hommes ,
qui faifoient à-peu-près l’ effet de nos bataillons.
Quelques enfeignes étoient en entier de piquiers ;
dans d’autres il y avoit des arquebufiers. Chaque
capitaine étoit commandant à-peu-près indépendant
du général pour l’armement, la difcipline intérieure,
& même la formation de fon enfeigne. On réuf-
fiffoit bien rarement à les affujettir à ne charger
que d’après des ordres fupérieurs pour en indiquet le
moment.
Il eft aifé de fe faire une idée de l’effet de dix-
huit ou vingt-quatre de ces enfeignes, formées, les
unes (tir fix, les antres fur huit ; quelques-unes fur
dix de hauteur. Les piquiers, plus preffés de charger,
aUoient devant, tête baiffée , fur l’ennemi ; les autres
reftoient en arrière.
On avoit auffi adopté la méthode de réunir toutes
ces enfeignes en un feul corps ; mais il en réfultoic
de très-grands inconvéniens, ou de fe ferrer trop au
centre, ou de brouiller fes rangs & fes files.
Il n’étoit nullement queftion d'obferver quelqu’ali-
gnement.
Les défaites de Leipfick et de Rocroy firent remplacer
ces grofles maffes par des corps de mille à
huit cents hommes ; mais ces bataillons avoient
encore des mouvemens bien lents & bien compaffés.
Lorfque Guftave eut enfin rendu l’ufage des fécondés
lignes tout-à-fait général, il étoit encore
très-difficile de ranger 'es efeadrons & les bataillons
en bataille : leur marche étoit trop lente.
Il éroitd’ufage d’obferver un intervalle entre ces
bataillons, d’environ foixante pas, pour donner à
un efeadron la facilité d’y palier. On obferva le
même intervalle entre .’es escadrons, afin de faciliter
à ceux de la fécondé ligne un pafiage lors d un
moüvement en avant pour remplacer la première.
Ces interval’es fervirent encore à placer des pelotons
de nioufqueraires à pied, quoique très-expofés
quand les efeadrons étoient battus. Nous voyons
Guftave s’en fervir cordtamment. Ce méiange for-
j çant !a cavalerie de rég er fon pas fur celui de l’in-
| fanterie, en obligeant cette arme d'aller auffi lentement
, lui faifoit perdre toute fa célérité & toute
fon impulfion.
Avant de commencer la guerré, Guftave établie
dans fa petite armée la plus exafle difeipline, en
faifant obferver, d’un grade à i’autre, la fubordina-
tion la plus rigoureufe.
Son attention s’étant portée fur les détails inté-
| rieurs, la force de fon génie militaire lui fit fencir
cave y manoeuvre ; on eft forcé, il eft vrai, de
convenir des grandes fautes commifes par le
général .Tilly, avant & pendant la bataille ;
futilité de firbftituer; des corps légers & faciles; à
remuer fans déranger leur ordre, à ces énormes ba-^
taillons, formés fans doute par les Efpagnols, à
I imitation de l’ancienne ordonnance de la phalange.
II divifa fon infanterie en brigades j , les brigades
furent compofées de deux régimens, & chaque régiment
fut formé de deux bataillons. Ces dernieis
corps furent réduits à fept bu huit cents hommes,
ayant entr’eux des intervalles, fuffifans pour exécuter
leurs mouvemens de droite & de gauche, pour les
quarts de converfion, pour fe former en colonne &
le déployer en ordre de bataille. Il les. arma de
piques & de moufquets ; les piquiers étoient fur huit
de hauteur, les moufquetairc-s fur quatre.
S’il étoit queftion de foutenir une attaque de cavalerie
, les premiers rangs de piquiers mettoient un :
genou en ter le & préfenroiçnt la pique à la hauteur
du poitrail : les deux premiers rangs dés moùfque- :
taires faifoient leur décharge fur l’ennemi ; les deux
derniers avoient foin de ne tirer que lorfque les’deux
premiers avoient rechargé.
Cette méthode qui confervoit toujours du feu,
étoit très-bonne contre un ennemi qui formoit toujours,
fa principale attaque de front, & elle donna
les moyens à Guftave de réfi/ler à la très-nombreufe
cavalerie des Impériaux.
Au lieu d’une feule ligne , il en forma deux ,
avec un corps de réferve, l’infanterie au centre de
la ligne.
Ce grand homme de guerre étendit également fes
vues lur la cavalerie. Les lourdes & groffières cui-
raffes , les cuiffards, les braffards , les pots en tête,
dont elle fe fetyqit en 1 6zo, furent fupprimés ; il
leur fubftitua d’autres armures, de même dénomination,
mais plus légères. Les. efeadrons, qu’il avoit
trouves très-nombreux, & fur huit de hauteur, furent
réduits à cent cinquante & à cinq de hauteur ;
ils eurent trente files ; ils acquirent par-là une légèreté
impoffible aux efeadrons impériauxde trois
cenc foixante fur huit de hauteur , couverts de fer
comme leurs chevaux, & formant des corps maffifs
privés de toute célérité & de toute’impulfion.
L ’ufage de mettre des enfans perdus à quatre ou
cinq cents pas en avant.de l’armée, ayant paru dangereux
à ce grand maître, fut bientôt abo'i; par leur
retraite précipitée , ils donnoient un mauvais exemple
au corps de l’armée.
Guftave ne tarda pas à pénétrer dans l’éleétorat de
Brandebourg & à s’en rendre a-peu-près le maître.
Il tomba bientôt après fur l’avant-garde de T illy ,
& lui enleva trois de fes. cantonnemens de cavalerie.
Campé enfuite trop avantageufement pour être atmais
elles diminuent bien peu !e mérite du :roi
de Suède dans cette aêtion. Quelle fcience dans
fon difpofiùf, & quelle lagacké à profiter*
raqué par le général des Impériaux, çelu.-c:, faute
de fubfiftance, dans un rems où l’on avoit bien rarement
des magasins de grains , fut obligé de-fe porter
fur Hal & Leipfick.
Guftave, bientôt informé de cette l©r.g:e marche*
qui n’étoit pas dirigée fur l’armée faxonne rafiembiée
entre l’Elbe & la Mulda , profita de cetce faute pour
effectuer fa jonction avec elle dans les environs de
Lorga, |
La connoi fiance dé ce pays fait voir combien il
étoit pofiible à Tilly de fe placer entre Guftave &
l’armée faxonne. Le pont de Magdebourg, dont
Papenhaim étoit le maître , lui donnoit la facil't.é de
fe porter fur Roftau,; avant l’inftant où Augufte eut
pu paffer l’Elbe fans pont ni pontons, il avoit environ
dix milles d’Allemagne pour prendre cette
direction, d’où il auroit pu fe porteur à volonté fur
Duben ou fur Wiitemberg pour y éçrafer les
Saxons, & forcer enfuite Guftave à combattre ,
si, contre toute apparence, il avoit pu pafier l ’Elbe.
Guftave, joint aux Saxons, détermina l’éle&eur
à marcher pour livret bataille aux Impériaux. A la
nouvelle de cetce marche, Tilly prit le mauvais parti
d’attendre ces armées combinées.
Une chaîne de coteaux commençant vers Mokern,
à un quart de lieue de Leipfick, fe renforce vers
Euderitx, & continue en diminuant, jufqu’à Brein-
tenfeld, & même un peu au-delà, en fuivant à-peu-
près le cours de l’Elfter. Cet endroit parut le plus
propre à Tilly pour y recevoir avec avantage un
ennemi débouchant fur lui par Duben, Zeilenburg
ou Wurczen.
Il plaça fa gauche vers Breintenfeîd ; mais il
paroît avoir tire un mauvais parti de la hauteur, en
mettanr fon artillerie fur le fommet, & la gauche
de fon armée à Micote; au moyen de cet arrangement
défectueux, fon canon tiroit par-deffus la tête
de cette gauche, & ne pouvoit plus lui être bon à
rien, dès l’inftant où elle fe portoit en avant. Cetce
même gauche, formée principalement de cavalerie ,
étoit féparée du corps de bataille par un intervalle
de plus de trois cents pas.
Le corps de l’armée étoit composé de feize gros
bataillons, fans réferve, comme le refte de l’armée.
La cavalerie de la droite du corps de bataille ,
appuyoit à un ravin affuré , impraticable, par les
partifans de Tilly.
Enfin la droite de l'armée impériale , compofée
principalement de cavalerie, étoit au-delà du ravin ,
& avec un intervalle de plus de trois cents pas entre
elle 6c le corps de bataille.