
La troifième claffe ne peut ni ne doit être
employée contre les ennemis du. dehors , elle
ne doit pas davantage être employée à la police
générale , elle ne doit agir .à, l’appui des forces
deflinées à ce grand objet, que quand elles
font infuffifantes ou dans dés. cas extraordinaires ;
efte n’efl point faite pour fervir'hors dé fis
foyers. Elle ne doit avoir en quelque forte qu'une
force d'inertie & de réfiftance. Si une entreprise
contre la liberté publique 1-obligeoit de prendre
les armes , elle ne devroit point, .agir en campagne
& à la manière des troupes réglées ; fa
défenfe la plus efficace & la :plus redoutable
ne. devroit pas être de fe fermer en armée. Elle
devroitcohfifter à prendre des poftes > à défendre
des points ^ à intercepter tout ce qui voudroit ■
renforcer, nourrir ou féconder l'ennemi commun
, Sc à appuyer enfin partout la -défobéif--
fance au pouvoir en infurreètion. Quelle en-
treprife pourroit vaincre un pareil genre de
réfiftance, &: comment une armée pénetreroit-
elle bien avant au milieu de plufieurs millions
d hommes ainli maîtres de l’efpace & déterminés
à. vivre; Sc à mourir libres.
Ain fi la troifième cl-afie déjà exercée pendant
les années où elle formoit la féconde ; n’a pas
befoin de s'exercer & de s'habituer aux armas
comme elle. Des rafTem.blemens, des formes de
difeiplipe, descpntraint,es-.çl'inftruéfion ne doivent :
point-lui çonyenir , des revues annuelles com- ‘
binées avec une fête nationale, quelques exer-,
cices de cible faits douze fois par an avec de
légers prix- d'émulâtion , voilà peut-être tout
ce qu’il faudrait établir.
La.force dès milices nationaleseû dans l'amour,
qu'en leur infpirera pour îài co'nftiturionde.-.Tmr.
pays St pour, Ta liberté. Travalliez-donc. fé&reu.r.
fement à faire'aimer 1 une 1 autre, & a rendre
le peuple heureux,ifansqupi lesmUtcgs nationales
appuieront un jour les jm.éçbnTentemèos &._un
peuplé armé qui féroit las de fa liberté ou du
fantôme qu'on lui Vaurait fait .prendre pour elle,,
ferait bientôt expofé à’ avoir un maître.
' Le degré d’autpfrira ‘cfës i,à'dminiftràti^ns.‘.'.de[
dépàrtëmëus', dé canton St même des . communes'
fur la police publiqfiè dÔit'ètre’t'rès^-préciTémènt
déterminé j il feroit infiniment dangereux de leur
abandonner trop d'influence fur elle, eileT pourraient
en , abufer pour appuyer journellement
mille petites oppr-effions de détail.
Il n’y aurait pas moins d’inconvé.niens à ce
que la force publique’put s'arroger de Pinfluence
fur les a iminiftrations, car Ce ne pourvoit jamais
être que T'influence de la force, influente qui
produit toujours Toppreffion & Fînjtiftice.
Toute affemblée particulière * toufë adfcion ,
[toute détermination relatives à l’adminiftration ,
à la police j & c ., doivent être interdites à la
fo rce publique. Ce n'eft jamais que fous le rapport
de citoyens dans les circonftances & avec
les formes permifes par la loi que- les citoyens
doivent avoir le droit de s’affembler. Rien n’eft
plus menaçant pour la tranquillité & pour les
lois, que de voir la force publique s’ingérant
de délibérer. Il n’y a qu’un pas de-là à la prétention
de gouverner , Sc la force ne doit jamais
qu’obéir & faire obéir j d’où naît l’importance
de lois très exprelies fur L’armement des citoyens.
■ ,En remontant aux principes du droit naturel &
•à l’état des fociétés fauvàges , il eft certain que le
droit d’être armé appartient à tous les hommes,-il
eft certain qu’une arme quelconque n’eft qu’une
force d’induftrie ajoutée par l’homme à fa force
naturelle, Sc que l ’homme a le droit illimité de
tous les moyens de force ou d’induftrie pour fa
défenfe ou pour fa confervation.
Mais ce principe vrai pour une fociété fau-
vage , où l’on- vit de fa chafié , où les habitations
font éparfes, & où il n’ÿ a pas de force
. publique établie , eft-il applicable à une fociété
nombreufe Sc policée, où c’eft dans le travail
d'é leurs mains Sc dans la culture dès terres que
prefque tous les hommes doivent chercher leur
fubfiitance j où des lois protègent la tranquillité
de tous T & où par la création d’une force
-publique, tous lès citoyens ont tacitement renoncé
à l’exercice de leur force individuelle.
N’eft il pas auffi naturel que poffible dans cet
; état de -fociété, de voir les hommes convenir
entrieux., que les armes font un moyen de force
dangereux-, un moyen d’enfanglanter les ‘que-
irellésè, une occafion continuelle1 de crimes , Sc
en conséquence qu’il faut Borriér lé droit de
,porter, des armes à ceux auxquels les armes font
■ ûêç'efia ires, en leur ôtant en même rems les
. moyens d’en abufer, ou les mettant au moins
fous une tellè'furvèillance de la loi, qu’ils puiffent
être rendus refponfables du mauvais ufage qu’ils
en féroient.
j .Ne pourrofent-rils pas fe confirmer dans ce
i parti èn. perrfaut que tout le monde étant armé ,
il ne peut plus y avoir de force, publique / ou
du. moins cette force-devient néçeffairerment in-
; fuffifànte. Car là portion de la force publique
qui veille à la police habituelle., ne peut, à
moins d’être fendue très-onéreufe à la nation,
: fe trouver toujours que très-inferieure., en nombre
j aux infurieélions qu’elle doit contenir ou àppài-
féV ; & dans, ce cas elle ne • peut en impofer
qu’autant que les infurgens ne feront pas armés.
Ne feroit-oti pas une jufte application de ces'
principes en prononçant par une loi expreffe
que tout citoyen ne pourra porter des armes
d’aucune efpèce, excepté dans le ca^bien conf-
taté de voyage ou'de chaffe fur fa propriété?
ou bien lorfqu’il feroit partie de la force publique.,
quand elle feroit légalement fous les
armes?
On ne porterait plus dans les fociétés & au
fein de la paix, cette épée incommode qui ne
rappelle plus que des droits effacés, Sc des fou-
venirs oppofés à l’efprit de la révolution.
Les foldats & les officiers ne porteraient des
armes que quand ils feraient de fervice. G’é toit
ainfi qu’en ufoient les anciens j au milieu des
camps même, ils étoient fans armes y & iis ne
les prenoient que pour marcher à l’ennemi, ou
pour s’exercer aux fimulacres du combat.
A l’exception de vingt ou trente fufils dé-
pofés dans la maifon commune de chaque municipalité
ou leélion pour le fervice habituel ,
ce feroit dans une falie deftinée à cet: objet,
dans chaque chef-lieu de canton ou feétion,
que feraient dépofés, gardés & foigneufement
entretenus, lesfufils, bayonnettes, gibernes&c.
dés deux claffes de la force publique deftinées
à être armées.
Le port même de l’épée ne feroit permis à
aucun membre de çes deux claffes que quand
l’une ou l’autre feroit fous les armes.
Enfin dans les villes , aucun citoyen ne pourroit
avoir de fufil chez lui ; & dans les campagnes
, où l’éloignement de la force publique
& Tifolement des habitations rendent ce moyen
de défenfe néceffaire, les fufils ne feraient permis
qu’aux citoyens qui feraient propriétaires ,
& qui pourraient répondre par-là en juftice de
leurs armes. Ces permiffions feraient à cet effet
enregiftrées dans leur municipalité.
Les prohibitions portées par cette loi générale
fur le droit d’armes, exigeraient néceffai-
rement des peines comminatoires.
On pourrait les ftatuer en amendes pécuniaires
employées au.même objet de dépenfe que l’impôt
dés permiffions. Celui de l'entretien Ôc des réparations
des armes des deux cl ailes, & c.
La liberté publique Sc la police de la république
, n’ayant rien de commun, & ne pouvant
point fe confondre,. il faut entre les mains
du pouvoir exécutif, des moyens de maintenir^
Tordre public j ils doivent être de plufieurs
genres.
One force de police dans chaque municipalité}
premier degré de force.
La gendarmeries fécond degré de force.
Les troupes à cheval de l’armée aélive s troifième
degré de force.
Ce n’eft que par- une bonne police générale
que la fureté, la liberté individuelle & la propriété
de chaque citoyen peuvent être protégées
, les impôts payés , Tes lois refpeétées ,
Sc enfin tous les rapports maintenus entre ceux
qui gouvernent & ceux qui font' gouvernés.
Tout chef-lieu de canton étant dans la nouvelle
conftitution le fiège d’une petite puiffance
admiuiftrative, ne , peut fe paffer d’une force
publique qui foit dans fon lein, pour appuyer
les lois, maintenir la tranquillité aider la
force publique a Clive.
Cetté force que nous confidérons comme le
premier degré de la force du dedans s’appellerait
garde citoyenne , elle feroit,fournie , comme
nous l’avons déjà dit , par les jeunes gens de
dix-neuf & vingt ans de la première cia fie i
pour conduire les malfaiteurs, d'une commune
à l’autre, efeorter les deniers publics, &c. j
& par les hommes de la troifième claffe, qui
feroient chargés de la tranquillité de la commune,
des foires, marchés, vogues , &c. , Sc
de la furveillance fur les récoltes. Elle feroit
toujours effective, préfente & en état de prendre
les armes, au premier ordre du préfident de
l’adminiftration dans les che'fs-liéux de canton ,
ou à celui de l’agent national dans les communes
ou les fi étions ; car il faudrait étendre
cette mefure jufques-là : mais en proportionnant
le nombre d’hommes défignés chaque jour avec
celui comp.ofarat les âges de dix-neuf & vingt
ans & celui de trente à quarante.
La garde propofée feroit rarement onéreufe-
au peuple} elle ne prendrait les armes que dans
les occafîons défignées & les fêtes républicaines.
Elle ne feroit de fervice effectif, que quand
l’adminiftration le jugerait néceffaire.
Mais ic i , les magiftrats, les juges, les hommes
depuis l’ âge de 40 ans 5Tes veuves de tout âge,
ou fille joùiffant de leur bien ayant une maifon
ou une propriété foncière, & pointdehfans au
fervice , feroient obligés de contribuer d’iinê
manière pécuniaire à ce fervice, afin de fubvenir
aux frais qu’il occàfionneroit. Corps de gardé,
bois, lumière, guérite, capottes, poudre, balles,
rétribution de la valeur d’une journée, aux
jeunes gens ou aux citoyens de trente à quarante
ans , ouvriers ou manoeuvriers obligés
d’abandonner leur ouvrage, Ôc c.
On pourroit fixer le fervicé à une décade.
Le fervice fe feroit à tour de rôle, d’après