
§ . V I I ï .
De quelle manure faut-il pourvoir à. la fureté, &
a la défenfe des sot es 6* des yaijfeaux de la
république , ainfi qua celle des différentes-
colonies , & aux fecours à accorder a nos
alliés ?
C e paragraphe renferme quatre objets ditfé-
rens, dont il eft peut-être néceflaire de s'occuper
féparément.
1 ° . Sûreté & défenfe des côtes.
Ce que nous avons dit pour la fûreté & la
défenfe des frontières du côté des différentes
puiffances qui avoifinent la république françaife ,
on pourroit Je dire pour la fûreté & la défenfe
des côtes depuis Anvers jufqu’à Andaye , &
depuis le port de Vandres jufqu’ à Monaco 5
avec la différence cependant , que la garde des
poftes 3 batteries , places de guerre', &c. fur
toutes les côtes , ne feroit -confiée qu’à* des*
jeunes gens de l’ âge de vingt-un ans , des villes
ou poftes en queftion , ou'des départemens dans,
lefquels feroient comprifes les différentes parties
des côtes : ainfi les départemens des Alpes maritimes
, du Var , des Bouches-du-Rhône, du
Gard , de l’Hérault, de l’Aude , des Pyrénées
orientales , pour la Méditerranée 5 ceux des* Pyrénées
ocidentales , des Landes, de la Gironde,
& c . pour l’Océan. Ces jeunes|gens formant
pendant deux ans les fufiliers Sc les canonniers
des compagnies & bataillons, dont les
officiers & fous-officiers feroient choifis parmi
les vétérans de la marine , & étant remplacés
chaque année par moitié 3 & fi les, départemens.
dans lefquels fe trouvent les cô te s , n’étoient
pas fuffifans , on d é f ig n è r o ite n tout ou en
partie, ceux qui fe trouveroient les avoifiner
davantage. Ainfi pour la Méditerranée les Baffes-
Alpes , Vaucliile , l’Ardèche , la -Lozère ,
l’Aveiron , le Tarn & l’Arriège 3 pour l ’Océan,
les Hautes - Pyrénées , le Gers , le Lot &
Garonne, la Dordogne f & c . En conféquerice ,
ces départemens ne fourniroient aucun citoyen
de l’âge de vingt-un ans & vingt-deux, pour
les garnifons des autres frontières 3 cet objet
étant réfervé , partie à ceux.de cet âge tirés
des départemens de l ’intérieur , & partie à
ceux du même â g e , tirés des localités fur les
frontières elles-mêmes.
2e . Service , fûreté & défenfe des vaiffeaux de la
république.
On pourroit fuppofer peut-être qu’il faudroit
deftiner à cet objet, ainfi-qu’à la fûreté & à la
défenfe des côtes , les départemens qui font
actuellement fur les côtes ou ceux ou partie de
ceux qui les touchent immédiatement 3 de manière
à en former quarante départemens qu’ on
pourroit appeller maritimes , & en deftinant
tous les autres à en former foixante défignés
ferus fe nom de continentaux 5 chacun renfermant
environ trois cens cinquante mille âmes ,
la population de la France depuis fes nouvelles
conquêtes, devant fe monter au moins à trente-
cinq millions d’habitans, ce qui Ce trouve un
: peu. différer des premières données 3 mais que
1 on concevra facilement tenir aux événemens
qui viennent autant d’agrandir le territoire de
la république , & à ceux qui font prêts peut-
être à l’agrandir encore : d’où il en réfulteroit
environ huit millions d’hommes, au lieu de fix
pour compofer les trois claffes de feize à quarante
ans 5 ce qui cependant ne changeroit
rien aux fix divifions militaires propofées , pour
former fix armées deftinées à repoufler les ennemis
du continent, non plus qu’à leur formation,
exercices, campemens & dé.penfes relatives
à tous ces objets. Ainfi trois millions
cinq cens.mille habitans environ pour les dix
départemens maritimes de la Méditerannée,
I fourniroient à-peu-près huit cens mille hommes
| pour Tes trois claffes de feize à quarante ans ,
dans lefquelles on trouveroit fuffifamment de
- citoyens pour le fervice, la fûreté & la défenfe
des bâtimens de guerre de la république , ainfi
que des côtes, & pour la police intérieure &
le maintien de la eonftitutîon & des lois. Dix
millions, cinq cens mille habitans pour les trente
départemens maritimes d e ’ l’O céan, fourniroient
au moins deux millions d’hommes pour les huit
claffes de L ize à quarante 5 enfin , vingt-un
millions environ d’habitans dans les foixante
départemens continentaux fourniroient cinq
millions d’hommes pour le s , trois ■ premières
ciaffes. On s’abftiendra d’entrer dans de plus
grands détails fur-cette partie qui doit regarder
particuliérement la marine ; fans rien changer
cependant à ce qu’on a prepofé pour la force
publique inadiive , les vétérans , le claffement,
par cinq , dix , v in g t, & c.. La force aàive
pour ia marine devant être prife , pour les
moufles, dans la claffe de feize à vingt-un ans,
& dans celle de vingtmn ans à trente, pour les
matelots , foldats, canonniers ; les marins officiers
& fous-officiers de terre & de mer pouvant
continuer leur fervice au-delà de l ’âge de trente
ans, comme dans les troupes de terre , & c.
N. B. 11 feroit auffi nécêffaire d’ étabjir quatre
écoles fpéciales pour la marine, une dans les
dix départemens de la Méditerranée, trois dans
les trente de l’Océan.
30. Secours a accorder aux alliés.
Ici il ne s’agit plus de la patrie que d’une
manière très-féconaaire 3 ici les citoyeqs n’ont
plus à protéger, à cooferver, à défendre leurs
propriétés , leur famille , leurs parens, leurs
amis 3 la politique a imaginé des alliances , &
y a ajouté quelquefois l’ importance d’aider ces
alliés dans leur fûreté & leur défenfe 5 peut-
être même a-t-elle calculé quelle trouveroit de
grands avantages, à avoir des foldats, toujours
prêts à revenir combattre pour deur patrie au
premier lignai de la guerre , & entretenus pendant
la paix , aux dépens des alliés. Sans nous
arrêter à examiner jufqu’à quel point la politique
peut avoir eu raifon fur cet objet , & en
nous bornant uniquement à nous foumettre à
ce qui eft , nous croyons qu’ici les foldats
auxiliaires ne doivent point être fur le même
ied que ceux de la milice nationale 3 mais
ien choifis librement dans la fécondé claffe
de vingt-un à trente ans dans les citoyens depuis
l’âge de vingt-quatre ans jufqu’ à celui de
vingt-neuf, on pourroit auffi permettre d’en
prendre dans la troifième claffe, tous engagés
pour quatre or. fix ans , & ne pouvant contracter
un fécond engagement qu’avec le con-
fentement du gouvernement. Avec ces précautions
, ces citoyens ne feroient aucuns torts , \
ni à veeux de vingt-un & vingt-deux ans devant 1
former les garnifons , ni à ceux de vingt-trois j
& de vingt-quatre ans devant être exercés dans
les camps,,On croit néanmoins qu’il feroit utile
de former les corps d’ infanterie , cavalerie , & '
artillerie deftinés à fervir chez les alliés , à
l’inftar de ceux compofant la force aétive de ;
la république 5 ainfi que de les foumettre aux
mêmes exercices , manoeuvres, évolutions, à
la même taClique & à la même difeipline, & c .
40. La fûreté & défenfe des colonies.
I c i , il femble que la politique & la juftice
exigent pour la fureté & la défenfe des colonies ,
des moyens indépendans , autant que poffible de '
la métropole -, & fi ces colonies fe trouvent
trop peu peuplées pour fuffire elles-mêmes à
leur défenfe ; fi même , il étoit impolitique de
la leur confier toute entière 5 alors il faudroit
prendre pour ces poffeffions entièrement ifolées
de la même patrie , les moyens propofés pour
la défenfe des alliés 5 en divifant cependant
toujours dans chaque colonie , les habitans
mâles en quatre claffes comme celles propofées
pour la république, & foumettant chacune d’elles
aux mêmes devoirs à remplir relativement à la
force publique aéàive ou ina&ive 5 les différens
proprietaires , ici devant de plus que dans la
république , contribuer par un impôt particulier
a l’entretien du corps de troupes françaifes
qu’on croiroit néceflaire d ’y envoyer de la métropole.
Telfes font les idées que nous avons cru important
de développer fur la force publique, l’ un
des objets le plus épineux comme le plus eflen-
tiel , dans toute efpèce de gouvernement 3 on
les trouvera peut-être très-infuffifantes, ou trop
démocratiques ou trop peu conformes à l’idée
à laquelle on s’eft habitué depuis Charles V I I ,
d’avoir des troupes continuellement fur pied ,
renfermées pendant la paix dans des garnifons ,
amolies par l’ oifiveté, ou la débauche, & ne
connoiffant d’ autre volonté à fuivre que celle
de leurs chefs toujours vendus au fouverain 3
mais c’eft pour la liberté individuelle & générale
que nous avons écrit 3 jamais elle n’a couru
de rifques 3 jamais elle n'a été ébranlée ou détruite
que par la force publique, mal dirigée ou
abufée 3 nous femmes bien loin cependant de
penfer que nous ayons propofé un plan exempt
de toute critique , & nous nous féliciterons
bien fincérement, fi nous en voyons propofer
de meilleurs.
Mon fils fans doute eft à moi-même,
Mais il eft encore à l’État,
La patrie a le droit fuprême
D’en faire avant tout un foldat.
Sortant des mains de la nature,
Ce n’eft que fous les yeux de Mars
Qu’il doit opter entre les. arts,
Le commerce & l’agriculture.
Par le citoyen * * * *
Pns dans des couplets fur l'éducation républicaine.
FORCE. Ce mot à plufieurs acceptions.
Comme vigueur, comme faculté d’agir vigou-
reufement. Nous en avons déjà parlé dans ce
Supplément ,-ibus les mots exercices , fêtes militaires.
Quelle devoit être la force du foldat romain,
puifqu il portoit en même-tems , un cafque ,
une cuiraffe ou un plaftron , une longue épée
à gauche, une plus courte à droite, le pilum
& un grand bouclier 3 outre ces armes , il portoit
fes uftenfiles de cuifîne , une feie , un
panier avec une bêche, une coignée , une courroie
, une faulx , une corde ? Ces inftrumens lui
étoient nécêffaires pour couper le b o is , remuer
& porter la terre , faucher le fourrage ,
& lier les prifonniers 5 fouvent il étoit chargé
de bled ou de bifeuit ordinairement pour dix-
fept jours , quelquefois peur un mois entier
& ce qu’on aura peine à croire il portoit en
outre trois ou quatre pieux liés enfemble. Ou
Yoit dans Tite-Live le foldat chargé de douze