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A IL LÉ . La déteftable méthode' de faire bivouaquer
les armées , méthode qui a occafionné '
dans la guerre de la liberté la perte de prefque
tous les hommes qui font morts dans les hôpitaux,
&■ les douleurs rhumatifmales dont font affligés ,
prefque tous les foldats qui ont échappé au fer
& au feu de l'ennemi , n’a pas permis de faire
beaucoup d attention à la difficulté que l ’on a en
campagne de fe procurer de la paille pour le coucher
des foldats fous la toile : même en tems de
paix , les officiers qui attachent quelqu’impor-
tance au bien-être ae leurs foldats , fe font convaincus
que quelques jours après qu’ils ont reçu
de la paille pour garnir leurs paillaffes dans les
caféines, cette paille, bientôt prefque réduite en
pouffière , leur eft plus nuifible qu’utile , & facilite
dans les chambres la mal-propreté & la multiplication
des infeétes. Il fer oi t donc auffi économique
qu avantageux de trouver un moyen de pro-
curer aux foldats de très-bonnes paillafies fans
paille , fur lefquelles on, n’auroit plus befoin de
mettre des matelas, qu’ils poürroient tranfporter
facilement en campagne , & qui poürroient en
même tems leur fervir à plufieurs ufages.
Pour remplir cet objet important, on propo-
feroit de faire les facs à diftribution avec un coutil
d une aune & un quart de large, préparé auparavant
avec les procédés découverts & employés
par le citoyen Efquinemart, au moyen defquels
ces facs , imperméables à l’eau & à. l’humidité ,
coufus avec foin, feroient facilement remplis d’air
quand il faudroit s’en fervir comme pailiaffe , &
préfenteroient une furface de deux pieds en largeur
fur fix en longueur ; ainfi les facs de trois
foldats , places a cote les uns des autres, préfenteroient
une furface de fix pieds carrés , fur laquelle
poürroient fe coucher les trois foldats, non
pas fur la longueur des facs, mais en travers, c’eft-
à-dire, fur leur largeur, devenue longueur par la
jon&ion des trois facs les uns aux autres. Avec ce
mmren , dont la moindre expérience prouveroit
la facilité de l’exécution , les foldats feroient entièrement
à 1 abri de 1 humidité, & auroient un
coucher très-bon par fon élafticité : il leur fuffiroit
enfuite de leurs capotes pour fe couvrir, devant,
en campagne, fe coucher en hiver avec leur gilet
& leur grande culote.
Le citoyen Efquinemart a auffi inventé un drap
compofé avec des poils d’animaux. Ce drap, très-
épais & imperméable à l’eau & à I’hümidité, pour-
rqit auffi remplacer la paille en campagne.| Combien
donc, fi on le vouloit, avec une volonté bien
déterminée, ne trouveroit-on pas de moyens
d’affurer aux foldats mille douceurs qui, en contribuant
à conferver leur fanté, les attacheroienc à
un état dans lequel ils verroient que l’on s’occupe
effentiellement de leur bonheur !
PAIN. Dans le D i c t io n n a i r e m i lita i r e , au mot
Four , on renvoie au mot Pain de munition, i
& le mot Pain ne fe trouve pas dans le Dictionnaire.
Dans celui Munition , il n’y eft non plus
fait aucune mention des fours. Au mot Subsistance
, l'auteur a parlé des fours à conftruire en
campagne pour pèrieélionner le pain pour le fol-
dat, mais il n’a nullement difcuté fi l’on ne de-
. vroit pas préférer aux fours en maçonnerie, toujours
fi; difpëndieux , fi difficiles , & quelquefois
fi impoflibles à faire faute de tems ou de matériaux
, les fours en forte tôle, tels que ceux dont
on s’eft fervi dans les àrmées du roi de Prufîè , ou
/'ceux propofés dans l’excellent ouvrage de M. De-
laulnay fur les fubfiftances, ou peut-être mieux
encore ceux inventes par le citoyen Bonnemain ,
phyfîcien & mécanicien.
Cet objet, infiniment effentîel, mérite d’être approfondi,
& de vroit être le fujet des fe cherches des
mécaniciens, des architectes, des chimifteSj&c,
tant pour les fours propres pendant la guerre,
que pour ceux néceffaires pendant la paix. On décroît,
en même tems, faire des recherches fur la
manière de procurer aux foldats du pain qui fût
mieux fait , plus nourriffant, moins pefant, fe
confervant plus long-tems : le bifcuit fembleroit
remplir ces conditions. On fait auffi d u p p in b is c
u it é . Il ne faut jamais, en campagne, donner du
pain au foldat, dit M. de Saxe, .maïs les accoutumer
au bifcuit j il feconferve plufieurs années,
& le foldat peut en porter pour quinze jours j il
exige beaucoup moins de chariots pour le tranfporter
5 il eft fain : on obvieroit pat- là aux friponneries
des pourvoyeurs des vivres, qui, ne cui-
fant le pain qu a moitié & y mêlant toutes fortes |
de chofes mal-faines, contribuent à détériorer Ja
fante du foldat, & en outre embarraffent beaucoup
les armées par la place qu’ils tiennent dans
les marches, les detachemens qu'il faut pour les
garder, & leur'train de boulangers, valets, chariots
, moulins , chevaux, 8cc. &c. Le même général
propofe de ne donner au foldat que du grain
avec lequel il feroit des galètes cuites fur des
palètes de fer, après l’avoir broyé & réduit en |
pâte avec de l’eau j mais cette méthode offriroic
encore de grands inconvéniens , & expoferoit le
foldat a n avoir très-fouvent qu’une très-mauvâife
nourriture : le bifcuit & le riz féroient donc préférables
, furtout fi l’on prenoit la fage méthode
de ne plus biffer manger de la foupe au foldat, &
de la remplacer par des légumes & un peu plus
de viande. ( V o y e£, dans ce S u p p lém e n t , le mot
Nourriture.) .
PAIX. Cette divinité bienfaifante tutélaire,
fans laquelle il n’y a plus ni jouiffances, ni fûrëté,
ni bonheur, que la multitude n’invoque que lorf-
qu’elle eft bannie de la terre, dont les hommes
fages ne prônent point affez le culte j -que les
hommes puiffans craignent & éloignent trop fou-
vent , & dont les brigands & les dilapidateurs redoutent
la préfence.
Cette divinité, à laquelle nous ne craignons pas
de prodiguer nos hommages avec cette même
plume dont nous nous fervons pour écrire fur l’art
de la guerre , quoique nous foyons bien éloignés
d’être les fe dateurs de la déeffe de cet art def-
tru&eur, dont nous contribuerions avec plaifir à
brifer les autels, quoique nous la fervions depuis
bien long-tems, & que , par devoir, nous ayons
dû acquérir toutes les connoiffances qui peuvent
affurer desTuccès fi déplorables , mais avec lef-
quels feuls on peut efpérer de l’honorer.
La guerre , dit Montefquieu, étoit pour les
Romains une méditation,*& la paix un exercice,
mais le peuple romain s’étoit rendu la guerre né-
ceffaire , & il faut bien fe garder de l’imiter en
ce point.
Depuis l’inftant où Charles VII imagina de conferver
des troupes fur pied, la guerre fembia devenir
plus néceffaire : on leva des impôts pour
payer des foldats , & l’on fe fervit des foldats
pour lever des impôts. Dès-lors auffi p fouve-
rains n’eurent pour ainfi dire aucun obftacle à fur-
monter pour entrer en campagne, & dès le moment
où leurs paffions ou celles de leurs minif-
tres leur firent croire la. guerre néceffaire, il
leurfuffit de.donner des ordres & la guerre ravagea
la terre. Ainfi ;, pour n’être pas furpris & ex-
pofé à fe trouver fans défenfe , chaque fouverain
fut obligé d’avoir des armées fur pied, même
au milieu de la paix la plus profonde : ainfi le fléau 1
de la guerre fe perpétua. 11 faut en convenir cependant
: quelques fouverains , quelques états ,
donnèrent à ce fujet de grands exemples de fa-
geffe. La Suiffe étoit entièrement armée , mais
chaque père de famille étoit foldat & reftoit fur
fes foyers; 5 en Pruffe , quelques bataillons de
garnifon reftoient raffemblés dans les places de
guerre, tout le refte du militaire étoit raffemblé
dans des camps deux ou trois mois chaque année.
En Angleterre, pendant la paix, le militaire étoit
diminué des trois quarts. Dans les Etats-Unis, les
milices ne font appelées qu’au moment de la guerre
, & exercées pendant la paix autour de leurs
foyers. Pourquoi donc , nous ne faurions trop le
répéter, n’imiteroit-on pas en France ces exemples
, même d’une manière encore plus avantageufe
pour les défenfeurs de la patrie , l’agriculture
, le commerceles arts, &c. ? On peut voir
à ce fujet, dans, ce S u p p lém en t,, le mot F o r c e :
p u b l iq u e .
PANSEMENT ( C h e v a u x , T r o u p e s a c h e v
a l ). C ’eft le foin qu’on prend des chevaux pour
leurs befoins , leur fanté & leur propreté. D’après
cette définition, on’fentira aifén:ent combien
le panfement des chevaux eft un objet important
pour leur confervation j auffi les bons écuyers regardent
ils le panfement comme le devoir le plus
effentitl du palefrenier.
Il faut diftinguer le panfement avant le travail,
d’avec le panfement après le travail. Avant le travail
, le panfement du cheval fe. borne à fa propreté
& à lui donner fa nourriture j mais après
le travail, le panfement exige de bien plus grands
foins.
- Il ne faut d’abord, en général, rentrer les chevaux
dans l’écurie qu’au pas , & au trot lorfqu’il
pleut fortement ou qu’il fait très-froid.
Dès que les chevaux font arrivés, avant de les
entrer à l’écurie, il faut les deffeller , les froter
avec le couteau de chaleur s’ils font fuans ( 1 ) ,
les bouchonner jufqu’à ce qu’ils foient fecs ; il
faut enfuite les étriller & les broffer. Pendant
qu’on les broffe, il y auroit un grand bien de leur
donner à manger quelques bouchées de foin pour
leur rafraîchir la Douche & les difpofer à pouvoir
boire quand ils feront panfés. ( Ils ne.font panfés,
quant à la propreté , que lorfqu’en paffant la main
à rebrouffe-poil, s’ils- font noirs, ils ne raient
pas en blanc j & s’ils font gris ou blancs , quand
la craffe ne vient pas au doigt. ) Il eft effentiel que
la broffe paffe dans toutes lès parties, principalement
autour des oreilles. Prefque .toutes les enchevêtrures
viennent aux chevaux faute d’avoir’
lé tour des oreilles bien pan le-, parce que la malpropreté
qui fe ramaffe autour dés oreilles, leur,
occafionné des démangeaifons qui les excite : à fe'
gratter , & qui leur caufe les accidens les plus'
graves.
Quand le cheval eft bien étrillé & bien broffé ,
il faut lui laverla bouche, les yeux & les naseaux
avec de. l’eau propre , ainfi qu’on aura eu foin de
(1) On ne fait pas affez combien la tranfpiration
& la fueur des chevaux eft âcre & mordicante. Si on
làiffe à la pouffière le tems de s’attacher à la peau &
de s’y épaiflïr, les pores fe bouchent, la tranfpiration
eft arrêtée, & les chevanx n’ont de repos ni jour ni
noir, fans parler des maladies qui peuvent s’enfuivre.
Il eft: donc infiniment important, toutes les fois qu’un
cheval a travaillé, de ne le faire rentrer dans fon
écurie qu après l’avoir parfaitement bouchonné, étrillé
& rendu fa peau sèche & luifânte. Les rhumes, les
morfondures, ne-viennent que d’un refroidiffement
ou d’une interruption de la tranfpiration.
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