
pêcher que cette manière ait tout l'effet qu’elle
devroit avoir. i°.EHe n’eft pas, à beaucoup près ,
déterminée d’une manière fixe & fondée fur des
elîais comme elle devroit l’être 5 i° . on ne la rend
pas affez habituelle & machinale au foldar j 30. nos
fafils étant trop lourds & trop peu maniables... '.
l’homme d’une force ordinaire eft forcé de tirer
en l’air ou à terre ; 40. mal à propos met-on les
plus grands hommes au premier rang. .
Il eft cependant peut-être très-pofiible de trouver
une manière différente & meilleure de tirer, en
.perfectionnant l’arme & l’exercice de cette arme,
& en le foumettant à faire fur cet objet toutes les
expériences néceffaires & fouvent répétées.
§. IV .
E v o lu t io n s i
Les évolutions fe réglant fur l’ordonnance, l’ordre
étendu a dû en faire imaginer d’impofliblesà
exécuter avec l’ordre profond 5 ainfi la poudre à
canon ayant néceflité , félon l’auteur, des chan-
gemens dans l’ordonnance, a dû faire adopter une
toute autre manière de faire mouvoir les troupes.
La diftance entre les rangs & les files occafionne
encore une grande différence dans les évolutions 5
elle en mettoit une très-grsnde entre la t2<5tique
des Grecs & celle des Romains, & ne peut qu’en
occafionner une plus'grande encore entre la notre
& celle de ces peuples : or, cetre différence eft
encore l’effet de la poudre à canon , qui a rendu
néceffaire notre manière de ferrer les rangs & les
files.
La nature de notre ordonnance & celle de nos
armes nous ont mis dans la néceflité d’inventer
pluïîeurs efpèces de pas, celui ordinaire, celui •
redoublé, celui de flanc, celui oblique, le pas
en arrière, &c. Les anciens avoient-ils cette multitude
de pas? C’elt ce que l’on ignore ? Partoient-
ils & marchoient ils tous du même pied ? On a tout
lieu de croire qu’ils en ufoient fur ce point-là
comme nous.
De quels moyens fe fervoient les anciens pour
conferver l’aligne ment? Ils en avôient fans doute
que nous ne connoiffons pas. Chez nous on eft
encote'à difputer fur les moyens qu’il faut employer
pour confètver l’alignement ; cependant ,
avec nos armes ,“ le moindre défaut dans l’ordre
des rangs & des files expofe ceux des premiers,
rangs à être tués par ceux des deux autres.
L’auteur penfe cependant que l'on parviendroit
bien mieux à conferver l’alignement fi l’on exer-
çoit davantage les foldats à marcher droit devant
eux d’un pas mefuré, égal & ferme , en les "fai- ’
fant marcher avec des diftances entr’eux , fouvent
& pendant long-tems.
Après avoir examiné ce qui concerne b marché, !
l’aute; r en vient aux évolutions, qui toutes fe j
réduifent à faire front où l'on faifoit queue 5 à j
faire front fur l’un ou l’autre de fes flancs , à par-
fer de l’ ordre de bataille à celui de marche , &
réciproquement à défiler & fe reformer dans
tous les fens & dans toutes les fituations.
Chez les G recs, où tous les phalangiftes du
premier rang étoient des hommes choifis pour la
taille & pour la force , & où dans ceux du' dernier
rang on avoir eu égard à la prudence, à la
capacité de maintenir l’ordre & la fermeté dans
la phalange^ il étoit très-important de préfenter
toujours le même arrangement de rangs à l'ennemi.
Les Grecs imaginèrent à cet e f f t trois évolutions
5 la lacédémoriiène , la macédoniène, le
choreus.
On ignore comment les Romains s’y prenoient
pour faire volte-face.
Quant à nous, à qui il importe moins quels
rangs on préfente à l’ennemi, un demi-tour à dioite
peut nous fuffire.
Si cependant on vouloit préfenter toujours le
même ordre de rangs à l’ennemi, on pourroit exécuter
cette évolution,d’abord par une contre-marche
avec tous les rangs à la fois ; mouvement im-
poflible pour les Grecs. On pourroit exécuter cette
même évolution par peloton , ou pour l ’accélérer
davantage, par de plus petites ferions, ou enfin par
des démi-converfidns, par demi & même par quart
de pelotons.
De la volte-face l’auteur paffe à la manière de
faire front fur les flancs, fuivant les deux tactiques
, & après avoir obfervé que le quart de con-
verfion eft la manière la plus fimple de faire front
fur le flanc , il eft obligé de convenir que l’on ne
peut rien affirmer fur la manière dont les anciens
s’y prenoient pour fe former fur leurs flancs. Quant
à nous, le peu de profondeur de notre ordonnance
ayant exceflivement étendu notre front, & augmenté
la difficulté & les longueurs des convergions
par de grands corps, on a adopté, une manière très-
commode , celle de faire décrire à chaque peloton
un demi-quart de converfion , en les faifant en-
fuite marcher tous par la diagonale , à l’exception
de celui du pivot, jufqu’au flanc du peloton voifin,
où ils fe mettent en bataille & s’alignent.
Etoit-ce là la méthode dont les anciens fe fbr-
moient fur leurs flancs ? Elle n’étoit point dans
l ’efprit de. leur tàdtique : peut-être fe fervoient-
ils du déploiement direCt & à tiroir , peut-être
preferoient - ils le pas oblique qu’ils pouvoient
exécuteravec plus de facilité que nous, à caufe de
l'ouverture de leurs rangs.
La manière dont les anciens fe mettoient en
colonne de marche & fe remettoient enfuite en
ordre de bataille , fe réduit auflï, félon l’auteur,
à des conjectures.
Probablement la phalange, pour éviter de fe
rompre, tâchoit de marcher par le flanc, après
avoir fait un à droite ou un à gauche j mais lorf-
qu’elle étoit obligée de marcher en colonne ,
elle fé rompoit fur telle divifion , & toutes les
autres fe mettoient à la queue l’une de l’autre,
& la phalange fe reformoit enfuite par le déploiement
à tiroir.
Chez les Romains, au contraire, on devoit préférer
la marche en colonne à celle par le flanc.
Quant à nos bataillons , ils ne trouvent aucune
difficulté à fe mettre, en marche en avant fur tel
front que l’on veut ; mais ils ne peuvent pas marcher
par le flanc , fi ce n’eft un très-court efpace
de te ms & fur un terrein égal : on évite cet inconvénient
en rompant fur tel front que l’on juge
à propos, & marchant enfuite librement fur le
flanc : d’où il en réfulte, pour la taétique moderne,
de grands avantages fur celîe des anciens, foit
pour palTer des défilés , foit pour en fortir.
. C ’eft après avoir prouvé ces vérités , que l’auteur
entre dans d’aflez grands détails fur les bataillons
carrés formés par les anciens ; & après avoir
jeté quelques doutes fur ces bataillons, l’auteur
prouve combien notre ordonnance l’emporter oit
fur celle des anciens pour, faire manoeuvrer un de
ces corps , les conduire à travers des défilés , les
faire rompre, remettre , plier , &ç. Suivent des
détails fur la retraite des dix mdle , d’où l’auteur
tire des inductions fur l'impraticabilité d’allier
l’ordonnance mince & celle profonde, en convenant
cependant que , dans certains cas, on peut fe :
procurer quelques-uns des avantagés de l’ordre
profond par la charge en colonne.
Ainfi l'auteur, après avoir prouvé l’ influence de
la poudre fur l’armure, l’ordonnance, le maniement
des armes & les évolutions , qu’il appelle les
élémens de l’art militaire , pafle à l’examen de
cette influence fur les parties qui en forment l’ef-
fence , les marches , les camps , les paffages des
rivières, les autres défilés & les batailles.
§. V.
M a r c h e s . • 1
La perfection d’une marche confifte en ce qu’elle
fe faffe fûrement, promptement & commodément 5
ainfi la fureté de la marche exige qu’on puifîe fe former
très-promptement : conféquemment, i°. plus
les colonnes feront étendues en profondeur, &
plus il faudra de tems pour fe former en bataille 5
20. plus le front fera étendu en longueur, plus ce
même mouvement exigera de :ems j 30. plus il faudra
de tems pour fe mettre en bataille, plus il faudra
prendre de précautions pour la marche, afin
de pouvoir fe former en bataille avant d’avoir l’ennemi
fur les bras.
On vo it, par ce feul expofé, combien les anciens
«voient d’avantages fur nous fur ce point.
Mais outre la néceflité de ranger nos armées fur
un ordre très-mince & très-étendu, avec des intervalles
, ce qui exige beaucoup plus de tems pour
fe former , ce qui doit être attribué à l’ufage de la
poudre, à canon, cette invention, influe de bien
: d’autres manières , par le nombre immenfe des
charois que notre artillerie e x ig e , & l'étendue
immenfe d’ une colonne de chariots & de trains
d’artillerie : d’où s’en eft fui vie la néceflité de multiplier
les colonnes à l’infini, tandis que les anciens
marchoient concurrement fur une & jamais fur
plus de trois.
De là s’en eft fu iv i, i° . une grande pefanteur
dans nos marches & le befoin de nous envelopper
d’une nuée de troupes légères, pour dérober nos
mouvemens à l’ennemi & frapper quelque grand
coup inattendu à la guerre.
29. Que l’artillerie vous ayant forcé d’étendre
votre ordonnance, il nous faut des champs de
bataille bien plus vaftes , cù l’armée ait fes, ailes
appuyées, & où aucune de fes parties ne foit fé-
paréè de l’autre j ce qui ne fe rencontre que difficilement.
3°. Que le feu de la moufqueterie ou du canon
ne pouvant avoir des effets heureux que fur tel
ou tel emplacement, on ne pourra pas efpérer en
rencontrer un ou deux d’avantageux dans une
marche.
Aufli, d’après ces obfervations, peu de faits
d’armes, d’attaques, de furprifes ou de retraites
hardies des anciens peuvent - ils nous fervir de
modèles j & les çhangemens néceffités par l’ufage
de Ja poudre à canon ont fait des marches, cher,
les modernes, une partie de l’ art de la guerre, infiniment
plus difficile que chez les anciens.
§. VI.
C am p s .
Comme prefque dans tous les camps, pris à la
guerre, il faut le tenir prêt à combattre, il faut
aufli les choifïr tous en conféquence, & les prendre
de manière à s’aflurer de pouvoir combattre
avec avantage 5 il faut en outre que le pofte qu’on
choifit pour camper, réponde au deflein que l’on a,
ou d’empêcher l'ennemi de pénétrer dans les contrées
que l’on veut défendre, ou de pénétrer foi-
même dans celle que l’ennemi occupe ou défend.
Les anciens avaient fans doute les mêmes objets
à remplir en général, mais il ne leur.falloie
pas à beaucoup près autant de précautions qu’à
nous j aufli la fcience des pofitions eft-elle devenue
pour nous heaucoup plus difficile que pour
eux , la lenteur occafîonnée chez nous par notre
attirail de guerre, nous obligeant à des attentions
auxquelles les anciens n’étoient point affujettis.
Quand les anciens vouloient être à portée de
s’ oppofer aux mouvemens d’un ennemi, fans qu’ il
lui fût poflible de leur en dérober un, ils fe campaient
fi près de lu i, qu’ ils pouvoient voir entendre
tout ce qui fe paffoit dans fon camp $ par
ce moyen, joint à la célérité de leur marche, ils
étoient affurés que l’ennemi ne leur échapperoit
pas, L’ufage de la poudre à canon nous rend ces
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